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La Cathédrale Saint Paul à Liège
substitut à la Cathédrale Notre Dame et St Lambert détruite par la révolution.

par Louis Hendrix, vicaire de St Jacques

1738 - Remacle Leloup - Collégiale St Paul à Liège
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NOTICE HISTORIQUE


L'EGLISE SAINT-PAUL A LIEGE

L'église Saint Paul à Liège doit son origine à ce savant distingué qu'était l'évêque Eracle (959-971).

Les chroniqueurs Gilles d'Orval et jean d'Outremeuse ont embelli les origines de cette église de gracieuses légendes. Dieu lui-même aurait indiqué au pieux Eracle les dimensions de la nouvelle église en plein juillet, une neige miraculeuse aurait recouvert le sol, à l'exception de l'emplacement que devait occuper le sanctuaire.

Non content de reproduire ici ce miracle de la neige qu'on retrouve dans bon nombre de récits légendaires, le chroniqueur à l'imagination féconde fait intervenir encore saint Paul, le patron de l'église. L'évêque avait choisi sa nouvelle église comme lieu de sépulture, mais l'apôtre lui apparut dans une vision et lui fit connaître sa volonté formelle: personne ne pourrait être enterré dans son église (1), Eracle dut renoncer à son choix et reçut la sépulture en la collégiale Saint-Martin qu'il avait fondée avant Saint-Paul.

L'histoire est beaucoup plus sobre que la légende. Eracle bâtit deux nouvelles églises, Saint-Martin et Saint-Paul, aux deux extrémités opposées de la ville.

Commencée vers 965-970, la construction de Saint-Paul était loin d'être achevée à la mort d'Eracle (971). Le biographe de Notger nous dit que celui-ci (972-1008) acheva l'édifice depuis les fenêtres « Ecclesiam Sancti Pauli a fenestris supra consummavit ».

L'évêque Eracle avait donné le village de Lixhe à la future collégiale Saint-Paul qui devait entretenir vingt chanoines (2), Notger augmenta le patrimoine de l'église et porta le nombre des chanoines de vingt à trente.

Cette église primitive fut évidemment construite dans le style du moment. Il n'en reste plus qu'une cave sous les sacristies actuelles et peut-être un pan de muraille en grès houiller dressé contre la face Sud de la tour actuelle; aucune description ne nous permet de reconstituer en rien le sanctuaire disparu.

Kurth (3) regarde comme probable que la collégiale était ornée de peintures, étant donné la place importante que la peinture occupait dans les décorations d'églises du Xe siècle, D'ailleurs Notger avait amené à Liège le peintre Jean qui, sous le successeur de Notger, décora l'église Saint-Jacques.

La solide construction d'Eracle et de Notger a duré près de trois siècles. L'église avait peut-être été endommagée en 1212, lors du sac de la ville par le duc de Brabant; en tout cas, vers la moitié de ce XIIIe siècle, les chanoines remplacèrent leur vieille église (qui était pourtant « decente structura et opere » par un temple en style gothique, aux proportions plus vastes. « La dévotion du peuple sera d'autant plus grande que le temple apparaîtra plus beau et mieux construit »; voilà ce que dit en substance une charte de 1289 (4) Decano et Capitulo... complacuit ampliorem structuram vetere dejecta construere, ut quanta aptior juxta temporis exigentiam appareret tanto magis devotio in populo oblatione orationum sequeretur.

Ces grands travaux commencèrent sous le doyen Otto de Jeneffe, dit des Prés (1232-1250). Déjà en 1254, la reconstruction, faute de ressources, dut être recommandée à la charité des fidèles le Cardinal Pierre, légat du Saint-Siège, accorda cinquante jours d'indulgence à ceux qui, s'étant confessés, donneraient une aumône pour l'achèvement de cette église, quod... inceperunt opere sumptuoso. On dirait que l'appareil intérieur de l'église se ressent de ce manque de ressources piliers et murailles de la nef sont formés de petites pierres de toutes dimensions.

Le 11 avril 1289, lundi de Pâques, Bonaventure, évêque de Céos et auxiliaire du prince-évêque de Liège, consacra le maître-autel et six autres autels placés à l'entrée du choeur (5) et, en 1292, le pape Nicolas IV accorda quarante jours d'indulgence à ceux qui visiteraient l'église Saint-Paul à certaines fêtes,

De cette époque datent la partie rectangulaire du choeur, le transept, les colonnes et la maçonnerie des nefs. La description de l'édifice nous permettra d'établir en outre que les deux premières travées de la grande nef ont té construites avant les autres. Les bas-côtés étaient voûtés, la nef principale couverte d'un plafond provisoire. Le choeur primitif était à chevet plat comme celui de l'église Saint-Christophe à Liege ; celle-ci, en effet, a été reconstruite vers 1241.

Il semble bien que la tour de l'ancienne église était restée debout, car, en 1275, le doyen Guillaume de Fraynoir y fit suspendre deux grosses cloches.

. Une seconde phase de la reconstruction se place au XIVe siècle, En 1334, avec l'assentiment du prince-évêque Adolphe de la Marck, le chapitre décida que chaque nouveau chanoine devrait consacrer à ces travaux les revenus de sa seconde année de résidence. Jadis, le chapitre avait déjà affecté une prébende spéciale à ces dépenses, mais vu la cherté croissante des matériaux et des salaires il dut recourir à cette mesure exceptionnelle.

C'est de cette époque que date probablement l'abside pentagonale du choeur, car ce fut au milieu du choeur agrandi, entre l'avant-choeur et l'abside, qu'on plaça, en 1349, un magnifique candélabre (6), - Le porche Nord, donnant sur la Place du Roi Albert, doit être contemporain de l'abside il présente, en effet, un fenestrage aveugle d'une grande pureté de dessin, qui est manifestement antérieur aux chapelles dont il interrompt la série.

Dans la seconde moitié de ce XIVe siècle, on ajouta les chapelles, construites le long des nefs latérales et qui forment la quatrième et la cinquième nefs de l'église. En 1347, on fait mention d'une chapelle, située au côté Nord.

C'est bien de ce côté (le long de la Place du Roi-Albert) que les premières chapelles ont été construites, donc avant celles du côté Sud. D'ailleurs, dans l'énumération des fondations d'autels, les plus anciennes sont celles établies pour les chapelles du côté Nord: ce n'est qu'en 1391 qu'on trouve une fondation d'autel du côté Sud. Le chanoine de Blochem nous dit que ces chapelles du Sud étaient, en 1391, « nouvellement construites »,

La tour fut commencée, elle aussi, à la fin de ce XIV siècle, On rapporte, dit de Blochem, que « Guillaume de Esche (chanoine de 1364 à 1394) plaça un écu vieux sous la première pierre de la tour », (7)

Le chroniqueur de Blochem rapporte encore que sous le doyen Grégoire Marescal (1414-1430) l'église reçut sa voûte en pierre et ses fenêtres supérieures, (8)

Si les fenêtres hautes ont été achevées à cette époque, il est probable que le réseau admirable des grandes fenêtres du transept est de la même époque et a été construit avant qu'on ne plaçât la voûte.

Sous ce même doyen Marescal est signalée la construction de la fenêtre de la tour, L'architecte Van Assche, à la fin du XIXe siècle, a restauré cette fenêtre et a établi un réseau en style rayonnant. Auparavant, le fenestrage de cette immense baie de la tour était découpé en flammes et coeurs et indiquait clairement le style flamboyant. Il semble donc difficile d'admettre que les fenêtres de la grande nef (en style rayonnant) et la grande fenêtre de la tour soient de la même époque. C'est pourtant de Blochem qui signale le fait et qui en fut, pour ainsi dire, le contemporain. Peut-être a-t-on simplement laissé cette baie de la tour ouverte pendant qu'on continuait les travaux et les meneaux n'ont-ils été ajoutés qu'au début du XVIe siècle, en même temps qu'on acheva le cloître Ouest en style ogival flamboyant.

Il est possible aussi que l'on ait construit un fenestrage sous le doyen Marescal et que, au XVIe siècle déjà, on ait dû le remplacer. Cette face de la tour est fort exposée aux intempéries et le fenestrage du XVIe siècle a été démoli parce que, à son tour, il menaçait ruine.

Quoi qu'il en soit, en 1460, le clocher n'était pas terminé et le chroniqueur gémit: « Plût à Dieu que les fonds existassent pour son achèvement, que je confie au Tout-Puissant. » (9)

La voûte de la tour, en parfaite harmonie avec celle de la nef, semble bien du XVe siècle.

L'ancien régime ne vit jamais l'achèvement du clocher: la maçonnerie en fut arrêtée à la hauteur de la grande nef. La vue des Délices du Pays de Liège (en 1738) nous montre la base de la tour, surmontée d'une construction assez basse où était installé le beffroi. (Voir figure 2.)


LES CLOITRES

Les cloîtres en style roman qui ont fait place aux galeries actuelles dataient de l'époque de Notger. Ils constituaient un carré parfait: ce ne fut que vers la fin du XIVe siècle qu'on supprima une aile des cloîtres pour construire les chapelles de l'église du côté Sud.

Le 6 juin 1446, le chanoine Daniel de Blochem posa la première pierre du cloître actuel et mit un écu de Philippe, duc de Bourgogne, sous cette première pierre.

La construction commença par la galerie Est (galerie du chapitre): pour raccorder ces nouveaux cloîtres à l'église, on démolit la première chapelle du côté Sud (10). La galerie Est et la galerie Sud sont de la même époque; on remarque tout de suite que la galerie Sud est plus large que la première 4,59 mètres contre 3,65 mètres, et le croisement plus compliqué des nervures de la voûte accentue cette différence. De Blochem, dans son texte, s'efforce de défendre le chapitre contre les reproches de la postérité de ce que « l'aile adjacente au chapitre (galerie Est) n'ait pas la même largeur que l'aile qui touche aux écoles (galerie Sud ) » (11). La largeur de la galerie la plus étroite serait équivalente à celle de l'ancien cloître « on pensait que sa largeur, ayant suffi jusque là aux chanoines, pourrait bien suffire à leurs successeurs ». En outre, on craignait que le mur ne cédât sous le poids des constructions adjacentes (chambres de l'étage); on établit donc ce mur de manière à soutenir le tout. Mais, comme plus tard on reconnut que ces craintes étaient vaines, on donna plus d'étendue à la galerie suivante et on la couvrit d'un toit plus droit et plus élégant.

Hélas la fabrique d'église manqua de ressources pour édifier la galerie Ouest, vers la place Saint-Paul. Et le chroniqueur se lamente sur la dureté des temps et sur les dettes que la reconstruction de ces deux galeries ont occasionnées « et cependant ni les portes, ni les pierres, ni les ferrailles n'étaient achevées... ».

Ce ne fut qu'en 1453 que le doyen Pierre van der Meulen (Petrus a Molendino, 1444-1459) fit exécuter les trois fenêtres du nouveau cloître, en face de la salle du chapitre.

La galerie qui s'étend le long de la place Saint-Paul est du début du XVIe siècle: elle appartient manifestement au gothique flamboyant (fig. 13).

Aux pendentifs de la voûte s'ont sculptées les armoiries de Henri de Hemricourt, chanoine jubilaire de Saint-Paul, mort en 1534. Ce détail ne nous indiquerait-il pas la date approximative de cette galerie? Sans nul doute, le chanoine de Hemricourt aura contribué à cette construction; peut-être même à l'occasion de son jubilé (12),

Des constructions diverses auraient dû border ce cloître - les fondations existent dans le sol, - mais, faute d'argent, le chapitre se borna à construire un simple mur plat, sans saillies ni contreforts. On voit très bien d'ailleurs que le mur se déverse au dehors.

Enfin le beau portail de la place Saint-Paul est postérieur de quelques années: il est daté par les armoiries du Prince-Evêque Corneille de Berghes (1538-1544). Quoiqu'il appartienne encore au style gothique par son allure d'ensemble et ses profils, sa décoration annonce déjà l'arrivée toute proche de la Renaissance.

De la même époque est la salle du chapitre, belle salle voûtée dont les colonnes ont des chapiteaux ornés d'une décoration Renaissance (figure 3).

Ici s'arrêtent les travaux de construction des anciens chanoines. Pour compléter l'histoire de la Collégiale, il nous suffira d'ajouter qu'au XVe siècle, elle fut pillée par la soldatesque de Charles-le-Téméraire. En 1469, le doyen Jean de Papenhoven chargea un chanoine de Saint-Martin de récupérer et de racheter, au besoin, les ornements, chapes, calices, livres (13) enlevés lors du sac de la ville; et, en 1472, le cardinal Bessarion, légat du Pape, accorda des indulgences pour obtenir la restauration de la Collégiale, « qui exigeait, dit-il, de grandes réparations dans ses constructions et dont les ornements avaient été enlevés en grande partie pendant cette guerre ». (14)

Le XVIe siècle donna à la Collégiale le magnifique vitrail du transept Sud, et, un peu plus tard, les vitraux de l'abside du choeur.

Le XVIIIe siècle, en voulant adapter l'église au goût du jour, fit oeuvre de vandale. L'église fut blanchie des plâtras et un affreux badigeon furent appliqués sur l'église et les cloîtres ; des lambris en marbre et des chambranles en marbre, aux portes, qui sans doute ne manquaient pas de beauté en leur genre, vinrent constituer une décoration par trop disparate.

Dans les cloîtres, on enleva les riches meneaux redentés et fleuronnés pour les remplacer par de larges verrières, sans caractère, mais qui convenaient mieux à ces cloîtres « blanchis »: ce fut le prévôt Armand van den Steen (15) qui paya les frais de cette « oeuvre d'art » et rappela ce haut fait par une double inscription sur les soubassements de ces fenêtres « R. A, D. van den Steen praepositus 1766 », (encastrée actuellement dans un mur de l'entrée, rue Bonne-Fortune).

La collégiale Saint-Paul eut aussi, au Moyen-Age, une école célèbre. Il est probable que, dès le début, l'évêque Notger aura imposé à la collégiale Saint-Paul, comme aux autres collégiales, l'obligation d'ouvrir une école claustrale. Les écoles joignaient le côté Sud des cloîtres, appelé pour ce motif latus scholarum. Une charte assez curieuse, datée du 11 avril 1331, règle les droits respectifs de l'écolâtre et du chanoine-chantre par rapport aux punitions à infliger. (16)

Le chanoine Thimister a publié, au tome XIV, (1878) du Bulletin de l'institut archéologique liégeois, le catalogue de la bibliothèque des chanoines qui était des mieux fournies. Ce catalogue avait été dressé, vers 1460, par le chanoine-écolâtre Daniel de Blochem: il signale 268 volumes dont la plupart contiennent plusieurs ouvrages.

La Révolution française a pillé la collégiale (17), En 1792, l'église fut transformée en boucherie. En 1794, lors de l'entrée définitive des Français, elle fut d'abord l'objet d'un pillage en règle; ensuite, on installa les chevaux dans les beaux cloîtres. Les biens furent séquestrés, le chapitre dut intervenir dans des emprunts forcés et vendit même une partie de son argenterie pour payer des dettes.

En 1793, les collégiales furent supprimées et leurs biens confisqués. Saint-Paul fut fermée au culte le l janvier 1798: une partie de son mobilier vendue en juillet 1798; plusieurs tableaux mis de côté pour un musée ou pour l'Ecole centrale.

Il s'en fallut de peu que ce beau monument ne disparût tout entier: le directeur de l'enregistrement et du domaine national en demanda la démolition!

Rangée, en 1800, parmi les églises à conserver pour l'exercice du culte, l'église Saint-Paul fut choisie deux ans après pour être la nouvelle cathédrale du diocèse.

La nouvelle cathédrale obtint, en 1803, ce qui restait de l'ancien trésor de Saint-Lambert, entre autres le buste de saint Lambert, la statue en argent de la Vierge et le groupe en or représentant saint Georges.

En 1804, on mit à la disposition de la fabrique d'église l'horloge et le carillon de Saint-Lambert.

C'est à cette époque que l'on compléta la tour que le XVe siècle avait laissée inachevée: en 1811, on éleva l'étage en pierres de sable (provenant des tours de Saint-Lambert) ainsi que la flèche avec ses quatre tourelles qui a la prétention de reproduire celle de l'ancienne cathédrale. On ne peut pas dire certes que la reconstruction soit réussie, mais n'oublions pas qu'il s'agit du début du XIXe siècle, où les esprits n'étaient pas aux préoccupations artistiques. (18)

Le 1er octobre 1812, on éleva la croix du clocher; hauteur totale de l'oeuvre: 89,55 mètres. Le carillon fut installé peu après et il fit entendre ses sons harmonieux, le 6 août 1813, lors du passage de l'impératrice Marie-Louise en notre ville.

La restauration de la cathédrale commença sous Mgr Van BommeL vers 1850. Dans la description de l'édifice, nous indiquerons les différentes phases de ces travaux. Qu'il suffise de signaler ici que, depuis Mgr Van Bommel, tous ses successeurs se sont activement préoccupés de la restauration et de l'embellissement de leur cathédrale: les travaux qu'ils ont fait entreprendre - et qui sont presque tous excellents - ont rendu l'ancienne collégiale Saint-Paul, digne autant que possible de succéder à cette magnifique cathédrale Saint-Lambert que la Révolution a détruite,



DESCRIPTION DE LA CATHÉDRALE


L' INTERIEUR

Dès qu'on pénètre dans l'église Saint-Paul construite cependant à différentes époques - on est sous le charme de l'harmonie et de l'unité de l'ensemble,

Si l'église Saint-Jacques est en notre ville le monument de l'art gothique flamboyant, monument d'un fini parfait et d'une délicatesse d'ornementation légère et gracieuse (19), Saint-Paul est l'église d'une simplicité ravissante, dont le charme réside dans la pureté des lignes.

Saint-Jacques est plus ornée, d'un goût plus précieux et plus rare

Saint-Paul est plus sévère, plus paisible, plus distinguée en quelque sorte, A Saint-Jacques, on se laisse séduire par la richesse des détails (20), les broderies de pierre, sculptures somptueuses de la fin du gothique; Saint-Paul s'impose par la simple grandeur du style ogival; et une impression de force, de solide puissance se dégage de cette architecture vigoureuse du XIIIe siècle.

L'ensemble austère (figure 4) s'égaie cependant d'une note plus joyeuse grâce aux colonnes de la nef et aux sveltes colonnettes du triforium, grâce surtout à la lumière abondante qu'y déversent à flots les fenêtres supérieures.

L'unité de l'édifice semble si parfaite qu'on ne remarque pas à première vue que l'abside du sanctuaire et les fenêtres hautes de la nef et du transept sont plus particulièrement ornées. Enfin, les voûtes magnifiques ajoutent leur richesse d'ornementation: rinceaux de feuillage et arabesques de la Renaissance y étalent leur polychromie merveilleuse.

L'église a 82,74 m. de long depuis la pointe de l'abside jusqu'au fond de la tour (73 à Saint-Jacques).

La largeur d'axe en axe des colonnes de la grande nef est 12,10 m, largeur de la grande nef entre les colonnes du fond 10,91 m, (21) (à Saint-Jacques, ces largeurs sont respectivement 12,64 in. et 11,40 m; à Saint-Lambert, la largeur d'axe en axe était de 13 m); largeur d'une travée: 4,61 m. (6,25 m. à Saint-Jacques).

Bas-côtés du XIIIe siècle: 4,16 m. de large jusqu'à la colonne; épaisseur du mur: 0,92 m; largeur des chapelles du XIVe siècle: 5,03 m. (largeur des bas-côtés à Saint-Jacques: 6,25 m) Largeur totale de l'édifice: 33,51 m.

Quant au transept, il a 32,09 m de long sur 11,34 m de large.

tiauteur de la voûte: 24 m, sous clef (23 m. à Saint-Jacques).

Le choeur de l'église est incliné légèrement à droite.


LA GRANDE NEF

La grande nef se compose de sept travées, séparées par des colonnes cylindriques lisses. La base de ces colonnes est cylindrique également, ainsi que les chapiteaux, seul l'abaque est octogonal.

Les chapiteaux des colonnes présentent un peu de saillie: une simple rangée de crochets qui s'épanouissent en larges feuilles plates.

Les abaques des chapiteaux supportent les moulures des arcades, la retombée des voûtes des petites nefs, et, de face, trois colonnettes engagées qui montent jusqu'à la retombée des arcs doubleaux et des nervures des grandes voûtes. Ces colonnettes forment avec le triforium l'ornementation des murs de cette nef.

Le triforium produit un effet charmant. Composé de sveltes colonnettes qui soutiennent des arcatures à arc brisé redenté, il présente une galerie utile au service. Les chapiteaux des colonnettes sont finement sculptés; ces chapiteaux et les écoinçons des arcatures sont en pierre de sable.

Le rang inférieur des claveaux aux grandes arcades de la nef et les nervures des voûtes ont été taillés également en pierre de sable. L'alternance de ces teintes claires et des teintes plus sombres des murs et des colonnes n'est pas d'un mauvais effet.

C'est ici l'endroit de faire remarquer que les deux travées vers le choeur ont été construites avant les autres. Regardez les colonnes: les tambours sont de hauteur moindre; les abaques des chapiteaux ont plus d'épaisseur; les feuilles des chapiteaux sont taillées plus profondément, mais sont moins longues; de même, dans la moulure des bases, les gorges sont plus profondes.

Les sculptures du triforium indiquent une différence semblable: aux deux premières travées, les chapiteaux des colonnettes se composent de quelques
feuilles longues et plates; les écoinçons ont une ornementation régulière de feuilles de fougères. Aux autres travées, les petits chapiteaux n'ont que leur partie supérieure sculptée et très déchiquetée; les écoinçons ont aussi une sculpture moins régulière et surtout ne conservent pas une ornementation empruntée uniformément au règne végétal: on y trouve des êtres fantastiques, monstres et autres figures, mêlés à des formes végétales qui sont pourtant toujours distinctes de celles des premières travées.

Tout en haut de la nef sont disposées les magnifiques fenêtres qui donnent à l'église son aspect si vivant. Le fenestrage, de style rayonnant, est des plus gracieux: il se compose de trois grands compartiments, en forme de quatre feuilles et d'un beau dessin. Les mêmes figures sont répétées aux quatorze fenêtres hautes.

Un détail typique de ces fenestrages confirme un point historique que nous avons rapporté: la grande nef est du XIIle siècle, mais la voûte et le réseau des fenêtres datent du début du XVe siècle: ecclesia perfectionem accepit in fenestris superioribus; le réseau en style rayonnant date de cette époque. Et de fait, quand on examine, du milieu du préau, la façade Sud de la cathédrale, on voit que les fenestrages ont été construits après les fenêtres: la ligne de naissance du grand arc des fenêtres n'est pas la même que celle du fenestrage.

Quoique la tour soit de beaucoup postérieure à l'église, la différence d'âge ne se remarque pas à première vue: car la voûte de la nef est probablement de la même époque que celle de la tour; de même, on a continué aux murs de la tour le triforium de la nef: cependant, ce travail exécuté après 1390 est fait d'une manière beaucoup plus grossière que le modèle du XIIIe siècle. Le triforium de la tour est entièrement en pierre de taille. Les arcatures sont sculptées à jour; les écoinçons n'ont donc pas de sculpture. Aux chapiteaux des colonnettes, il y a une série de crochets et non pas les longues feuilles qui occupent toute la hauteur du chapiteau.

Les arcs-doubleaux qui, de chaque côté de la tour, soutiennent un compartiment des voûtes, sont supportés par des consoles, taillées en masque et en feuille.

Le fond de l'église est occupé par une immense verrière, jadis en style flamboyant, actuellement refaite par l'architecte Van Assche selon les formes du gothique rayonnant.

Le même architecte a construit le jubé actuel; les deux buffets d'orgue, qui n'ont rien de remarquable, sont disposés sur les côtés pour ne pas cacher l'immense verrière: c'est leur unique mérite.

L'ancien jubé occupait presque toute l'enceinte de la tour: les orgues qui y étaient placées provenaient de la collégiale Saint-Pierre et sont actuellement à l'église Saint-François-de-Sales.

On a conservé sous la tour la porte à deux vantaux de l'ancien jubé, exécutée, en 1643, par Chabot. Ce beau travail de dinanderie est un don du doyen Paul de Simonis (1641-1647).

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Détail particulier: le pilier Nord au fond de l'église, contre la tour, porte le niveau des différentes inondations: l'année est indiquée par un chronogramme,

1571. aLto Mosa LoCo CresCens hVC appVLlt VsqVe,

1643. aLtIVs eXpanso fLVMIne DVXIt aqVas.

1926. CIrCUMCIsIonIs DIe hUC assUrglt aqUa.

Ensuite le niveau aux dates suivantes: 1740 et 1850.

Le transept a des dimensions grandioses: 33 m sur 11,60 m. Quoique la construction reste bien simple le triforium n'a même pas été continué autour du transept et du choeur - l'ensemble fait une impression grandiose.

De chaque côté, une immense verrière en occupe toute la largeur. Les meneaux divisent la fenêtre en six compartiments; le réseau de l'arcade développe une ornementation d'une pureté remarquable et d'une grande richesse,

L'espace sous les fenêtres était jadis revêtu de lambris de marbre; de chaque côté s'élevait une niche en marbre blanc, dont la partie supérieure était taillée en coquille. Au Nord se trouvait une statue en bois de la Sainte Vierge portant l'Enfant Jésus; au Sud, la belle statue de saint Jean-Baptiste, attribuée à Delcour: cette dernière se trouve actuellement dans la petite abside, à gauche du choeur.

Lorsque, dans la seconde partie du XIXe siècle, on fit disparaître ces marbres, on remit à jour les belles arcatures redentées qui ornent les murs de tout l'édifice. Plus tard, le peintre Tassin a représenté dans ces arcatures les saints du diocèse. - Au transept Sud, juste à l'entrée de la salle capitulaire, se dresse une vieille statue de saint Hubert, travail remarquable de la fin du XIVe siècle, et montrant le saint revêtu d'un curieux superhuméral à cinq fanons. - Au transept Nord, on a découvert, en 1890, une piscine, dissimulée dans l'épaisseur du mur latéral et qui datait du XIII siècle; cachée jadis par les lambris en marbre, elle a dû disparaître de nouveau derrière un confessionnal,

Au XIX siècle, furent construits les collatéraux du choeur. Là où se trouve actuellement l'entrée de ces chapelles, étaient adossés au mur deux autels latéraux celui du côté Nord fut donné comme autel majeur à Sainte-Marguerite à Liège; celui du côté Sud, l'ancien autel du Saint-Sacrement, a été donné à l'église de Hoesselt: autel en marbre, avec deux belles colonnes monolithes de marbre rouge, « qui n'est pas sans valeur au point de vue de l'art », dit le Registre des Délibérations.

Vers la place du Roi Albert, quelques vieilles constructions masquaient le choeur de l'église (fig. 2): ce fut l'architecte Halkin qui, en 1856, prolongea la nef latérale de ce côté; en 1875, on construisit les collatéraux du côté Sud.

Cette ajoute n'a certes pas nui au bel ensemble de l'édifice. Le transept paraît, au contraire, plus grandiose encore; le travail a d'ailleurs été exécuté avec beaucoup de soin.

Cependant tout n'est pas nouveau dans ces collatéraux du choeur. Les deux absides qui les terminent furent ajoutées au XIVe siècle en même temps que l'abside du choeur : elles formaient comme deux absidioles du sanctuaire.

La petite abside du côté Sud forme un ensemble bien caractéristique au milieu des nouvelles pierres de la chapelle collatérale: voûte avec clef sculptée, fenestrage du XIVe siècle, et même une peinture murale du XVIe siècle, attribuée à Lambert Lombard le Christ en croix, entre la Vierge et saint jean.

Dans le pavage de l'abside du côté Nord, une dalle avec inscription recouvre les restes de quatre de nos Princes-Evêques: Erard de la Marck (1505-1538), Georges d'Autriche (1544-1557), Charles d'Oultremont (1763-1771) de César-Constantin de Hoensbroeck (1784-1792). Lors de la démolition de la cathédrale Saint-Lambert, ces corps furent transportés à Saint-Paul dans ce caveau.

Lorsque, vers 1850, on discuta les plans de restauration de la cathédrale, Mgr Jacquemotte, vicaire-général, avait proposé de continuer les chapelles autour du choeur; ce projet de déambulatoire ne fut pas exécuté, à cause du voisinage de la rue, déjà assez étroite: il eût d'ailleurs dénaturé le beau choeur de Saint-Paul.


LE CHOEUR DE LA CATHEDRALE

Le choeur de la cathédrale (fig. 5) paraît assez sombre; les verrières modernes, d'un rouge opaque, donnent peu de lumière: le contraste est grand entre ce choeur et la nef du milieu, claire et gaie.

L'abside, avec ses cinq fenêtres étroites et ses antiques verrières, produit une impression gracieuse et distinguée. Comme il a été dit plus haut, ce fut vers 1334 que cette abside polygonale vint remplacer le mur plat qui terminait le choeur primitif. La construction elle-même indique la différence d'époque: à l'abside, on trouve des moulures prismatiques et les colonnettes engagées ont un profil quelque peu allongé. - Les moulures qui entourent les fenêtres du choeur furent copiées, vers 1852, sur les moulures des fenêtres absidales: la Commission des monuments voulut qu'on adoptât ce profil plus riche; ainsi
disparut une des caractéristiques de la construction, et cela, afin d'obtenir la fameuse unité de style « prenant pour point de départ les parties les plus ornées »,

A l'entrée du choeur est appendu un Christ du XIVe siècle, Cette statue provient de l'ancien arc triomphal; restaurée en 1884 par J. Helbig, elle a repris sa place d'honneur.

Dans le choeur même, il ne se trouve plus une pièce de l'ancien mobilier, intéressante au point de vue archéologique. Il ne reste que le lutrin, un aigle, qui tient un reptile dans ses serres, attribué à Delcour (22); c'est tout ce qu'on a laissé des siècles précédents, et encore le socle qui le supporte est moderne.

Unité de style tel était le principe qu'on invoqua encore une fois. Mais, alors que l'église appartient à la première période du gothique et que la simplicité en est la note caractéristique, n'a-t-on pas pris comme modèles du mobilier nouveau, les formes les plus luxueuses de la dernière période du gothique? Sans doute, ce furent des artistes compétents qui ont travaillé à ces oeuvres; l'ensemble cependant est trop riche.

En 1863, on fit disparaître du choeur l'ancien maître-autel en marbre et les panneaux en marbre de l'abside et du choeur. L'église de Seraing a pu acquérir le tout au prix de 3.000 francs (23): la beauté de ces marbres fait encore l'admiration des visiteurs de l'église de Seraing.

En 1860, on plaça le trône épiscopal, plus tard aussi les nouvelles portes latérales et les stalles des chanoines celles-ci, dessinées par Durlet, sont dues, pour la menuiserie, à Merveille (prix fixé 38.500 fr) et pour la sculpture à Ducaju d'Anvers (42.000 fr). Ce mobilier est exécuté en gothique rayonnant; les dais sont même en flamboyant.

La dossier des stalles porte des bas-reliefs remarquables du côté de l'évangile, deux scènes de la Vie de saint Lambert, la translation de son corps et son ensevelissement; du côté de l'épître, la résurrection des morts et le jugement. Ces bas-reliefs sont assurément le meilleur travail de sculpture moderne qui existe à la cathédrale.

Il faut cependant ajouter que ces dossiers des stalles cachent les arcades redentées qui sont l'ornementation des murs du choeur: à quoi bon dès lors débarrasser les murs des panneaux en marbre si c'était pour y placer ces lambris en chêne?

Une balustrade massive en cuivre sépare le choeur de la nef, travail moderne imitant le style du XIVe siècle mais cette clôture est trop haute et empêche la vue du choeur, - Jusqu'en 1864, le choeur était séparé de la nef par une haute clôture en marbre, qui s'abaissait vers le milieu, Aux deux extrémités étaient placés des groupes de Renier Rendeux (1684-1744) la Foi et l'Eglise. Ces deux sculptures surmontent actuellement les stalles du petit Séminaire de Saint-Trond et ces stalles elles-mêmes avaient été commandées en 1809 pour la cathédrale de Liège, où elles restèrent jusqu'en 1866,

Une magnifique porte en cuivre, du début du XVIIIe siècle (époque Louis XIV), ornée de guirlandes et de feuilles d'acanthe, fermait jadis le
choeur: elle a été transportée au musée diocésain et remplacée par une nouvelle en style gothique.


LE MAITRE-AUTEL

Le maître autel est sans contredit le plus bel ornement du choeur: en son genre, c'est une oeuvre d'art d'une réelle valeur.

Entre les colonnes de porphyre, sur lesquelles repose la table d'autel, apparaît une riche mosaïque, représentant saint Lambert. Cette mosaïque est un merveilleux travail de l'artiste romain Luc Carimini.

Le retable, avec statuettes et ornements en cuivre, a des groupes sculptés en marbre blanc, tout à fait remarquables; ce sont des scènes de la vie de saint Lambert: le saint refuse de bénir la coupe d'Alpaïde, la scène du martyre de saint Lambert, son inhumation.

Aux deux extrémités de l'autel se dressent les belles statues de saint Pierre et de saint Paul, aussi en marbre blanc. Elles sont placées dans des niches en cuivre surmontées de baldaquins hauts comme des tours; le tout très orné.

Cet autel majeur est certes très précieux. On a veillé aussi à ce que ni le retable, ni les baldaquins ne viennent mettre un écran devant les fenêtres absidales (24); et certes toute la décoration en cuivre, les détails des arcades comme les fleurons des dais, a été exécutée avec grand soin. Mais cette abondance d'ornements n'est-elle pas ici quelque peu déplacée? Un autel est essentiellement une table de sacrifice, placée d'ordinaire au-dessus de la tombe d'un saint. Ici, au contraire, table d'autel et mosaïque de la tombe sont comme éclipsées par toutes ces richesses qui les encadrent; sculptures, niches et dais auraient dû être traités comme des parties accessoires: et voilà que l'accessoire est devenu l'essentiel Mieux que tout ce luxe, une simple pierre d'autel sur colonnettes, avec une croix d'autel et six chandeliers, enrichie peut-être d'un ciborium liturgique, aurait convenu à un édifice aussi délicatement simple et distingué que l'église Saint-Paul.


LES VOUTES

La voûte est conçue sur le type simple: un arc-doubleau par pile et une croisée d'ogives par travée; l'abside est bâtie sur plan polygonal, une nervure par angle.

Au croisement des ogives de chaque travée est encastrée une clef de voûte sculptée, peu saillante dont l'ornementation se borne à une fleur, un masque: la clef de la travée centrale représente saint Paul entre deux anges céroféraires.

Sur les voûtes le chiffre 1557 et quelques autres dates du XVIe siècle indiquent, semble-t-il, l'époque de la peinture.

Au XIXe siècle, la peinture de la voûte fut restaurée à plusieurs reprises, entre autres par Carpey en 1855: c'est lui qui a ajouté au milieu du transept les symboles des quatre évangélistes.

L'ancienne polychromie de la voûte - attribuée à Lambert Lombard - peut être citée avec raison comme une des grandes beautés de l'église.

La voûte avec ses couleurs vives ressemble à un décor de conte de fées. Sur les larges panneaux se déroulent les rinceaux capricieux des arabesques. Leurs branches feuillues s'épanouissent en fleurs magnifiques: roses pourpres, fleurs bleues, corolles dorées. Et, non content d'avoir créé un paysage de rêve, l'artiste a voulu peupler ce paradis imaginaire d'une faune de fantaisie: oiseaux des pays exotiques, échassiers à long bec, dont la tête est ornée d'une fine aigrette, paons à longue queue pendante et au plumage magnifique, reptiles aux formes fantastiques, êtres d'un monde irréel et merveilleux qui ajoutent la richesse de leur coloris à la perfection du dessin.

Sous la tour où pendaient jadis les cordes des cloches, la voûte a reçu une décoration conforme à cet endroit: parmi les arabesques, on voit deux sonneurs à l'ouvrage dans le costume caractéristique du XVIe siècle,

Les voûtes des basses nefs (fig, 6) et des chapelles sont ornées d'une polychromie semblable mais comme les colonnes des nefs et les arcades furent couvertes d'une couche de peinture à l'huile (2), ainsi les voûtes eurent leur polychromie cachée sous un épais badigeon, Ce n'est qu'en 1895 que l'église a retrouvé son aspect primitif.



VITRAUX, PEINTURES ET TABLEAUX


LES VITRAUX

Comme anciennes verrières, la cathédrale possède la grande verrière du transept Sud et les vitraux des cinq fenêtres absidales. Tout le reste est moderne.

Une mention toute particulière doit aller au grand vitail du transept, qui est en réalité le plus bel ornement de l'église.

Oeuvre merveilleuse de la Renaissance, cette verrière est une des plus belles connues du début du XVIe siècle. A Liège, on ne peut lui comparer que les superbes vitraux du choeur de Saint-Jacques: même richesse de coloris, même goût artistique dans la conception comme dans l'exécution, A Saint-Jacques, cependant, les vitraux sont enchâssés dans les fenêtres étroites de l'abside, mais ici c'est un tableau grandiose dont les différentes scènes se développent dans toute la largeur du transept et dont la somptuosité s'impose par conséquent davantage. C'est sans exagération qu'on peut prononcer le mot de « chef-d'oeuvre », car, malgré les outrages du temps et des hommes, cette verrière reste sans rivale par sa lumière chaude et profonde, la variété de ses couleurs chatoyantes, le velouté des étoffes drapées avec art toutes choses que ne posséderont jamais nos vitraux modernes.

On doit pourtant adresser un reproche à la verrière, ou mieux à l'art du XVIe siècle qui était déjà à son déclin. Jadis, l'art du verrier créait une harmonie parfaite entre le dessin du vitrail et les lignes du réseau de la fenêtre. Mais la Renaissance exigeait plus de liberté, voulait s'affranchir de toute entrave: dès lors, les verrières devinrent des oeuvres d'art à considérer en elles-mêmes, sans aucun rapport avec la fenêtre où elles sont placées. L'artiste a voulu demeurer indépendant du cadre que lui traçait l'architecte, mais le résultat n'a pas contribué à la beauté de l'oeuvre comme on peut le voir par exemple dans la Conversion de saint Paul.

La partie supérieure du vitrail représente le Couronnement de la Sainte Vierge. Notre-Dame, revêtue d'une robe bleue et d'un long manteau de satin
blanc, est agenouillée au milieu de la scène, tandis que Dieu le Père et Dieu le Fils lui imposent la couronne; au-dessus d'eux plane le Saint-Esprit sous la forme d'une colombe.

Dieu le Père a l'aspect d'un noble vieillard, le front ceint d'une triple couronne. Dieu le Fils se présente sous la figure d'un homme dans la force de l'âge, enveloppé d'une tunique rouge. Leur trône à tous deux est comme une stalle de choeur richement ornée de sculptures; par devant, le globe terrestre, curieusement traité en cristal transparent.

Cette scène semble avoir été fortement restaurée.

Un tableau plus vivant et plus mouvementé est la couronne d'anges et de saints entourant la vision centrale, Dans cette foule innombrable, on reconnaît, à côté des symboles des évangélistes, des fidèles de tout rang: papes, cardinaux, évêques, abbés et moines, empereur, rois, puissants du monde et humbles manants: bref, la chrétienté entière a été convoquée pour rendre hommage à Marie, la bénie Mère.

Dans les écoinçons sont représentés des anges, un prophète et l'apôtre saint Paul. Mais voilà que le réseau supérieur de la fenêtre nous montre encore des groupes d'anges avec leurs instruments de musique; dans la rosace du milieu, des anges chantent en l'honneur de Notre Dame. On les croirait empruntés à quelque tableau de primitifs!

La partie inférieure du vitrail est divisée en deux compositions; une belle construction Renaissance en forme de portique entoure chacune d'elles et constitue comme une galerie au milieu de la fenêtre. Tout ce que l'art du XVIe siècle a pu imaginer en fait de luxe, on le retrouve ici: colonnettes en marbre de diverses couleurs, colonnes surchargées d'ornements antiques, camées, médaillons. Dans toutes les niches il y a des statues; des docteurs enseignent dans des chaires et au balcon entre les arcades et les colonnes, se meuvent de nombreux personnages qui se penchent et ont l'air de suivre la scène qui se déroule au milieu.

Aux deux extrémités de la construction se dressent les figures symboliques de la Synagogue et de l'Eglise: la première, une femme qui a un bandeau sur les yeux, tient une bannière brisée et laisse traîner par terre les tables de la loi (26); l'autre est une Reine, la tête ceinte d'une couronne, qui tient le calice avec la sainte Hostie et élève victorieusement la croix.

La scène de gauche représente la Conversion de St Paul. Au ciel apparaît le Sauveur, tenant en main la sphère du monde et son étendard, signe de sa puissance. Le tableau, plein de vie et de mouvement, semble reproduire le moment où le Christ interpelle Paul le persécuteur.

La figure principale est évidemment saint Paul: il est étendu sur le dos, la main gauche sur le bouclier et de la main droite faisant la geste de celui qui répond à quelqu'un. Les compagnons de Paul restent plutôt étrangers à cette scène; ils se protègent de leur bras ou de leur bouclier contre la lumière surnaturelle; à l'avant-plan un d'entre eux retient le cheval qui a désarçonné son cavalier.

L'art de la fin du gothique se révèle dans ce visage de saint Paul, viril et expressif, où l'étonnement est si bien marqué; et la Renaissance s'est attachée spécialement à reproduire avec un soin extrême tous les détails de son équipement: qu'on considère, par exemple, les cnémides d'un rouge vif, ornés de dessins particulièrement délicats.

Le compartiment de droite est réservé au donateur: Léon d'Oultres, chanoine de Saint-Lambert et prévôt de la collégiale Saint-Paul (27). Le donateur est représenté d'après nature en habit de choeur, soutane violette et rochet gaufré, l'aumusse sur le bras gauche, comme les chanoines de l'ancienne cathédrale, Il est protégé par saint Lambert, qui lève en bénissant la main droite (au dessus du baldaquin se lit l'inscription: SANCTUS-LAMBERTUS-ORA), Le chanoine d'Oultres est agenouillé devant l'autel de saint Paul (inscription: PAVELUS-DOCT [sic]), Dans le lointain se dessine le vieux Liège.

L'écu du donateur et la date 1530 sont placés au dessus de chaque tableau du vitrail inférieur (28).

L'histoire attribue cette oeuvre d'art au peintre-verrier liégeois jean de Cologne, qui a vécu dans la première moitié du XVIe siècle. L'effet merveilleux de ces couleurs chatoyantes met en relief l'habileté technique du maître liégeois. La tête de la Vierge, p. ex., dans le vitrail supérieur, est d'une beauté ravissante et les boucles blondes ont été coloriées de main de maître. La belle couleur dorée est due à l'emploi du chlorure d'argent, dont on se servait dès la fin du XIVe siècle.

La grande fenêtre du transept Nord possédait aussi sa verrière du XVIe siècle. Celle-ci, probablement, ne comptait qu'une scène, car c'est seulement en 1852 que la fenêtre a été abaissée au niveau de la fenêtre d'en face (voir fig. 2 et 23). On y voyait l'Adoration des Bergers, attribuée aux Liégeois Jean Nivar
et Renier Flémalle. Placée en 1532, aux frais du doyen jean Stouten (29), la verrière fut complètement détruite en 1794 par les balles des soldats français.

Quelle était la valeur de cette oeuvre? E. Thys (30) - et, après lui, Thimister le répète - écrit: « L'Adoration des Bergers, qui y était représentée, n'était qu'un pastiche ». Louis Abry (31) écrit au contraire vers 1715: « Qu'aurait-on pu voir de plus galant que l'Adoration des Bergers sur la grande verrière de Saint-Paul, qui regarde vers Saint-Martin? » Malheureusement aucun dessin n'en subsiste pour trancher la question.

La verrière actuelle est un don de Mgr de Montpellier (1852-1879) et représente la Glorification du T. S. Sacrement,

Dans le réseau de la fenêtre on voit différentes figures de l'Eucharistie: Le Sacrifice d'Abraham, La Manne au Désert, L'Agneau Pascal, Le Pain du Prophète Elie et d'autres motifs, symbolisant le saint Sacrement.

Le grand panneau central reproduit l'Institution de la Sainte Eucharistie à la dernière Cène, tableau grandiose et très bien conçu: dans les écoinçons de cette composition centrale se trouvent les figures de saint Jean-Baptiste, Moïse, Aaron et Melchisédech.

Dans le vitrail inférieur est représenté Mgr de Montpellier, agenouillé devant le saint Sacrement et protégé par son patron saint Théodore; à droite, l'évêque de Liège, Robert de Torote (1240-1246), fait lire le décret par lequel il établit la Fête-Dieu.

Dans le panneau inférieur, qui sert de base à la verrière, on voit une procession de moniales: ce sont les Carmélites du Potay qui, le 30 septembre 1860 (32), vont prendre possession solennellement de leur nouvelle fondation de Cornillon et occuper donc l'ancien couvent où sainte julienne a vécu: ce petit fait moderne a ainsi sa place dans les fastes du diocèse. Plus loin est représentée la vision de la sainte qui a donné naissance à la Fête-Dieu,

Ce qu'on peut reprocher à bon droit à cette verrière, c'est qu'elle n'est pas un vrai vitrail comme en produisait l'art des anciens maîtres verriers, Au Moyen-Age, le vitrail était comme une mosaïque de plaques de verre, colorées dans la masse et qui, découpées et enchâssées dans du plomb, reproduisaient par leur juxtaposition les divers personnages: seuls les lignes de la figure ou
les plis du manteau étaient marqués par des traits de couleur brune, appliqués sur le verre coloré.

Il s'agit ici d'un tout autre procédé. Capronnier de Bruxelles, à qui est due cette verrière, a certainement abusé des émaux. Au lieu d'employer des verres teintés dans la masse, il n'a que trop souvent étendu sur le verre blanc des silicates que la chaleur du four fondait et fixait: c'est en toute vérité une peinture sur verre.

Que malgré cela on doive attribuer à cette oeuvre de réelles qualités, est un fait évident. D'abord toutes les scènes ont été bien conçues et exécutées: il y a harmonie parfaite entre les lignes architecturales et celles du dessin.

Mais ce qui en fait le grand mérite, c'est l'extrême perfection du dessin, achevé jusqu'au moindre détail. Si peu translucide que soit l'ensemble, on subit cependant l'impression de cette belle oeuvre.

Au choeur même, dans les hautes fenêtres au-dessus des stalles, sont encore placées trois autres verrières modernes. Du côté de I'Evangile celle consacrée au souvenir de Mgr Barrett (vicaire capitulaire de Liège de 1814-1829, puis évêque de Namur de 1833-1835): elle représente Saint Paul qui baptise ses geôliers dans (a prison; du côté de l'épître un premier vitrail rappelle la mémoire de Mgr Van Bommel (1829-1852): Ananie rend la vue à saint Paul et le second représente Mgr de Mercy d'Argenteau, archevêque de Tyr et doyen de la cathédrale 1845-1875 (+ 1879), agenouillé devant un autel de la sainte Vierge. Dans la partie supérieure du vitrail: Saint Paul et Saint Barnabé devant l'église de Jérusalem.

Ces verrières, qui sont aussi l'oeuvre de Capronnier, ont les mêmes mérites que celle du transept et aussi les mêmes défauts: l'abus du rouge les rend encore moins translucides,

Les vitraux de l'abside du choeur datent du milieu du XVIe siècle ils ont été placés entre 1557 et 1559.

Ces vitraux, certes, ont une valeur artistique; dans toute autre église on en parlerait comme de chefs-d'oeuvre, mais en regard de la splendide verrière du transept, on remarque trop ici la distance qui les sépare de celle-ci.

En chaque vitrail on voit le donateur et son saint patron; également le blason familial dont les couleurs vives rehaussent l'éclat de la scène représentée. Une construction Renaissance, ressemblant quelque peu à un temple antique, forme l'encadrement obligé de chaque tableau; des statues se dressent dans les niches latérales.

A la fin du XIX siècle on s'imagina que les verrières de l'abside laissaient entrer trop de lumière; et les vitres, en dessous et au-dessus de chaque scène, furent remplis par des anges, peints sur fond bleu. Le chanoine Lucas (33) écrit « L'artiste-peintre a eu l'heureuse idée de remplir les vides de ces fenêtres, de 16 m, de haut, par des anges portant les instruments de musique et s'unissant aux chanoines du choeur pour chanter l'amour et la gloire de Dieu. » Quoi qu'il en soit du chant des chanoines, on ne peut pas qualifier cette addition d' « heureuse idée » au point de vue esthétique au moins; le dessin des anciens vitraux se dégagerait bien mieux sans tout cela; l'ensemble d'ailleurs ne se présente pas très bien.

La verrière centrale représente le Christ en croix. Un ange recueille le sang de la plaie du côté. A droite du Christ se trouve la sainte Vierge soutenue par l'apôtre Jean; à gauche Marie-Madeleine est agenouillée au pied de la croix.

Et au-dessus de la scène terrestre l'artiste nous montre le ciel ouvert: la Divinité elle-même veut en quelque sorte partager la souffrance du Fils. Le Saint-Esprit plane au-dessus de la croix. A gauche du vitrail apparaît Dieu le Père, dont le regard éploré s'attache sur son Fils agonisant, autour de Lui planent des anges dans une attitude de désolation.

Le ciel et la terre pleurent la mort de l'Homme-Dieu: voilà le thème émouvant qu'a voulu développer l'artiste du XVle siècle.

Ce vitrail, comme nous l'avons dit plus haut, est dû à la libéralité du doyen jean Stouten; voici l'inscription R. D. Mgr Joannes Stouten hujus ecclesiae decanus hanc fenestram dedit 1558,

Les deux vitraux du côté de l'Evangile sont également des dons de chanoines de Saint-Paul.

Le premier, de 1557, est dû au chanoine Gilles de Bloquerie: celui-ci était en même temps chanoine de Tongres et secrétaire du prince-évêque Georges d'Autriche. Le vitrail représente le donateur, protégé par saint Pierre; dans les niches supérieures les figures de Notre-Dame et de saint Gilles, patron du donateur.

Le second aussi fut donne en 1557, par Mgr Grégoire Sylvius (+ 1578), prieur des Dominicains de Liège, inquisiteur, nommé chanoine de Saint-Paul après son retour du Concile de Trente, et, plus tard, évêque suffragant. Le donateur en chape est agenouillé sur un prie-Dieu: un ange porte sa crosse et sa mitre, puis sa devise: prius asperum. Dans la partie supérieure se voient les statues de saint Grégoire et de saint Augustin.

Les deux vitraux suivants reproduisent toujours le même schéma. Le chanoine Corneille Erps (+ 1575) est représenté avec saint André; dans les niches supérieures les saints Corneille et Cyprien; plus loin le blason de la famille Erps avec devise et inscription.

Enfin, le vitrail de Remacle Lymborch (+ 1587), maitre ès-arts. Tout en étant chanoine de Saint-Paul, il s'acquit une grande réputation par la pratique de la médecine, medicae artis professione clarus, au témoignage de Chapeaville. Le donateur est représenté en habit de choeur: il a comme protecteur son patron saint Remacle, revêtu de la mitre, de la crosse et du superhuméral propre aux évêques de Liège. Un petit temple en style Renaissance qui recouvre la scène, abrite les statues de saint Pierre et de saint Paul, - Ce vitrail est de 1559.

De chaque côté des anciennes verrières absidales on a ajouté un vitrail moderne: à gauche celui de Mgr Doutreloux (1879-1901), à droite celui de Mgr Rutten (1902-1927). On a pris comme modèles les anciennes verrières qu'on a imitées, l'art en moins.


PEINTURES MURALES

L'unique exemple d'ancienne peinture murale est conservé dans la petite abside, à l'Est du choeur: c'est une oeuvre du XVIe siècle, attribuée à Lambert Lombard (voir page 22),

Lombard avait exécuté d'ailleurs à Saint-Paul des peintures murales plus importantes.

Helbig (*) rapporte - d'après un manuscrit du chanoine Hamal - qu'on découvrit en 1817 sous les tableaux du choeur, donc au-dessus des stalles des chanoines, « de belles peintures de Lombard peintes en 1529, mais assez gâtées ».

Le même auteur signale, d'après un texte inédit de Louis Abry (seconde partie du XVIIe siècle), que Lombard avait peint une Cène « à manière de fresques » sur les murailles du transept de Saint-Paul. Abry ajoute que cette peinture de 1558 (faite donc après le retour d'Italie) est la plus grande qu'on ait vue de Lombard « les figures sont tout au moins comme nature et la disposition très magnifique. »

Enfin Helbig lui-même a pu, en 1875, constater l'existence de fresques au transept. Comme nous l'avons dit plus haut (page 21), l'ancien autel du S. Sacrement érigé au XVIIIe siècle était adossé au mur vers le choeur, dans l'aile Sud du transept. Actuellement on y a percé la double arcade, donnant accès aux collatéraux du choeur. Or, au moment où l'on exécutait ce travail, le mur derrière l'autel, débarrassé de son crépissage, laissait voir les restes d'une peinture importante, une Descente de Croix.

Après avoir décrit les divers personnages représentés, Helbig conclut dans son livre « La proportion des figures dépasse la grandeur naturelle (ainsi que le remarque Abry pour les figures de la Sainte-Cène qui se trouvaient dans l'autre partie du transept). A en juger par les vestiges que nous avons sous les yeux, l'ordonnance était belle, simple de lignes et sobre, sans profondeur du groupe - conformément aux convenances de la peinture murale - et sans abondance exagérée de figures. Le style de cette peinture est celui de la Renaissance italienne et la tonalité paraît distinguée... Le tout se rapportait bien à Lombard, tant au point de vue du caractère des figures que de l'époque à laquelle cette peinture avait pu être exécutée. »

Toutes les peintures murales actuelles sont l'oeuvre de Tassin, vers 1895. La décoration du choeur est sobre; il n'y a d'ailleurs pas de grandes surfaces, puisque les stalles couvrent une partie considérable des murs. Des filets d'or viennent souligner partout les lignes des sculptures.

Dans les arcades trilobées de l'abside sont représentés les quatre Evangélistes et les quatre Docteurs de l'Eglise. Au dessus du trône épiscopal et sur le mur d'en face s'échelonnent onze scènes de la Vie de Notre Seigneur, qui forment ensemble un tout harmonieux.

Au choeur même, au-dessus des stalles, se voit, d'un côté, le Christ dans la gloire, entouré de ses archanges; de l'autre côté, la Reine du ciel qu'escortent les huit Béatitudes.

Tout cela est du travail honnête, bien exécuté sans doute, mais ce n'est pas du grand art.

La même remarque s'impose pour les peintures du transept, lesquelles occupent les surfaces planes le long des grandes fenêtres.

La Vie de la Sainte Vierge se déroule en huit scènes à côté de la verrière du XVIe siècle sa présentation au temple, ses fiançailles, la visitation, la présentation et le recouvrement de l'enfant jésus; plus loin, Marie sur le chemin du Calvaire, la Mère des douleurs et sa mort bienheureuse,

Cette première série est noble et douce, sans trop ressembler aux images pieuses; sur le mur d'en face, l'artiste a reproduit la vie de saint Paul et le caractère farouche de cet athlète héroïque du Christ donne aussi à ces scènes un autre cachet. Voici les différents épisodes: Paul au martyre d'Etienne, sa
conversion sur le chemin de Damas, Ananie lui rend la vue. Paul dans une corbeille s'échappe de Damas, Elymas le magicien est frappé de cécité, les habitants de Lystres veulent offrir un sacrifice à Paul, Paul et Silas dans la prison de Philippes, un tremblement de terre les délivre, Paul prêchant devant l'Aréopage d'Athènes, les adieux de saint Paul et de saint Pierre, son martyre.

Ces différentes scènes ressemblent à des tableaux, plutôt qu'à des peintures murales. L'artiste a eu tort de donner les mêmes dimensions à toutes ces représentations, car les plus élevées se trouvent à 16 et 20 m, et se présentent donc d'une manière beaucoup moins distincte.

Le grand mérite de l'oeuvre de Tassin c'est que la belle décoration qu'il a donnée à l'église ne détruit pas les lignes de l'architecture: d'une manière très habile l'artiste a tiré parti des surfaces libres. C'est surtout dans les peintures du transept qu'on remarque l'influence que Tassin a subie de la part des maîtres italiens. D'un bel effet sont également les auréoles moulurées qu'il a données à ses personnages, ainsi que différentes parties décoratives, traitées presque comme des bas-reliefs.

Dans les arcades trilobées au bas des murs du transept, l'artiste a peint les principaux saints du diocèse. Beaucoup critiquent les plis raides de ces peintures et prétendent que ces saints sont représentés « en un gothique qui sent par trop le poncif » (34) Ces reproches sont certainement excessifs.


TABLEAUX

A la cathédrale, et surtout au musée diocésain, sont conservés quelques tableaux, très intéressants au point de vue de la peinture mosane. Nous ne citerons ici que les tableaux qui se trouvent à l'église même.

Une peinture sur bois, conservée dans le collatéral Nord du choeur, est l'oeuvre la plus ancienne: c'est La Vierge au Papillon (fig 7), monument funèbre du doyen Pierre Van der Meulen ou a Molendino (35), mort en 1459. Entre saint Pierre, patron du donateur, et saint Paul, patron de l'église, est assise la sainte Vierge avec l'enfant jésus sur ses genoux: de la main droite elle présente un papillon au petit jésus et celui-ci effrayé recule et lève le bras pour se protéger à genoux, près de la Vierge, Marie-Madeleine baise les pieds de l'Enfant. Les montants du trône de la Vierge Marie sont ornés de sculptures et au-dessus du dossier il y a un groupe d'anges qui chantent; aux extrémités, deux anges posent une couronne de roses sur la tête de la Vierge.

Sur le devant du tableau est agenouillé le chanoine Van der Meulen, l'aumusse sur le bras gauche; le donateur est représenté très petit proportionnellement aux autres personnages et une banderole à peine perceptible indique sa prière à la divine Mère: O MATER DEl MEMENTO MEI. (36)

Le tableau ne ferait certes pas mauvaise figure à côté des primitifs flamands: l'artiste inconnu était incontestablement un maître. Cette peinture est charmante, car tout est représenté si simplement et si naïvement et chacun des personnages a des traits bien caractéristiques: à remarquer spécialement les figures d'apôtres trapues et énergiques, et le portrait du doyen Van der Meulen.

Lorsqu'on compare cette oeuvre au retable des Van Eyck, qui avaient peint leur chef-d'oeuvre quelques vingt-sept ans auparavant, on doit reconnaître cependant que notre artiste était beaucoup en retard sur eux. Ce qui rappelle les tableaux des Van Eyck, sont les textes peints sur le bord de la robe de Notre-Dame: AVE MARIA GRACIA PLENA DOMINUS TECUM BENEDICTA TU IN MULIERRIBUS (sic) ET BENEDICTUS FRUCTUS VENTRIS TUI JHESUS XRIST, et de chaque côté du col: SALVE REGINA,

Un autre tableau du XVe siècle est la Messe de saint Grégoire, peinture sur bois, placée au dessus de la crédence du choeur. Cette oeuvre, originaire d'une église des environs d'Aix-la-Chapelle, trahit l'influence allemande que le peintre a subie; cependant, M. le chanoine Coenen (37) fait remarquer que les montagnes qui y sont représentées « évoquent plutôt le paysage de Liège ». Au point de vue liturgique, le grand intérêt de ce tableau réside dans la richesse des ornements sacerdotaux; au point de vue artistique, il peut être rangé parmi les belles oeuvres qui évoquent ce thème iconographique, particulièrement goûté par la piété affective du Moyen-Age.

Le musée diocésain (entrée par les cloîtres) possède diverses toiles du XVIe siècle; sept tableaux des peintres Joachim Patenier (1445-1524) et Henri Blés (1480-1550), du début de ce siècle, peuvent encore être rangés parmi les primitifs; tous les autres sont de Lambert Lombard (1505-1566) et de ses élèves et manifestent l'influence de la Renaissance.

Au collatéral droit du choeur, à l'entrée des sacristies, on trouve un triptyque attribué généralement à jean Ramey (né vers 1530, mort au début du XVII siècle), un des élèves de Lombard. Ce triptyque bien conservé représente: le Portement de la Croix, la Descente de Croix et la Résurrection.

Ce même jean Ramey, en 1602, avait peint douze médaillons, représentant les bustes des Apôtres. Ces médaillons avaient été placés aux colonnes de la grande nef. L'appréciation qu'en donne le voyageur français Philippe
de Hurges (38) n'est pas très flatteuse: « L'on void en ce lieu les testes peintes des douze Apostres, toutes en forme desmesurée et gigantale, ridicules et difformes à veoir, sans que j'aye pu sçavoir à quelle fin on les y a représentées de ceste sorte, » - Après la Révolution française on n'entend plus parler de cette oeuvre : il semble bien que cette perte n'a pas été très grande.

D'après Helbig (*) « Ramey avait également dessiné les vitraux placé dans les chapelles de la collégiale de Saint-Paul. »

Du XVIIe siècle la Cathédrale possède d'abord cinq tableaux de Bertholet Flémalle (1614-1675): dans la sacristie: la Conversion de saint Paul (ce tableau a servi de retable au maître-autel jusqu'en 1795); dans la chapelle de saint Lambert: Le Christ en Croix et L'Adoration des Rois Mages; au fond de la chapelle de la sainte Vierge: Les adieux de saint Pierre et de saint Paul et saint Charles Borromée au milieu des pestiférés. Ces deux derniers tableaux sont loin d'avoir la perfection des toiles du même artiste qui se trouvent à la chapelle de Saint-Lambert. Que l'oeuvre de Bertholet Flémalle soit si bien représentée à Saint-Paul ne doit pas nous étonner: des rapports étroits unissaient cet artiste aux chanoines de la collégiale, même en 1670 il devint leur collègue; il dut cette nomination au prince-évêque et, parait-il, ne fut pas astreint à l'obligation du choeur.

Dans le collatéral Nord, à gauche du choeur, se trouve une série de six tableaux assez petits, scènes de la vie de jésus peintes par Franck le jeune (+ 1642). La cathédrale acquit ces belles peintures en 1855 de la famille du chanoine C. van Berwaer; les registres portent: 6 tableaux de Franck Floris moyennant six cenfs francs suivant cédule testamentaire. - Au même endroit est une grande toile d'Erasme Quellin (+ 1678). Ce peintre d'Anvers, élève de Rubens, s'était retiré à Liège et exécuta en 1646 pour l'église des Augustine (39) comme tableau du grand autel: Les 4 Docteurs de l'Eglise et la Sainte-Eucharistie, Le tableau fut transporté à Paris lors de la Révolution et donné à Saint-Paul en 1815. Ici il occupa le fond de l'autel du Saint-Sacrement dans le transept Sud: quand fut mise en ordre la nouvelle chapelle du Saint-Sacrement, il fut placé dans cette galerie-ci.

Au collatéral Sud, à droite du choeur, on trouve un des plus beaux tableaux de la cathédrale: Le Baptême du Christ par jean Carlier (1638-1675): cette oeuvre superbe provient de l'église des Pères Carmes. A côté est une Assomption de la Sainte Vierge par Gérard Lairesse (1641-1711), élève de Bertholet Flémalle. Ce tableau est l'ancien retable du maître-autel
de la cathédrale Saint-Lambert; emporté par les Français, il fut rendu en 1815 et racheté pour le maître-autel de Saint-Paul. Mais comma la distance ne permettait pas d'apprécier cette toile à sa juste valeur, on la remplaça par La Descente de Croix, oeuvre très méritante de Gérard Seyhers d'Anvers (1589-1651), ami de Rubens et de Van Dyck. Ce tableau aussi fut placé au collatéral Sud en 1864 lorsque le choeur fut meublé en gothique moderne,

Du XVIIIe siècle la cathédrale possède quatre bons tableaux du peintre anversois J. P. Tassaert (+ 1725); ils furent achetés vers 1838 par Mgr Van Bommel et représentent des scènes de la vie de saint Paul: deux d'entre eux sont dans la chapelle de Saint-Joseph, les deux autres au fond des basses nefs.

Le XIXe siècle a procuré à la cathédrale des oeuvres de Jean-Joseph Ansiaux (1764-1840): une Assomption de la Sainte Vierge et La Résurrection du Christ (toutes deux sous la tour) et La Conversion de saint Paul dans la chapelle du Saint-Sacrement; enfin, Tahan de Spa a exécuté Le Martyre de Saint Lambert (au fond de la chapelle de Saint-Lambert): dans ce dernier tableau l'expression de quelques personnages est certainement exagérée et parfois trop violente, - Napoléon I avait commandé, paraît-il, ces quatre tableaux afin de conserver pour le Louvre des oeuvres d'art enlevées à Liège. (40) En tout cas ces 4 tableaux furent placés au choeur en 1817 et remplacèrent quatre grands paysages peints par Lambert Dumoulin en 1687.

Enfin, dans le collatéral Nord se trouvent quelques copies de maîtres italiens; trois autres sont placées au-dessus de l'autel de la Sainte-Vierge (au fond, à gauche). Ces copies ne sont pas sans valeur et furent exécutées vers 1840 par Walery Rottermund, artiste polonais établi à Paris.


SCULPTURES ET OEUVRES D'ART

Comme les vandales du XVIIIe siècle avaient détruit le caractère du monument gothique par leur badigeon et leurs panneaux de marbre, ainsi le XIXe siècle fut marqué par une furie de restauration qui a accompli parfois une besogne utile, mais dont les excès furent particulièrement regrettables en voulant réaliser l'unité de décoration. En vertu de ce nouveau dogme artistique, on éloigna de l'église images et meubles anciens; tout fut refait « dans le style du monument »: hélas! qu'on regarde les deux autels à l'entrée du choeur pour avoir une idée de l'extrême élégance de ce gothique moderne!

Qu'est-ce qui nous reste encore des oeuvres d'art de l'ancienne Collégiale? Peu de chose! Et quand on compare l'église Saint-Paul aux grandes églises des autres villes, et même certaines églises ordinaires si riches en oeuvres anciennes, cette pauvreté fait encore plus pénible impression. De propos délibéré on a écarté de la décoration ce que l'art de la Renaissance avait produit et, en 1896, à l'occasion du XIIe centenaire de saint Lambert, le chanoine Thimister constate triomphalement que (41) « (à l'église Saint-Paul) on ne retrouve plus, sauf l'une ou l'autre remarquable oeuvre d'art indépendante des lignes architecturales, aucun vestige de la Renaissance ». Et quelques années après, le chanoine Lucas n'est pas encore content: il s'en prend au petit autel de la Sainte-Vierge (au fond, à gauche, fig. 9) et écrit (42) « Je serai heureux le jour où l'autel, en style Renaissance, aussi froid que le marbre dont il est composé, sera remplacé par un petit autel en style ogival. »

Mais de grâce! Qu'on ne touche plus au peu qui reste!

Le seul autel qui soit conservé du début du XVIIe siècle est érigé actuellement dans le collatéral Sud: il constitue le monument que les enfants de Pierre Oranus ou d'Heur élevèrent à la mémoire de leurs parents (morts en 1595 et 1618).

L'autel est une oeuvre de la plus pure Renaissance, type caractéristique des autels de cette époque. Quatre colonnes de marbre rouge veiné, dont les bases portent les quatre quartiers de la famille Oranus, supportent une corniche; aux extrémités de celle-ci s'élèvent deux statuettes en marbre blanc: saint Pierre et saint Paul. Au centre s'érige une niche, formée par quatre colonnettes en marbre rouge: chapiteaux et bases sont en marbre blanc et se détachent très fort sur le fond en marbre noir. Dans la niche est placée une statuette de la Vierge avec l'Enfant jésus: belle statuette, dont les plis sont drapés avec art, mais le petit jésus n'est certes pas joli et rappelle assez bien ces enfants insignifiants qu'on retrouve aux tableaux des primitifs,

La niche au-dessus de la Vierge est couronnée d'une corniche avec fronton courbe interrompu: là, une colombe aux ailes déployées symbolise le Saint-Esprit, et le tout est encore surmonté d'un médaillon, avec la figure de Dieu le Père.

Le retable de l'autel est une très bonne peinture: un Ecce Homo, plein d'expression, - L'inscription dans le marbre relate la fondation de trois messes hebdomadaires à célébrer par les bénéficiers à cet autel.

Dans la dernière chapelle, au fond de la basse-nef Sud, on a encastré dans le mur deux autres monuments se rapportant à la famille Oranus (fig. 8).

Le premier « mnemosynon » - ce beau mot grec, en, effet, est gravé sur la pierre - rappelle la mémoire du chanoine François Oranus, prévôt de Maeseyck (+ 1636). Deux colonnes en marbre rouge, dont les chapiteaux blancs sont de l'ordre corinthien, encadrent un bas-relief: dans le lointain on remarque un personnage ayant le capuchon des Franciscains et d'autres qui semblent se dépouiller de l'habit du siècle; sur l'avant-plan est agenouillé le chanoine Oranus dont on peut admirer le beau profil: à droite sont représentés Notre-Seigneur et sa Mère et saint François d'Assise, qui se prosterne aux pieds du Sauveur. Le défunt avait ce saint comme patron et, de plus, comme l'indique l'inscription, « il gît ici, enseveli dans la bure de saint François »,

Aux extrémités de la corniche se dressent deux petites statuettes d'albâtre: sainte Catherine et sainte Barbe; le fronton est interrompu par un petit socle avec la statuette du Sauveur; une jolie tête d'ange comme pendentif termine la partie inférieure de l'ouvrage.

Le second monument est celui de Pierre-Ernest Oranus (+ 1637) et fut érigé par sa femme, Elisabeth de Soumagne. Le plan des deux monuments
est à peu près le même seulement ici il n'y a pas de bas-relief au milieu, mais le buste de saint Pierre, et aux extrémités du fronton sont placées les statuettes de saint Pierre et de sainte Elisabeth.

Ce sont des oeuvres qui ne manquent pas de cachet: elles constituent des modèles de la sculpture au début du XVIIe siècle; les statuettes surtout sont finement travaillées.

Au côté Nord, chapelle du fond, est placée une très belle statue de la Sainte Vierge avec l'Enfant Jésus (fig. 9), en marbre blanc. Tout amateur d'art doit admirer ce groupe élégant et distingué: il fut exécuté pour la Cathédrale Saint-Lambert par le Chartreux Robert Henrard (1617-1676). Celui-ci, avant son entrée en religion avait perfectionné son talent à Rome sous la direction du sculpteur François Du Quesnoy; à Liege, il eut jean Delcour parmi ses élèves.

De ce dernier, le grand sculpteur liégeois jean Delcour (1627-1707), la Cathédrale possède quelques pièces remarquables

1° A côté de la Vierge de frère Henrard, on a encastré dans le mur deux bas-reliefs rectangulaires, en marbre blanc, de facture superbe: à gauche Les adieux de saint Pierre et de sain Paul, à droite Le Christ donnant les clefs à saint Pierre (fig. 9). Ils proviennent de l'ancienne église Saint-Pierre, aujourd'hui démolie.

2° Au fond du collatéral Nord, Le Christ au tombeau (fig. 10), provenant du mausolée que Waltère de Liverlo avait érigé dans la chapelle du couvent des Bons-Enfants, Voici l'inscription: Christo Sepulto Waltherus de Liverloo et Maria d'Ogier conjuges posuere anno 1696. - Une pièce de grande valeur, un des plus beaux types du Christ mort, où la beauté humaine est idéalisée pour l'unir à la grandeur divine. Peut-être pourrait-on reprocher à Delcour une trop grande exactitude dans l'anatomie de ce Christ qu'il met dans une pose avantageuse et un peu de mièvrerie dans la draperie exagérée du linceul.

3° Aux deux côtés de cette émouvante figure, se trouvent deux anges adorateurs en bois que l'abbé Moret attribue aussi à Delcour et, comme cet auteur le dit avec raison (43), les anges de Delcour « sont des êtres surhumains, d'un charme juvénile et troublant, vraie création de notre artiste ». Ici on peut se rendre compte en même temps de la maîtrise avec laquelle notre sculpteur sait draper ses personnages pour donner l'illusion de la vie et du mouvement.

A la fin du XIXe siècle, une pierre d'autel est venue recouvrir le Christ de Delcour: l'ensemble est encadré de deux colonnes torses (du XVIe siècle) en marbre noir, provenant de l'ancienne église Saint-Pierre.

Comme retable de cet autel, on a érigé un Calvaire le Christ en croix entre les statues de Notre-Dame et de saint jean. Ce groupe est conçu dans le style anguleux et raide d'il y a quarante ans « des planches vêtues de plis à cassures géométriques, et surmontées de têtes empruntées à un jeu de massacre », voilà comment s'exprime Colleye (44) et il n'a pas tort! C'est vraiment dommage que les belles sculptures de Delcour servent à composer un ensemble si peu réussi,

4° Tout au fond de la petite abside (au Nord, à côté du groupe précédent) est une grande statue de saint Jean-Baptiste, provenant de l'ancienne église paroissiale de ce nom. Quoique certains auteurs attribuent cette statue à Guillaume Evrard (1709-1793), il est réellement établi que c'est une oeuvre de Delcour. Nous pouvons dire avec l'abbé Moret que l'artiste y donne un autre aspect de son talent: son art est calme quand le sujet le commande,

5° Enfin, au-dessus de la porte d'entrée, portail de la Place du Roi Albert, est suspendu le grand crucifix en bronze, que Delcour modela en 1663. Le Christ fut placé au fortin Dardanelle qui devait défendre le Pont-des-Arches. Lorsque, à la Révolution française, on démolit le fortin, il fut d'abord désigné pour le grand Musée de Paris, mais il resta heureusement au pays et trouva place au portail Nord de Saint-Paul.

Parmi les oeuvres les plus populaires de Delcour, ce crucifix est aussi le meilleur que l'artiste ait exécuté. - Le bronze fut coulé par Perpète Wespin de Dinant,

Le XIXe siècle a doté l'église d'une nouvelle chaire de vérité (45) (fig. 11).

Conçue comme une haute construction gothique, elle présente des arcades, contreforts, arcs-boutants, pinacles et fleurons, exécutés d'après les formes les plus riches du flamboyant. Elle symbolise le Triomphe de la Religion.

L'abat-voix est une haute flèche, fine et élancée, travaillée à jour et richement décorée. Les sculptures de cette partie représentent l'Ancien Testament. Au sommet de la pyramide se dresse la statue de Dieu le Créateur; à l'étage suivant, un groupe: Adam et Eve, que pourchasse l'Ange au glaive flamboyant; plus bas encore, six niches contiennent des statues plus grandes: Daniel, Jérémie, Moïse, Isaïe, Ezéchiel et Elie.

Entre deux grandes statues d'ange, qui devraient soutenir l'abat-voix, est placée l'image du Christ en croix avec la Vierge et saint jean: la croix est la pierre angulaire du Testament Nouveau; l'ornementation de la cuve et du piédestal développe cette idée du triomphe de l'Evangile. Aux angles de la cuve sont fixées les statuettes des quatre évangélistes; les panneaux présentent en bas-reliefs la Nativité, jésus parmi les Docteurs, la Descente du Saint-Esprit, le Sermon sur la Montagne, la Résurrection.

Le piédestal de la chaire est creusé de cinq niches contenant de grandes statues en marbre blanc: la Religion, personnifiée par une Vierge qui tient la croix et le calice et dont le pied écrase le serpent; à sa droite, les statues de saint Pierre et de saint Hubert; à sa gauche, saint Paul et saint Lambert.

Deux escaliers symétriques, dont les rampes ajourées sont découpées en flammes, contournent un des piliers de la grande nef. Le pilier lui-même est enveloppé de panneaux finement sculptés. Et là, derrière la chaire, entre les départs des deux escaliers, se trouve sous un dais la statue en marbre: le Génie du Mal, belle sculpture qui fait ressortir par contraste la sereine beauté des autres statues.

Cette statue du Génie du Mal est incontestablement la plus belle: l'Ange déchu, enveloppé de ses longues ailes, a le pied droit enchaîné au rocher; sa main gauche tient son sceptre et sa couronne brisés, et son visage, qui exprime le remords et le désespoir, vibre de regret pour la félicité perdue.

La chaire est attribuée aux frères Geefs; dans le contrat, on ne parle pourtant que de Guillaume Geefs, sculpteur à Bruxelles: c'est lui en tout cas qui a fait les statues en marbre et aussi celle du Génie du Mal (46), elles sont d'ailleurs signées.

Thimister (Essai, p. 222) nous dit par rapport à cette dernière statue que l'artiste fut chargé de représenter le démon, « conservant le type de la beauté et portant en même temps tous les signes de la dégradation. Cette idée était très difficile à réaliser, quoiqu'on l'eût décrite avec beaucoup de détails (47), elle a cependant été parfaitement réalisée; mais une première statue fut refusée comme ne rendant pas l'idée chrétienne, » D'accord avec ce texte, E. van Bommel écrit dans La Belgique Illustrée (t. II, p. 296) au sujet de ce Génie du Mal: « On l'a trouvé tellement séduisant qu'on n'a pas jugé convenable de le conserver dans une église. Il figure aujourd'hui avec honneur dans un musée de Hollande: la statue qui l'a remplacé est d'ailleurs loin d'être sans mérite ». - il serait intéressant de pouvoir comparer les deux oeuvres: cela nous permettrait aussi de voir ce que, en 1847, on considérait comme « trop séduisant pour une église »,

Cette chaire - qui est d'ailleurs un beau travail - fut pendant plus de dix ans l'objet des préoccupations constantes du Chapitre. Dès le 4 mars 1837 (48), Guillaume Geefs s'obligea à exécuter en plâtre anges, abat-voix, la draperie y attenante, quatre évangélistes et trois bas-reliefs; en outre, il s'engagea à exécuter en marbre les trois premières statues qu'on lui commanda alors: la Religion, saint Pierre et saint Paul, au prix de neuf mille cinq cents francs chacune, tout compris.

En 1841, G. Geefs (48) propose un changement: il présente le plan actuel de l'abat-voix, « couronne gothique surmontée d'une flèche du même style ». Les chanoines étaient embarrassés; ils répondirent prudemment: « le nouveau plan peut être admis ils laissent toutefois à M. Geefs la responsabilité de son oeuvre et l'engagent à s'entourer de toutes les lumières qu'il croira utiles. »

Qu'on regarde la chaire actuelle: les anges qui sont placés sous l'abat-voix élèvent le bras mais ne soutiennent rien du tout: probablement ont-ils été placés dans le plan primitif pour tenir une draperie qui descendait de l'abat-voix.

Thimister nous dit que la chaire fut placée en 1843: les deux statues de saint Pierre et de saint Paul n'arrivèrent qu'en 1845 (quoique signées G. Geefs 1844) les trois autres statues en marbre ne furent commandées qu'en janvier 1846 et la statue du Génie du Mal porte la date 1848.

Le Registre des Délibérations (f. 164) nous a conservé le rapport de L. Roelandt, architecte de la ville de Gand, à qui le Chapitre avait demandé un avis motivé sur l'ensemble de l'oeuvre et la qualité du travail et ce rapport nous donne une idée de l'enthousiasme avec lequel on accueillit la nouvelle chaire « qu'on doit citer, au dire de Thimister, au premier rang parmi les oeuvres les plus remarquables que possède la cathédrale ».

L'architecte de Gand na que des éloges pour « l'achèvement de ce faste travail » le style, quoique plus orné, est bien en rapport avec celui de l'église; on arrive à un tout homogène et harmonieux; la sculpture, la composition et l'expression des figures, le fini de l'exécution sont dignes des plus grands éloges; l'idée religieuse qui se déroule du sommet à la base de la chaire, est des plus heureuses et des plus magnifiques. Bref, le tout fait le plus grand honneur à Monseigneur l'Evêque, au conseil de Fabrique, qui en a fourni la grande idée religieuse, et à l'artiste qui a su la réaliser avec autant de conscience que de talent.

La Belgique Monumentale (t. II, p. 156) apprécie comme suit « L'art ogival n'a rien produit de plus riche, de plus gracieux, de plus aérien; la matière cristallisée n'a pas plus de caprices; la terre pétrie n'a pas plus de mollesse; et au milieu de ce prodigieux ensemble de rinceaux, de feuilles sculptées et de statuettes, une puissante unité se fait sentir. L'effet des lignes, le choix des ornements, le développement de la pensée première, tout se tient, se coordonne et révèle une heureuse harmonie... M. Geefs s'est de nouveau montré ici poète et penseur... »

Certes, l'éloge de l'architecte Roelandt reste vrai en grande partie; pourtant on ne peut y souscrire sans réserve,

C'est un meuble trop riche pour la Cathédrale: au milieu des lignes sévère de la grande nef, ce luxe détonne: une oeuvre plus simple eût mieux convenu.

Ensuite la chaire ne rappelle que trop le gothique romantique et même en constitue un des spécimens les plus typiques. Le nouvel art gothique, tel que le créa l'imagination romantique dans la première moitié du XIX siècle, n'était qu'une parodie de l'art sublime et simple du Moyen-Age; on s'arrêta avec prédilection aux formes les plus compliquées de l'art décadent; la fièvre romantique s'amuse à entasser étage sur étage, à multiplier les arcades, pinacles et fleurons, et, loin d'aboutir à un ensemble raisonné, on n'a produit que des oeuvres qu'on qualifie irrévérencieusement de gothique de pâtisserie. Est-ce que cette chaire au milieu de la Cathédrale ne produit pas un peu l'impression d'une « pièce montée » ?...!

Serait-il pourtant désirable d'éloigner la chaire afin de rétablir ainsi l'unité ? Il ne saurait en être question quoi qu'on puisse reprocher à l'oeuvre, elle reste un très bon travail et personne ne voudrait plus renouveler le vandalisme de jadis en écartant impitoyablement ce qui ne convient pas au goût du jour.

Une réelle oeuvre d'art moderne est la nouvelle Châsse de saint Lambert. Elle date de 1896 et fut inaugurée à l'occasion du XII centenaire du Patron du diocèse,

La châsse, dessinée d'après les meilleurs modèles du XIIe siècle, représente un sarcophage surmonté d'une toiture à deux versants: long de 2 m, large de 0.60 m et haut de 0,93 m. Seize bas-reliefs, qui reproduisent les principaux épisodes de la vie du saint, s'échelonnent sur toute la longueur, les deux pignons sont ornés de statuettes.

C'est en toute vérité un mélange harmonieux d'or, d'argent, d'émaux, de pierreries et de filigranes: oeuvre d'art qui a demandé six années de travail (50). Les bas-reliefs et les statuettes des pignons sont en argent battu au marteau: huit cent quatre pierres dures y sont enchâssées et les personnages des deux pignons ont leurs vêtements ornés de cent quarante-deux pierres: émeraudes, rubis, saphirs, diamants et perles fines.

Pour avoir une idée de la perfection du travail, qu'on songe aux trois mille pièces qu'il a fallu ajuster: or, tout l'ajustage s'est fait par l'extérieur.

Les panneaux renferment plus de deux cents personnages qui sont exécutés d'une manière remarquable et se distinguent par leur attitude naturelle et vivante.



LES CLOITRES


La Cathédrale jouit du rare privilège d'avoir conservé intacts ses anciens cloîtres. Avec l'église, ils forment un carré autour du préau et cet ensemble, évocateur d'uni passé lointain, impose son recueillement parmi l'agitation de la ville.

Au milieu du préau, se dressait jadis sur un socle de pierre l'image du Christ en croix, signe distinctif des collégiales. A côté de la croix était une fontaine; le puits à l'eau très limpide existe encore.

Les ailes Est et Sud des cloîtres furent bâties au milieu du XVe siècle; toutes deux ont la même hauteur, mais la seconde est plus large; dès lors les nervures de la voûte se coupent en laissant au milieu une série de compartiments et ainsi le côté Sud paraît plus compliqué (fig. 12). L'aile Est a des arcades plus sveltes, l'autre produit l'impression d'être plus ornée, mais elles restent simples et distinguées. Leurs chapiteaux portent des figures sculptées d'hommes et d'animaux.

On a une très belle vue des cloîtres lorsqu'à travers la pénombre des arcades, on laisse plonger le regard dans la profondeur de l'église.

Que le côté Ouest (fig. 13) appartient à une autre époque se remarque tout de suite; il est plus riche, plus haut, plus large, délicatement orné selon les principes d'art du gothique flamboyant. Le long du mur extérieur existent des arcades aveugles, que viennent border des festons en pierre, délicatement sculptés. Les nervures prismatiques de la voûte se coupent en figures plus compliquées; à l'intersection des nervures pendent des clefs ornées d'écussons, de figures ou de masques grimaçants.

Au XX siècle, on a refait les meneaux et le réseau des fenêtres, hachés au XVIIIe: les types de ces fenestrages sont des copies d'une fenêtre de 1558, existant aux cloîtres de Notre-Dame à Maestricht. On a donné aux fenêtres des trois ailes les mêmes formes, empruntées au gothique du XVIe siècle.

A l'entrée de l'aile Ouest, en face du portail de la place Saint-Paul, se trouvent de fines sculptures qui datent probablement du XVe siècle (fig. 14). A cette époque, on érigea là un autel dédié à la Mère de Dieu et cette première travée forma comme le retable de l'autel.

La partie supérieure de l'arcade contient un fenestrage aveugle, reproduisant les formes les plus parfaites du gothique et comparable au fenestrage aveugle au-dessus de l'entrée Nord; les meneaux de ce fenestrage reposent également sur de petites consoles, taillées en bustes.

En dessous, une série de six culs-de-lampe présentent des sculptures qui semblent postérieures au réseau de la fenêtre aveugle. Chaque pierre est soutenue par un ou deux bustes de prophètes: curieux travail qui nous représente là ces visages expressifs de vieillards à longue barbe, dont les grands yeux profonds scrutent des textes sacrés.

Au-dessus de la porte qui donne accès à l'église de ce côté-ci, a été fixé un grand crucifix de la fin du XVe siècle (fig. 13). L'image de jésus est plutôt d'un réalisme exagéré; « le Sauveur, lèvres entr'ouvertes, le corps décharné, meurt en souffrant atrocement (*). »

Ce qui, dans ces cloîtres moyenâgeux, augmente l'impression de paix mystique, sont les pierres tombales encastrées dans les murs. Pierres gothiques du XVe siècle, monuments de la belle Renaissance ou modestes pierres que décore une croix, un blason, parfois une inscription en belles lettres gothiques: réunion impressionnante de monuments funèbres qui évoquent quatre siècles d'histoire de l'ancienne Collégiale

Dans le cloître Est sont rangées quatre grandes pierres tombales du XVe siècle: ce sont des tombes plates, portant l'effigie du défunt gravée au trait: tombes de Jacques Motton (+ 1410), de Gilbert de Loze de Bois-le-Duc (+ 1425), de Thierry de Hokelem (+ 1427) et de Gilles de Bissenhaye (+ 1444).

Ces pierres tombales sont remarquables sous plus d'un rapport. Les quatre chanoines sont représentés en grandeur naturelle, revêtus de leurs ornements liturgiques. N'est-il pas intéressant de pouvoir comparer ces représentations authentiques d'ornements du XVe siècle, si riches et si amples, à nos vêtements liturgiques actuels moins esthétiques?

Jacques Motton, chanoine et écolâtre, n'était que diacre. Il tient en mains le livre des évangiles, signe de l'ordre qu'il a reçu; il est revêtu de la dalmatique a longues manches qui est fendue aux deux côtés jusqu'à mi-hauteur; des bandes d'orfrois bordent les manches et la partie inférieure de la dalmatique.

Les trois autres portent l'ample chasuble du XVe siècle, qui recouvre entièrement les bras et enveloppe le corps de tous côtés; des bandes de broderies y dessinent une croix. Tous aussi ont des aubes parées et des amicts ornés d'un col de broderies.

Qu'on ne s'imagine pas que les lourdes pierres tombales ne recouvrent que des cendres inertes! Non, ces chanoines d'un autre âge se dressent là vivants au seuil de l'éternité: les yeux ouverts, le calice en mains, prêts à monter à l'autel pour exercer leur sacerdoce.

Ne ressemblent-ils pas aux saints de nos anciens vitraux? Comme eux, ils s'avancent sous une arcade gothique, enrichie de sculptures et ornée de festons; une main bénissante (51), symbole de Dieu, sort du sommet de l'angle: la mort en effet les introduit dans la vie bienheureuse et l'arcade triomphale représente la porte du ciel.

Il convient d'ajouter à ces pierres symboliques du XVe siècle, celle du chanoine Jean, surnommé Canon (+ 1529). Cette pierre est un travail remarquable de la Renaissance: des pilastres richement décorés soutiennent un dôme de gracieuses arabesques. Mais cette tombe, due à l'art nouveau, est restée fidèle à l'idée des siècles précédents. Sous l'arcade trilobée du dais se tient le chanoine, calice en mains et revêtu des ornements sacerdotaux: ses yeux ouverts contemplent la lumière invisible.

L'aile Ouest des cloîtres possède aussi ses monuments funèbres, toute une série du XVIe siècle, et exécutés d'après un modèle nouveau. Essentiellement ils se composent d'un groupe de figures, posées dans un encadrement mouluré avec colonnettes et fronton courbe interrompu. Et, quoique la forme de la tombe ait changé, elle exprime pourtant la même vérité religieuse.

Le défunt est toujours représenté vivant: dans toute cette rangée de monuments on le voit agenouillé sur sa tombe, revêtu de l'habit de choeur des chanoines de Saint-Paul, l'aumusse sur le bras gauche, Ce que le défunt regarde ce n'est pas la tombe, ce symbole de mort à côté de lui: mais avec foi et amour il fixe le crucifix qui se dresse comme un signe d'espérance. - Ainsi sont représentés le chanoine Meewen (+ 1575) à genoux devant le Christ en croix; - Gérard Boncourt (+ 1557) agenouillé devant un Calvaire: le Christ en croix entre Notre-Dame et Saint Jean (52); - Pierre Vogels (+ 1576) devant la tombe du Christ au moment où la Vierge et Saint Jean ensevelissent le corps sacré.

Chose admirable! Il n'y a ici qu'un mort: le Christ qui a subi la mort à notre place (53), Sur la tombe du chanoine Boncourt des anges viennent receuillir le sang du Rédempteur qui coule de ses plaies, figure de cette rançon divine dont se réclame le défunt: AlAE (animae) EIVS PARCE DEUS dit l'inscription: « Mon Dieu, soyez propice à son âme », car ce sont vos mérites qui lui font espérer la Vie.

A l'entrée de cette aile des cloîtres, un monument de 1570 représente le chanoine Baudouin Goff agenouillé devant une tombe, mais ce n'est pas sa propre tombe, c'est le sépulcre glorieux du Christ qui ressuscite d'entre les morts. Les yeux du chanoine ne fixent donc pas une vision d'épouvante, mais s'attachent avec amour à ce mystère de vie et de résurrection: un chrétien ne meurt pas, il vit éternellement. L'archivolte de la niche nous répète les mêmes paroles de joie: Celui qui croit au Christ ne peut mourir. EGO SVM RESURRECTIO ET VITA, QVI CREDIT IN ME ETIAM SI MORTUUS FVERIT VIVET, JO.

Le monument du doyen jean Stouten, que lui éleva en 1557 son neveu et successeur, reste dans la même tradition, Au point de vue artistique c'est une oeuvre de la plus pure Renaissance classique, Un bas-relief semi-circulaire sert de fronton; des pilastres ornés de bustes d'Hermès soutiennent la corniche; dans la partie inférieure, des femmes courbées qui pleurent font office de cariatides.

Le monument présente un sarcophage sculpté, supportant en haut-relief la représentation du cadavre (54); la décoration elle-même rappelle maint détail païen: chouettes aux ailes déployées, vases, branches d'acanthe, guirlandes de fruits ou encarpes, cornes d'abondance, disques, oiseaux: mais l'ensemble évoque de nouveau la défaite de la mort par la résurrection du Christ. Au fronton apparaît le Sauveur, sortant glorieux du tombeau; la sculpture centrale nous montre les soldats témoins de ce mystère; leurs gestes d'étonnement semblent indiquer au défunt l'image du Christ vivant.

Dans les pierres tombales postérieures, la sculpture exprimera moins parfaitement cette espérance chrétienne. Tel, du côté Est, le monument du doyen Ernest de Miche (+ 1641), fort belle oeuvre de sculpture. L'image du mort se présente en demi-relief sous une niche, dont les colonnes et les chapiteaux appartiennent à l'ordre composite. Comme ses confrères du XVe siècle, dont les tombes sont alignées à côté de la sienne, il est revêtu de ses ornements sacerdotaux mais ses yeux sont fermés, ses mains jointes sur la poitrine ne tiennent plus le calice, sa tête repose sur un coussin: hélas, ce n'est qu'un cadavre et non pas un de ces bienheureux qui contemplent la lumière éternelle!

Moins émouvant et moins chrétien encore est le monument du doyen Antoine Gal (+ 1683), dans l'aile Est, en face du précédent. Déjà l'inscription « hic jacent ossa et cineres... ici gisent les ossements et les cendres... » contraste avec les pierres tombales qui proclament que le défunt est vivant. Et la décoration est aussi triste que le texte une faux, des ossements, des anges pleureurs qui renversent leurs torches, et au milieu un squelette ailé et grimaçant porte un linceul avec les armoiries du chanoine.

Les autres pierres tombales, qui sont encastrées sous les arcades des cloîtres, n'ont pas de valeur spéciale: ce sont de simples pierres, ornées d'un blason, d'un nom, d'une inscription. Les monuments du XVIIIe siècle se composent presque tous d'une plaque en marbre blanc, où sont sculptés des flambeaux renversés ou un sarcophage.

Nous sommes loin de cet âge de foi que nous rappellent les premiers monuments funèbres: ici règne souverainement le paganisme classique. Très rarement l'inscription nous redit encore les paroles de consolation chrétienne (1731): « prie pour qu'il vive éternellement » - « il attend ici le repos et la résurretion » exspectans beatam requiem et resurrectionem,



TRÉSOR

Voir sur ce sujet
Les vicissitudes du trésor de Saint Lambert - Jean Puraye


La porte qui donne accès au trésor de la Cathédrale se trouve dans l'aile Est des cloîtes et mérite l'admiration (fig. 15). Le vantail de la porte est couvert de superbes rinceaux en fer battu et estampé; les pentures sont devenues ainsi une magnifique décoration, traitée avec une extrême finesse qui représente de gracieuses tiges se développant en feuilles et fruits.

Cette porte, qui provient de l'ancienne Cathédrale Saint-Lambert, date du XIIIe siècle.

La trésorerie contient des pièces remarquables: nous nous contenterons d'en énumérer les principales.

Buste de Saint Lambert au trésor de la Cathédrale de Liège

Le buste de saint Lambert mérite sans nul doute la place d'honneur (fig. 16). Ce chef-d'oeuvre d'art liégeois du XVIe siècle est dû à la munificence du Cardinal Erard de la Marck (1505-1538); Henri Soete ou Suavius l'exécuta de 1506 à 1512. (55)

La hauteur totale du buste est de 1,62 m, celle du piédestal 0.52 m, la base a 1,07 m de long sur 0,64 m de large. Buste et socle sont en argent doré, enrichi de pierres précieuses; la crosse en cuivre doré est moderne et remplace celle qui fut vendue lors de la Révolution française.

Saint Lambert est représenté avec tous ses ornements pontificaux et porte au-dessus de sa chasuble le superhuméral dont le privilège avait été concédé à nos anciens princes-évêques.

Le piédestal renferme dans ses six niches les principaux épisodes de la vie du saint, exécutés en haut-relief.

Des dais luxueux avec arcs-boutants, pinacles, colonnes couronnent chacune des niches et constituent un exemple de l'ornementation riche et délicate de la fin de l'âge gothique.

Sur le devant du piédestal se voit Erard de la Marck, agenouillé sur un prie-Dieu et revêtu de la cappa magna. Deux anges tiennent ses armoiries: une banderole déroule une invocation à saint Lambert, une autre le nom du donateur, - Contre les colonnettes qui soutiennent les dais se dressent de fines statues d'apôtres; aux angles de l'hexagone sont placées les statues plus grandes des saints évêques du diocèse.

Détail particulier: des colonnes interrompues émergent au-dessus du socle et sur ces bases on voit des anges tenant les instruments de la Passion; or, ces anges sont traités dans le genre de la Renaissance, tandis que les groupes du piédestal appartiennent à l'art réaliste et expressif du gothique du XVIe siècle.

A quoi devaient servir ces colonnes interrompues qui émergent au-dessus du soubassement? On estime généralement qu'elles étaient destinées à soutenir un dais au-dessus de la tête du saint: et, certes, ainsi l'effet produit eût été plus monumental. Pendant son travail, l'artiste aura dû modifier son plan pour une cause quelconque et aura ajouté les anges qui ne sont pas du plan primitif.

Reliquaire de Saint Georges et Charles le Téméraire au trésor de la Cathédrale

Important au point de vue historique est le Groupe Reliquaire de Saint Georges, en or repoussé et ciselé (fig. 17). En 1471, après les excès de la soldatesque bourguignonne, lors du sac de la ville, Charles-le-Téméraire offrit ce précieux reliquaire à la Cathédrale Saint-Lambert. Une riche chasuble, trois chapes, deux dalmatiques et quelques nappes d'autels faisaient encore partie de ce don expiatoire.

Le duc de Bourgogne est agenouillé sur un coussin et tient en mains un petit reliquaire hexagonal, contenant un doigt de saint Lambert. Il est représenté revêtu de son armure, cotte de mailles, cuissards, jambières et solerets à la poulaine; au cou pend le collier de la Toison d'Or; son casque et ses gantelets sont déposés devant lui.

Debout, derrière le duc, se tient saint Georges, patron des chevaliers, qui de la main gauche, présente son protégé et de la main droite soulève son casque. Sur le socle se lisent les initiales du duc et de la duchesse de Bourgogne: C(harles) M(arguerite) et la devise du Téméraire: JE L'AY EMPRI.

Ce groupe, haut de 0,54 m, est l'ouvre de l'orfèvre du duc, Gérard Loyet de Lille, qui y a travaillé pendant les années 1466-1467.

D'autres chefs-d'oeuvre:

Un ivoire du XIIe siècle, représentant les trois résurrections que citent les évangiles: celles de la fille de Jaïre, du fils de la veuve de Naïm et de Lazare (fig. 18).

Un reliquaire en or de la vraie croix contenant deux parcelles importantes; celles-ci, longues de quinze et de neuf centimètres, forment une croix à laquelle est attaché un Christ en or. Sur un fond d'or émaillé de fleurs sont debout Adam et Eve; ils ont le corps émaillé au naturel; plus tard on leur a ajouté une toison d'or. La relique elle-même serait un don du Pape Etienne IX (1057-1058) à la Cathédrale de Liège où il avait étudié; les émaux du reliquaire datent du XVe siècle.

Vraie Croix

Un tableau byzantin représentant la sainte Vierge et l'enfant Jésus; cette peinture est entourée d'un précieux cadre, finement découpé et orné de filigranes. Cette belle oeuvre remonte vraisemblablement au XIe siècle et fut donnée, dit-on, à la Cathédrale, par l'empereur Frédéric II (1715-1250).

Icone byzantine de la Vierge Conductrice (Hodegetria)

En outre, plusieurs calices remarquables, des ostensoirs, une belle Vierge d'argent en style Renaissance, une chasuble du XVe siècle, des manuscrits du XIIe siècle, etc.



L'EXTÉRIEUR DE LA CATHÉDRALE


Quand on considère l'église Saint-Paul de la Place du Roi Albert (côté Nord, fig, 1), on peut à peine s'imaginer qu'on a devant soi la façade d'un monument gothique du XllIe siècle: rien ne trahit la paisible simplicité qui caractérise l'intérieur, ni ce cachet de solidité quelque peu sévère propre aux monuments de la vallée mosane.

Le chanoine Thimister (56) proclame avec enthousiasme les mérites de cette façade Nord: « L'élégance et la profusion de son ornementation et le développement de ses grandes lignes architecturales constituent une des plus belles pages du style ogival secondaire, parvenu à son plus haut degré de splendeur ».

D'où provient ce contraste entre l'intérieur et l'extérieur? Hélas C'est le résultat de la restauration, exécutée vers 1850 par l'architecte Delsaux (57).

Et l'on peut se rendre compte une fois de plus que « restaurer » est souvent tout autre chose que rétablir ce qui était, que c'est au contraire remplacer l'ancien que l'on fait disparaître par du nouveau tout différent. Sans aucun doute, telle est la conception de Delsaux: il a rebâti la façade en style fleuri, d'après son plan.

Pour apprécier le contraste entre la nouvelle façade et l'ancienne, qu'on compare, avec le côté Nord actuel, la vue de la Collégiale Saint-Paul dans Les Délices du Pays de Liege (fig. 2), ou la façade Sud, telle qu'on peut la voir du milieu de la Place Saint-Paul. La fig. 19 nous indique précisément cette façade Sud; la vue a été prise du préau des cloîtres.

Cette façade Sud (fig. 19) produit une impression de simplicité et de force. La construction a gardé, bien distinctes, les traces des trois périodes: le mur de la grande nef, sans balustrade, mais orné d'arcatures trilobées sous la corniche, et les contreforts massifs avec leurs arcs-boutants appartiennent à la première période du gothique; le réseau des fenêtres hautes, du début du XV siècle, emprunte les formes du gothique rayonnant; enfin, les chapelles latérales trahissent, dans le réseau des fenêtres, l'influence du flamboyant: ces chapelles n'ont été bâties que les unes après les autres et peut-être que le fenestrage a été refait à la fin du XVe siècle.

On y a retrouvé aussi des restes de gargouilles celles-ci n'ont pas été rétablies et c'est regrettable, car, avec elles, cette façade si caractéristique eût encore paru plus originale,

A quoi ce côté Sud doit-il le privilège de n'avoir pas dû subir la réfection totale du côté Nord? A ce que « cette façade-ci est peu exposée aux regards du public »; elle ne fut donc restaurée qu'un demi siècle après l'autre et elle échappa ainsi au zèle indiscret des architectes précédents. Au-dessus des chapelles latérales, on a ajouté cependant une balustrade et les contreforts des chapelles ont été couronnés de pinacles. Comme ces chapelles appartiennent au gothique flamboyant, on émit le principe qu'on pouvait compléter la construction dans ce genre de là, ces « ornements » ajoutés. Mais cette façade Sud l'emporte incontestablement sur l'autre par son cachet d'élégance solide, sévère et simple.

Lorsqu'on entreprit, vers 1850, les grands travaux de la Cathédrale, on ignorait complètement ce qu'est une restauration discrète. L'architecte Delsaux, qui a rendu, comme précurseur et comme technicien, des services inappréciables à la conservation des monuments gothiques, est encore, à ce moment, plongé dans l'ivresse du romantisme. Il néglige ce qu'il y a de particulier au style local, veut introduire l'unité du style et l'unité de décoration « en prenant pour point de départ les parties les plus ornées qui sont l'abside et les chapelles ».

Se basant sur ce principe, il ajoute arbitrairement une double galerie avec pinacles au-dessus de la grande nef et au-dessus des chapelles latérales; les contreforts massifs avec leurs arcs-boutants ne sont plus reconnaissables, tant tout cela est devenu grêle et surchargé de crochets et de fleurons bref, cette façade qui était jadis simple et puissante se présente désormais comme délicate et ornée selon les formes les plus luxueuses du gothique français.

Ces changements il faut e reconnaître - n'ont pas été exécutés sans opposition. Quand le Chapitre approuva le plan de l'architecte Delsaux, il fut stipulé qu'un autre architecte examinerait ce plan. C'est ainsi qu'on demanda l'avis de F. C. Gau (59), architecte de l'église Sainte-Clotilde à Paris.

Les deux architectes concevaient la restauration d'une manière presque diamétralement opposée; la Commission Royale des Monuments donna la préférence au plan de Delsaux et ce plan fut exécuté.

C'est pourtant un fait digne d'être signalé que - déjà en 1850 - Gau défendait le principe qui est universellement admis maintenant « le vrai principe d'une bonne restauration est de respecter et de conserver le style de chaque époque ».

La correspondance entre les deux architectes (60) est par ailleurs intéressante parce qu'elle nous livre le fond même de leur pensée et nous permet de voir l'état d'esprit qui a présidé à cette restauration. Pour justifier les changements que son plan propose, Delsaux commence par prétendre que la construction a subi tant de modifications qu'il est impossible de tout rétablir dans l'état primitif mais voilà que, serré de près sur ce point, il livre toute sa pensée: parfois, on doit donner un peu d'élasticité au principe de la conservation intacte des monuments, dit-il, et, avec un enthousiasme romantique, il célèbre « le grand principe de l'harmonie qui doit dominer l'esprit de l'artiste ». « je suis porté à croire qu'ils (c'est-à-dire contreforts et arcs-boutants) doivent être reconstruits dans un style en harmonie avec la majeure partie de l'édifice ».

Et voici ses dernières paroles: quant à moi, je n'hésite nullement: les galeries que je propose n'eussent-elles jamais existé à Saint-Paul, je voudrais les voir placées; ces galeries sont absolument nécessaires « au complément d'un édifice », on les retrouve à toutes les grandes églises, « ces chefs-d'oeuvre qui me servent plutôt de modèle et de point de départ ».

On doit reconnaître cependant que cette façade Nord (place du Roi Albert, fig. 1), - malgré l'erreur fondamentale de sa restauration - donne un aspect gracieux à la Cathédrale et par ses belles pierres de taille, ses contreforts, ses pinacles et sa double balustrade charme l'oeil qui l'examine.

L'oeuvre de Delsaux est remarquable sans doute, mais cette restauration n'en est pas moins une erreur.

L'abside et le choeur de l'église Saint-Paul (fig. 20) ont été restaurés de la même manière que la façade Nord. Au XIVe siècle, l'abside polygonale a été bâtie en pierres de sable - non en granit - mais cette différence est à peine visible, car les pierres jaunes ont été recouvertes d'une couche de ciment, qui leur donne l'aspect de pierres de taille et empêche leur effritement.

Les deux contreforts extrêmes de l'abside reposent sur des encorbellements afin de ne pas obstruer complètement l'étroite rue Saint-Paul, derrière le choeur de l'église.

Comme nous l'avons indiqué plus haut, la tour de la Cathédrale ne fut pas achevée au XVe siècle, La partie ancienne assez massive et qui atteint la hauteur de l'église, cadre bien avec l'aspect solide et simple de la façade Sud. Qu'on remarque les contreforts placés aux angles de la tour: ils doivent contrebuter deux murs à la fois, Au XIIIe siècle, on aurait élevé un contrefort de chaque côté de l'angle.

Au dessus de cette base vigoureuse, on ajouta en 1811-1812, un nouvel étage en pierres de sable, tirées de l'ancienne Cathédrale Saint-Lambert: c'est là que sont suspendues les cloches; de mauvaises fenêtres à arc brisé sont garnies d'abat-sons... mais tout cela est bien étranger au domaine de l'art!

La flèche octogone repose sur cette base carrée: aux angles se dressent quatre clochetons. La croix atteint à la hauteur de 89,55 m. Par cette forme de la tour et de la flèche, les Liégeois ont voulu conserver un souvenir de leur magnifique cathédrale Saint-Lambert.

De la place Saint-Paul, on a une vue complète de toutes les constructions de la cathédrale: église et dépendances. Ce côté Ouest montre les contreforts de la façade non modifiée les murs extérieurs des cloîtres qui sont tout simples. L'ensemble a conservé ici son aspect vrai.

Le long de la place s'étend le mur extérieur du cloître Ouest, mur sans ornements qu'auraient dû compléter probablement d'autres constructions. Mais, entre ce mur et l'église, s'ouvre un gracieux portail, richement orné (fig. 21).

Ce portail, comme nous l'avons dit, date à peu près de l'an 1540: il appartient aussi à l'art gothique, quoique son ornementation soit en grande partie empruntée à la Renaissance.

L'arcade d'entrée, de style ogival, est entourée d'une large bande, ornée de motifs Renaissance.

Au-dessus de l'arcade s'étend une rangée de sept niches avec consoles, dais, arcatures trilobées, fleurons, le tout en gothique flamboyant. Dans les écoinçons entre la galerie et l'arcade rien que des sculptures Renaissance: une série de masques, médaillons sculptés figurant des effigies d'empereurs ou simples copies de médailles antiques; deux bas-reliefs la Naissance du Christ et la Résurrection (dont l'ornementation recèle maint détail classique). Entre ces diverses parties se dessinent les gracieux méandres de guirlandes de feuilles ou d'arabesques d'acanthe.

Les piliers, consoles, niches et baldaquins latéraux sont, de nouveau, propres au gothique du XVIe siècle, tandis que le médaillon, au centre du fronton, est un motif de la Renaissance. Ce bas-relief central représente la Conversion de saint Paul, sculpture qui reproduit avec plus ou moins de fidélité l'oeuvre originale. Le médaillon, en effet, fut refait par Peeters d'Anvers en 1914. Le moulage en plâtre de l'ancien bas-relief est conservé au Musée diocésain.

Dans l'angle supérieur du pignon, en un petit panneau rectangulaire, sont sculptées les armoiries du prince-évêque Corneille de Berghes (1538-1544).

Qu'on veuille remarquer combien discrète et délicate a été la restauration de ce côté Ouest de la Cathédrale, effectuée sous la direction de M. Lohest en 1914. Un tel travail peut être cité en exemple.

Pour l'histoire de l'art au XVIe siècle, il n'est pas inutile de comparer le portail Ouest de Saint-Paul (fig 21) avec le portail de l'église Saint-Jacques (fig. 22): ce dernier ne fut construit qu'une vingtaine d'années à peine après celui-là (de 1558 à 1560) et il constitue une oeuvre d'art de la plus pure Renaissance, ne gardant plus dans cette harmonieuse façade classique aucun vestige de l'ancien art médiéval. A Saint-Paul, au contraire, c'est un « portail flamboyant que l'on a habillé d'ornements à la mode d'Italie » (61). L'église Saint-Paul annonce sans doute l'arrivée toute proche de la Renaissance, mais dans ses constructions, elle garde, bien distinctes, les trois périodes du gothique et, jusque dans ce dernier portail, elle reste fidèle à l'ancien art.

La collégiale Saint-Paul est donc devenue depuis un siècle la Cathédrale de Liège, mais qu'on n'oublie pas que pendant tout le moyen-âge, Saint-Paul n'a été qu'une église secondaire; notre Cathédrale était la magnifique église Saint-Lambert.

Lorsqu'à la fin du XVIIIe siècle, l'ancienne Cathédrale fut démolie et qu'il fallut choisir une autre église pour le chef du diocèse, on n'eut que l'embarras du choix: les églises Saint-Paul, Saint-Jacques, Saint-Martin et d'autres répondaient aux exigences d'une belle Cathédrale.

Quelle ville pourrait, comme Liège, offrir autant d'églises monumentales

Dans ces quelques pages, nous avons loué la construction et les oeuvres d'art de cette église secondaire qu'était Saint-Paul, et c'est justice. Mais que n'eussions-nous pas eu à dire de la valeur artistique et des richesses de notre grandiose


CATHEDRALE SAINT-LAMBERT!


(1) Cette légende semble inventée pour expliquer l'absence de tombeaux à l'intérieur de l'église. Cependant, depuis le XIV" siècle, plusieurs hauts dignitaires de l'église ont été enterrés dans les chapelles, celles-ci n'étant pas comprises dans l'église proprement dite. Ces monuments funéraires sont encastrés actuellement dans les parois des cloîtres.

(2) Vita Notgeri, c. 3, et KURTH. Notger de Liege, t. I, p. 152.

(3) Op. cit., p. 321.

(4) Cartulaire de Saint-Paul, p. 95.

(5) Cartulaire, p. 95.

(6) THIMISTER. Histoire de l'église collégiale de Saint-Paul, p. 586. - Ce candélabre fut enlevé et vendu en 1666, parce qu'il cachait le nouveau maître-autel.

(7) THIMISTER, op. cit., p. 590: « et inter haec fiebat turris ecclesiae, tempore residentiae Wilhelmus de Esche, qui fertur sub primario lapide scutum vetus posuisse ».

(8) Les dates 1528-1557-1576, qu'on retrouve dans les voûtes, sont simplement les dates de la peinture.

(9) Utinam adessent sumptus ad ejus consummationem quam omnipotenti committo.

(10) THIMISTER, Histoire, p. 594.

(11) THIMISTER. Essai historique, p. 65.

(12) Ecusson: une bande chargée, en chef, d'un croissant posé dans le sens de la bande. - Ce chanoine, d'après le chevalier POULLET, dans l'édition de Van den Berch, t. I, p. 95, « était fils naturel de Henri de Hemricourt, seigneur de Wilrisi, maître d'hôtel de la Reine de Hongrie ». Messire Henri de Hemricourt, chanoine de Saint-Paul, est cité en 1504 et 1509 dans les chartes du monastère du Val-Benoît (B. I. A. L., t. XXX, pp. 355 et 371).

(13) Le doyen dit: ecclesia collegiata Sancti Pauli penitus et radicitus denoscitur spoliata. Cartulaire, p. 486.

(14) Cartulaire, p. 492.

(15) Né en 1719, devint chanoine de Saint-Lambert en 1759, en 1761 prévôt de Saint-Paul et, l'année suivante, président de la Chambre des finances. II mourut en 1777 et fut enterré dans le vieux choeur de Saint-Lambert.

(16) Cette charte est publiée par THIMISTER: Cartulaire, pp. 177-179. On y énumère les différents délits que les enfants ont coutume de commettre soit à l'école, soit au choeur, et les punitions qu'on peut leur infliger à l'église: verbis corrigere, per aures trahere, vel alapam dare, ce qui ne doit pas empêcher l'écolâtre de les punir encore en classe: potent illos eosdem in scolis postmodum si velit acrius cerberare.

(17) L'histoire de l'église Saint-Paul pendant la Révolution est exposée d'après GOBERT. Liége à travers les âges, t. IV, pp. 467-470.

(18) « L'on a rarement avec plus de bonheur enlaidi une vénérable et belle chose. L'architecte qui a réalisé cela pouvait mettre sa chemise aux enchères: ce fut un homme heureux. » (H. COLLEYE. Dans la paix des vieilles églises, p. 14.)

(19) Voyez L. HENDRIX. L'Eglise Saint-Jacques à Liège. Liège, 1928.

(20) BULLETIN DE LA GILDE DE SAINT-THOMAS ET DE SAINT-LUC, f. XI.

(21) La largeur de la nef entre les premières colonnes est 11 mètres 20.

(22) THIMISTER (Histoire, p. 517) rapporte le texte d'un vieux manuscrit « Anno 1674, 24 decembris, fuit erecta aquila in medio chori supra columnam marmoream, quae cum pede marmorea constat plus quam quadringentis florenis brabantiae cupro et manufactura inclusis ».

(23) Le grand tableau du maître-autel resta à la cathédrale: l'Assomption qui orne l'autel de Seraing fut peinte par Chauvin. - Cet autel, en marbre jaspé et d'ordre corinthien, fut consacré à Saint-Paul en 1664. Le Christ et les anges adorateurs qui surmontent l'autel sont de Cornélis Van der Werck (1665-1742).

(24) Il est vrai que le projet total comportait en plus un haute flèche centrale qui aurait malencontreusement caché la verrière; elle n fut pas exécutée.

(25) Cette peinture fut encore renouvelée en 1860. En 1895, on hésita sur le parti à prendre: repeindre à l'huile d'un ton gris uniforme, « repeindre richement » comme la polychromie du choeur de Saint-Paul exécutée en 1892... On s'arrêta à un troisième parti: dérocher et rendre aux pierres leur teinte naturelle.

(26) Sur la table de droite on peut lire: DEVM TIME ET PR-OXIM-VM.

(27) Le 17 décembre 1500, il devint chanoine de Saint-Lambert; plus tard chancelier et prévôt de Saint-Paul; il donna la verrière en 1530 et mourut le 17 décembre de l'an 1530.

(28) Ecu: d'hermine au chevron de gueules, chargé de trois besans d'or.

(29) Jean Stouten, né à Zonhoven, devint doyen en 1519 et mourut en l'an 1556. L'église Saint-Paul lui doit encore la verrière centrale de l'abside: Le Christ en Croix. C'est lui aussi qui commanda le premier livre édité à Liège: Brevarium in usum venerabilis ecclesiae collegiatae Sancti Pauli Leodiensis.

(30) E. THYS. Guide historique et artistique, Liège, 1873.

(31) L, ABRY. Les hommes illustres de la nation liégeoise, p. 294.

(32) La procession conduisait les Religieuses du couvent de l'Espérance à celui de Cornillon; cinq évêques y prirent part. (DARIS, p. 176.)

(33) L'Eglise de Saint Paul, p. 13.

(*) Jules HELBIG. La Peinture au Pays de Liége, édition de 1903, pp. 162-165.

(34) Liège. Guide illustré, p. 88.

(35) Ce Petrus a Molendino, originaire de Nimègue, était l'oncle de l'abbé de Saint-Jacques, Conrardus a Molendino (1471-1474). Lors de la bénédiction abbatiale de ce dernier, l'évêque suffragant de Liège avait prêché un si long sermon que tous s'assoupirent omnes attediati sunt... Tel est le récit du chroniqueur.

(36) Cette touchante image du chanoine, agenouillé aux pieds de Marie, était attachée autrefois au dessus de la pierre tombale de Van der Meulen. La pierre se trouve dans le pavage du collatéral Sud: elle porte, sculptée au centre, la figure de l'Agneau divin et l'inscription toute simple: Agnus Dei qui tollis peccata mundi, miserere nobis.

(37) Conférence manuscrite: Les Peintures de la Cathédrale de Liège, p. 3. Plus loin nous empruntons encore d'autres détails à cette conférence.

(38) Voyage à Liege et à Maestrect en1615, édition des Bibliophiles, pp. 186-187.

(*) HELBIG, o. c., 1903.

(39) Actuellement: église du Saint-Sacrement, boulevard d'Avroy.

(40) J. S. RENIER. Inventaire des objets d'art, p. 260.

(41) B. S. A. H., t. X, p. 332.

(42) Chanoine LUCAS. L'Eglise de Saint-Paul, p. 10.

(43) L'Abbé J. Moret. Notice suc Jean Del Cour, p. 19.

(44) Dans la paix des vieilles églises, p. 13.

(45) D'après GOBERT (op. cit., p. 471, en note), l'ancienne chaire est actuellement à l'église des Pères Rédemptoristes. En parlant d'elle, on répète l'éternelle remarque qu'elle était « peu en harmonie avec le style de la cathédrale ».

(46) Presque tous les livres l'attribuent pourtant à son frère J. Geefs.

(47) L'idée symbolique que la chaire doit réaliser a certainement été donnée par le Chapitre. Cependant, nous n'avons pas retrouvé dans les registres de la cathédrale les indications données à l'artiste. Il est noté simplement, au 24 janvier 1846, que cette statue de l'Ange sera exécutée en chêne de Russie, d'après un modèle qui devra être préalablement approuvé par Mgr l'Evêque et le Conseil de Fabrique. - Le Registre aux délibérations (27 mai 1859) donne le contrat entre le Chapitre et les sculpteurs Goërs (ou Goyers) de Louvain pour une nouvelle stalle épiscopale: le document stipule tous les détails des sculptures et des statuettes qu'on devra exécuter. Cette stalle a été exécutée, mais dès l'achèvement des nouvelles stalles du choeur, on donna à l'église de Terwagne le prie-Dieu, ayant fait partie de la stalle épiscopale, ainsi que les trois bas-reliefs qui le décorent et qui sont l'oeuvre des frères Goërs de Louvain, 11 janvier 1864. « Mgr l'Evêque s'intéresse fort à cette église, à l'ameublement de laquelle il a contribué. »

(48) Registre des délibérations, f° 69.

(49) Ibid, f° 93.

(50) La châsse a coûté soixante mille francs. B. S. A. H., t. X, p. 362.

(*) DE BORCHGRAVE. Sculptures mosanes, p. 127.

(51) Pierres de Jacques Motton et de Gilbert de Loze.

(52) La surface de cette pierre est entièrement sculptée; elle porte comme ornements des arcatures redentées, des fleurs et feuillages stylisés.

(53) E. MALE. L'Art Religieux en France, t. III, p. 409.

(54) Cette statue a disparu depuis quelques années; sa place est encore bien marquée sur le monument; dans l'ouvrage de Thimister on peut en voir une représentation.

(55) Cette oeuvre fut commandée le 29 décembre 1505, le jour même où Erard de la Marck fut élu prince-évêque; la dépense totale s'éleva, dit-on, à plus de cent mille écus.

(56) Essai historique, pp. 156-166.

(57) L. HENDRIX. Comment fut conçue la restauration de la Cathédrale de Liège vers 1850, dans LEODIUM, 1929, pp. 7 à 18.

(58) Voir LE0DIUM, Loc. Cit., p. 15.

(59) Gau naquit à Cologne en 1790 et mourut à Paris en 1853. On lui doit les plans de l'église Sainte-Clotilde à Paris, dont il commença la construction en 1846: cette église n'est qu'un pastiche du style ogival du XIVe siècle.

(60) Voir LEODIUM, loc. cit., pp. 10-13.

(61) C'est ainsi que C. ENLART (Manuel d'Archéologie, p. 772) appelle les premiers portails de la Renaissance, et il ajoute: « A distance, ils ont l'aspect du style français; de près, les détails sont transformés en ornementation à l'antique ».

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