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Collégiale Saint Denis à Liège

L'église St-Denis à Liège

par Richard FORGEUR


Remacle Leloup - Collégiale Saint Denis à Liège


HISTOIRE


L'église Saint-Denis fut fondée en 987, sous le règne du prince-évêque Notger, par trois frères: Nithard, chanoine et coste (1) de la cathédrale Saint­Lambert, jean et Godescalc. Ils y installèrent vingt chanoines, nombre élevé peu après à trente.

Les chanoines vécurent en commun jusqu'au 12e siècle, puis délaissèrent le dortoir et le réfectoire pour s'établir dans des maisons situées aux alentours de la collégiale. Ils étaient placés sous la direction purement nominale d'un prévôt et dirigés par un doyen. Ils nommaient un chantre, un coste et un écolâtre (2).

Le personnel de la collégiale comprenait en outre 33 chapelains, des chantres, des musiciens et 8 enfants de choeur apprenant le chant et la musique chez le maître de chapelle chez qui ils habitaient. Un de ceux-ci fut André-Modeste Grétry qui demeura une dizaine d'années à Saint-Denis, suivit les cours de l'école du chapitre et y apprit la musique avant son départ pour Rome.

La collégiale n'étant pas paroissiale, les offices paroissiaux étaient célébrés dans l'église voisine de Sainte-Aldegonde, située contre le flanc sud du choeur; un des chapelains y était curé.

Au XVIIe siècle, le chapitre compta deux hommes remarquables: son doyen Nicolas Lampson (+ 1635), humaniste, et Pierre-Paul Valdor, fondateur de l'hospice des incurables (+ 1694).

L'annexion de la Principauté à la France amena la suppression du chapitre (1797), la disparition de l'argenterie, du carillon et des cloches. En 1801, l'église devint paroissiale pour les territoires des anciennes paroisses supprimées: Sainte-Aldegonde, Saint-Étienne, Saint-Gangulphe, Sainte-Catherine et Sainte-Madeleine.

De l'église construite vers 987 par Nithard, il ne reste que la grande nef et le bas du transept nord. Les fenêtres hautes sont les mêmes que celles de Saint-Servais de Maastricht (vers l'an 1000).

Au XIe siècle ou au début du 12e siècle, on édifia la tour avec chapelle Saint-Michel au premier étage, ouvrant sur la nef par une grande baie.

A la fin du XIVe siècle, on bâtit le choeur actuel, en gothique, aux lignes très pures. A l'époque gothique, on adjoignit des chapelles aux bas côtés, dont certaines à deux étages (3) et on construisit le haut de la tour. Au XVIe siècle, on condamna la baie de la chapelle Saint-Michel vers la nef pour y placer les orgues actuelles (1589). L'église resta romano-gothique jusqu'à la fin du XVIIe siècle. Vers 1700, démolition des piliers rectangulaires de la nef, élargissement des arcades posées dès lors sur des colonnes toscanes. Construction de la voûte de la nef (1705), reconstruction de la voûte du bras sud du transept (1723), des trois ailes du cloître sud (1717-1726), érection du portail de la rue de la Cathédrale (1724), des portails intérieurs du cloître (1727 et 1734), transfert du jubé sous les orgues, installation du nouveau maître-autel et décoration de toutes les nefs en stuc, style rocaille (1747), reconstruction des chapelles nord (1749), suppression des pierres tombales et leur remplacement par le pavé actuel (1750).

Vers 1803, démolition des annexes du nord et de Sainte-Aldegonde; édification du portail extérieur nord. Au XIXe siècle, démolition de l'ancien jubé et réouverture du rez-de-chaussée de la tour; placement des vitraux du choeur (1852); en 1902, démolition des stalles, abaissement du niveau entier du transept. L'église garde des témoins de chaque époque presque; elle a été dégradée, parfois mal restaurée, agrandie, repeinte, transformée, mais nous est parvenue riche de sa longue histoire. Si elle a perdu son unité et, en partie, son caractère médiéval, elle reste attachante par l'atmosphère qui règne sous ses voûtes. Débarrassée des quelques médiocres statues à la manière de Saint-Sulpice, qui la déparent, elle serait harmonieuse dans sa diversité, comme elle est émouvante par les souvenirs qu'elle conserve des étapes de son existence quasi millénaire.



DESCRIPTION EXTÉRIEURE


Se rendre au milieu de la place Saint-Denis.

L'église est orientée et mesure environ 57 m. de long sur 32 m. de large.

Elle a cinq travées et cinq nefs. Les murs gouttereaux de la grande nef datent des environs de l'an 1000. La partie inférieure des fenêtres est cachée par les toits des bas côtés.

On voit, à gauche, le très beau choeur construit en pierres de Lorraine (fin du XIVe siècle) dont le toit dépasse très sensiblement celui de la nef; le décor sculptural a fortement souffert des intempéries.

Le mur inférieur du transept est en grès houiller, la partie supérieure a été reconstruite en calcaire. A droite du toit du transept, un contrefort étaie la voûte de la croisée. Les chapelles anciennes des bas côtés furent reconstruites en 1749; cette date figure sur le claveau supérieur de la troisième fenêtre.

Portail Louis XVI, provenant de l'ancienne église paroissiale Saint-Thomas, placé vers 1805.

La tour carrée, en grès houiller, flanquée de deux tourelles d'escalier, est dépourvue de porte à l'extérieur (XIe siècle). La partie supérieure consiste en un massif rectangulaire en bois, recouvert d'ardoises; elle pourrait remonter à la fin de la période gothique. Les tourelles d'escalier sont, dans le haut, à pans coupés et non sur plan circulaire comme elles l'étaient généralement à l'époque.


Prendre à droite pour longer la tour.

Les deux fenêtres du rez-de-chaussée, à la face ouest, sont fortement restaurées. Celle du premier étage, cintrée vers l'intérieur, est rectangulaire à l'extérieur. Le haut de la tour accuse la trace de nombreux remaniements exécutés sans souci d'unité.


Avancer de quelques pas pour voir la face sud,

semblable à celle du nord, mais surmontée encore d'une belle corniche en pierre de sable, taillée en damier (billettes) (XIIe siècle). Cette bande sculptée et la forme des fenêtres et de leurs arcs de décharge sont, en tous points, semblables à celles de la collégiale Saint-Servais de Maastricht (Xe et XIIe siècles).

De la rue de la Cathédrale, on voit le portail Louis XIV (1726) et un long mur où jadis s'adossaient des maisons de musiciens et de chantres du chapitre.


Reprendre à gauche, longer le bas de la tour et entrer dans l'église par le portail Louis XVI.



DESCRIPTION INTÉRIEURE


On est aussitôt frappé par la largeur de cette église à cinq nefs et par sa riche décoration de style rocaille (1747).

Au mur, à droite, un petit bas-relief ovale en marbre blanc: la tête du Christ dans un encadrement en marbre noir (XVIIe siècle). Au-dessus, une copie de la Sainte-Cécile de Raphaël (Vatican) par Bruls (vers 1845). A côté de cette peinture, la Parenté de jésus, peinte, en 1691, par Englebert Fisen (1655-1733).

En dessous, une niche en marbre noir porte, de même que celle qui lui fait pendant, les armoiries du prévôt de Saint-Denis, Michel Clercx (1693-1734). La niche contient une belle statue en bois représentant saint Grégoire le Grand (1757); c'est une oeuvre du meilleur sculpteur liégeois du XVIIIe siècle, Guillaume Evrard (1709-1793).


Pénétrer, à droite, sous la tour.

Deux fenêtres l'éclairent à l'ouest. Le rez-de-chaussée est couvert de quatre voûtes d'arête reposant sur une colonne à chapiteau cubique (renouvelée en 1885). Fonds baptismaux néo-romans (1887). Sous les voûtes, Jules Helbig peignit, en 1887, les baptêmes du Christ, de Craton, de l'empereur Constantin et de Clovis. Entre les deux fenêtres, un Saint-Denis en bois, du XVIIIe siècle.

En sortant de la tour, on voit à gauche une très grande effigie de saint Pierre assis, en bronze (1887), copie de la célèbre statue de la basilique vaticane.


NEF CENTRALE


De cet emplacement, on a une belle perspective sur l'église, où l'opposition entre la nef romane, habillée de stucs Louis XV (1747) et le choeur gothique du XIVe siècle se marque nettement, l'un dans sa richesse décorative, l'autre dans la sobriété et l'élan de ses lignes structurelles. La nef a malheureusement perdu ses piliers, remplacés, en sous-oeuvre au XVIIIe siècle, par des colonnes en calcaire. Celles-ci supportent des arcades élargies au XVIIIe siècle et une épaisse muraille romane. Les fenêtres primitives subsistent, enrobées dans le stuc et garnies de verrières colorées très légèrement en vert-clair et rose. Sous les fenêtres, beaux bustes des apôtres en hauts-reliefs, exécutés en 1917 dans le style du XVIIIe siècle.

Une voûte a remplacé, en 1705, l'ancien plafond de l'époque romane.

Au centre de la voûte se trouvait un grand tableau ovale, peint par Carlier, l'un des meilleurs peintres liégeois du XVIIe siècle, représentant le martyre de saint Denis (1666). Cette oeuvre, enlevée en 1794, fut reconstituée en 1806 par Lovinfosse, d'après une esquisse.


CHAIRE DE VERITE

Belle chaire Louis XIV, (vers 1720-30) de l'ancienne église paroissiale Sainte-Ursule (au Palais). Trois bas-reliefs la décorent: le Christ prêchant, jésus au milieu des docteurs et Dieu purifiant les lèvres d'Isaie par un charbon ardent. Ces panneaux sont séparés par des statuettes du Bon Pasteur et des quatre évangélistes, les socles de ces derniers portant leur symbole respectif: pour saint jean, l'aigle qui souligne la divinité du Christ; pour saint Mathieu, l'homme qui insiste sur l'humanité du Christ; pour saint Marc, le lion et pour saint Luc, le boeuf parce que ces deux derniers écrivains commencent leur évangile par des évocations de ces animaux.

Les bancs, de style Empire, datent de 1805.

Du milieu de la nef, on peut admirer le buffet d'orgues. C'est un des plus anciens du pays (1589).

En bois noir, à riche décoration dorée, avec trois tourelles, il contient un instrument encore en partie de l'époque. La tribune du jubé date également du dernier quart du XVIe siècle. Elle a été avancée au début de ce siècle, en surplomb de la nef. Les musiciens prenaient place sur le jubé placé à l'entrée du choeur. Sur le positif, statues de saint Denis décapité et des saints Rustique et Eleuthère.

Les cloches sont modernes.


Se diriger vers la grande statue de saint Pierre et prendre à gauche.

On voit, au mur, la niche faisant pendant à celle de saint Grégoire; elle contient une belle statue de saint jean Népomucène (1757).

A gauche, une dalle en marbre blanc rappelle l'épitaphe de Nithard, chanoine et coste de la cathédrale Saint-Lambert et co-fondateur, avec ses deux frères jean et Godescalc, du chapitre de Saint­Denis (1751).

Au-dessus, une grande peinture du XVIIe siècle: le martyre de sainte Catherine. On l'attribue à Fisen (4). Plus loin, une petite copie du baptême du Christ de Carlier, qui se trouve à la cathédrale.

Un grand portail en marbre, don du prévôt Michel Clercx I (1727), donne accès au cloître.


CLOITRE

S'engager dans l'aile occidentale (1726).

A droite, des annexes: ancienne compterie. Une niche Renaissance en bois (entre 1600 et 1650) contient une statue de saint Trond, de la fin du XVe siècle. Un crucifix en fonte, XIXe siècle, dans le style du XVIIe siècle. A gauche, l'aile sud du cloître (1724). Au mur, une peinture: la déploration sur le corps du Christ, copie de Fra Bartoloméo, par Bruls. Une grille condamne l'entrée mais laisse voir l'aile est du cloître (1717). Au fond, deux colonnes ioniques en marbre noir. Au-dessus, les armes du prévôt Miche! Simonis (1691) (5) Grande statue de saint Quirin, en bois sculpté (vers 1600); il tient son crâne entre ses mains, évocation de son martyre.

A gauche, trois pierres tombales dans le mur, les seules qui aient échappé à leur destruction massive en 1750 (voir description ci-dessous).


BAS COTE SUD

Rentrer dans l'église et prendre à droite, le long des autels du bas côté sud.

Sur la première colonne, cadre en bois, style Régence, contenant les noms des anciens membres de la confrérie Saint-Roch.

Les chapelles, édifiées en 1751, contiennent de petits autels en marbre de Saint-Remy, avec retables peints par Henri Deprez (1729-1797).

La première chapelle a pour retable une peinture ovale: la Sainte Trinité. Vitrail montrant saint François-Xavier (XIXe siècle).

La seconde chapelle fut prolongée au 19e siècle. Elle contient encore un ancien autel. Une jolie pieta du début du 16e siècle rappelle Notre-Dame de Saint-Remy, conservée à l'église Saint-Jacques (XVIe siècle). Sur l'autel, un pélican en bois doré provenant du maître-autel (XVIIIe siècle).

Vitrail: Notre-Dame des Sept Douleurs (XIXe siècle). La chapelle est fermée par une grille Louis XIV, en fonte, portant l'ancre de l'Espérance et les deux clés de saint Pierre.

A côté, un vitrail dédié à saint Vincent de Paul (XIXE siècle); puis, la porte du cloître, au milieu d'un grand portail (1727) dû au même donateur que le premier (style Louis XIV).


AILE ORIENTALE DU CLOITRE (6)

Cette aile date de 1717. Au mur, les trois pierres tombales signalées ci-dessus: 1e, Guilleaume Dreyens, chapelain et claustrier (+ 1554), repose dans une décoration Renaissance, comme son voisin de la 2e dalle funéraire: Gilles de Blocquerie, chanoine et chantre (+ 1647), en chasuble gothique, dont la tête est très expressive; enfin, la 3e: Pierre Rossius de Liboy et son épouse, avec leurs armoiries (1655).

A côté de la porte du cloître, au dessus de l'autel moderne de saint Antoine de Padoue, Christ en croix, tableau du XVIIe ou du début du XVIIIe siècle. Sur la dernière colonne, cadre en bois, style Régence, contenant les noms des anciens membres de la confrérie des trépassés. A côté de l'autel, un panneau du XVIe siècle représente joseph et Marie adorant l'Enfant jésus et, au revers, jésus devant Caïphe. En face, un tableau de mêmes époque et dimensions montre l'Ecce Homo et, au revers, l'Annonciation. Ces tableaux, d'un peintre inconnu, proviennent des volets du retable du transept. Certains auteurs les considèrent comme étant des oeuvres de Lambert Lombard (1506-1566).


BRAS SUD DU TRANSEPT

Pénétrer dans le croisillon sud du transept.

Les murs sont encore romans, au moins dans le bas. Ce croisillon, sur plan carré, ne fut voûté qu'en 1723. Cette voûte, en plâtre, imite très bien celle en pierre du transept nord. Elle fut peinte en 1917, comme celle du nord, en imitation de briques. Les clés représentent une tête d'évêque entre deux têtes d'homme. Le pignon du transept, qui avait deux fenêtres romanes, fut remplacé par un mur en briques éclairé par une seule fenêtre gothique (XIXe siècle). A droite, au dessus d'un confessionnal moderne, l'Annonciation, peinture du XVIIIe siècle.

Sous la fenêtre, un grand crucifix en bois polychrome, sculpté vers 1690 et attribué à Comélis Van der Werck, sculpteur liégeois (vers 1665-1742). A ses pieds, les armoiries du prévôt Simonis. Derrière, une peinture de Lovinfosse: saint jean, Notre-Dame et sainte Madeleine. Dais à lambrequins en bois, blanc et or (Régence, XVIIIe siècle). Aux côtés, deux petits tableaux, dont le haut est arrondi, représentent la décapitation de sainte Catherine et celle de saint Denis (milieu du XVIIIe siècle).


RETABLE

Un autel en pierre, très simple, supporte le célèbre retable représentant la Passion du Christ et la vie de saint Denis, le seul meuble gothique que l'église ait conservé. C'est un travail brabançon du début du XVIe siècle apparenté à l'oeuvre de Jan Borman le Jeune de Bruxelles, sauf pour la prédelle qui semble être d'une autre main. La partie supérieure comporte six scènes: la flagellation, le couronnement d'épines, la montée au calvaire, le crucifiement, la descente de croix et les lamentations sur le corps du Christ. Le fourreau du soldat, placé aux pieds du Christ crucifié, porte les lettres A L T.

La prédelle est consacrée à la vie de saint Denis. Deux saints, souvent confondus en un seul, portent le même nom: l'aréopagite, évêque d'Athènes, converti par saint Paul (Ier siècle) et le premier évêque de Paris, décapité avec Rustique et Eleuthère sur le Mons martyrum ou Montmartre (IIIe siècle). Les cinq scènes représentent: 1) Denis et sa femme sont baptisés par saint Paul; 2) Denis prêche aux habitants de sa ville, Athènes; 3) il est sacré évêque; 4) le pape saint Clément l'envoie en Gaule comme évêque de Paris; 5) il y est arrêté et décapité.

Les panneaux peints du retable sont dispersés (7).

Entre le retable et la porte de la sacristie, Pieta peinte sur bois (XVIe siècle). Au dessus, une Déposition de Croix, peinte sur toile vers le milieu du XVIIe siècle. A droite, une Nativité du début du XVIe siècle. Ces trois tableaux, dont le peintre est inconnu, sont de bonne facture.


S'avancer dans la nef.

On a une vue remarquable sur la nef, les orgues et le choeur. Au début de la voûte de la nef, les armoiries du prévôt Michel Clercx. Sous l'arc triomphal, grand crucifix moderne en style gothique.


CHOEUR

Le choeur gothique est l'un des plus beaux de la ville et le plus élevé. Simple abside sur plan polygonal, sans déambulatoire, il se compose de neuf lancettes, hautes de 17 mètres environ, dans le style très pur de la fin du XIVe siècle (comparer avec les absides de Saint-Paul et de Sainte-Croix, début XIVe siècle). Le bas est décoré d'arcatures aveugles. A droite, une petite porte néo-gothique dont le tympan contient une statue du XVIe siècle: sainte Aldegonde, abbesse de Maubeuge, vêtue en chanoinesse séculière. Elle fut, hélas, badigeonnée en brun, ce qui fit disparaître la blancheur de son surplis et de sa robe, ainsi que le bord d'hermine de sa cape noire.


MAITRE AUTEL

Placé à l'avant du choeur jusqu'en 1747, il fut alors reculé et remplacé par l'autel actuel: simple tombeau appuyé à un mur en marbre, portant un grand trône d'exposition tournant sur pivot. Il porte les armoiries de Simon-Joseph de Harlez, grand chantre de la cathédrale, prévôt de Saint-Denis de 1756 à 1781, protecteur du jeune Grétry. Tout est en marbre blanc, sauf le trône en bois sculpté et doré. Beau socle en argent repoussé (1719) qui supporte une croix processionnelle donnée, en 1713, par les époux François Canto-Cotte et portant leurs armes. La porte du tabernacle est moderne. Celle du trône, en bois sculpté doré, montre les disciples d'Emmaüs. Les beaux chandeliers en laiton, néo-gothiques, sont remplacés, aux fêtes, par d'autres, en argent, du XVIIIE siècle. Des deux côtés, grandes statues en marbre de Carrare, datant de la fin du XVIIe siècle. On les attribue à deux sculpteurs: la Vierge serait de Robert Verbure (1654-1720) et le Saint-Denis de Van der Werck.

Les neuf lancettes sont ornées de vitraux de Capronnier (1852). Ils représentent, en style du XVe siècle, la mort des saints patrons des anciennes paroisses dont le territoire a été attribué à celle de Saint­Denis, en 1801; en outre, la décapitation de saint Denis. Dans le haut, les quatre évangélistes, saints Gangulphe, Lambert, Hubert, etc. A gauche un aigle­lutrin en bois doré du XVIIIe siècle. La porte de l'ancien « revestiaire » ou sacristie est surmontée d'un beau tympan gothique et d'une statue de saint Roch de 1625.


BRAS NORD DU TRANSEPT

Le bas des murs est roman. Le haut fut reconstruit au XVIe siècle. Une seule fenêtre l'éclaire: son fenestrage, détruit en 1723, fut reconstitué au 19e siècle en style du XVIe. Ce croisillon fut couvert, dès sa construction, de deux voûtes octopartites à voûtains de briques; les clés présentent les mêmes motifs qu'au bras sud.

A droite, autel néo gothique, dédié jadis à la Sainte Face, est orné d'un grand retable peint.

A côté, une grande baie gothique conduisant dans l'ancien « revestiaire ». Le bas des pieds-droits de cette entrée montre l'ancien niveau du transept.


REVESTIAIRE

Ancienne sacristie, construite à la fin du XIVe siècle, en même temps que le choeur et couverte, au début du XVIe siècle, d'une voûte remarquable en étoile.

Les trois fenêtres sont ornées de vitraux néo­gothiques du XIXe siècle. Dans la première: sainte Claire, saints François et Louis. Dans la deuxième: sainte Elisabeth, reine de Hongrie, saint Bonaventure, franciscain et cardinal, et sainte Rose de Viterbe. Dans la troisième: saint Roch, sainte Marguerite de Cortone et saint Antoine. Sous cette fenêtre, un ancien sacraire (8), actuellement condamné, en style gothique du XIVe siècle.

Le pignon du transept est décoré de plusieurs tableaux. A droite, une porte en arc gothique surbaissé du XVIe siècle, actuellement condamnée, donnait accès jadis au cloître nord. Au-dessus, jésus parmi les docteurs, toile de F. Daems de Bruxelles (1834); à côté de la porte, petite Pieta, très expressive, du XVIe siècle. Au dessus du tambour de porte, un grand tableau de la fin du XVIIe siècle ou du début du XVIIIe siècle: le mariage mystique de sainte Catherine. Sur le mur gauche, une grande Assomption, peinte par Jean-Louis Counet (+ 1743).

En se dirigeant vers le bas côté nord, on passe entre deux tableaux d'un anonyme du XVIe siècle, provenant très probablement des volets du retable de la Passion. Celui de droite montre l'arrestation du Christ à Gethsémani et saint Pierre coupant l'oreille de Malchus; au revers, le baptême du Christ. Celui de gauche représente le roi Dagobert, poursuivant un cerf, découvre miraculeusement le tombeau de saint Denis (9) et au revers, le Christ portant la communion à saint Denis, entouré de vieillards (10).

Sur la colonne, un cadre fermé par deux portes contient les noms des anciens membres de la confrérie du Saint-Nom de jésus et du Saint-Sacrement: belle sculpture Louis XVI, polychrome et dorée.


BAS COTE NORD

A droite, sur un autel moderne, la statue de Notre-Dame du Pont des Arches; placée primitivement sur le pont, elle serait tombée à l'eau et aurait, selon une légende déjà répandue au moyen âge, remonté le courant jusqu'à proximité de l'église Sainte­Aldegonde (1643). Son culte y fut célébré jusqu'à la destruction de cette église en 1805, époque où elle fut transférée à Saint-Denis. Belle statue en bois, datant du XVIe siècle, elle avait été très mutilée pour pouvoir être habillée de robes et de manteaux les plus riches; sa profonde restauration de 1917 lui rendit son aspect primitif sous sa polychromie renouvelée.

Derrière, une peinture d'Alfred Martin évoque le miracle de la statue sauvée des eaux et la procession.

Sous la fenêtre, confessionnal Louis XIV.

Les trois chapelles suivantes, datant de 1749, abritent chacune un bel autel en marbre, de 1750, orné de guirlandes de laurier en bois sculpté et doré.

Le premier autel a pour retable un tableau ovale: l'Annonciation de H. Deprez (vers 1750); il est caché par une belle statue de saint Roch, en bois sculpté, attribué à Cornélis Van der Werck. Un vitrail néo­gothique comme ses deux voisins, représente l'apparition du Sacre-CoEur à Marguerite-Marie Alacoque à Paray-le-Monial (+ 1690).

Le second autel est précédé d'une grille en fonte Louis XIV; on y voit les deux clés de saint Pierre et un calice surmonté d'une hostie. Le vitrail est consacré au mariage de la Vierge.

Le troisième autel a un retable de mêmes forme et auteur que le premier; il représente l'Assomption, mais est caché par une statue en plâtre du saint curé d'Ars, jean B. Vianney dont on voit, à droite, une lettre autographe adressée aux paroissiens de Saint­Denis en 1855. Le vitrail est dédié à saint François de Sales.

La colonne porte le tableau des noms des anciens membres de la confrérie du Saint-Esprit, agrégée à celle de Rome en 1711. C'est un joli cadre Régence, surmonte des armoiries de Mgr Doutreloux, évêque de Liège à la fin du siècle dernier.

On voit, à gauche, le grand portail par lequel on est entré. Il est semblable aux autres et donnait jadis sur l'aile occidentale du cloître nord; il fut offert en 1734 par Michel II Clercx, prévôt de Saint-Denis (1734-1756).


SACRISTIE

Construite au XIXe siècle, la sacristie renferme une dizaine d'armoires Louis XIV, provenant de l'ancien vestiaire des chanoines ou de celui des chapelains.

Le trésor fut perdu à la fin du XVIIIe siècle, mais Saint-Denis reçut une partie de l'argenterie des églises paroissiales supprimées par le Concordat (1801) et annexées à la nouvelle paroisse Saint-Denis. Elle possède actuellement un bel ostensoir en argent, daté de 1716, provenant de Sainte-Madeleine et un très beau seau à eau bénite, orné d'armoiries, de style Louis XIV, en argent également (1704); un ciboire en vermeil donné, en 1663, par Lambert Villers, curé de Sainte-Aldegonde; trois calices en vermeil du XVIIe siècle dont un aux armoiries de Rosen; un autre offert, en 1616, à l'église Saint-Étienne par les paroissiens; des chandeliers en argent, portant le nom d'Agnès Freissens, 1666.

Ajoutons encore quatre chapes en velours rouge brodé d'or, très riches, datées de 1784; un bel ornement complet en drap d'argent provenant, dit-on, de l'abbaye de Stavelot et un autre comprenant sept pièces, à orfrois du début du XVIe siècle, représentant des préfigures de l'Eucharistie et des saints, brodés au fil de soie. Ces scènes rappellent la peinture flamande de l'époque; enfin, une chape et un huméral ornés d'anciennes broderies montrant des fleurs de toutes couleurs, des armoiries et l'inscription: Nicolas de Hallebaye 1789.


SALLE DU CONSEIL DE FABRIQUE

Beau meuble en forme de garde-robe, de style Régence très simple.

Un retable ovale peint par Deprez vers 1750; il représente un évêque jeté à la mer;

un panneau sur bois de la première moitié du XVIe siècle: un chanoine donateur, en soutane noire, surplis et petite fraise, à genoux, protégé par saint Denis;

un diptyque sur bois, du début du XVIIe siècle, représente sainte Hélène et l'empereur Constantin. Au revers, saints Pierre et Paul; une peinture ovale du XVIIIe siècle: saint Roch;

un tableau dont le haut est arrondi: des angelots volent autour d'un ostensoir; il fut peint en 1780 pour la confrérie des défunts comme l'inscription le rappelle.

Sur la cheminée, beau Christ en ivoire, du XVIIe siècle.



1 Coste ou custos: gardien des reliques, du trésor et de la sacristie.

2 Ecolâtre: chanoine directeur de l'école du chapitre.

3 Traces visibles dans les combles.

4 Qui ne le cite cependant pas dans son livre de comptes, à vrai dire incomplet.

5 L'ancien retable de cet autel, une belle Adoration des mages, par Bertholet Flémalle, est actuellement à la cathédrale, dans la chapelle Saint-Lambert.

6 Visible sur demande.

7 Deux sont conservés au Musée de l'Art wallon à Liège; un autre, au Musée des Beaux-Arts à Bruxelles.

8 ou sacrarium: dispositif pour jeter l'eau servant à certaines ablutions liturgiques et la conduire en terre.

9 Identification fournie par le R. P. COEUR, bollandiste.

10 Un panneau de mêmes dimensions représentant la conversion et le martyre de saint Denis est conservé au musée des Beaux-Arts à Bruxelles.

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