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Palais des Princes Evêques de Liège

par Sylvain MAZY


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LES DETAILS DES SCULPTURES SE TROUVENT PLUS BAS.

INTRODUCTION

Ce petit travail n'a aucune prétention. Il a hérité des instructions données par quelques devanciers. Il contient quelques observations faites sur place. Il a en outre tenté de mettre le Palais de Liège dans son cadre géographique et historique.

Nous eussions voulu publier d'abord, une étude initiale: « Première idée de Liège ». Les circonstances ont décidé autrement mais nous comptons bien y revenir.

Le présent travail comprend trois parties essentielles: l'histoire du Palais; l'édifice; l'intérieur de l'Hôtel Provincial. Par suite des travaux de restauration en cours, nous avons dû négliger les locaux affectés au pouvoir judiciaire. Ils ne manquent pas d'intérêt, mais ils sont actuellement peu accessibles.

Pour comprendre la signification du Palais de Liège, pour saisir l'impression qui doit s'en dégager, tant de la construction massive, des cours séculaires, des ornementations et des détails datant d'époques rapprochées, il y a de sérieuses difficultés à surmonter.

Le Palais a été la résidence du souverain d'un Etat millénaire, la principauté épiscopale de Liège, relevant de l'empire. Le passé a partiellement survécu dans le monument. Les restaurations récentes y ont contribué. Les nouvelles constructions ont maintenu les traditions.

Or, la vie et l'histoire du pays liégeois, avant 1789, sont encore peu connues, en dehors d'un petit nombre d'amateurs et d'avertis.

C'est pourquoi nous avons cru utile d'indiquer une foule de renseignements de cet ordre, afin de faciliter la visite de ce vieux Palais qui occupe une bonne place dans l'ensemble de nos monuments nationaux.

Par une question de méthode, il y a certaines indications qui ont dû se répéter nous n'y avons rien changé, jugeant cette répé­tition utile pour la compréhension.


I. LA SITUATION DU PALAIS

Le Palais de Liège, ci-devant Palais épiscopal, est situé auprès du cône de déjection de la Légia et au pied des montagnes de Pierreuse et de Publémont.

Si l'on se reporte aux temps lointains du moyen âge, la demeure princière était bien bâtie, assez facile à défendre contre les coups de mains des brigands et des féodaux.

Elle était, par surcroit, au bord des routes qui gagnent Tongres et Maestricht. Celles-ci rejoignaient par Pierreuse et Hognoul, la Chaussée Brunehaut et la Basse Meuse par Féronstrée.

Devant le Palais, il y avait le Vieux-Marché, la Cathédrale Saint-Lambert; à l'est, un vinâve important, avec la Violette et le Perron à l'ouest, la crête de Publémont, très anciennement occupée.

Le Palais était lui-même au centre d'une agglomération importante et son isolement ne remonte qu'au XIX siècle.

La meilleure idée que l'on puisse avoir, vraisemblablement de la situation du Palais, c'est celle qui se réalise du flanc de Pierreuse, vers les Minimes, du haut des terrasses de la Commanderie des Vieux-Joncs.

De là, les toitures du Palais plongent dans des cours comme dans des forteresses, et les longues horizontales des murailles prennent d'étonnantes proportions.

De là, on peut juger la situation primitive du Palais, dans un site de défense, entre l'escarpement d'une assez forte montagne et un fleuve divagant, formant de multiples bras et des îles marécageuses. De là, on peut s'imaginer les méditations des princes ecclésiastiques qui nous ont gouvernés, ayant en face d'eux, à l'horizon, les abbayes de Robermont, du Val-Benoît, de Saint-Gilles; une ville toute hérissée de clochers et de dômes d'églises, d'oratoires et de prieurés et, tout près d'eux, leur Cathédrale Saint-Lambert, avec la massivité de ses tours et l'élancement dune flèche qui dépassait l'altitude des plateaux dominant la vallée.


II. LE ROLE DU PALAIS

Le Palais est intimement lié à tout le passé de la ville et de la principauté de Liège. Sa solidité a défié les perturbations et les bouleversements séculaires.

Demeure princière du souverain d'un très petit Etat, il a été essentiellement construit un demi-siècle après la destruction de la capitale. Il ne manque pas d'être un énergique symbole de la vitalité wallonne et de conserver les souvenirs de l'opulence des seigneurs qu'il a abrités.

Le Palais est un des plus anciens et des plus importants monuments civils du XVI siècle. Sur son emplacement, il y a eu d'autres constructions épiscopales, et lui-même, il a eu à subir plus d'une restauration.

Son rôle s'est accrû au cours des siècles. De grands personnages y sont venus, y ont séjourné. Le peuple s'y est régulièrement assemblé pour y faire entendre ses griefs, pour y délibérer, pour y obtenir justice, pour y pratiquer du négoce, pour y assister aux fastes de la vie des Cours.

Le Palais a concentré la plupart des manifestations de l'existence régionale; il a logé les services de la petite nation liégeoise au fur et à mesure que ceux-ci se sont développés: chambre des comptes, tribunaux, prisons et halles.

Avec la chute de la principauté en 1795, le Palais a failli être démoli. Depuis lors, sa fortune a été amoindrie, Liège ayant perdu son rang de capitale politique.

Néanmoins, son rôle demeure considérable. Siège de l'administration provinciale, résidence du Gouverneur, pied-à-terre royal, il abrite la plupart des conseils de justice du chef-lieu.


III. L'HISTOIRE DU PALAIS

A. Jusqu'à l'incendie de 1185.

Il n'est pas possible de faire connaître l'époque et l'emplacement précis du Palais primitif. Les premiers siècles du moyen âge liégeois sont encombrés d'une foule de légendes auxquelles nous ne nous arrêterons pas.

Avant Notger, Liège s'est développée très lentement.

La tradition rapporte que Saint Lambert aurait bâti une modeste demeure près de la Légia l'Irlandais Sédulius donne une description assez vague de l'habitation de l'Evêque Hartgar (840­852 ?). Mais les Normands, en 881, ont tout ravagé. Eracle (959-971) se crut mieux en sûreté en s'établissant sur le Publémont, sans doute en face de la basilique Saint-Martin.

Toutefois, jusqu'alors, il n'est nullement fait mention, dans les rares vieux textes que l'on possède, du Palais, mais bien de la Maison de l'Evêque.

Il était réservé à Notger (972-1008) de fonder l'Etat liégeois, d'être le premier Prince-Evêque, de bâtir un Palais, d'entourer sa capitale de fortifications, ou de les améliorer. Le Palais, c'est alors le château, et comme le Louvre, à Paris, c'est la partie principale de la fortification, courant de Hors-Château â la Porte Saint-Martin.

Depuis sa fondation, le Palais a appartenu à l'Evêque seul, et de ce côté, ni le pouvoir civil, ni les chanoines de Saint-Lambert n'ont jamais émis de prétention. A la Révolution, le domaine épiscopal sera simplement sécularisé et remis â l'Etat. Ni la province, ni la ville de Liège n'y obtiendront droit de propriété.

Du Palais de Notger, on ne sait rien de précis.

Vraisemblablement, a-t-il été construit en grès de la vieille carrière de l'Evêque en Pierreuse, et a-t-il dû avoir l'aspect des autres constructions notgériennes, telles qu'on les retrouve à Saint-Denis et à Saint-Jean. Certaines indications recueillies dans des chroniques du XIe siècle, laissent croire que la résidence de Notger que l'on appellera plus tard, le vieux-Palais, longeait la Rue Sainte-Ursule, actuelle, et s'élevait en face du choeur de la Cathédrale et des Degrés de Saint-Lambert. Face à la Place Saint-Lambert, auraient été établis des jardins princiers; d'autres s'étendaient jusqu'à la Rue des Mineurs, Place Notger actuelle, bien abrité des vents du nord, un verger fournissait de fruits, la table épiscopale.

Le Palais eut, dès sa fondation, une vie politique importante. Il y vint un pape, des empereurs, des rois; il s'y tint des conciles; il s'y prêcha deux croisades.

Au XIIe siècle, il parait bien que le Palais ait dû subir plus d'une restauration. Mais, on manque, à ce sujet, de certitude, sauf pour les agrandissements de l'Evêque Henri de Leyen (1145-1164). Au Vieux-Palais de Notger, il ajouta des constructions avec plusieurs cours intérieures, en face de la Place Saint-Lambert. Deux préaux carrés entourés de bâtiments y existaient déjà, destinés aux fastes du Prince et à certaines manifestations de la vie publique.


B. De l'incendie de 1185 à l'incendie de 1505.

En 1185, un incendie détruisit le Palais et les édifices religieux voisins, la Cathédrale, les églises Saint-Pierre, Saint-Clément, Sainte­Ursule ou des Onze Mille Vierges.

De la restauration des bâtiments sinistrés, on n'est nullement informé. L'Evêque Radulphe de Zaehringen (1167-1191) a-t-il fait rebâtir le Palais, ainsi que Jean d'Outre-Meuse le prétend ? En 1192, il semble que ce soit chose faite. En 1212, la demeure épiscopale est pillée par le duc de Brabant.

En 1421, la Cour de l'Official - le tribunal de l'Evêque -, situé en ce temps là non loin de la Place Notger, est incendiée. Peu après, Jean de Heinsberg (1419-1455) procède à certaines restaurations, notamment autour du portail de la façade principale.

En 1465, les Liégeois, en lutte contre leur prince, Louis de Bourbon (1455-1482), saccagent le Palais et les partisans de Guillaume de La Marck s'y livrent à de nouveaux pillages en 1488.

Si l'édifice a pu échapper aux destructions des Bourguignons, en 1468, ii n'en est pas moins si délabré, que Jean de Hornes (1482-1505) réside tantôt près l'église Saint-Martin, tantôt à Maestricht.

En 1505, le Palais est ravagé de fond en comble par un nouvel incendie,


C. De l'incendie de 1505 à l'incendie de 1734.

Ii était réservé à Erard de La Marck (1500-1538), le populaire Marckâ, de rebâtir le Palais, d'en faire cette somptueuse résidence que le temps a laissée en grande partie intacte.

Le début du XVIe siècle coïncide avec la Renaissance et on bâtit plus qu'autrefois.

Du monastère des Prémontrés ou de l'abbaye de Saint-Laurent où il s'est établi, Erard préside à la restauration des églises, des portes et des châteaux que les troubles du siècle précédent ont mis en très vilain état. La paix revenue, les métiers prospèrent à nouveau et des sacrifices pécuniaires sont possibles. L'Evêque y consacre les revenus de ses nombreuses charges et prébendes. Il envoie Lambert Lombard, en Italie, étudier les grands maîtres, afin d'en faire, plus tard, le peintre du Palais. Il subventionne Suavius pour confectionner le magnifique buste de Saint Lambert. Il accumule des oeuvres d'art, des meubles luxueux qui ne nous sont malheureusement pas parvenus.

On n'a pas de précisions sur la durée de la reconstruction du Palais. Erard ne l'a pas vu achever. Il ne le sera d'ailleurs jamais.

On a prétendu que l'architecte fut François Borset; des études récentes forcent à croire que ce fut Maître Arnoldus Van Mulken, le restaurateur de Saint-Martin et de Saint-Jacques.

Pris en masse, le Palais est encore celui d'Erard. Les tours en ont disparu, de même que le portail de la Place Saint-Lambert. Si la façade principale ne rappelle plus en rien celle du XVIe siècle, la première cour n'a guère changé. L'édifice conserve tout un mélange de l'architecture mosane, ogivale et renaissance italienne. Les voyageurs du XVIIe siècle l'ont trouvé supérieur au Louvre et aux Tuileries.

L'oeuvre fut continuée pendant les règnes de Corneille de Berghes (1538-1544), de Gérard de Groesbeck (1564-1580) et d'Ernest de Bavière (1581-1612). Celui-ci fixa au Palais, le siège de la Cour des Echevins; ainsi la plupart des services administratifs y furent concentrés.

Le XVIIe siècle a été fort inégal pour le Palais. Les princes de Bavière qui ont alors gouverné la principauté, ont été souvent absents, au grand dommage du Palais épiscopal. Les Grignoux, à la poursuite des Chiroux, y pénétrèrent à plusieurs reprises et, en 1646, y commirent de graves dégradations.

En 1685, les drapiers verviétois installèrent une halle pour y vendre leurs produits, dans le bâtiment joignant la Rue Sainte­Ursule.

L'administration se compliquant, en 1718, on dressa un plan de construction de local pour le siège des Etats; on démolit les dépendances de la Cour de l'Official qui s'installa Place aux Chevaux (Place de la République Française) on songea à occuper tout l'emplacement de l'Hôtel Provincial actuel.

Mais le gouvernement liégeois a toujours été célèbre par ses lenteurs. Le projet n'avait reçu aucune exécution quand, en 1734, un incendie ravagea toute la partie du Palais faisant face à la Place Saint-Lambert, la tour de l'Official, l'église Sainte-Ursule, la chapelle du Palais, la halle aux drape des Verviétois.


D. De l'incendie de 1734 à la restauration de 1845.

La restauration du Palais fut faite durant le règne de Georges­Louis de Berghes (1724-1744).

L'Evêque avait dû se retirer au couvent des Capucins. Fort­ment soutenu par les Etats liégeois, il disposa de ressources considérables.

L'époque n'était pas très favorable aux constructions; le goût manquait.

Ce fut Jean-André Armeessens, le fils du martyr bruxellois de 1719, qui eut la tâche de dresser les plans. Il aurait voulu démolir tout le Palais et en construire un autre. Le Prince-Evêque ne l'admit pas. On sauva de l'oeuvre de Van Mulken ce que l'on put. Anneessens fit la façade actuelle de la Place Saint-Lambert; on ne lui ménagea pas la critique, tant on trouva l'ouvrage froid et monotone. Au-dessus du balcon, on plaça les armes du prince régnant. On ne rétablit pas la tour ou prison de l'Official et le pénitencier fut transféré à Saint-Léonard, en 1738. A la place de la Cour de l'Official, là où se trouve l'Hôtel du Gouverneur, on construisit une partie de l'Hôtel des Etats destiné aux réunions des divers ordres.

En 1740, la restauration était achevée. Jean-Théodore de Bavière (1744-1763) continua l'embellissement du Palais. Les peintres Delcloche, les deux Coclers, y travaillèrent. On acheta de riches tapisseries à Bruxelles et à Audenarde. Le sculpteur Halet fit une fontaine que l'on plaça vers l'angle de la Place Notger. Le Palais connut alors une vie de Cour, brillante, à la mode de Versailles. Le prince partagea ses délices entre le Palais de Liège et le Château de Seraing.

Après Jean-Théodore, il devint nécessaire de restaurer la façade de la Rue du Palais. Le travail n'y fut pas heureux; on en fit disparaître les caractéristiques du style ogival.

A la Révolution, la fureur populaire se porterait vers les édifices rappelant l'ancien régime, contre le Palais, contre la Cathédrale. Celle-ci disparaîtrait; celui-là serait pillé de la plus odieuse façon. Presque seul, le portrait de Velbrück (1772-1784) serait épargné. La cour principale servirait de théâtre à plus d'un feu de joie, alimenté par le mobilier et par les tapisseries. Des incendies, en 1790, en 1795, en 1807, augmenteraient les ruines.

Sécularisé, le Palais serait le siège d'assemblées politiques, de tribunaux, de campements de soldats, de magasins à fourrages. Sur la façade de la Place Saint-Lambert, on afficha les édits officiels. Dans la première cour, Bassenge invita l'administration centrale à planter l'Arbre de la Liberté. On y remisa les cloches et les butins enlevés lors des réquisitions. On fit disparaître la plupart des signes de l'époque épiscopale, notamment les blasons. Du sommet du Palais, on enleva le globe et l'aigle de l'empire et on y installa un carillon.

L'administration centrale qui s'y était établie, dès 1794, ne put supporter davantage le délabrement. En 1801, le Préfet Desmousseaux s'installa dans l'Hôtel de Hayme de Bomal, au Quai de Maestricht et les bureaux de la préfecture se logèrent dans l'ancien Hôtel Curtius. Les tribunaux ne quittèrent pas la Maison des Etats. Une partie du Palais servit de prison, de refuge pour mendiants, vagabonds, syphilitiques, filles repenties. Plus tard, les bureaux de la Poste y trouvèrent asile.

Après la tourmente révolutionnaire, le Palais devait demeurer à I'Etat. On transférerait le siège de l'évêché aux Prémontrés. En 1824, le Palais fut bien près d'être vendu et démoli.

En 1836, le pouvoir provincial s'organisa. L'Etat fixa une partie de l'administration provinciale au Palais et les Etats Provinciaux continuèrent à délibérer dans l'ancien couvent des Bons-Enfants, où ils étaient déjà depuis 1823. Le Gouverneur, le baron Van den Steen de Jehay (1832-1844) habita son propre Hôtel du Mont-Saint-Martin.

En 1845, l'Hôtel Provincial de la Rue des Bons-Enfants était détruit par un nouvel incendie.


E. Le Palais depuis 1845.

Au gouvernement provincial, on offrit divers locaux. Provisoirement, on s'installa à la Société Cockerill, Rue de la Régence.

On songea à utiliser le Palais fortement abandonné. L'historien Mathieu Polain protestait depuis 1842 contre la désaffectation du monument. En 1841, Frère-Orban conseillait à la ville de Liège de dégager l'emplacement du Square Notger. Dans de nombreuses interventions, le baron Edmond de Sélys-Longchamps réclamait l'aménagement du Palais.

Il y avait un projet de l'architecte Chevron, datant de 1825, destiné à transformer l'Hôtel des Etats pour les services de la province, le logement du Gouverneur et le pied-à-terre du Roi. En 1842, la députation permanente de Liège projetait de restaurer le Palais et d'y installer tous les services. En 1844, l'Etat s'y intéressait, avec décision. L'incendie de 1845 devait hâter les évènements.

Un projet de Cluysenaer, architecte bruxellois, aurait disposé des bâtiments situés à l'est du Palais. Avec les transformations indispensables, il ne fut pas resté grand'chose de l'oeuvre d'Erard et de Van Mulken. Des protestations s'élevèrent dans la presse locale et le projet fut écarté. Le Ministre de l'Intérieur, Van de Weyer, dut venir sur place.

Une Commission d'aménagement du Palais proposa deux solutions: reporter l'Hôtel Provincial vers la Place du Marché, avec l'établissement d'une rue aboutissant à la Rue du Palais, ou bâtir l'immeuble donnant sur la Place Notger.

Depuis 1837, la ville de Liège cherchait à améliorer les communications vers Bruxelles et Tongres. La Place Notger présentait alors un relief totalement différent de celui d'aujourd'hui; une forte montagne en occupait toute l'assise jusqu'au bord même de l'emplacement de l'Hôtel du Gouverneur. La ville, en créant une rue nouvelle, dégagerait le Palais; mais elle devrait exproprier une série d'immeubles, dont l'Hôtel de Hinnisdael et l'église Saint-Clément. Le travail était difficile.

Ce fut cependant ce plan qui fut retenu. On mit le projet au concours; ce fut l'étude de Jean-Charles Delsaux, architecte provincial, qui fut acceptée.

Le Palais du XVIe siècle pouvait être restreint, entouré de hauts murs et de tours, accessible seulement par des rues étroites. Celui du XIXe siècle ne pouvait pas être le même. Il lui faudrait de plus larges abords, des entrées nombreuses, des locaux pour de nouveaux services.

Delsaux proposa de rétablir deux cours en style ogival, réunies par un passage central à trois arcades, de bâtir un Hôtel Provincial, un Hôtel pour le Gouverneur, des appartements royaux. Dans la première cour, sur les façades, il aurait placé des statues et les blasons des Princes-Evêques.

La tâche de Delsaux était compliquée. Il fallait laisser debout la partie restaurée par Anneessens; il fallait faire du gothique tel que l'époque le réclamait, sans altérer celui du XVIe siècle et sans trop heurter la simplicité de la façade de la Place Saint-Lambert.

Vers la Place Notger, il y avait les difficultés du relief. Il fallait faire disparaître les bâtiments qui avaient servi d'écuries et qui avaient été transformés en caserne. Il fallait faire déménager certains services judiciaires, le corps de garde, racheter à la ville, l'a­cienne église Sainte-Ursule, y affecter le siège de certains tribunaux.

La pose de la première pierre se fit le 11 juin 1849, en présence de la famille royale. Les travaux furent menés activement. En trois ans, l'aile de l'Hôtel Provincial, la restauration de la première cour étaient achevées.

La décoration de l'Hôtel Provincial est due, en grande partie, à l'attention des Gouverneurs de la province, au baron de Macar (1847-1863), au baron Pety de Thozée (1882-1908) et surtout à Charles de Luesemans (1863-1882).

En 1850, le baron de Macar proposa à Delsaux, aux membres de l'Institut Archéologique Liégeois, à Charles Rogier, Ministre de l'Intérieur, de créer une Commission destinée à arrêter la décoration de l'Hôtel Provincial. Elle réunit les spécialistes en histoire. La ville de Liège ne voulant pas intervenir financièrement, on n'aboutit pas avant 1877.

Charles de Luesemans avait été bourgmestre de Louvain; il y avait contribué à la restauration de l'Hôtel de Ville. Dans un discours d'une grande valeur documentaire, le 2 juillet 1878, à l'occasion de l'ouverture de la session ordinaire du conseil provincial, il annonça toute une série d'embellissements pour le Palais. Bien inspiré par l'artiste Jules Helbig, il fit achever la façade de la Place Notger, en y introduisant des sculptures qui rappellent l'histoire mouvementée et fastueuse de l'ancienne principauté de Liège. L'ameublement du Palais leur doit beaucoup.

En 1885, Pety de Thozée faisait décider l'achèvement et la décoration de la salle des Pas Perdus. Depuis lors, d'autres mises au point ont été effectuées.

Au cours du XIX siècle, la ville de Liège procéda aux aménagements des environs du Palais. Les dernières ruines de la Cathédrale Saint-Lambert disparurent.

Delsaux proposa de créer la Place Notger et d'y construire un escalier monumental donnant accès à la Rue Saint-Pierre et au Mont Saint-Martin. De Wandre et Blonden donnèrent des indications pour corriger le plan précédent.

Ainsi, la masse imposante et monumentale du Palais fut isolée. On nivela le sol ; on fit disparaître la formidable butte de sable: on créa l'amphithéâtre qui s'élève jusqu'aux Degrés de Saint-Pierre.

Il restait à pourvoir aux autres services relevant de la conservation des archives, du pouvoir judiciaire, de l'administration des finances.

Dès 1852, une Commission de magistrats s'y était intéressée. C'est du côté de la Rue Sainte-Ursule que l'on ferait de nouveaux efforts. Il était réservé à Godefroid Umé, le successeur de Delsaux, d'y faire démolir des immeubles, d'y détourner le cours de la Légia, d'y édifier de nouveaux bâtiments, de restaurer la deuxième cour, (1870).

Après Umé, Léopold Noppius se chargea de la décoration de la Place Notger, de la restauration de la première cour et de la façade de la Cour d'Assises donnant sur la deuxième. Ces restaurations ont été faites avec une grande fidélité (1882).

Dans l'esprit des architectes provinciaux, il était question de restaurer la façade de la Rue du Palais et de rétablir, un style gothique, celle de la Place Saint-Lambert, de l'orner de vases, de groupes et de statues allégoriques, parce que la richesse architecturale du Palais ne se laisse aucunement soupçonner par la façade principale. Ces travaux ne paraissent nullement en voie d'exécution.

Toutefois, certaines restaurations sont achevées et d'autres sont en cours, dans les locaux réservés au Palais de Justice et dans la deuxième cour.


IV. L’EDIFICE

A. Les Façades extérieures du Palais.

a) La Façade de la Place Saint-Lambert et de la Rue Sainte-Ursule.

Place Saint-Lambert, c'est le coeur et aussi le berceau de la Cité. A l'irrégularité et à la largeur très réduite de la plupart de ses issues, on découvre les traces d'une longue et active histoire. Elle compte à peine un siècle d'existence; elle s'appela d'abord Place Napoléon-le-Grand.

Son emplacement actuel ne permet en rien de deviner ce que fut son aspect au cours des siècles passés.

Les fouilles de 1907 ont bien mis à jour des restes de demeures préhistoriques, d'une villa belgo-romaine avec hypocauste, des fondations d'édifices médiévaux.

Que l'on s'imagine l'imposante Cathédrale Saint-Lambert couvrant la majeure partie de la Place, depuis la Place du Maréchal Foch jusqu'à la Place du Marché, très près de la Violette (Hôtel de Ville), avec ses deux tours carrées vers la Place Foch et vers la Rue de Bex, une autre tour, avec un clocher très effilé atteignant l'élévation de la Citadelle; un portail très voisin de l'entrée du Palais et un autre, en face de la Rue Gérardrie.

Tournée vers la Rue Gérardrie, une église paroissiale, Notre­Dame-aux-Fonts; très près du Palais, vers la Place du Marché, l'église paroissiale de l'Evêque, l'église Sainte-Ursule ou des Onze Mille Vierges; sur la Place Saint-Lambert, à gauche du Palais, le Vieux-Marché, qui ne dut pas avoir une importance énorme, vu son exiguïté. Et encore des cloîtres, des chapelles, des habitations de chanoines et de clercs, des maisons appartenant à l'Evêque, parfois adossées aux édifices eux-mêmes, des écoles, un cimetière. Et l'on aura, alors l'idée de l'entassement de constructions qui ont encombré la Place durant plusieurs siècles et des venelles qui en assuraient la liaison.

Les destructions des révolutionnaires de la fin du XVIIIe siècle, puis les transformations suscitées par la circulation et l'urbanisation, ont profondément modifié la topographie de l'endroit.

Dans le fond de la Place, le Palais barre tout l'horizon. II a quelque chose de solennel, et aussi de régional ou de provincial. De loin, on aperçoit un soupçon des sculptures de la première cour. Il se perd dans les constructions de la Rue Sainte-Ursule, vers le Marché et le dôme de Saint-André. C'est par là qu'il faut commencer la visite.

Place du Marché, le Perron, la Violette, la Cathédrale, le Palais voisinaient, rassemblant ainsi les locaux du pouvoir de la Cité, du Chapitre et du Prince-Evêque. Plus d'un événement historique s'est déroulé entre le Perron et les Degrés de Saint-Lambert, où il y avait droit d'asile et au pied desquels on procédait aux exécutions capitales.

Le domaine épiscopal s'étendait au delà du Marché, vers les Mineurs.

Rue Sainte-Ursule, anciennement en Céarie (local où le public venait verser les rentes en nature au Prince), ancienne Rue des Onze Mille Vierges ou Sous les Degrés de la Prison du Maïeur, le passage a toujours été étroit. Cette rue a conservé un certain archaïsme, avec ses abords couverts de maisons mosanes de Renaissance liégeoise, ses deux vieilles bâtisses, dont l'une date de 1671, avec des toitures à corbeaux, sans épis, à encorbellements et à vitrines à consoles.

La partie du Palais que l'on a devant soi, correspond au Vieux­Palais construit par Notger. Très anciennement, elle a servi de bureaux et de greniers à la Céarie du Prince; c'était autrefois une sorte de bureau de contributions. Non loin de là, il y avait la Prison civile du Maïeur, vers le Marché. Des le XII siècle, il y eut une halle aux draps et aux fourrures; elle fut plus tard destinée au commerce des tisserands verviétois.

L'église Sainte-Ursule a été conservée, incorporée dans le Palais. On en distingue encore les voûtes et les fenêtres en plein cintre. Elle sert actuellement de bureaux au pouvoir judiciaire.

De l'entrée de la Rue Sainte-Ursule, vers la Place Saint-Lambert, le Pont Saint-Lambert, réservé à l'Evêque, reliait le premier étage du Palais à la sacristie de la Cathédrale. Adossées aux murailles, les marchands avaient bâti des maisons de négoce et des échoppes.

Aussi l'aménagement de la rue actuelle a exigé un grand nombre de démolitions.

La façade du Palais vers la Rue Sainte-Ursule date de 1870. Elle est assez froide, mais il ne faut pas perdre de vue que Godefrold Umé devait relier l'aile de la Place du Marché à la façade principale de la Place Saint-Lambert; c'est ce qui était difficile, d'autant plus qu'il fallait conserver la muraille extérieure de l'église Sainte-Ursule.

La partie du Palais de la Place Saint-Lambert a été constituée en quatre phases: l'agrandissement du Palais de Notger, vers l'ouest par Henri de Leyen, au XII siècle; la construction d'Erard, au XVIe; le Palais, jusqu'au début du XVIIIe siècle, ne dépassa guère le porche actuel, vers l'ouest; il fut achevé, dans cette direction, par Anneessens, après 1734 et au XIXe siècle, par Delsaux.

La façade de la Place Saint-Lambert a été sévèrement critiquée par ses lignes droites, monotones, en opposition avec la luxuriance de la façade de la Place Notger et de la première cour. Anneessens en a fait disparaître le style ogival de l'époque d'Erard. Si elle prépare assez mal à voir l'intérieur, le balancement de ses deux ailes ne manque toutefois pas de lui assurer une certaine majesté. La patine du temps lui a donné un aspect vénérable et assez grandiose. Son appareil est simple, avec des emprunts raisonnables faits au style classique.

Le toit est beau, mais les fenêtres de la troisième rangée sont petites, malheureuses et la balustrade du toit est un peu maigre.

Le dôme fut jadis surmonté par un globe sur lequel était un aigle aux ailes déployées (on retrouve le même embléme, au Bassinia, à Huy); à la Révolution, on l'a remplacé par un campanile et un carillon.

Le porche ancien était un portail en forme de pavillon à trois pans, bâti en hors-d'oeuvre, à trois étages.

A l'entrée du porche, six colonnes monolithes, en calcaire de Seules, de style ionique à la base et composite au faîte, supportant la balustrade, la tribune, le vaste fronton arqué, aux armes de Georges-Louis de Berghes, l'Evêque qui commanda la restauration du Palais et qui laissa sa fortune à ses chers frères, les pauvres de la Cité de Liège. L'inscription porte:

GEORGIU5 LUDOVICUS EPISCOPUS ET PRINCEPS

LEODENSIS PALATIUM PER INCENDIUM

EX PARTE DESTRUCTUM

RE5TAURAVIT EX MUNIFICENTIA

STATUUM, CLERI ET CIVITATIS

ANNO 1737.

« Georges-Louis Evêque et Prince de Liège a restauré le Palais détruit partiellement par an incendie, avec l'appui financier des Etats, du Clergé, de la Cité en l'année 1737. »

Du porche, on aperçoit déjà la richesse de la première cour. Dans la muraille de droite, un linteau et un chambranle de l'ancienne église Sainte-Ursule, par une décoration florale amusante, prépare le décor de l'intérieur.

La partie du Palais située à droite du porche, était anciennement destinée au Conseil du Prince, aux appartements réservés aux étrangers. Actuellement, elle est destinée au Parquet du Procureur Général et à la Cour d'Appel.

Les caves construites de plain-pied avec le sol de la Place Saint­Lambert, étaient louées à des particuliers. Sous le régime français, elles servirent de salle de danse. Après 1848, leur mise en location cessa; elles furent affectées à la conciergerie et au corps de garde. C'est dans ces caves que les botteresses, à la Révolution, trouvèrent de l'argenterie cachée.

La partie du Palais, allant du porche à la Place Notger, est affectée à l'Hôtel du Gouverneur et aux appartements royaux. Ses abords ont subi de profondes transformations, au cours des siècles. Il y a eu, là, l'ancien verger de Notger; puis la Cour et la tour de l'Official, l'Hôtel de Hinnisdael, des maisons privées, la fontaine de Halet, avec jet d'eau, et tout proche, le portail septentrional de la Cathédrale.

Au XVIIIe siècle, Anneessens y construisit la Maison des Etats.

Au début du XIXe siècle, jusqu'en 1848, on y établit le siège de certains tribunaux et celui du corps de garde dont on n'a pas fait disparaître l'inscription. Pas plus que la plaque républicaine destinée à aider la publicité des lois:

LOIX PUBLIEES

DANS LE

DEPARTEMENT DE L'OURTE.

Cette plaque est du marbrier André Dumont, nom qui devait être illustré plus tard, par deux savants géologues.

Depuis longtemps, il est question de restaurer toute la façade principale en lui rendant son caractère gothique. Les préoccupations du moment n'y font plus guère songer.


b) La Façade de la Place Notger.

Quand on débouche de la Place Saint-Lambert, la Place Notger présente un aspect inattendu, rempli de contrastes, avec du bruit, du mouvement, du recueillement; sur une très petite place, les spectacles les plus divers se rassemblent, passent du solennel au pittoresque et du calme à l'agitation.

Le sol s'y relève en amphithéâtre jusqu'à la Rue Saint-Pierre. Des escaliers et une forte rampe entourent le fond de la place. Une chaussée y est intensément fréquentée; c'est une des rares issues vers la Hesbaye et Bruxelles. Le square est frais. La stèle du sculpteur liégeois Oscar Berchmans est une survivance assez rare, à Liège, du modern-style. Elle a été érigée en mémoire de Montéfiore­Levy.

Montéfiore-Lévy est né en Angleterre en 1832. Ancien élève de l'Université de Liège, industriel, Liégeois d'adoption, il reçut la grande naturalisation en 1882. II fut alors élu sénateur et le demeura jusqu'à sa mort en 1906. Protecteur de la science, il intervint financièrement pour créer l'Institut électro-technique de Liège et y consacra plus d'un million de francs. Généreux philanthrope, il aida le gouvernement provincial à soutenir l'oeuvre du député permanent Gaston Grégoire (Gouverneur de 1919 à 1926), en assurant, par un legs de trois millions, le bon fonctionnement du sanatorium pour tuberculeux de Borgoumont. Sa veuve devait poursuivre son oeuvre à Esneux.

Tout autour, des immeubles, assez cossus, s'alignent, en demi-cercle, très élevés, avec de fortes perpendiculaires, des toitures à flèches, à clochetons et à pinacles.

Dans le fond méridional, apparaît la Place Saint-Lambert, avec le grand branle-bas de sa foule et du circuit de ses tramways, avec la richesse de ses magasins; et le spectacle n'en finit pas, au fur et à mesure que l'on s'avance de la gare du Palais, vers l'amphithéâtre du square et les Degrés de Saint-Pierre.

Place Saint-Lambert, on est en présence du Palais de Justice et du Palais du Gouverneur. Place Notger, c'est le Palais Provincial. Ce qui déroute, c'est l'entrée habituelle commune, Place Saint­Lambert.

Place Notger, l'ensemble est harmonieux; il prouve que l'on peut juxtaposer, sans heurt, les époques, les genres et les styles.

Mais, ici, tout a été bouleversé, jusqu'à l'aspect physique. La Légia a disparu. L'extrémité de la montagne de Publémont a cédé, après 1870, une énorme butte de sable qui arrivait aux abords mêmes du Palais et en cachait une forte partie de la façade. Il y avait là, les restes des anciens remparts qui ont dû subir le même sort.

Cet endroit a été très anciennement habité. Des fouilles y ont mis à jour des matériaux qui peuvent remonter à l'époque carolingienne.

Place Notger, il y a eu une ancienne chapelle Notre-Dame-des­Degrés, à la base des Degrés de Saint-Pierre; puis, très voisine, l'église Saint-Clément et Saint-Trond (XIIe siècle), démolie en 1846; au sommet des degrés, l'église Saint-Pierre (VIlle siècle), démolie en 1862; les cloîtres de Saint-Pierre; un cimetière; puis, se pressant sur toute la crête, l'église Saint-Nicolas-aux-Mouches (XIe siècle); l'église Saint-Hubert (XIIe siècle ?) démolie en 1815; la basilique Saint-Martin (Xe siècle); l'église Saint-Remade-en-Mont (XIe siècle), démolie en 1801. A un horizon assez proche, Saint­Servais (Xe siècle), avec sa tour romane.

Toute cette série d'églises, depuis Sainte-Ursule et Notre-Dame­aux-Fonts, jusque Saint-Martin et Saint-Servais, établies sur une distance ne dépassant pas un kilomètre, marque un très ancien peuplement d'une ville qui doit l'origine de sa fortune, à sa situation de vieille cité épiscopale.

La façade de l'Hôtel Provincial constitue une agréable surprise, que l'on vienne de la Place Saint-Lambert, de la Rue Saint-Pierre, de la Rue de Bruxelles. A côté de la façade principale, il y a un contraste saisissant.

Mais, c'est des hauteurs des Degrés de Saint-Pierre, qu'il faut la voir se déployer dans tout le luxe de ses sculptures grises et noires, des verticales, des nombreuses fenêtres. C'est de là aussi qu'on sait fort bien se rendre compte du site vers le bas, la descente du cône de déjection de la Légia; vers le haut, les gradins de Pierreuse, avec de vieilles maisons et des jardins remplis d'arbres. Contre la base de Pierreuse, le vallon de la Légia, le Fond Saint­Servais, la tranchée du chemin de fer.

C'est là, à l'emplacement des écuries des Princes-Evêques, que Delsaux a réussi une oeuvre importante, bien dégagée du quartier voisin, en petit granit de Florzé. Il s'est rapproché autant qu'il a pu de l'architecture ogivale du XVIe siècle sans méconnaître les exigences modernes de la destination du Palais, il a emprunté certains éléments à l'antiquité classique, tout en transigeant déjà avec la Renaissance le tout, avec une liberté assez grande dans le style des colonnes du péristyle, dans le beau découpage des fenêtres, dans les colonnes et les grilles qui rappellent le luxe de la première cour.

La grille et la cour font penser à la disposition des châteaux des XVIIe et XVIIIe siècles la grille est due à MM. Fraigneux, ferronniers d'art liégeois.

Grâce au vaste développement des surfaces de l'édifice, aux saillies de ses marteaux, au péristyle, on a pu y étaler un grand nombre d'oeuvres d'art qui rappellent la composition et l'histoire de la principauté de Liège:

sur les colonnes des angles et du milieu, des statues

au faîte du premier étage, les blasons des bonnes villes

au rez-de-chaussée, les insignes des trente-deux bons métiers de la ville et des bas-reliefs rappelant certains faits remarquables de l'histoire régionale.

Afin de donner aux sculptures, une teinte en harmonie avec l'ensemble de la façade, on les a enduites d'une légère couche d'huile de lin, chauffée et mélangée avec du noir d'ivoire.

Le choix des statues et des bas-reliefs mérite examen. Pour le juger, il faut se souvenir de l'état très peu avancé des connaissances relatives à l'histoire liégeoise, en 1878. Depuis lors, de très sérieuses études ont été entreprises et ont amené d'importantes découvertes que l'on ne pouvait nullement soupçonner, il y a un demi-siècle. Mais, on peut regretter que l'on ait alors négligé certaines personnalités, certains épisodes que la chronique n'avait nullement laissés dans l'oubli notamment en ce qui concerne les XVIIe et XVIIIe siècles, des magistrats, des inventeurs, des artistes. Il y avait place pour Curtius, Renkin Sualem, Hamal, Fabry et bien d'autres.

En général, les statues sont sérieuses, réalisées avec un souci d'art et de différenciation. Supérieures à celles du Petit-Sablon, de Bruxelles, elles apportent une grande preuve de l'excellence de l'école liégeoise. Les bas-reliefs, par leur sagesse, administrent la démonstration que l'école belge de sculpture du XIXe siècle, a su rapidement se sauver de l'académisme et de l'imitation servile de l'antique, grâce à l'influence de deux grands sculpteurs liégeois, Simonis, l'auteur de la Colonne du Congrès et Jehotte, celui du Jardin du Palais des Académies.

Sur la façade du marteau de gauche, contre la Rue du Palais, on distingue

Trois statues, à la partie supérieure de la colonne de gauche:

1. Saint Monulphe (de Léopold Noppius), Evêque de Maestricht (558-597), né à Dinant. La tradition rapporte qu'il aurait prédit un brillant avenir au site de Liège;

2. Pepin de Landen (Noppius), Maire du Palais, mort en 639, ancêtre de Charlemagne et des carolingiens;

3. Saint Remacle (Noppius), Evêque de Maestricht (650-662), évangélisa l'Ardenne et le Condroz, fonda les abbayes de Stavelot et de Malmedy, aida à défricher de vastes étendues et à les mettre en culture.

Quatre blasons entre les parties supérieures des deux colonnes:

4. blason de la ville de Liège, la capitale de l'Etat liégeois;

5. blason de la ville de Tongres, la plus ancienne ville de la Belgique, riche et forte à l'époque romaine. Elle fut la première ville épiscopale du pays liégeois;

6. blason de la ville de Huy. Huy est une ville très ancienne, déjà occupée avant l'invasion romaine, pourvue, très tôt, d'un puissant château-fort, où l'Evêque se retirait en temps de crise politique. Huy fut donné à Notger, par Ansfrid, son dernier comte, en 985;

7. blason de la ville de Dinant. Dinant fut une ville très vaillante, au passé mouvementé, patrie des batteurs de métaux, les copères. Elle fut détruite par les Bourguignons, en 1467.

Trois statues à la partie supérieure de la colonne de droite:

8. Francon (J. Halkin), Evêque de Liège (856-900 ?). Il était poète, orateur, musicien. Il continua à soutenir brillamment les écoles de l'époque de Charlemagne et il devait être un digne précurseur de Notger. Il s'allia à Arnould de Carinthie et avec lui, il vainquit les Normands à Louvain en 891. Il a bien l'attitude du chevalier;

9. Rathère (J. Halkin), Evêque de Liège (953-956), écrivain remarquable, précurseur des moines de la réforme de Cluny;

10. Wazon (Decoux), Prince-Evêque de Liège (1042-1048), savant mathématicien, propagea l'instruction, secourut les Liégeois lors d'une longue famine, résista aux attaques des ducs de Brabant. Il est classé parmi les plus grands Princes-Evêques. Partisan de la réforme de Cluny, précurseur du Pape Grégoire VII, il soutint l'indépendance du clergé et du pape contre les prétentions impériales, avant la Querelle des Investitures. Jules Closon en a donné une importante biographie dans la Chronique Archéologique du Pays de Liège (1937).

Sur la partie inférieure, sur la colonne de gauche: trois statues:

11. Lambert le Bègue (Noppius), Prédicateur du XIIe siècle, curé de Saint-Christophe. Il créa des béguinages, il prêcha contre les moeurs dissolues du clergé; on l'arrêta dans la Cathédrale et on l'envoya à Rome où il fut absous. Il a peut-être inspiré Saint François d'Assise qui est venu après lui. Il a écrit en patois liégeois. L'attitude du prédicateur est parfaitement réussie;

12. Hughes de Pierrepont (Noppius), Prince-Evêque (1200-1229). Il a eu une carrière très mouvementée. Il a acquis le comté de Moha et la ville de Saint-Trond. En guerre avec le Brabant, d'abord vaincu, il remporta la victoire de Steppes, près de Montenaeken, qui mit fin pour longtemps, aux brigandages des Brabançons. II créa l'abbaye du Val-Saint-Lambert;

13. Hemricourt (Noppius), né en 1333, mort en 1403. Seigneur hesbignon, chroniqueur sérieux, on lui doit une des meilleures sources de l'histoire du moyen âge liégeois, notamment par son « Miroir des Nobles de la Hesbaye », « la Guerre des Awans et des Waroux », « le Patron de la Temporalité des Evêques de Liege ». Il fut bourgmestre de Liège en 1390 et il termina sa vie dans l'ordre de Saint-Jean de Jérusalem.

Deux blasons, immédiatement à droite

14. Blason des Fébvres ou Ferons. Ce métier était le premier, le plus important par le nombre d'artisans et la diversité des professions. II comprenait les travailleurs des métaux, sauf ceux qui s'occupaient de l'or et de l'argent. Il groupait surtout des forgerons, des cloutiers, des couteliers et des armuriers. Son blason est le seul qui soit sommé d'une couronne. Jadis, il représentait Saint Eloi portant en main, un marteau et une paire de tenailles;

15 Blason des Charliers, des constructeurs de chars, des charrons, des tourneurs de bois. Ce métier a dû être très important et il nous reste son souvenir dans un grand nombre de noms de familles, surtout à Liège et en Hesbaye.

Un bas-relief, à droite

16. Episode des guerres d'Ambiorix (Decoux). Ce bas-relief représente une scène tragique des luttes d'Ambiorix; l'armement gaulois est bien respecté.

Deux blasons, au milieu

17. Blason de Franchimont. Le Franchimont était érigé en marquisat. Sous la souveraineté du Prince-Evêque de Liège, il jouissait d'une administration particulière. Il comprenait les bans de Verviers, Theux, Spa, Sart et Jalhay. Pays de forestiers, de métallurgistes et de tisserands, il eut toujours un sens très prononcé de la liberté. Il voulut aider Liège, en 1468, en lutte contre les Bourguignons. Après le Sac de Liège, il subit de la part de Charles le Téméraire, de dures représailles. C'est encore du Franchimont et du congrès de Polleur que sortirent d'importants éléments révolutionnaires de 1789, qui mirent fin au pouvoir épiscopal;

18. Blason de la ville de Bouillon. C'était la terre liégeoise la plus éloignée. Acquise lors de la première croisade par Otbert. Louis XIV nous l'enleva au Traité de Nimègue de 1678. Pendant un siècle, Bouillon subit le sort des villes-frontières.

Un bas-relief, à droite

19. Saint Monulphe prédisant la prospérité d'une ville, dans le vallon de la Légia (Mathieu de Tombay). La légende raconte que Saint Monulphe passant par nos régions, se serait arrêté dans notre site encore inoccupé et y aurait été frappé par l'excellence de sa situation.

Deux blasons, vers la colonne de droite

20. Blason des Cherwiers ou des Cultivateurs. Ce métier comprenait aussi les briquetiers;

21. Blason des Mouiniers ou Meuniers.

Sur la partie inférieure de la colonne de droite trois statues

22. Le Sire de Perwez (Alphonse de Tombay), de son vrai nom Henri de Horn, seigneur de Perwez-en-Brabant; il soutint les Liégeois révoltés contre le Prince-Evêque, Jean Sans Pitié. Homme de guerre intrépide, il périt à la bataille d'Othée, en 1408;

23. Jean d'Outre-Meuse (A. de Tombay), né en 1338, mort en 1400, d'une très vieille famille patricienne, chroniqueur assez fantaisiste, écrivit « Ly Myreur des Histors », chronique liégeoise en cinq volumes, remontant à la création du monde et « la Geste des Evêques de Tongres et de Liège »; ces ouvrages ont été reproduits par la Commission Royale d'Histoire de Belgique. Jean d'Outre-Meuse a aussi publié « Trésorier de philosophie naturelle des pierres précieuses », traité d'architecture industrielle et artistique, dont on conserve une copie du XVIe siècle à la Bibliothèque Nationale de Paris;

24. Jehan le Bel (A. de Tombay), né vers 1290, mort en 1370; il a commencé sa carrière dans la chevalerie puis, il fut conseiller de Jean d'Avesnes, d'Edouard III et de sa femme, Philippine de Hainaut. Il a écrit d'excellentes chroniques au sujet des débuts de la Guerre de Cent Ans, qui ont fortement inspiré Froissart. « Les Vraies Chroniques de Messire Jehan le Bel » ont été publiées en 1863, par Mathieu Polain, historien liégeois. Jehan le Bel est considéré comme le premier grand prosateur du XIVe siècle.

Sur la façade du marteau de gauche, vers la cour du Palais: à la partie supérieure de la colonne de gauche

10. La statue de Wazon.

Quatre blasons entre les parties supérieures de deux colonnes

25. Blason de la ville de Ciney, la capitale du Condroz

26. Blason de la ville de Thuin. La principauté de Liège s'étendait très loin à l'ouest. Elle possédait une bonne partie de l'Entre­Sambre-et-Meuse, l'abbaye de Lobbes et la ville de Thuin. Au sud de Thuin, il y a encore une région que l'on appelle indifféremment « Le Pays de Liège » et « Li Pais d' Lidje. »;

27. blason de Fosses. La ville de Fosses fut liégeoise dès le IXe siècle

28. blason de Couvin. Couvin fut acheté par Otbert au comte de Hainaut. Cette possession allait de la Meuse à Chimay. Il y a toujours entre Couvin et Chimay, le chemin dit « des Liégeois ».

Une statue sur la colonne de droite

29. Eracle (Decoux), Evêque de Liège (959-971); savant prélat, bâtit Saint-Martin, Saint-Paul, l'abbaye de Saint-Laurent et pensa transporter la résidence épiscopale à Saint-Martin.

Sur la partie inférieure, sur la colonne de gauche une statue

24. Jehan le Bel. (A droite)

Deux blasons, immédiatement à droite

30. Blason des Boulangers. Cette corporation comprenait les fabricants de pains, miches, pains d'épices, gâteaux, pâtisseries

31. Blason des Vignerons, des maraîchers, des éleveurs de bétail.

Un bas-relief, à droite

32. La Charité de Wazon (M. de Tombay). On distingue nettement les sacs de blé, en souvenir des distributions de grains auxquelles l'Evêque procéda, durant la longue famine qui survint sous son règne.

Deux blasons, au milieu

33. Blason des Houilleurs

34. Blason des Pêcheurs et marchands de poissons d'eau douce.

Un bas-relief, à droite

35. La Bataille de Steppes (Léon Mignon). En 1212, le duc de Brabant, Henri I, Guerroyeur, beau-père de l'Empereur Othon IV, de Brunswick, prit la ville de Liège et la pilla. L'année suivante, les Liégeois, conduits par Hughes de Pierrepont, écrasèrent l'armée brabançonne, dans la plaine de Steppes, près de Montenaeken. Cet épisode se rattache aux luttes entre Brabançons et Liégeois, entre Guelfes et Gibelins, entre Philippe-Auguste, les Rois de France et les Empereurs d'Allemagne; elle précéda d'un an la célèbre bataille de Bouvines.

Deux blasons, vers la colonne de droite

36. Blason des Cuveliers et Sclaldeurs. Les Cuveliers, c'étaient les fabricants de tonneaux, de cuvelles, les marchands de vins, les cabaretiers. Les Sclaideurs c'étaient les déchargeurs de vins et metteurs de liqueurs en bouteilles

37. Blason des Porteurs (Portefaix). C'étaient les porteurs de marchandises en sacs, comme le grain et le sel. Ils travaillaient surtout au port de la Meuse. Pour être admis dans cette corporation, il fallait savoir porter, sans aide, ni repos, trois setiers de seigle (75 kilos), de la Goffe à la Porte Saint-Martin; les anciens, pour y rester, savoir le faire jusqu'à la Porte du Palais.

Une statue, sur la colonne de droite

38. Jean Van Eyck (Herman Lambert), Chambellan du Prince­Evêque Jean de Bavière, dit Jean Sans Pitié (1390-1417), peintre de Philippe le Bon, perfectionna les procédés de la peinture à l'huile. Il était né à Maeseyck, bonne ville liégeoise. Le costume de l'époque bourguignonne est bien caractéristique.

Sur la façade, au fond de la cour, à gauche du péristyle à la partie supérieure de la colonne de gauche, une statue

29. Eracle.

Au milieu, quatre blasons

39. Blason de Châtelet, ville de la Sambre

40. Blason de Saint-Trond, ville frontière, très voisine du Brabant, aussi vit-elle souvent les Liégeois se battre contre les Brabançons et les Bourguignons

41. Blason de Vise. Visé fut une ville prospère, bien avant Liège

42. Blason de Waremme. Waremme fut une ville fortifiée du Haspinga que l'Evêque Nithard (1038-1042) reçut en 1040 de l'Empereur Henri III. Dans le Haspinga, il y avait d'autres forteresses dont Walévia (Waleffe) acquise par Hughes de Pierrepont.

Sur la colonne de droite, une statue

43. Henri de Verdun (A. de Tombay), Prince-Evêque (1075-1091), acquit définitivement le pays de Waremme, lutta pour la paix sociale, pour la suppression des duels et des guerres privées, institua le Tribunal de Paix.

Sur la partie inférieure, colonne de gauche, une statue

38. Jean Van Eyck.

A droite deux blasons

44. Blason des Brasseurs. C'était un métier très important; les Liégeois sont de grands buveurs de bière depuis le XIIIe siècle, où ils étaient habitués à la cervoise;

45. Blason des Drapiers, métier florissant dans toutes nos villes, disparu de partout, sauf de Verviers.

A droite, un bas-relief

46. Episode de l'institution de la Fête-Dieu (L. Mignon). Sainte Julienne était née à Retinne en 1193, à l'époque de Saint François d'Assise. Prieure de l'hospice de Cornillon, elle provoqua l'établissement de la Fête-Dieu qui fut célébrée pour la première fois à Saint-Martin en 1246, avant de devenir une fête du monde catholique, en 1264.

Au milieu, deux blasons

47. Blason des Retondeurs ou tondeurs de draps. C'était la corporation des artisans appliqués à la police, à l'embellissement des draps. C'étaient les ouvriers les plus exigeants, les plus remuants et aussi les plus sûrs;

48. Blason des Entretailleurs ou tailleurs d'habits.

A droite, un bas-relief

49. Episode de la sortie des Franchimontois (J. Halkin), en 1468, contre les Bourguignons commandés par Charles le Téméraire et Louis XI, campés à Sainte-Walburge, avant le Sac de Liège. On remarque, ici, l'allure farouche des conjurés.

Deux blasons, vers la colonne de droite

50. Blason des Pelletiers, métier très important; tout le monde, hommes et femmes, faisait grand usage de fourrures

51. Blason des Vieux-Wariers, des fripiers vendant de vieux habits.

Sur la colonne de droite, une statue

52. Jean de Wilde (H. Lambert), héros liégeois de la lutte contre Charles le Téméraire; vaincu à Brusthem en 1467, il périt dans un coup de main contre les Bourguignons, la veille du Sac de Liège, en 1468.

Sur le retour du péristyle, du côté gauche à la partie supérieure de la colonne de gauche, une statue

43. Henri de Verdun.

A la partie supérieure de la colonne de droite, deux statues

53. Alix de Warfusée (A. de Tombay), une des belles dames de la Hesbaye du temps jadis (XIIe siècle). La noblesse du drapage est nettement remarquable

54. Pierre l'Ermite (Laumans), Prédicateur de la première croisade; il est enterré au Neufmoustier, à Huy.

A la partie inférieure de la colonne de gauche, une statue

52. Jean de Wilde.

A droite un bas-relief

55. Episode de la mort de Saint Lambert (J. Halkin). La tradition rapporte que l'Evêque aurait été assassiné, dans son église, Place Saint-Lambert, au début du Ville siècle. Les circonstances de la mort de Saint Lambert ne sont pas sûres. Saint Lambert, chef de l'Eglise régionale, gardien des terres ecclésiastiques, aurait eu à combattre les seigneurs désireux d'augmenter leurs domaines et leurs revenus. C'est dans cette lutte qu'il aurait été assassiné par Dodon, administrateur des domaines royaux.

Une autre version qui a été transmise jusqu'ici, rapporte que Dodon aurait été l'agent de la vengeance de sa soeur Alpaïde. Pepin de Herstal, Maire du Palais, aurait eu répudié sa femme Plectrude et pris Alpaïde comme concubine. Saint Lambert aurait désapprouvé pareille conduite et serait devenu l'objet de la colère de la jeune Franque.

Au musée communal de Liège, il y a un tableau du peintre liégeois Chauvin qui rappelle ce récit.

A droite, deux statues

56. Vincent de Bueren (M. de Tombay), (XVe siècle), l'un des chefs de l'entreprise des Franchimontois contre les Bourguignons, à Sainte-Walburge, en 1468. Parvenu à s'échapper, il tomba dans une embuscade quelques jours plus tard, durant le Sac de Liège

57. Saint Lambert (M. de Tombay), Evêque de Tongres et de Maestricht (669-706 ?). Il eut un épiscopat difficile durant le déclin des Mérovingiens. Il séjourna souvent à Liège où il avait bâti une maison. Son activité religieuse l'amena à faire créer les monastères de Chèvremont, d'Amay, d'Andenne; il propagea le christianisme en Campine. Il dut subir le martyre, Place Saint-Lambert; ce fut l'origine d'un pèlerinage important et un des points de départ de la formation de la ville de Liège.

Le drapage de la statue est beau ; mais la figure de l'Evêque parait beaucoup trop jeune.

Sur la façade du péristyle à la partie supérieure des colonnes, de gauche à droite; six statues

54. Pierre l'Ermite

58. Gertrude de Moha (Laumans), dernière comtesse de Moha; elle laissa son château au Prince-Evêque, vers 1245;

59. Ambiorix (Desenfants), chef éburon qui lutta vaillamment contre les armées de César et de ses lieutenants. Il préféra s'exiler en Germanie plutôt que de se soumettre aux Romains.

60. Charlemagne (Desenfants). Le récit de sa vie contient sans doute une partie légendaire. Il n'est pas certain qu'il soit né dans la région liégeoise, mais il y a souvent séjourné

61. Berthe (L. Mignon), mère de Charlemagne

62. Godefroid de Bouillon (L. Mignon), l'un des chefs de la première croisade; il vendit son château à Otbert.

A la partie inférieure de la colonne de gauche, une statue

57. Saint Lambert. (A droite)

A droite, un bas-relief

63. Notger répand l'instruction (J. Halkin). Ce fut l'un de grands soucis du prélat liégeois.

A droite, une statue

64. Notger (Decoux), premier Prince-Evêque de Liège (972-1008), il est considéré comme le plus important des Evêques liégeois. Sur la statue, on reconnaît son air décidé et martial. D'origine allemande, il fut désigné par Othon I, le Grand, comme souverain de Liège. II agrandit le domaine de l'église de Saint-Lambert, notamment du comté de Huy et d'une partie de la Hesbaye. Il fut un grand bâtisseur d'églises et de fortifications; les constructions notgériennes sont toujours visibles à Saint-Denis. Il construisit la première Cathédrale Saint-Lambert. Sous son règne, la paix, l'instruction, les arts furent protégés. L'historien liégeois Kurth lui a consacré un ouvrage important « Notger de Liège ou la Civilisation au Xe siècle ».

A droite, un bas-relief

65. Episode de l'élection des deux premiers bourgmestres par le peuple (Noppius). En 1253, pendant le règne de Henri de Gueldre (1247-1274), le tribun Henri de Dinant réussit à faire nommer les deux bourgmestres que l'on appelait maîtres-à-temps, parmi les gens des métiers. C'était, pour longtemps, le triomphe de la démocratie. Henri de Dinant et sans doute Jean Germeau furent les deux premiers élus. Ils organisèrent aussitôt les milices populaires pour défendre les libertés.

Puis, successivement, vers la droite: une statue

66. Henri de Dînant (Decoux), tribun populaire du XIIIe siècle, le Jacques Van Artevelde liégeois; il lutta contre le Prince­Evêque Henri de Gueldre et contre les nobles afin de faire respecter les droits conférés par la charte d'Albert de Cuyck. Vaincu, il dut s'exiler à Valenciennes, auprès de Marguerite de Constantinople. La pose du tribun a été bien réalisée; dans sa main, on lit « Liberté ».

Un bas-relief

67. Les armoiries de la province de Liège avec une certaine combinaison invoquant celles de la principauté et de la ville de Liège.

Une statue

68. Albert de Cuyck (A. de Tombay), Prince-Evêque (1196-1200), il octroya une importante charte aux Liégeois, confirmant tous leurs droits antérieurs. Cette charte contient notamment l'expression liégeoise: « Pauvre homme en sa maison roi est ». C'est sous son règne que l'extraction de la houille a dû prendre une certaine extension. La sépulture d'Albert de Cuyck a été retrouvée, Place Saint-Lambert, lors des fouilles de 1907.

Un bas-relief

69. L'Octroi de la Paix de Fexhe eu 1316 (A. de Tombay). La lutte entre les Grands et les Petits se termina sous le règne d'Adolphe de La Marck (1313-1344). Par la Paix, ou Charte de Fexhe, Adolphe de La Marck accordait aux Liégeois un ensemble de libertés équivalant à la Charte de Cortenberg des Brabançons. C'était une vraie charte constitutionnelle. Les Princes-Evêques la jurèrent jusqu'en 1789. C'est pour la faire respecter qu'on se révolta, ce qui entraîna la fin de l'indépendance liégeoise. Adolphe de La Marck était soutenu par les Papes d'Avignon; il fut l'allié de Philippe IV, le Bel, contre les empereurs d'Allemagne.

Une statue

70. Erard de La Marck (Noppius), Prince-Evêque de Liège, 1506­1538) de l'époque de la Renaissance, l'un des plus remarquables souverains de l'Etat liégeois. Il releva la plupart des ruines laissées après les troubles du XVe siècle et après les destructions de 1468. Il fit reconstruire le Palais, après l'incendie de 1505. D'abord allié du Roi de France, Louis XII, il se tourna vers Charles-Quint et parvint ainsi à maintenir l'indépendance de la principauté. Très savant ami d'Erasme de Rotterdam, il encouragea le mouvement intellectuel et provoqua la formation de l'école artistique de Lambert Lombard.

Un bas-relief

71. Charlemagne remet le gonfanon à l'église Saint-Lambert (Noppius).

Charlemagne aurait déjà reconnu des droits souverains à l'église Saint-Lambert et lui aurait fait cadeau d'un gonfanon, étendard gardé par le chapitre cathédral et destiné à exalter le courage dans les combats. Il était de soie rouge, bordé d'une crépine d'or et fixé à une grande lance. Dans la croix de la lance, il y avait une cloche que l'on agitait pour appeler le peuple aux armes. A la guerre, il était confié au Haut-Avoué de la Hesbaye. Il fut perdu à Brusthem, en 1467. On en refit un autre sur l'ancien modèle; il fut à nouveau perdu lors des emigrations de 1789.

Une statue sur la colonne de droite (A gauche)

72. Saint Hubert (Mignon), Evêque, successeur de Saint Lambert (706 ?-727), transféra à Liège, le siège de l'évêché de Tongres et de Maestricht. Il établit un code de police et fixa le système des poids et mesures. Cette statue est plus réaliste que celle de Saint Lambert.

Sur le retour du péristyle, du côté droit, à la partie supérieure, il y a, successivement deux statues, sur la colonne de gauche

62. Godefroid de Bouillon

73. Charles Martel (Van de Kerkhof), fils de Pepin de Herstal, Maire du Palais (715-741), vainqueur des Musulmans, à Poitiers, en 732.

Une statue sur la colonne de droite

74. Pepin de Herstal (Van de Kerkhof), Maire du Palais (679-714), établit sa résidence à Jupille et à Herstal.

A la partie inférieure sur la colonne de gauche, deux statues

72. Saint Hubert;

75. Velbrück (Mignon). Suivant le premier projet, à cet emplacement, il devait se trouver la statue de Sébastien La Ruelle. Velbruck (1771-1784) fut un excellent Prince-Evêque. Contemporain de Joseph II, il fut un Prince éclairé. Sous son règne, les idées nouvelles, politiques, philosophiques, techniques purent se développer librement. Il créa la Société l'Emulation. Velbrück fut sincèrement regretté par les Liégeois. Cinq ans après sa mort, la révolution éclatait et chassait le Prince-Evêque.

L'attitude opulente, majestueuse, bien fin XVIIIe siècle, de Velbrück, est bien respectée. M. Georges de Froidcourt a publié récemment: « François-Charles, comte de Velbrück, Prince de Liège, Franc-Maçon ». (Couronné du Prix Rouveroy.)

Puis, un bas-relief

76. L'assassinat de Sébastien La Ruelle (Van de Kerkhof). Le bourgmestre La Ruelle fut assassiné en 1637 par des soldats espagnols, sur l'ordre du comte de Warfusée. C'est un épisode tragique de la participation de nos provinces à la guerre de Trente Ans. On remarque nettement l'attitude de Warfusée, impitoyable et cynique.

Sur la colonne de droite, une statue

77. Goswin de Strailhe (Noppius), un des chefs de l'attaque nocturne des Franchimontois en 1468. Livré à Charles le Téméraire, après le Sac de Liège, il fut décapité devant la Cour de Bruxelles, pour la divertir.

Sur la façade du fond de la cour, à droite du péristyle, à la partie supérieure, successivement: une statue

74. Pepin de Herstal.

Quatre blasons

78. blason de Looz. Looz était une bonne ville, chef-lieu d'un comté formé de la majeure partie de la province de Limbourg. Il devint liégeois au XIIIe siècle. Le comte de Looz demeura un des plus puissants seigneurs de la principauté

79. Blason de Hasselt;

80. Blason de Maeseyck;

81. Blason de Bilsen.

Une statue

82. Gérard de Groesbeek (A. de Tombay), Prince-Evêque (1563­1580), contemporain du duc d'Albe, il abandonna l'alliance de l'Espagne. Il travailla de son mieux au maintien de la paix dans la principauté, durant l'époque excessivement difficile de la Révolution du XVIe siècle, aux Pays-Bas. Sous son règne, les métiers furent actifs et prospères; la démocratie reprit sa puissance du XIVe siècle. A remarquer le costume très sobre du temps de la Réforme. Cette statue n'était pas dans le projet primitif, mais bien celle du miniaturiste Jean de Stavelot (XV siècle), chroniqueur de l'abbaye de Saint-Laurent

A la partie inférieure, successivement : une statue

77. Goswin de Strailhe.

Deux blasons

83. Blason des Naiveurs ou des bateliers

84. Blason des Soyeurs ou des scieurs de long.

Un bas-relief

85. Le duel d'Aynechon et de Falloz (Van de Kerkhof), épisode sanglant de la guerre civile des Awans et des Waroux, qui décima la noblesse hesbignonne au XIIIe siècle. Ce duel eut lieu en 1296, à l'emplacement de la Place Foch.

Deux blasons

86. Blason des Marniers, marchands de bois

87. Blason des Charpentiers, menuisiers, ébénistes, luthiers, faiseurs de bois d'arquebuses. Sur trente-deux métiers, il y en avait cinq qui intéressaient le travail du bois. Celui-ci avait alors une grande importance en construction et dans les usages ordinaires, le fer et la pierre étant d'une utilisation encore très réduite.

Un bas-relief

88. La Mâle Saint-Martin (Desenfants). C'est un tragique événements de la lutte entre les Grands et les Petits. Attaqués par les Grands, Place du Marché, dans la nuit du 3 au 4 août 1312, les Petits résistèrent victorieusement à l'attaque et poursuivirent les nobles jusqu'en Saint-Martin. Ceux-ci se réfugièrent dans l'église et y mirent le feu. Pas un seul n'échappa. On appela ce drame « li mâle Saint-Martin » (ou la mauvaise Saint-Martin). Ce furent les Matines liégeoises, dix ans après les Matines brugeoises. On était en pleine guerre civile des Awans et des Waroux. La noblesse était très affaiblie. Le peuple était vainqueur. Il obtint la Paix d'Angleur (1314) qui consolidait son pouvoir; c'était le prélude de la Paix de Fexhe, deux ans plus tard.

Deux blasons

89. Blason des Couvreurs

90. Blason des Maçons, tailleurs et sculpteurs de pierre.

Une statue, sur la colonne de droite

91. Georges-Louis de Berghes (Noppius), Prince-Evêque (1723­1743), fit reconstruire le Palais, après l'incendie de 1734 et il légua ses biens aux pauvres de la Cité.

Sur la façade du marteau de droite, vers la cour de l'Hôtel Provincial à la partie supérieure, successivement : une statue

82. Gérard de Groesbeck.

Quatre blasons

92. Blason de Beeringen

93. Blason de Herck

94. Blason de Brée

95. Blason de Stockhem.

Trois statues

96. Lambert Lombard (A. de Tombay), artiste liégeois, né en 1505, mort en 1566, protégé d'Erard de La Marck, architecte-peintre du Palais et de la Cité de Liège, savant humaniste, numismate, archéologue, étudia la Renaissance en Italie, revint à Liège, y créa l'école liégeoise et ne fut pas sans influence sur l'école flamande. Son action à Liège fut considérable tant par son école que par ses oeuvres.

97. Chapeauville (M. de Tombay), né en 1551, mort en 1617, chanoine de Saint-Lambert, écrivit l'histoire de la principauté au XVIe siècle.

98. François Borset (M. de Tombay), artisan liégeois du début du XVIe siècle, qui a travaillé à la reconstruction du Palais. Jusqu'en 1896, on l'a pris pour l'architecte du Palais; cet honneur doit revenir à Arnold Van Mulken.

A la partie inférieure, successivement une statue

91. Georges-Louis de Berghes.

Deux blasons

99. Blason des Corbusiers qui travaillaient la chaussure ordinaire, les souliers de femmes et d'enfants; ce métier comprenait aussi les savetiers

100. Blason des Corduaniers ou cordonniers, travaillaient les bottes et chaussures d'hommes en cuir de Cordoue ou cordouan, en cuir de veau, de vache, de mouton.

Un bas-relief

101. La Bataille d'Othée (Desenfants). Cette défaite des Liégeois, en 1408, par Jean Sans Peur, duc de Bourgogne, fut le commencement des malheurs et de la décadence du XVe siècle.

Deux blasons

102. Blason des Tisserands, des travailleurs du lin, des fabricants de toiles

103. Blason des Cureurs et Toilers, des travailleurs de la toile, des lingères et des blanchisseuses.

Un bas-relief

104. La mort de Louis de Bourbon (A. de Tombay), Prince-Evêque (1455-1482), protégé par les ducs de Bourgogne; tout son règne s'écoula en luttes contre ses sujets. C'est alors que la ville de Liège fut complètement détruite. Après la mort de Charles le Téméraire, Louis de Bourbon, livré à ses propres forces, fut vaincu dans une lutte devenue inégale. Il fut tué en 1482 par Guillaume de La Marck, frère du Sanglier des Ardennes, à la Bonne-Femme, entre Liège et Grivegnée, près du défilé étroit de la Chartreuse.

Deux blasons

105. blason des Fruitiers et Haranguiers

106. blason des Mangons ou des bouchers; ce métier était très important; la halle des bouchers existe toujours, au quartier de la Goffe.

Trois statues

107. Mathias-Guillaume de Louvrex (J. Halkin), bourgmestre de Liège, magistrat, juriste de grande valeur, né en 1665, mort en 1734;

108. Charles de Méan (J. Halkin), bourgmestre de Liège, né en 1604. mort en 1674, juriste, rédigea « le Droit Civil des Liégeois » annoté plus tard par Louvrex

109. Jean Delcour (J. Halkin), né à Hamoir en 1627, mort à Liège en 1707, étudia la sculpture en Italie. Ses oeuvres sont nombreuses au pays de Liège, notamment des statues religieuses. Liège possède de lui, particulièrement, la Vierge de Vinâve d'Ile, la grande fontaine du Marché, Saint-Jean-Baptiste, en Hors-Château. Le drapage de ces trois statues est particulièrement remarquable.

Sur la façade du marteau de droite, vers la Place Saint-Lambert à la partie supérieure une statue

98. François Borset.

Quatre blasons

110. Blason de Hamont, localité limbourgeoise

111. Blason de Peer, localité limbourgeoise

112. Blason de Verviers

113. Blason de Maestricht, longtemps ville indivise entre Liège et le Brabant.

A la partie inférieure une statue

109. Jean Delcour. (A droite)

Deux blasons

114. Blason des Tanneurs, corroyeurs, mégissiers, maroquiniers

115. Blason des Chandelons et Floqueniers. Les Chandelons fabriquaient et vendaient des chandelles, des huiles, de la moutarde, des balais, des brocalles, ancêtres de nos allumettes, des savons, des teintures. Les Floqueniers avaient dans leur ressort, les flocons, les literies et matelas, les tapis, les chapeaux de feutre, les poteries et la vaisselle de terre.

Un bas-relief

116, L'exécution de Guillaume de La Marck (A. de Tombay) la fortune des armes reviendrait au successeur de Louis de Bourbon, Jean de Hornes (1482-1505). Guillaume de La Marck, tombé aux mains de l'Evêque, serait décapité à Maestricht en 1485, trois ans après l'assassinat de Louis de Bourbon.

Deux blasons

117. Blason de Herstal qui n'était cependant pas au nombre des bonnes villes

118. Blason de Hornes qui ne l'était pas davantage, mais une partie du comté de Hornes relevait de Liège.

Un bas-relief

119. L'érection du Palais par Erard de La Marck (Laumans). Ce bas-relief ne pouvait pas être omis dans cette galerie.

Deux blasons

120. Blason des Merciers; ce métier s'intéressait à la mercerie, aux objets d'habillement, aux ustensiles et outils, aux épiceries, aux drogues et articles d'apothicaire

121. Blason des Orfèvres, métier comprenant les orfèvres, les bijoutiers, les lormiers (fabricants de mors et de harnachements), les graveurs, les peintres, les verriers, les vitriers, les imprimeurs et les libraires.

Ainsi, on peut suivre, par l'analyse de la façade de la Place Notger, une forte partie de l'histoire de la principauté, sa composition, ses anciennes activités régionales.


c) La Façade de la Rue du Palais.

C'est la façade qui porte le mieux la trace des outrages successifs des siècles. Tournée vers une rue étroite, la Rue du Palais et les collines de Pierreuse, elle n'a pas subi de restauration récente.

Passé l'angle de la Place Notger et la statue de Lambert Le Bègue qui semble commander à toute la rue, c'est la construction de Delsaux que l'on a d'abord. Du même style que les autres façades du début du XIXe siècle, elle ne paraît pas être achevée. Il reste des emplacements pareils à ceux de la façade de la Place Notger et qui attendent des bas-reliefs et des statues.

Puis, c'est la façade gothique d'Erard de La Marck fermant la première cour. C'est un précieux témoignage de la construction de Van Mulken.

Elle a été moins soignée et l'arc surbaissé lui a donné une certaine lourdeur. Rongée par le temps, démolie par les hommes, elle n'a pas été non plus achevée. Des niches attendent des statues, là aussi. De nombreux blasons ont été bouchardés, privés de leurs armoiries, à la Révolution. De superbes cannelures de colonnes se sont effritées. Des meneaux ont laissé choir une partie de leur ornementation. Des pinacles manquent.

Le porche donnant sur la première cour est malheureux; c'est plutôt celui d'une grange que celui d'un Palais. Il forme un singulier contraste avec les galeries que l'on aperçoit de la rue.

Plus bas, c'est l'énigmatique muraille des appartements d'Erard, à l'emplacement approximatif du Palais de Notger. Elle porte les stigmates de l'abandon et des écroulements. C'est la partie la plus ravagée. Il y reste des arcs gothiques brisés, non réparés, des tronçons de colonnes abandonnés, dans une muraille lourde, plate, uniforme. Des fenêtres quelconques ont remplacé les baies à croisillons.

Çà et là, on devine une lézarde. Singulièrement, une porte donnant sur la deuxième cour a été bien restaurée.

Le 26 novembre 1766, une tour qui se trouvait à l'angle nord­ouest de la deuxième cour, s'écroula: elle dut entraîner plus d'une déprédation dans la façade extérieure; c'est vraisemblablement le point de départ des ravages de la muraille de la Rue du Palais. Le pouvoir épiscopal était alors à son déclin et le goût artistique, de peu de valeur. Il y eut une restauration en 1776; les ressources financières étaient réduites. Le cachet ogival disparut.

La Rue du Palais est très ancienne, manque de régularité. La partie qui va de la Place Notger au bas de la Rue Pierreuse, s'est appelée Dessous les Chéneaux, par suite de la présence des conduites d'eau d'un moulin situé à l'endroit où se trouvent les écuries du Gouverneur. A peu près au même emplacement, jusque très tard au XIXe siècle, une source dont l'eau devait avoir des propriétés particulières, alimentait un atelier où l'on trempait l'acier: on y travailla une quantité incroyable d'épées et de couteaux envoyés par les aciéries de Solingen. Le reste de la rue s'est appelé jusqu'en 1863, Rue Derrière le Palais.

La rue fut jadis beaucoup plus étroite qu'elle ne l'est aujour­d'hui. La Légia y a coulé à ciel ouvert et l'on dut y construire une série de ponceaux. Un puits également à ciel ouvert et les étalages de nombreux fripiers gênaient la circulation. Actuellement, le mouvement y est toujours intense on y évite les encombrements de la Place Saint-Lambert et de la Place du Marché. Cette circulation parait bien remonter à plusieurs siècles.

La Rue du Palais est construite au pied de Pierreuse, par où l'on gagnait le pays de Tongres.

Il faut bien se garder d'attribuer au quartier de Pierreuse, une signification péjorative qu'il ne possède pas. C'est un quartier ouvrier, gagne-petit, populaire, gai, pétulant, autant révolutionnaire qu'Outre-Meuse, ce qui n'empêchait pas le Prince-Evêque de venir par là, lors de sa Joyeuse-Entrée. L'humeur wallonne s'y est bien maintenue ; un caractère de refuge lui a donné un certain internationalisme qui n'y a rien altéré.

Chemin rocailleux, très raide, il conduit à la Citadelle. Vieux quartier, modeste, il voisine immédiatement avec l'opulence des rues et des places de l'agglomération centrale. De la Place Saint-Lambert, on ne le soupçonnerait jamais. Il lui reste de très vieilles maisons posées de guingois, des caves à même le trottoir, des seuils où l'on fait la causette, des placettes pour les jeux et les flâneries. Il donne accès à l'église Saint-Servais dont les paroissiens se réclament les plus anciens de la ville. Il offre une vue générale sur le Publémont, jusqu'au delà de Saint-Martin.

A gauche des écuries du Gouverneur, jusqu'au XIXe siècle, il a existé un Hôtel qui a eu son époque de célébrité. Ce fut l'Hôtel du Canal de Louvain, d'où partait, au XVIIIe siècle, la diligence pour Hasselt et Bruxelles.

Les écuries, à présent désaffectées, datent de l'époque de Delsaux; elles ont succédé à un moulin à chicorée qu'Orban y avait bâti à la place du moulin des Chéneaux.

Au pied de Pierreuse, subsiste la Commanderie des Vieux-Joncs.

Elle fut le refuge de l'Ordre Teutonique à partir de l'an 1300. Restaurée en 1759, elle a servi au curé de Saint-André, jusqu'à la Révolution, comme presbytère, puis devint, pour peu de temps, l'Hôtel de Londres, puis enfin, local de logements multiples. Acquise par la ville de Liège en 1920, certains services judiciaires s'y sont établis.

Toute la rue a conservé de très vieilles bâtisses, genre mosan, avec des murailles à croisillons, de petites fenêtres à carreaux nombreux. De vieilles enseignes ont disparu, remplacées par un modernisme moins savoureux. Au n° 60, on suppose que la première imprimerie s'est installée. Aux n° 58-56, il y eut l'Hôtel de la Clef; Raes de Heers qui se distingua à Brusthem, en 1467, y habita. Aux n° 54-52-50, le Café du Timbre, constituant tout un immeuble caractéristique, était le rendez-vous en vogue des Liégeois, au siècle passé. Au n° 44, on lit une plaque très suggestive

LE 14 MAI 1836

EST NE DANS CETTE MAISON

EDOUARD REMOUCHAMPS

AUTEUR DE LA CELEBRE COMEDIE

TATI L' PERIQUI

DONT LE SUCCES DETERMINA

LE REVEIL DU SENTIMENT WALLON.

« LES AMIS DE L'ART WALLON. »

La partie inférieure de la rue touchait aux jardins princiers. Brusquement, on y arrive à deux quartiers très différenciés d'une part, celui des Mineurs, avec l'église Saint-Antoine, Hors-Château, des venelles en cul-de-sac, de véritables Cours des Miracles; d'autre part, la Place du Marché, celle de nos grand'places qui a le mieux conservé un cachet d'autrefois.


d) La Façade vers Saint-André.

Il reste la façade tournée vers Saint-André. Elle est assez mal conservée. Tout ce quartier est menacé depuis longtemps. On y a projeté une rue reliant le Marché à la Rue du Palais. Il subsiste quelques très vieilles maisons comme il y en avait tant adossées au Palais.


B. Les Cours intérieures.

L'existence de plusieurs cours intérieures édifiées au détriment des jardins princiers, remonte au moins à l'époque de Henri de Leyen. Lors de la reconstruction par Erard, il y en eut quatre.

Une cour séparait à l'ouest, le Palais, des écuries; elle a disparu avec l'établissement de l'Hôtel Provincial.

Une autre cour, dite la troisième cour, aboutissant à Saint-André, est également en voie de disparaître.

Erard y avait fait un jardin botanique exceptionnellement riche. Elle était entourée d'ateliers pour les artisans du Palais, notamment pour le serrurier; il y avait encore là, une glacière, et Velbrück y avait fait reconstruire une forge.

Au XVIIIe siècle, cette cour supportait un grand abandon. Le jardin botanique y avait été ruiné et l'on y avait établi un manège pour dresser les chevaux. Puis, les locaux du pourtour servirent, à la Révolution, de prison pour femmes et pour vagabonds.

Actuellement, cette cour est dans un total délabrement. En 1863, la ville de Liège a voulu y créer une place publique; le projet n'est pas réalisé. Des constructions destinées aux administrations publiques y ont été élevées. Le dôme de Saint-André y est assez inattendu; il rappelle celui de Saint-Jean.

Une deuxième cour qui était la cour privée du Prince-Evêque, est, à présent, et pour longtemps encore, un véritable chantier. On y travaille à une restauration totale. Il y apparaîtra des merveilles comme dans la cour principale.

On a peine à s'imaginer l'abondance des ornements de cette cour princière intime. A la muraille occidentale, d'un énorme rocher, sortaient des jets d'eau et des gerbes de fleurs. Au milieu des parterres, la fontaine existait déjà, avec sa balustrade sculptée, ses statues, ses sirènes à jets d'eau, son aigle impériale déployant largement ses ailes.

Le péristyle y est inachevé; des galeries n'existent que sur deux façades. La restauration fera apparaître les colonnes, les blasons, les sculptures et sans doute, le cadran solaire d'Erard de La Marck.

En dehors de l'abandon et du désordre, cette cour si enchanteresse, a subi plus d'un outrage. Il y a eu l'écroulement de la tour du nord-ouest; puis, à la Révolution, on a bouché les galeries pour y aménager des prisons en 1842 et en 1860, une des parties des voûtes méridionales s'effondra. Umé et Noppius réussirent déjà une restauration partielle.

La première cour, ou la cour principale, c'est du Palais, la partie la mieux connue. Plus d'un voyageur, plus d'un artiste, plus d'un littérateur l'ont décrite. Victor Hugo s'y est longuement arrêté.

Les galeries couvertes ont joué le rôle du Forum romain. Elles ont servi d'abri au peuple assemblé. Il lui est arrivé de les envahir dans les époques révolutionnaires et troublées; mais ce fut assez rare, malgré les nombreuses séditions de toute l'histoire liégeoise. C'est de là que les révolutionnaires liégeois partirent pour Bruxelles, en 1830.

Cour principale et galeries ont été, jusqu'assez tard au XIXe siècle, un domaine public. Les carrosses et les chaises à porteurs y stationnaient comme aujourd'hui les autos On s'y mettait à l'abri des intempéries. Les négociants s'y donnaient rendez-vous. Les avocats y attendaient la clientèle. On y organisait des jeux publics, des joutes de chevalerie, des poursuites d'animaux sauvages. Au début du siècle dernier, on y lâcha des ballons. Durant des siècles, jusqu'en 1867, il s'y tint, tous les matins, un marché de choses les plus disparates, depuis les légumes, les tableaux, jusqu'aux friperies et ferrailles du bric-a-brac.

A la Révolution, les blasons furent pour la plupart, bouchardés. Des richesses accumulées, durant de nombreux règnes, furent brûlées dans la cour du Palais. Nicolas Bassenge commanda de planter, au milieu, l'Arbre de la Liberté. Actuellement, la vie des galeries est plus monotone. Le dimanche, les après-midi, durant les vacances, elle est réduite au minimum. Mais, le matin, elle est tout entière accaparée par ceux qui ont surtout affaire avec le pouvoir judiciaire. Elle en a acquis un surcroît de solennité.

Les colonnes font de la cour, une des plus belles d'Europe. En opposition violente avec la façade, elles s'unissent à tout le décor pour exalter l'imagination et provoquer le recueillement.

Elles sont courtes, variées, trapues, se rapprochent des proportions de l'ordre toscan. Leur originalité est totale elles ne rappellent en rien les siècles passés; elles constituent un singulier type de construction gothique dans un décor renaissance. Peut-être, l'architecte a-t-il été inspiré par les dessins d'Albert Durer.

On a l'illusion qu'elles sont monolithes; il n'en est rien. Reposant sur un disque de plomb, elles sont composées de cinq pièces: la base, deux pièces dans le fût, un anneau intermédiaire, le chapiteau.

Elles sont toutes différentes et leur différenciation n'amène aucune dissymétrie, aucun contraste. Elles figurent de gros balustres, bombés par le bas, rappelant l'architecture indoue. Les chapiteaux cubiques font penser à l'art roman. L'arc ogival qui les réunit, est surbaissé et se rapproche de l'anse de panier. Le chapiteau, c'est du gothique luxuriant; les sculptures des fûts sont d'une richesse inouïe, avec des arabesques, des dessins, des figures, des grotesques, des macarons, des animaux, des feuilles, des fleurs et des anges.

Ces colonnes sont en excellent état. Celles de la galerie septentrionale ont dû être restaurées. C'est là que, au cours de quatre siècles, l'érosion a le plus agi; certains chapiteaux ont dû y être remplacés. Dans la galerie méridionale, à droite de l'entrée, la troisième et la quatrième colonnes ont dû être remplacées entre 1784 et 1789; elles sont très reconnaissables par leurs piédestaux carrés.

Quand on suit le pourtour des galeries, on peut se rendre compte des multiples transformations et restaurations qu'elles ont subies. Il reste dans les murailles, des fenêtres, des portes de l'époque d'Erard; pour d'autres, on en voit les traces; certaines ouvertures ont été bouchées, à une époque indéterminée; on aperçoit, çà et là, un arc gothique ou renaissance. A certaines portes qui sont restées ou qui sont restaurées (ainsi la deuxième de la galerie parallèle à la Place Saint-Lambert), on peut deviner ce qu'elles étaient dans l'oeuvre de Van Mulken.

La perspective des voûtes est d'un excellent effet. L'impression de grange de ferme que l'on a sous le porche, a vite disparu. Il a fallu restaurer certaines voûtes. Avant 1561, il y en a déjà qui se sont écroulées; c'est très observable, près du porche donnant accès à la Rue du Palais.

Gérard de Groesbeck, en 1568, Ernest de Bavière, en 1587, les firent réparer. Sur deux arcs doubleaux de cette région, on peut lire les chronogrammes qui révèlent les deux dates précitées:

EXEMPLO A GROISBEKE TIBI PRAEVNTE

GERARDO

O DUX REXQVE ERNESTE LABANTIA

BAVARE FIRMAS

Ces deux vers latins signifient

A l'exemple de ton prédécesseur Gérard de Groisbeke ô chef et roi, Ernest, tu restaures des choses branlantes de la Bavière.

Ces restaurations expliquent en outre la présence, dans la galerie orientale, des écussons de Gérard de Groesbeck et d'Ernest de Bavière, parmi de nombreux blasons d'Erard de La Marck que la fureur révolutionnaire n'a pas pu atteindre. C'est ainsi qu'au fond de la galerie occidentale, aux intersections des nervures de la voûte d'angle qui la relie à la galerie septentrionale, on compte sept fois les armoiries d'Erard; à la voûte de la galerie septentrionale, quatre fois celles d'Ernest de Bavière; à la voûte d'angle de cette galerie, dix-sept blasons d'Erard et six de Gérard de Groesbeck.

Dans la galerie occidentale, celle de l'Hôtel Provincial, on peut lire une plaque commémorative datant de 1930 et qui attend toujours son inauguration

LES 3 ET 4 SEPTEMBRE 1830, SONT PARTIS DE LA COUR DE CE PALAIS, SOUS LA CONDUITE DU CHEVALIER DE BOSSE, DE J. J. CHARLIER ET DE L'AVOCAT CHARLES ROGIER, LES VOLONTAIRES LIEGEOIS QUI ALLERENT CONTRIBUER SI GLORIEUSEMENT A BRUXELLES, AU SUCCES DE LA REVOLUTION BELGE ET A LA LIBERATION DU TERRITOIRE.»

Il convient de rapprocher cette inscription d'une autre encastrée dans la façade du Théâtre Royal, vers la Rue Georges Clémenceau:

ICI, LE 2 SEPTEMBRE 1830

A L'APPEL DE CHARLES ROGIER,

S'ENROLERENT LES PREMIERS VOLONTAIRES

LIEGEOIS DE LA REVOLUTION BELGE.

CONFERENCE DU JEUNE BARREAU DE LIEGE, 1931.

Enfin, à l'entrée de cette galerie, sur la marche supérieure de l'escalier donnant accès au porche, il y a une inscription énigmatique, sous forme de trois feuilles de saule. C'est la signature de Delsaux, l'architecte provincial, auquel on permit de signer son oeuvre. Il y mit, symboliquement, la traduction wallonne de son nom.

Au milieu de la première cour du Palais, il y a eu, jusqu'au XXe siècle, une fontaine bien pourvue d'eau par l'araine du Val-Saint-Lambert, descendant des hauteurs d'Ans. En temps de pluie, on peut encore eu retrouver la trace à la surface du pavement. Cette araine a pu se confondre avec la Légia.

La Légia, venue de la Rue de Bruxelles, a décrit des méandres et changé de cours. Elle a coulé, Place Saint-Lambert et elle en a baigné la villa belgo-romaine. Elle a, par la suite, pénétré sous le palais, là où se trouve la loge du concierge du gouvernement provincial; elle a traversé obliquement la cour pour gagner la Place du Marché et circuler sous la Violette. Elle a coulé, à ciel ouvert, Rue du Palais. Actuellement, on n'en a plus de trace que dans les égoûts de la ville.

De l'intérieur de la première cour, le péristyle se développe totalement en un quadrilatère ajouré, aux multiples armoiries d'Erard de La Marck.

Il y a de légères différences entre les diverses façades, mais ces différences ne rompent nullement l'unité. La façade tournant le dos à la Place Saint-Lambert est plus pure et plus élégante. Les toitures sont belles, décoratives par leur pente et par le fond qu'elles préparent.

Il entrait dans le plan de Delsaux de réunir les deux cours par un passage central à trois arcades et de mettre, dans les niches, et sur les façades intérieures, les statues et les blasons des Princes­Evêques. Ces projets n'ont pas été réalisés. En 1850, il restaura la galerie occidentale et toute la façade de l'Hôtel Provincial que l'on avait refaite en briques, après 1734.

De 1378 à 1881, Noppius restaura les trois autres façades. D'abord, la façade orientale et les chapiteaux de sa galerie puis, la façade septentrionale qui était fort délabrée; la façade méridionale ne dut recevoir que quelques retouches.

L'étude des cours serait incomplète si l'on ne mentionnait pas les quelques centaines de pigeons qui y vivent. Ils apportent de la vie, de la familiarité à l'édifice et à la Place Saint-Lambert. Ils ont leurs habitudes, nichent peu au pigeonnier provincial, élisent domicile, partout où une corniche, un chapiteau leur sont propices. Ils ne sont pas sans causer une foule de dégradations au Palais.


C. Les Tours.

Il faut aussi s'imaginer, dans le Palais, ce qui n'existe plus. Sinon, on risque d'avoir de l'ouvre d’Erard et de Van Mulken, une idée très imparfaite.

Il n'était pas possible qu'une demeure seigneuriale et princière ne fût pas garnie de tours.

Les premiers palais épiscopaux avaient dû avoir des tours et celles-ci avaient, vraisemblablement, servi de tours de défense.

La tour de l'Official, au sud-ouest, était en ruines, à la fin du XVe siècle.

Au Palais d'Erard, il s'élevait une tour élancée, à plusieurs étages, aux quatre angles de la première cour. La deuxième cour n'en était pas pourvue. La première cour étant accessible au public, sans doute, ces tours devaient-elles rappeler la présence et l'autorité du Prince-Evêque souverain. Il y eut une cinquième tour à l'extrémité orientale du Palais; on l'appela la tour de Quintaine. On n'en connaît pas le rôle; située, vers les Mineurs, au bout des jardins épiscopaux, servit-elle de tour de repos, de plaisance, ou de vide­bouteilles comme il y en a tant dans la vallée de la Meuse ?

L'une après l'autre, les tours disparurent.

Déjà sur le plan de Blaeu (début du XVIIe siècle), la tour située vers la Rue Sainte-Ursule ne figure pas. Erard était mort en 1538 et cette tour s'écroula en 1540. On ne la rétablit pas.

La tour ou prison de l'Official, à l'angle sud-ouest, disparut après l'incendie de 1734.

En 1766, la tour du nord-ouest, au pied de Pierreuse, s'écroula à son tour, et c'est à cette époque, que l'on dut démolir celle qui s'élevait au nord-ouest.


D. L'Impression Générale.

Avant de pénétrer dans les locaux du Palais, il ne doit pas être sans intérêt, ni superflu, de donner une vue d'ensemble sur toute la construction qui vient d'être étudiée.

A en juger par la situation des anciens remparts, par le développement de la ville médiévale, par les agrandissements successifs du Palais, il devait y avoir de très vastes dépendances et de très grands jardins. Vers la Place du Marché et les Mineurs, l'étendue du Palais a sensiblement diminué, mais vers la Place Notger, elle a pris une extension maximum.

Son plan a été emprunté à la Renaissance italienne. Mais la plupart des éléments sont gothiques. Ce n'est plus le château-fort avec fossés, machicoulis, mais un château de plaisance tel qu'on l'élevait sur la Loire, à l'époque de François I et de Henri II. Il n'y a rien du style mosan, comme c'est le cas pour d'autres constructions liégeoises contemporaines.

Néanmoins, le Palais porte les signes de la décadence où était tombée l'architecture ogivale au XVIe siècle. Il lui manque de hautes lignes verticales, et le défaut d'élévation est encore accentué par la disparition des tours et la division du fût des colonnes de la cour principale.

Les apports des architectures étrangères sont indéniables; ils étaient inévitables, vu la situation de carrefour géographique de la ville de Liège.

Le Palais possède très heureusement une certaine élégance, une grande originalité, d'où la sévérité, la grâce, la délicatesse et la richesse ne sont pas exclues.


V. L'INTERIEUR DU PALAIS PROVINCIAL

L'Hôtel Provincial est de construction et d'aménagements récents. Nous n'y rechercherons pas les traces de l'ancien Hôtel des Etats, le tout étant très moderne, datant de la deuxième moitié du XIXe siècle.

Il a fallu tenir compte, autant que c'était possible, de l'architecture de la première cour, de la façade de la Place Notger; aussi, dans le vestibule, les colonnes, les portes rappellent les styles antérieurs. Ailleurs, la décoration a été plus libre. On est peu habitué à l'éclat du polychromé tel qu'on le rencontre dans certaines parties de l'Hôtel.

Certains, habitués à des beautés plus sobres, à des pièces d'art bien classées, en seront surpris.

Ici, le but, c'était de donner du relief au siège de l'assemblée délibérante provinciale, de la chaleur à une salle du Conseil où les débats, à une période censitaire, devaient être beaucoup plus froids, plus calmes, moins colorés qu'ils ne le sont aujourd'hui. On est même allé jusqu'à l'abus des couleurs vives et surtout des inscriptions.

Mais, de tout cela, on ne s'en plaint pas: c'est toute une surprise dans l'ensemble assez austère et fastueux.

A. Le Vestibule; les Escaliers; la Salle des Pas-Perdus.

Dans une demi-clarté, le vestibule n'est pas sans une certaine majesté, sans exagération, bien propre à sa destination.

Les colonnes sans être aussi riches qu'ailleurs, sont d'une bonne construction gothique, où l'art indou n'est pas complètement étranger.

A gauche et à droite, un escalier ample, majestueux, conduit à l'étage, à la salle des Pas Perdus.

De part et d'autre, Vieillevoye, peintre verviétois du siècle dernier, a peint deux tableaux représentant les deux principaux bâtisseurs du Palais: Notger et Erard de La Marck. La touche est savante et le coloris superbe.

Chez Notger, la tête est belle; il y a toutefois une certaine raideur dans les draperies. Erard a la tête fine du prélat cultivé. Le violet, très malaisé à obtenir, ne manque pas de distinction.

Puis, s'élevant dans l'escalier, on atteint deux grandes fresques du peintre Emile Delpérée. Elles représentent deux faits essentiels de l'histoire de la démocratie liégeoise: l'Octroi de la Paix de Fexhe, en 1316, épisode déjà cité dans les bas-reliefs de la façade de la Place Notger, et la Restitution du Perron, en 1477. Sous les deux fresques, sont reproduites les armoiries des cinq parties de la Principauté de Liège : Looz, Franchimont, Liège, Hornes et Bouillon.

Delpérée a, ici, réussi des fresques difficiles à réaliser, tant elles ont dû être rapidement ébauchées et achevées. On lui a parfois reproché, ailleurs, une certaine vulgarité, ainsi dans « les Députés Gantois devant le Palais de Charles le Téméraire »; ici, il a su éviter cet écueil. Les dessins sont bons; les coloris, calmes, sans recherche.

Dans « la Paix de Fexhes », l'Evêque Adolphe de La Marck jure sur son épée et sur un livre sacré; un des deux bourgmestres, habillé de rouge, montre la charte à signer; un moine, à genoux tient la croix. Les armoiries des armes et des boucliers, les costumes des hommes d'armes sont reproduit avec une grande fidélité. Le drapage est très beau et l'expression des figures, bien caractérisée.

Dans « la Restitution du Perron », la perspective aérienne est parfaitement appliquée. La tour de Saint-Lambert est encore debout, dans le fond mais les demeures patriciennes ont été démantelées lors du Sac de 1438. Le cher Perron des Liégeois que le duc de Bourgogne a transporté à Bruges, va être rendu à la Cité. Aussi, le Perron domine la fresque. Le gonfanon de Charlemagne voisine avec les bannières de Bourgogne. Les assistants sont émus, attendris, attentifs bourgmestres, hommes et femmes du peuple, bourgeois. Des enfants n'oublieront jamais cette scène de délivrance.

Près des fenêtres de la salle des Pas Perdus, deux blasons sont très reconnaissables: celui d'Erard de La Marck et celui de Gérard de Groesbeck.

L'escalier d'honneur aboutit à la salle des Pas Perdus, décorée après 1885, sur l'intervention du Gouverneur Pety de Thozée. L'ensemble est en gothique flamboyant, un peu rococo; il se distingue par ses arcs variés, ses colonnes accouplées ou engagées.

Au-dessus des portes de la salle du Conseil, sept fresques donnent encore certains aspects de l'histoire liégeoise. De gauche à droite

1. Charlemagne dictant à ses secrétaires;

2. Création d'écoles;

3. Deux chefs-d'oeuvre de l'art liégeois:

les fonts-baptismaux de Renier de Huy, datant du début du XIIe siècle, anciennement à Notre-Dame-aux-Fonts, actuellement, à Saint-Barthélemy

l'évangéliaire de Notger, très riche pièce d'ivoire de la fin du XI siècle, se trouvant actuellement au musée Archéologique Liégeois

4. Erard de La Marck étudiant le plan du Palais

5. Suavius achevant, sur l'ordre d'Erard, le buste de Saint Lambert, actuellement à la Cathédrale Saint-Paul;

6. Groesbeck, en 1572, écrivant sa « Réforme » du code judiciaire, dans un sens beaucoup plus humain

7. Groupe d'artistes liégeois: peintres, sculpteurs, musiciens.


B. La Salle du conseil Provincial.

Elle est située à l'emplacement de l'ancienne Cour des Echevins, tribunal criminel de la principauté.

L'architecte n'avait guère à tenir compte du style extérieur. Il y a mis de belles voûtes d'arêtes d'une élévation convenable. L'effet général est gothique, bon, décoratif, monumental, avec une impression de luxe, de sérieux pour un local de discussions et de délibérations.

La salle est très ornée, très sculptée, avec un certain abus du doré. C'est le sculpteur J. Herman et le peintre Ed. Van Marcke qui ont surtout contribué à la décoration.

La tribune présidentielle est grandiose, bien conservée, de composition somptueuse et pittoresque, richement polychromée. Il n'a pas été possible, jusqu'ici de connaître son auteur; mais elle a les caractéristiques de l'école de Delcour. Renier l'attribue cependant à Delcour et croit qu'elle a été construite sous Maximilien-Henri de Bavière (1650-1688). Elle est précédée d'un petit bureau soutenu par deux petits satyres aux pieds fourchus. La rampe de la tribune commence par deux satyres enfants et se termine par deux plus grands, barbus, couverts d'une peau de lion, assez bizarre. Au-dessus du siège, deux jeunes femmes étalent une vaste draperie d'hermine, à crépine d'or celle de gauche tient une crosse épiscopale le milieu du manteau est occupé par les armes de Bavière.

Elle est surmontée d'un dais à franges d'où s'élèvent les blasons de la Belgique, de Liège, des grandes divisions de la province. On est sans doute en présence du trône du Prince-Evêque Jean-Théodore de Bavière dont il porte les armoiries. En 1871, Jules Hellig la découvrit, abandonnée, méconnaissable, en partie couverte de plâtre, dans l'ancienne église Sainte-Ursule.

Une frise entourant la salle porte les noms des préfets et gouverneurs qui ont administré la province depuis la suppression de la principauté, des présidents du Conseil Provincial, depuis 1836.

Deux peintures de Mathieu Nisen rappellent l'oeuvre de deux philanthropes: de Ferdinand Nicolaï, de Stavelot et de Godin-Parnajon, de Huy qui ont aidé à créer des orphelinats et des hospices.

Le plafond est décoré d'arabesques; il porte les armoiries de la plupart des Princes-Evêques et des chefs-lieux des cantons de la province.

Dans cette salle, depuis surtout quarante ans, les résolutions les plus hardies ont été prises. Elle ont fait de la Province de Liège, une des plus progressives de la Belgique en ce qui concerne la lutte contre la tuberculose, contre certaines maladies professionnelles, en ce qui concerne l'hygiène, l'enseignement, l'éducation physique, l'éducation populaire, l'électricité, l'agriculture, certains travaux publics, les assurances sociales.

Depuis quelque temps, cette salle, principalement, sert, avec succès, à certaines expositions régionales.


C. La Salle des Gobelins.

Tout autour de la Salle du Conseil, des salles plus petites servent à la députation permanente, aux réunions des Commissions et des groupes politiques.

Pour la Salle des Gobelins, le nom est erroné; c'est plutôt la Salle Leyniers qu'il faudrait dire.

Les tapisseries qui s'y trouvent ne sont pas des Gobelins; la plupart ont été commandées par les Etats de Liège, à Daniel Leyniers, de Bruxelles, en 1750, Au début du XIXe siècle, ces tapisseries furent enlevées, roulées, abandonnées dans les combles du Palais. Le Gouverneur de Luesemans les y découvrit en 1877. Des ouvriers blanchisseurs s'en servaient pour garantir les planches contre les éclaboussures du badigeon. Elles étaient couvertes de plus de 2.000 taches. On parvint à les restaurer.

La tapisserie du fond est admirable et saisissante d'animation. Le dessin est excellent; le paysage est splendide les poses sont naturelles et mouvementées. La pièce, très grande, 6 m X 3,5, se distingue par une belle fraîcheur de teintes.

Elle représente une scène de chasse Antiope est renversée avec sa monture et un énorme sanglier s'élance vers elle ; Télémaque se précipite à son secours.

En face des fenêtres, une autre tapisserie est très remarquée par la vigueur de son coloris, par la beauté des flots, des coquillages, par la lumière d'aurore bien réussie derrière le bateau. Elle représente Vénus venant de l'Olympe, sur son char; elle prie Neptune d'ordonner une tempête afin d'empêcher Télémaque de débarquer à Ithaque.

D'autres tapisseries, des verdures, avec paysages et volatiles, complètent l'excellente décoration murale.

Le plafond a été peint par Carpey, en 1881. On y a mis l'Olympe, Jupiter, Junon, Vénus; sur les flots, Neptune et Amphitrite dont la jambe suit le déplacement du spectateur. L'oeuvre est bonne; le coloris est moelleux et aérien; il y a beaucoup de grâce dans le dessin, d'harmonie de teintes et de contours, une grande délicatesse et une grande variété de poses.

La table, garnie de cuivre, c'est un beau travail d'art liégeois; elle servit aux réunions du Conseil Ordinaire, sous l'ancien régime. Le guéridon, de style intercalaire, Louis XIV, Louis XV, a de belles sculptures.


D. L'Antichanbre de la Salle de la Deputation Permanente ou Salle de la Petite Deputation Permanente.

Cette salle contient un portrait par Hennequin, de Louis-François Thomassin, ancien haut fonctionnaire, sous le régime français. Il nous laissa un important Mémoire Statistique du Département de l'Ourte, C'est un document historique de très grande valeur.

Hennequin est un excellent élève de David; il se révèle dans ce portrait, avec une grande liberté d'allure et une grande vérité.


E. Salle de réunion de la Deputation Permanente.

Elle contient quelques oeuvres intéressantes. Tout d'abord, quatre portraits:

Celui du banquier Gérard Nagelmackers, peint par Gallait; beau portrait très expressif. Nagelmackers fut président du Conseil Provincial de 1836 â 1855. Auparavant, il avait été membre des Etats-Généraux, puis du Congrès National, Avant la révolution de 1830, il avait déjà préconisé à la Chambre de Commerce de Liège, la création des chemins de fer en Belgique;

celui de Charles de Rossius, par Fassin, président du Conseil Provincial de 1855 à 1868;

celui de Noël Delfosse, échevin de la ville de Liège, conseiller provincial, membre de la députation permanente, ministre d'Etat, membre et président de la Chambre des Représentants. Il se rendit célèbre par sa réponse, lors des troubles de 1848, à Adelson Castiau: « Les idées de la révolution, pour faire le tour du monde, n'ont pas besoin de passer par chez nous. » Ce portrait est assez froid, correct, très représentatif pour l'époque;

celui du baron de Macar, par Nisen; le baron de Macar fut Gouverneur de 1847 à 1863. Le portrait est sobre, d'une excellente plasticité.

Ensuite, trois bustes de Gouverneurs:

celui de Luesemans, par Alphonse de Tombay;

celui de Pety de Thozée, par le même;

celui de Gaston Grégoire, par Georges Petit.


F. La Salle des Gardes.

A part la cheminée Louis XV en marbre doré, les deux trumeaux, avec guéridons, deux vases, il n'y a guère à noter que la frise de Carpey, la crédence supportant un guerrier en bronze de Barbedienne et un lustre majestueux de Wilmotte.


G. La Salie Louis XV.

Elle pourrait tout aussi bien s'appeler la Salle des Trophées.

Elle est très ornée, mais certaines de ses peintures sont assez sombres et assez détériorées. Elle renferme des boiseries, des sculptures en forme de boutons de roses très réussis.

La frise de la salle est de Carpey; il y a peint de petits génies, symboles des Sciences, de l'Art et de l'Agriculture.

Elle possède deux bustes en marbre blanc représentant, l'un Léopold I, de Geefs, l'autre, Léopold II de Halkin. Deux autres bustes en bas-relief représentent les empereurs Constantin et Charlemagne; ils ont appartenu à l'ensemble où se trouvait la tribune de la Salle du Conseil.

Au plafond, deux grandes compositions, élégantes, bien dessinées qui pourraient bien être de J. B. Coclers, étalent des Furies et des Discordes.

Il y a deux autres toiles, sans doute également d'un des Coclers; l'une c'est une fontaine ornée de groupes d'enfants et de dauphins, à guirlandes abondantes; l'autre représente un grand vase à fleurs, un lièvre suspendu à un arbre et trois beaux lévriers.

Dans l'encadrement des boiseries, très décoratifs, on a placé deux tableaux de fleurs de Jean-Georges-Christian Coclers.

Au fond, une grande toile, assez sombre, c'est « la Justice » du peintre hollandais Théodore Vanderschuur (XVIIe siècle).


H. Les Appartements prives.

Nous mentionnons les appartements privés du Gouverneur; ils sont évidemment d'une accessibilité relative.

La décoration du vestibule donnant sur la Place Notger, se poursuit jusqu'au hall d'entrée.

Au dessus des attiques des portes, Evariste Carpentier a représenté des aspects de la ville de Liège:

la deuxième cour du Palais;

le musée Curtius;

l'église Saint-Jacques;

l'église Saint-Barthélemy;

le pont des Arches;

le quai Micoud, l'église Saint-Martin, sous la neige. On y distingue une nacelle faisant encore le service du passage d'eau.

En outre, un grand portrait du Prince-Evéque, Charles d'Oultremont (1763-1771), venant du Château de Wégimont; il est très expressif, correctement dessiné, de couleur suffisante.


La petite Salle à Manger.

Elle est entourée de beaux lambris de style Louis XV. Cette sculpture, très ornementale, est remarquable par son faible défoncement, caractéristique du travail liégeois interprétant le style français.

Le fond d'une logette est formé de plaques de faïence, avec un Ecce Homo,

Au-dessus d'une porte, une peinture représente assez vaguement une scène galante.


Le petit Salon (le Réception.

Il est élégamment et richement décoré. Des tapisseries d'Audenarde, bien restaurées, sont animées de paysages, de volatiles.

Au-dessus des attiques des portes, Jean-Georges-Christian Coclers a peint des fleurs et des guirlandes; dans des médaillons, aux quatre coins du plafond, Carpey a ajouté des bouquets de fleurs.

Les portes Louis XV sont délicates, finement sculptées. Dans un style plafonnant rappelant les fresques italiennes, Carpey a excellemment reproduit quelques souvenirs de l'histoire liégeoise:

Saint Monulphe prophétisant l'avenir du site de Liège;

Raes de Rivière, bourgmestre de Liege, en 1463, haranguant le peuple;

Ferdinand de Bavière, Prince-Evêque de Liege, recevant les clés de la ville, lors de sa Joyeuse-Entrée;

la Fuite du Prince-Evêque de Méan, la nuit, lors de la chute définitive de l'Etat liégeois, en 1794. Cette dernière fresque revêt un certain cachet mouvementé et romantique.


Le grand Salon de Réception.

On pourrait l'appeler le Salon d'Achille, par suite de la décoration des tapisseries du XVIII siècle représentant les principaux épisodes de l'histoire d'Achille: Thétis plongeant Achille dans les eaux qui doivent le rendre invulnérable; Thétis revêtant Achille du casque, du bouclier, des armes fabriquées par Vulcain; colère d'Achille en présence d'Agamemnon, apaisé par Minerve, qui passe la main dans la chevelure du héros; combat singulier entre Ménélas et Pâris.

Les teintes des tapisseries sont vives et très heureuses; elles rappellent avec celles de la Salle des Gobelins, les procédés de Leyniers, bien que l'on n'ait pas d'assurance au sujet de leur origine.

Les caractéristiques des autres dépendances des appartements privés se répètent dans ce grand salon. Les portes Louis XV sont d'excellente facture ; le plafond Louis XIV est bien réussi.

Aux angles, se trouvent des allégories représentant les parties du monde; aux attiques, la Chasse, la Culture, les Sciences, les Arts; au-dessus des glaces, la Guerre; au milieu de la frise, des bouquets de Delcloche.


La grande Salle à Manger.

Elle constitue un ensemble imposant par les neuf portes Louis XV, les dix glaces, les peintures de Coclers et de Delcloche, par le beau ton du bois bien marié avec celui de l'or.


Les Appartements de la Reine.

L'antichambre est décorée comme le grand salon, avec des tapisseries relatives à l'histoire d'Achille.

La chambre à coucher de la Reine renferme des peintures de Coclers et de Carpey. Elle contient un lustre merveilleux, en verre, provenant vraisemblablement de l'ancienne verrerie liégeoise d'Avroy. Chaque branche du lustre a au moins quatorze pièces emboîtées. Les détails de la décoration, feuilles et fleurs, se distinguent par leur grande souplesse et leur parfait naturel.

Grivegnée (Liège), 4 juin 1938.

Sylvain MASY.

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