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Les eaux de Chaudfontaine

PARALLELE DES EAUX MINERALES
ACTUELLEMENT CHAUDES ET ACTUELLEMENT FROIDES
DU DIOCESE ET PAYS DE LIEGE

par J. F. BRESMAL, 1721

Plan du premier Hotel des bains de Chaudfontaine

A NOBLES ET HONOREZ SEIGNEURS

MONSIEUR JEAN-NICOLAS DE STENBIER, JURIS CONSULTE,
DEPUTE PERPETUEL DES ESTATS DU PAYS DE LIEGE ET COMTE DE LOOZ,
BOURGUEMAITRE POUR LA TROISIEME FOIS;

MONSIEUR JEAN-REMI DE CHESTRET, JURIS CONSULTE,
L'UN DES GREFFIERS DE LA SOUVERAINE JUSTICE DE LIEGE,
BOURGUEMAITRE &c.

ET

A MESSIEURS LES CONSEILLERS
COMPOSANS LE SENAT DE LA NOBLE CITE DE LIEGE


MESSIEURS,
Plufieurs perfonnes d'efprit & de merite, tant de notre Ville, que des Pays étrangers, m'ont demandé avec expreffément le Parallele de toutes les Eaux Minerales actuellement chaudes & actuellement froides de notre Diocefe & Pays de Liege, afin d'avoir une connoiffance folide de leurs principes diftinguez; je me fuis déterminé d'autant plus librement à fatisfaire à leur Souhait, que j'y ai remarqué de l'utile pour notre Public, pour qui, fans exagerration, je facrifierai toujours, non feulement ce que je puis avoir acquis de fcience dans fon fein, mais même le plus pur de mon fang, s'il pouvoit être avantageux à fà gloire ou à fa felicité.

Ces fources d'Eaux Minerales que je décris, feront fort profitables à la Cité, par l'abord le paffage des Etrangers. Il y a même entre celles-là, des Fontaines dans la Banlieue de fa Dependance, qui dans la fuite du temps, par leurs grandes forces & puissances à guerir les maladies les plus opiniâtres, tant par la Boiffon que par les Bains, lui feront un veritable Peron.

Cette occafion d'écrire m'a fourni le deffein de donner en même temps un Avis au Public pour le garantir de la Pefte, des Fievres peftilencielles & putrides. Je ne lui cacherai rien de ce qui fera de ma connoiffance qui pourra lui être utile à prevenir ces terribles maladies.

Je vous demande, MESSIEURS votre protection pour ces deux Ouvrages,qui font renfermez dans un meme volume: Vous ne pouvez naturellement me la refufer; parce qu'étant nez Eburons, d'une Race des plus anciennes, Vous êtes les Peres communs de vos Concitoyens, que vous devez faire attention à mon bon deffein, pour animer les autres, peut-être plus capables que moi, à ne pas enterrer leurs talens.

Cela feul doit fuffire, comme je crois, pour me faire obtenir ma demande: Je ne dois pas fuivre les pas de ces fades adulateurs, qui pour prévenir ceux à qui ils dedient leurs Ouvrages, en font par leurs louanges outrées, des Heros, qui bien fouvent n’on ont pas l’ombre. Je fçai pourtant qu'à vos égards je ne puis tomber dans ces inconveniens; j’aurois mille veritez à dire à votre gloire, fi je ne craignois de faire rougir votre modeftie.

C'eft dire affez, quand je dis que S. A. S. E. & le Peuple, vous ont nommez, que le Sort vous a choisis; cette Déeffe au bandeau n'auroit fçû faire un meilleur choix, fi elle avoit en la vûe libre: un chacun a applaudi fon decret, & a montré fon contentement, louant Dieu, qui préfide à la Fortune, & qui la fait agir comme il lui plait, pour remplir fes deffeins impenetrables.

Je vous prie, MESSIEURS, d'être perfuadez, que je fuis l'un de ceux qui ont reffenti la joye la plus veritable pour vos Elections, & de me faire la juftice de croire que je fuis & ferai toute ma vie, avec beaucoup de confideration refpectueuse,


:MESSIEURS,
Votre très-humble & tres-obéiffant Serviteur
J.F. BRESMAL.


A CELUI QUI LIRA.

Pour peu de connoiffance que l'on ait dans le monde, on ne peut ignorer, que toutes les Sciences n'ayent tiré leur origine de l'experience, qui comme leur veritable fource, leur a donné l'être, les a formées, & les a élevées à l'état où nous les voyons aujourd'hui. Cette mere des Arts a fes démonftrations affurées, & fes raifons ne font pas fujettes à l'artifice; en un mot, c'eft une pierre de touche, la feule lumiere qui nous fait diftinguer les realitez d'avec les apparences. Cette verité ne fe peut contefter: les Ecoles fameufes ne font fondées que fur les experiences que les premiers Auteurs ont faites des chofes, ce qui leur a fervi de lumiere pour nous tracer des regles & des preceptes.

C'eft dans ce qui regarde la Medecine que l'experience eft la plus neceffaire: parce que fa pratique eft la piece la plus importante. Les plus experimentez Medecins font eftimez les plus fçavans, & le font en effet. Il eft à fouhaiter qu'un chacun ait recours à cette experience, pour fe faciliter les moyens de parvenir à la connoiffance de la vraye & folide Medecine, dont l'objet eft fi confiderable, qu'il s'agit de la confervation ou de la perte de la fanté, & même de la vie de l'homme, qui eft le chef-d'œuvre de la nature.

Dans lavue de m'acquitter de ce que je dois à ma confcience & à mon prochain, depuis trente deux ans que j'ai eu l'honneur d'obtenir le Bonnet Doctoral en Medecine, après m'être appliqué quatre ans à la theorie dans l'Univerfité de Louvain; j'ai fait plufieurs experiences fur differens mixtes tirez des animaux, des vegetaux & des mineraux dont la Medecine tire fes remedes, elle n'en contient pas de plus puiffans, de plus specifiques, ni de plus affurez que les Eaux Minerales Thermales, ou actuelement froides, pour s'en fervir, tant par les Bains que par la boiffon: elles ont feules le pouvoir de guerir fans alterer, de purifier fans corrompre, de reparer fans affoiblir, & de preferver fans peril. Sur cette connoiffance j'ai formé le deffein de me rendre les Eaux Minerales familieres, furtout celles de notre Diocese & Pays de Liege. La fortune m'a favorifé dans ma resolution, par les occafions qu'elle m'a fait naître dans les Analyses que j'ai faites à Aix, àChaud-Fontaine, àTongres, à Hui, à Bré, à Spa, à Nivefet & ailleurs.

Prenez la peine de lire ce petit Parallele que je vous donne, vous jugerez de leur difference; puifque les couleurs oppofées font paroître avec éclat leurs varietez. Je crois que les Eaux Minerales que je décris dans un même Livre, feront connoître avec éclat leurs differentes forces & puiffances medicales, par la découverte des principes diftinguez dont elles font impregnées.

Dieu n'eft pas feulement admirable dans tous les beaux êtres qu'il a donné à confiderer à nos fens; il l'eft bien davantage dans ce qu'il a caché à notre jugement. Quoique notre idée nous faffe concevoir, que la regle que le divin Createur a ordonnée à la nature, l'oblige d'agir toûjours fur le même méchanifme; il n'a pas pourtant accordé aux mortels de le pouvoir imiter: Où eft l'homme, qui, quoiqu'il connoiffe la matiere, pourroit lui donner la difpofition d'un être animé; cela appartient à l'Immortel seul, qui a creé toutes chofes de rien. Sa bonté divine & fa mifericorde infinie laisse neanmoins à la penetration des hommes des connoiffances qui ont du rapport à leur bonheur: par exemple, il ne permet pas qu'ils puiffent creer un être vivant, même le plus petit, comme une mouche, une fourmi; & il leur accorde qu'ils comprennent , que fi tant de fources d'Eaux medicales jailliffent fur la furface de la terre, c'eft pour les appliquer à la guerison des maladies qui attaquent les perfonnes de differens temperamens. Les Ecoles la réduisent à neuf efpeces; quant à moi je dis, qu'ils font autant differens, qu'il y a de differens lineamens dans la face des hommes. Il eft pourtant tres-certain, que dans cent millions de visages il n'y en a pas un feul dont les traits fe rapportent entierement à l'autre.

Je ne fçaurois affez admirer ni adorer les bontez & les grandeurs que Dieu a fait paroître fur notre Diocese & Pays de Liege, l'ornant, en faveur de fes Habitans & des Etrangers, de Fontaines fi precieuses, dont l'Analyse de la plûpart a été décrite au Public, tant par d'autres que par moi, dans divers petits Livres ou Brochures compofées à ce fujet; neanmoins je fuis perfuadé qu'on me fçaura bon gré, fur-tout les Medecins étrangers, de mettre les Eaux de ces Fontaines en parallele, pour en mieux connoître la nature & la difference, & les employer utilement aux diverfes maladies qui arrivent journalierement aux differentes complexions de la nature humaine.

La premiere partie de cet Ouvrage contient la Description des Thermales Balneables & Potables d'Ai -la-Chapelle Chaud-Fontaine & de Borchette.

La feconde partie rapporte les qualitez des Sources Minerales actuellement froides de Hui, de Tongres, de Bré, de Spa, de Nivefet, de Chevron & de plufieurs autres qui ne font pas ficonnues.

Je rapporterai, pour mieux satisfaire le Lecteur, les Approbations données touchant les Eaux Minerales qui ont été analysées publiquement; & de plus, je dirai fincerement ce que j'ai découvert dans celles que j'ai analyfées moi feul; qui pour éviter la dépense, n'ont pas été jufqu'ici examinées fi folemnellement.

L'Analyse publique fe fait pour donner plus de certitude & de confiance aux peuples; cependant elle n'augmente en rien leur vertu physique, ni ne diminue l'existence de leurs qualitez effentielles.

La Description chaque Source fera dans un Dialogue particulier. Je croi que ce genre d'écrire, qui confifte en Demande & en Réponse, ne déplaira pas au Lecteur: il explique plus clairement, & ne fatigue pas tant le Lecteur.

J’efpere que les Interessez aux Sources Minerales feront contens de moi; d'autant que je me propofe de ne point fortir de la verité des faits, & d'en ufer avec une fincerité integre: Elles ont chacune leur merite particulier, que l'on connoîtra dans leur Parallele, à l'avantage de ceux, qui, pour se guerir des maladies qui les accablent, pourront (afin d'en ufer avec fuccès, foit par les Bains, foit par la boisson) choifir entre les Eaux actuellement chaudes ou actuellement froides, par rapport à la qualité de leurs maux, & à la difference de leurs complexions.

Je n'ai pas de prédilection pour aucunes de ces Eaux Minerales; fi en écrivant je donne la préféance aux Eaux de Hui, quoique nouvellement en usage, je l'ai fait pour éviter la conteftation entre les Eaux de Tongre & de Spa pour l'ancienneté: le Pere Fifen dans fon Hiftoire de Liege donne la préféance aux dernieres; Pline, plus ancien que ce Pere, Jules Céfar dans fes Commentaires, & d'autres Hiftoriographes du temps, la donnent aux premieres. Pour ôter toute conteftation, j'ai décrit les Eaux Minerales duPays, felon le rang que les Villes & les Villages où la nature les a produits, tiennent à l'Etat.

Je donne à la fin de cet Ouvrage un petit Traité ou Avis au Public pour le préferver de la Pefte, des Fiévres peftilencielles, putrides, contagieufes &c. Cela lui fera d'autant plus agreable, que les pauvres y trouveront des remedes qu'ils pratiqueront à petits frais.

PARALLELE DES EAUX MINERALES ET THERMALES
DU DIOCESE ET PAYS DE LIEGE


PREMIERE PARTIE.

DIALOGUE PREMIER.

Des Bains en general, & de leurs differences.


D. PUISQUE VOUS voulez bien, Monfieur, que je m'inftruife de la qualité des Eaux minerales du Diocese & Pays de Liege; j'efpere que je n'abuserai pas de votre bonté, fi je vous fais des questions pour m'éclaicir.

R. Je vous ai promis de vous faire part de tout ce que mon étude, & une longue experience m'ont appris fur cette matiere. Interrogez-moi, s'il vous plaît, je vous communiquerai avec plaifirce que j'en fçai.

D .Dites-moi, s'il vous plaît, depuis quel temps les Bains font en ufage, & leur étymologie.

R. Pour vous obéir, j'aurai l'honneur de vous dire, que Balneum, que les Francois appellent Bains, tire fon étymologie d'un verbe & d'un fubftantif grecs. Le premier fignifie chaffer, & l'autre trifteffe. Nous lifons dans l'Hiftoire Ecclefiaftique, que faint Augustin s'en eft fervi pour chaffer la douleur qu'il reffentoit de la mort de fainte Monique fa Mere.

Quant au premier temps de leur ufage ,tous les Hiftoriens conviennent, que les nations les plus anciennes & le mieux policées, les ont eu en tres-grande eftime. Darius Roi de Perfe entretenoit un nombre confiderable d'Officiers pour l'entretien de fes Bains. Après la déroute de ce Prince infortuné, le premier Satrape de cette Nation demanda à Alexandre le Grand, s'il ne defiroit pas entrer dans les Bains délicieux de Darius: Non, non, répondit le Macedonien, mais je veux entrer dans les Bains d'Alexandre; voulant fignifier qu'ils étoient à lui, puis qu'il les avoit conquis avec le refte de l'Afie.

L'Hiftoire Romaine nous rapporte, que M. Agrippa avoit fait conftruire à fes propres dépens 170. Bains; Que Mecenas étoit le premier qui en eût fait bâtir à Rome; & qu'Antoine Caracalla avoit fait édifier dans cette Capitale de l'Univers des Thermopoles portans fon nom, fi magnifiques, que la fculpture des Chambres deftinées pour les Bains, ne pouvoit jamais être imitée par les plus grands Maîtres des fiecles futurs. C'eft ainfi que l'écrit Cœlius, livre 30, chap.7.

L'Hiftoire ajoûte, qu'Antoine le Philofophe & Diocletien ont fait bâtir une grande quantité de Thermopoles à Rome, dont on voit encore les veftiges. Le Martyrologe nous marque, que les pauvres Chrétiens du temps de Diocletien & de Maximinien ont fouffert des travaux infinis, dans la conftruction de ces Bains, travaillant comme des efclaves; à Rome, à Carthage & à Milan, par ordre de leurs cruels perfecuteurs. Ces Bains furent nommez Herculéens, Thermae Herculea.

D. Pourquoi les appelloit-on Therme Herculea? Pour moi je penfe que ce faux Dieu, felon la Fable, doit avoir baigné.

R . Vous avez le sentiment d'Erafme, qui rapporte dans fes Proverbes, après Pifandre dans fa Chronologie fabuleuse, que Minerve avoit fait des Bains chauds à Hercule pour le délaffer de fes fatigues.

D. A quel fujet les anciens Romains ont-ils fait tant de dépense pour édifier des Thermopoles, avec une fi grande quantité de Bains?

R. Pour conferver la fanté, contribuer au plaifir du peuple, & attirer leur amitié. C'étoit une politique de ces anciens Maîtres du Monde de donner de l'amufement à la populace, pour se mettre à l'abri des reflexions qu'elle pouvoit faire fur leur conduite dans le Gouvernement, en lui ôtant par ces divertiffemens le temps de refléchir fur des faits tyranniques qui auroient pû lui donner l'envie de fe revolter.

C'est dans ce même efprit qu'ils ont érigé des Theatres pour les Spectacles comiques, & ce fuperbe Amphitheatre dont Rome voit encore les veftiges, où fur l'arene on l'amufoit par le cruel combat des bêtes feroces & des gladiateurs. En voici affez pour vous faire connoître, que les Bains ont été de tout temps en ufage pour les plaifirs, & pour conferver la fanté.

D. Maintenant je vous conjure de me parler des Bains, comme d'un objet tres-efficace, non feulement pour conferver la fanté, mais pour la recuperer, lorfque les maladies l'ont détruite.

R. Savonarela, au livre premier, traitant de cette matiere définit les Bains, un corps fubtile, liquide, environnant la circonference des corps, ou propre à le faire, pour les changer felon les qualitez manifeftes, ou occultes par rapport à notre science. Je crois que je vous ferai plaifir de vous rapporter les propres termes latins de cet Auteur: Quòd fit corpus fubtile, liquidum, corpori circumferentialiter occurrens, vel occurrere aptum, ut fit ipfius fecundùm qualitates manifeftas, vel occultas, faltem refpectu noftræ fcientiæ, actualiter immutativum. Lib .1. cap. I. Savon. de Balneis.

Sur cette définition il paroît, que tous les corps fubtils & liquides font propres à faire des Bains; par exemple, le vin, le lait, le fang les eaux de pluie, de riviere ou de fontaine, fimples ou Minerales, utiles à la fanté: car il y en a qui font inutiles, mal faines, même veneneufes; comme étoit celle dont Caffander, fils d'Antipater, empoifonna Alexandre le Macedonien dans Babylone.

Il y a trois fortes de Bains; les naturels, les artificiels, & ceux qui tiennent de la nature & de l'art.

Je nomme naturels, ceux qui doivent à la feule nature leurs qualitez intrinfeques & extrinfeques; comme les Eaux Minerales Thermales, qui fortent du fein de la terre avec leurs principes mineraux & la chaleur actuelle.

J'appelle Bains artificiels, ceux d'eaux fimples, que l'on impregne par artifice de differentes qualitez, felon les mixtes diftinguez dont on fe fert pour cet ufage; comme les Bains mineraux qui imitent la nature, ceux que l'on compose avec des vegetaux aftringents, emollients, corroborants, aromatiques &c.

Ceux qui tiennent de la nature & de l'art, font ceux aufquels on doit donner les degrez de chaleur necessaires par l'action du feu domestique; comme l'eau fimple, le vin & le lait, le fang, les Eaux Minerales froides.

D. Si vous nommez les feuls Bains d'Eaux Minerales actuellement chaudes naturels; je conclus que vous ne croyez pas qu'on puiffe se baigner dans un liquide actuelement froid.

R. Vous concluez tres-bien: l'ufage des Bains actuelement froids eft aboli dans la Medecine à caufe des mauvaises fuites qu'on en a remarquées; Hypocrate neanmoins femble en approuver l'ufage par l'aphorifme 25. de la fect. 5. Tumores articulorum atque dolores abfque ulcere, podagras & convulfiones, horum plurim â frigida aquâ largiter effufà levat & extenuat folvitque dolorem, nam modicus torpor dolorem fedare poteft.

C'est-à-dire que les tumeurs des articulations, & que les douleurs fans ulceres & fans autres folutions de continuité, les gouttes & les conuvlfions, font pour la plûpart foulagées par les Bains faits d'une grande quantité d'eau froide, puis qu'un mediocre engourdiffement peut ôter la douleur.

Il y a des Medecins qui fuivent cet aphorifme au pied litteral: j'en connois qui ont été affez temeraires pour confeiller les Bains d'eau froide dans le rhumatifme: ce qui felon le bon fens, felon la raison, felon un jugement folide & felon moi, ne fe peut faire fans risquer la vie.

D. Vous ne convenez pas des Bains froids, cependant tant de personnes de tout âge fe baignent impunément en Eté dans l'eau actuellement froide; bien au contraire, ces gens affurent qu'elles trouvent un rafraîchiffement qui leur fait plaifir. Nous apprenons même par l'Hiftoire, que Céfar-Augufte étant atteint d'une maladie dangereufe, Mufa fon Affranchi, qui étoit un Medecin fameux (frere de celui du Roi Juba ) le guerit par les Bains froids qu'il fit prendre à cet Empereur: depuis cette guerifon fameufe les Bains devinrent des remedes à la mode.

R. Je fcai ce trait de l'Hiftoire; & de plus, il m'eft connu que ce Medecin les ordonnoit imprudemment pour remede à toutes fortes de maladies. Céfar mit la fanté de Marcellus fon gendre & fon neveux entre les mains de Mufa. Ce Prince fut attaqué d'une maladie, que l'on ne crut point dangereufe dans le commencement: il voulut le guerir par l'ufage des Bains froids. En effet il fe baigna; mais il mourut, ce qui ôta de Rome cet ufage pernicieux, & fit connoître à tout le monde, que Musa n'étoit qu'un Medecin empirique, qui agiffoit fans connoiffance des caufes ni des effets: puifque les Bains froids étoient pour lui un remede à tous maux.

Je foutiens, que les Bains froids nuifent aux muscles, aux tendons & aux nerfs: par confequent, qu'ils ne font pas convenables aux perfonnes jeunes, ni aux adultes, ni à ceux d'un âge viril, encore moins à ceux d'un âge avancé: la vie ne confifte que dans le mouvement, qui eft fon principe; tout ce qui peut l'empêcher lui eft contraire. Je fuis tres-perfuadé que le froid actuel eft un empêchement au mouvement & enfuite à la nature. Si plufieurs perfonnes en Eté fe baignent fans rifque, principalement les jeunes, dans les eaux limpides; c'eft que pour-lors le foleil dardant fans peine & perpendiculairement ses rayons fur la furface des eaux des fleuves & des rivieres, leur donne un degré de chaleur convenable à la nature du temps. Croiez-moi, il feroit tres-dangereux, en Eté même, pourtous les hommes, les plus jeunes & les plus robuftes, de fe baigner dans de l'eau de fontaine actuellement froide, ni au premier, ni au fecond degré, ni au troifiéme, encore moins au quatriéme, fans rifquer la vie: d'autant plus la chaleur du temps & de la faifon auroit échauffé les corps des baigneurs temeraires, d'autant plus les Bains d'eau actuellement froide leur feroient rifquans. C'est un fyftême conftant, que le changement fubite du froid au chaud, ne peut être que fatal: Omnis mutatio fubitanea periculofa.

Laiffons les eaux froides, puifque le divin Createur nous a donné les Eaux thermales de Chaud -Fontaine, avec une chaleur fi douce, & fi convenable à la nature, qu'elles peuvent rafraîchir ceux qui les prendront au coucher du foleil, & rendre à ceux qui en uferont le matin un mouvement à leur fang par une chaleur proportionnée à ce premier agent de la circulation.

D. Quel ufage peut-on faire des eaux fimples? & puifque je comprends que les eaux actuellement froides font nuifibles, quel degré de chaleur peut-on leur donner?

R. Un premier degré comme au fang; c'est dans cet état qu'elles délaffent le corps, qu'elles font delicieufes, qu'elles rafraîchiffent, qu'elles nettoient, qu'elles humectent, qu'elles amolliffent la peau, qu'elles donnent le moyen aux glandes débouchées de faire leurs fontions pour l'infenfible transpiration, fi neceffaire à maintenir l'homme dans une fanté parfaite.

D. En quelle rencontre peut-on fe fervir des Bains du lait, & de ceux du fang?

R. Ces Bains font plus propres pour la fpeculation, que pour l'ufage, à caufe des difficultez qu'il y a à les pratiquer. Les Bains de lait peuvent faire beaucoup de plaifir aux Dames qui aiment à fe faire une belle peau: s'ils font mêlez d'eau de fleur d'orange, ou de rofe, ils rendent la peau de celles qui en ufent, blanche, douce, unie & de bonne odeur.

L'Hiftoire nous rapporte, que Conftantin le Grand Empereur Romain étant atteint de la lépre, fes Medecins lui confeillerent pour fa guerifon les Bains du fang de plufieurs jeunes enfans; remede cruel qu'il pratiqua inutilement, n'ayant enfuite été gueri que par les faintes Eaux du Baptême, dont ce premier Empereur Chrétien fe baigna, par le confeil de celui qui occupoit pour-lors la place de faint Pierre.

D. Pourquoi appelle-on thermales les Eaux Minerales actuellement chaudes?

R. Les Romains nommoient les Bains d'eau chauffée, du mot latin therma. Il eft tiré d'un verbe grec qui fignifie j'échauffe: ainfi je ne doute pas que vous ne conceviez, que les Eaux Minerales. actuellement chaudes font nommées à jufte titre thermales; parce qu'on peut s'y baigner fans le fecours d'aucun moyen étranger, puifqu'elles ont la chaleur neceffaire en fortant de leurs fources.

D. Depuis quel temps a-on trouvé ces fources d'Eaux thermales?

R. Je crois que les fources d'Eaux chaudes font depuis la creation du monde, auffi-bien que les Fontaines froides; cependant plufieurs Auteurs (felon Moyfe, Genef. 36.) croyent qu'Ana fils de Sebeon en a fait la premiere découverte, lors qu'il menoit paître les ânes de fon pere dans le defert.

D. On rapporte pour certain que les Eaux Minerales gueriffent par les Bains les maladies de l'interieur, auffi-bien que celles de l'exterieur. Dans la guerifon de celles-ci il y a un contact physique; dans les défauts des parties internes, je ne les connois pas, non plus que plufieurs Auteurs qui en ont écrit; entre autres Lamzwerde dans fes Admonitions du grand abus qui fe fait dans l'ufage des Eaux Minerales chaudes & froides: Il ne veut pas que les Bains puiffent guerir tant de differentes maladies & il ajoûte, qu'il eft ridicule de croire, qu'elles humectent le fec , qu'elles refroidiffent le chaud & qu'elles échauffent le froid: cela repugne, dit-il, aux loix de la nature, puifque Galien, au livre 1. des Simples, chapitre 8. dit, qu'il eft impoffible que les Eaux chaudes puiffent produire deux effets fi contraires. Voici les propres termes de cet Auteur. Sufficit annotaffe thermarum vires non fe extendere ad tot morborum copias; nam humida ficcare, humectare ficca, frigida calefacere, calefacta refrigerare, naturæ legibus repugnant: quia aquæ calidæ, tefte Galeno, ambo facere nequeunt.

R. Si Lamzwerde vivoit, il feroit facile de le faire revenir de fes faux préjugez: l'experience des Eaux thermales, qui ont gueri tant de maladies differentes à Aix, & furtout à Chaud-Fontaine, lui feroit faire des reflexions fur leurs manieres d'operer, qu'apparemment il n'a jamais penetrées. Il connoîtroit effectivement, que les Bains d'Eaux Minerales actuellement chaudes defféchent, humectent, refroidiffent & échauffent effentiellement. Vous le comprendrez avec facilité lorfque je vous aurai éclairci fur leur maniere d'agir.

Les Bains d'Eaux Minerales chaudes, foit par la nature, foit par l'art, gueriffent plufieurs maladies, incurables à tout autre remede.

Les Bains d'Eaux acides & ferrugineufes conviennent mieux aux affections bilieuses & melancholiques, comme je dirai en fon lieu.

Les Thermales fulphureufes font efficaces dans les maladies froides, pituiteuses, & au relâchement des fibres & des muscles.

Tous les Medecins fçavent, que la cacochimie pituiteufe fe fait par le défaut de la premiere digeftion. Il fe produit des alimens une pâte plus ou moins gluante, vifqueufe, groffiere & adherente , qui s'accroche & s'attache contre nature aux membranes internes de l'eftomac & des inteftins. Ce qui paffe à la maffe du fang de cette mauvaise digeftion, ne pouvant être affimulé pour la nourriure des parties actives de cette maffe fanguine, l'épaifit: d'où s'enfuit qu'il fermente peu, qu'il eft plus tardif dans fa circulation & qu'il fe charge de ferofité: de cette mauvaise difpofition font produites les fuppreffions des mois, la fterilité, la cachexie des hommes & des femmes, les pâles couleurs, l'hydropifie &c.

Lorfque le chile visqueux croupit dans les extrémitez des vaiffeaux capillaires, dans les glandes & dans les pores, il remplit, comme l'eau fait une éponge, toutes les parties internes & externes du corps:c e qui fait l'origine des relâchemens des parties, & même occafionne les ftagnations, les fcirrhes & d'autres maux auffi fâcheux & rebelles que chroniques, felon les differentes qualitez de l'acide vicié dont le chile eft impregné.

La cacochimie fereufe fe fait quand la ferofité, qui fert de vehicule aux alimens, & aux excrémens, eft ou trop abondante ou infuffifante, ou peche en qualité. Lorfqu'elle eft trop abondante, elle rend le corps, auquel elle fe mêle, trop fluide: fi elle eft infuffifante, la confiftance de tous les autres fluides eft. vitiée: elle peche en qualité, quand elle eft trop falée ou trop acide, d'où procedent les rhumatifmes, les maux des rognons, de la veffie & les maladies de la peau.

Les Eaux Thermales conviennent, tant par la boiffon que par les Bains, pour la guerifon de ces deux cacochimies, & des maladies qui en dépendent. Si nous confiderons bien la premiere de ces cacohimies, il eft indubitable qu'elle confifte dans une lenteur ou engourdiffement de toutes les humeurs, tant du chile, de la limphe, de la propre maffe du fang, que de tous les efprits qui en font provenus: cela vient du vice de la premiere digeftion, de l'ufage des alimens contraires, de l'oifiveté, de trop dormir, & des trifteffes violentes & continuelles. C'est un fyftême dans la Medecine, que les humeurs de nos corps ( dans leur état naturel ) doivent être dans un mouvement continuel, & proportionné à la nature; le chile, aidé du mouvement peristaltique, monte par le conduit torachique vers la masse fanguine, le fang circule continuellement, la limphe fortant des glandes congloberées, fe mêle avec le chile & le fang, pour leur fervir de dilayant; la ferofité inutile & fuperflue fe fepare par les urines, par les fueurs & par l'infenfible tranfpiration. Enfin tout ceci bien confideré, il eft facile de concevoir comme les bains d'Eaux chaudes, touchant les corps par un contact phyfique, doivent operer par leur chaleur actuelle, qui doit être moderée & temperée, comme à Chaud-Fontaine, & pas exceffive & brulante, comme elles fortent à Aix & à Borchette: ils rendent toutes les humeurs, dont nous venons de parler, fluides & propres à leur mouvement circulaire & même fermentatif, excitant par la chaleur les principes actifs de nos corps, diffipant les inutiles & rendant particulierement aux efprits vitaux un caractere tranquille & lumineux. C'est par ces effets que la fentence d'Hypocrate eft verifiée quand il dit, que la nature gueriffoit les maladies, naturam effe morborum medicatricem.

Les Bains agiffent prefque de cette maniere: ils écartent les empêchemens au cours des humeurs, ils ôtent la ftagnation, ils augmentent la fenfible & l'infenfible tranfpiration, qui eft fi neceffaire pour évacuer la ferofité superflue. La nature étant ainfi aidée, peut facilement chaffer, par la circulation naturelle & reguliere du fang, les excrémens par les felles, par les urines, & par les fueurs, felon que ces matières, qui caufent la maladie, croupiffent dans les lieux differens pour les excretions; quoique les Eaux Minerales ne touchent point les maux internes par un contact phyfique & immediat; l'experience a affez fait connoître à un chacun ce que je viens d'avaucer.

D. Il me paroît felon ce que vous venez de me dire de la façon d'operer, que les Bains d'eaux fimples chauffées pourroient bien produire les mêmes effets que ceux des Eaux Minerales.

R. Vous êtes dans l'erreur: vous n'avez pas fait reflexion, que dans les maladies cachextiques & chroniques, les fibres ou les fpincters des parties étant relâchées, les Bains d'eaux fimples leur nuiroient plûtot que de leur être utiles; parce qu'ils amolliffent, relâchent & humectent les feuls Bains d'Eaux Minerales, par la vertu des efprits & des fubftances dont elles font impregnées, font capables de rendre le tonus à ces refforts; ils n'empêchent pas le flux des humiditez vers la circonference, & font obstacle au reflux qui fe fait lorfque ces parties font trop amollies & trop relâchées.

D . Avant d'entrer dans le difcours des Eaux thermales, je vous prie de me dire quelle eft la caufe efficiente de la chaleur dans les Fontaines qui fortent du fein de la terre actuellement chaudes.

R . Les fentimens font differens fur ce phenomene; quelques Auteurs, même des modernes, l'attribuent à des feux fouterains. Je n'ai jamais été de cette opinion, comme il paroît dans les Ouvrages que j'ai donnez au Public fur cette matiere: j'ai toûjours été perfuadé que cette chaleur dans les Eaux étoit produite par la reaction des particules heterogenes qu'elles contenoient; j'étois pour-lors fondé fur une idée que le mechanifme de la nature m'avoit fait concevoir dans diverfes experiences où je mêlois les acides & les alkalis, qui produifoient la chaleur fans l'affiftance d'aucun feu, ni de flamme ni de braise: ce qui m'a fait conclure que la cause efficiente de la chaleur dans les Eaux ne fe faifoit pas autrement dans le fein de la terre.

Monfieur de Rochas, Ecuyer Sieur d'Aiglun, Medecin de Sa Majefté Tres- Chrétienne Louis XIII m'a fait connoître par le Traité des Eaux fulphureufes qu'il a donné au Public paffé près d'un fiecle, & que j'ai lû depuis peu, l'ayant trouvé par hazard chez un de mes amis, que mon illation étoit fondée fur le mouvement de la nature. Il eft fi curieux de voir l'exactitude de cet Auteur, pour s'éclaicir dans fes doutes par fes propres fens, que je crois que je vous ferai plaifir (& à ceux qui prendront la peine de lire ces Dialogues) de vous donner fon procedé, qui eft décrit dans fon Ouvrage, qui pour fon ancienneté, eft tres-rare à trouver. Je n'y mettrai rien du mien, que le changement de quelques énonciations de l'ancien ftile François dans le moderne. Il dit au chapitre 1. page 13.

Je trouvai inopinément la fontaine qui eft le fujet de ce Difcours. L'objet des chofes, extraordinaires & inconnues cause toûjours de la furprife: la vapeur & la chaleur sensible qui fortoient de cette fource me donnerent de l'admiration; parce que le lieu où elle se trouve eft rempli d'un froid exceffif par les neiges & les glaces éternelles qui l'environnent de toutes parts. A cette vûë, tant quelque temps en fufpens, je jugai que cette rencontre meritoit une confideration particuliere. Je m'approchai de plus près & je remarquai, que cette chaleur diminuoit à mesure qu'elle s'éloignoit de fa fource; je fus perfuadé à l'inftant, que la caufe n'en étoit pas éloignée, & je confus alors un defir paffionné de la connoître.

Cet Auteur exécuta fon deffein dans la fuite, malgré les grands fraix qu'il dut faire pour falarier les ouvriers, & malgré l'apprehenfion, ou plûtôt le doute où il étoit de rencontrer des feux allumez fous la terre, capables de faire perir les travailleurs.

Il feroit trop long de vous dire comme il s'y prit pour les engager dans une entreprise qui paroiffoit dangereufe, ni par quelles raifons il fe défit de fon apprehenfion. Je paffe à la page 19. du même chapitre où il dit:

Je fis mettre la main à l'œuvre & continuer ce travail pendant quinze jours; pour lors je parvins à la fource, qui étoit chaude extraordinairement. Cette chaleur accompagnée d'une forte grande ébullition, causoit beaucoup d'écume. Je vis bien que j'étois arrivé à l'origine de cette chaleur, mais j'en ignorois encore la caufe.

Il continue plus bas pag. 19. & 20.

Je fis continuer le travail le long du canal de la fontaine; mon étonnement s'accrut par une nouvelle découverte en moins de trois heures d'ouvrage: la fontaine étoit froide jufqu'au dernier degré.

Monfieur de Rochas ayant employé tous les efforts de l'art fpargirique pour analyfer cette fource, a trouvé une terre fulphureufe & remplie de fel vierge, qu'il appelle hermetique, parce qu'il prétend, avec fondement, que ce fel eft un efprit univerfel, l'ame du monde & le trefor de la nature corporifé dans la terre, comme il dit au chap. 7. page 22.

Toutes épreuves faites, il eft conftant & vifible que l'efprit contenu dans cette Eau, penetrant la fubftance du foulfre, lui fait faire cette grande ébullition.

Après une experience fi heureufement découverte par Mr. de Rochas, & qui prouve fi évidemment à nos fens, on ne peut douter de la caufe efficiente de la chaleur actuelle dans les Eaux thermales. L'eau impregnée du fel, & même de l'efprit univerfel, rencontrant la mine de foulfre, ou d'un autre mineral huileux, impregné d'acide metallique, devient chaude, bourbeufe, change de goût; & dans le paffage de fon foier jufqu'à la fuperficie de la terre, elle reprend fa diaphaneité. J'appelle foier l'endroit où fe fait la grande ébullition: plus il est éloigné de la furface de la terre, moins les Eaux ont de chaleur, & bien fouvent, quoiqu'impregnées des principes de mineraux, avant de fortir au jour elles font fi peu chaudes, qu'on peut les mettre au dernier degré de chaleur, ou au premier degré de froid actuel. Cet exemple fe voit à Chaud-Fontaine dans les fources du grand Bain, & du Gadot. La premiere eft minerale actuellement chaude: on peut s'y baigner fans que l'art donne du secours à fa chaleur naturelle; & la feconde, quoiqu'impregnée à peu près des mêmes qualitez minerales, ne peut fervir pour les Bains fans être chauffée. Je vous en parlerai plus amplement dans leur Dialogue particulier. S'il vous refte encore quelque doute fur le mechanisme de la nature, dans les Eaux thermales, pour le lever entierement,lifez ma Circulation des Eaux imprimée chez Broncart l'an 1700, & les Preuves Hollandoifes fur les Eaux thermales d'Aix-la-Chapelle. Elles font écrites en Latin. Je vous en donnerai dans le Dialogue qui fuit, la Traduction Françoise. Je crois en cela faire plaifir aux Curieux qui ignorent le langage de Ciceron.

Si vous prenez donc la peine de lire, ou fi vous avez déja lû l'Hydrographie, ou la Circulation des Eaux, vous y découvrirez, que je conviens avec M. de Rochas de la caufe efficiente de la chaleur actuelle dans le fein de la terre, mais pas du foier: il eft plus probable à notre idée, qu'il doit exifter dans le centre, qui eft le point fixe de la Circulation des Eaux, comme le cœur l'eft ans l'homme de la circulation du fang: C'est de cette partie organique que fe communique à tout le corps le fang par fa circulation, l'effet de ce mouvement eft de porter les fubftances neceffaires à chaque partie, pour les nourrir ou pour les accroître. C'est ainsi que le centre de la terre diftribuë, par la circulation des Eaux impregnées des fubftances heterogenes (qui faisant reaction les unes contre les autres, excitent une chaleur qui ne peut s'exprimer) font envoyées pour dans leurs paffages entretenir & accroître toutes les minieres des métaux & des mineraux connus & inconnus.

Je ne puis démentir ce qu'un auffi honnête homme que M. de Rochas a connu par la découverte; & je fuis fûr que vous concluerez, qu'il y a plus de fonds à faire fur les foiers que cet Auteur a vûs, que fur le fyftême ideal que j'ai établi pour cause efficiente de la chaleur actuelle dans les eaux. J'avoue, qu'il eft plus certain de s'en rapporter à nos fens, qu'à notre idée; mon fyftême pour la circulation n'en eft pourtant pas détruit: puifque, felon la raifon , elle ne peut se faire autrement. Il fe peut bien que les eaux venant du centre impregnées des fubftances heterogenes peuvent rencontrer dans leurs paffages des matieres fulphureufes qui augmentent cette reaction qui excite la grande chaleur qui refte aux eaux qui fortent actuellement chaudes à la furface de la terre. Ce n'eft pas à dire, pour un exemple, que la chofe fe faffe toûjours ainfi: la chaleur actuelle peut venir directement du centre, quand elle ne trouve aucune resistance dans fon paffage par les canaux que la nature a établis.

DIALOGUE SECOND.

Des Eaux Thermales d'Aix-la-Chapelle.

D. Pourquoi l'appelle-t’on Aix -la Chapelle?

R . Pour la diftinguer des autres Villes qui portent le même nom; comme par exemple, Aix en Provence. On la nomme la Chapelle, par reconnoiffance à l'Empereur Charlemagne, qui eft le reftaurateur de cette Ville, & a fait bâtir cette Chapelle, ou plûtôt le magnifique Temple dédié à Dieu en l'honneur de la fainte Vierge Mere de fon Fils.

Tant d'Auteurs ont parlé de l'origine de l'ancienneté & des prérogatives avantageufes de cette Ville Imperiale, qu'on prendroit pour une digreffion, fi je vous entretenois plus long-temps fur cette matiere. Tout le monde fçait que cette Ville Imperiale, où on avoit accoûtumé de couronner les Empereurs, a été autrefois la Capitale des Gaules. Voici la Traduction que je vous ai promife.

LES PREUVES HOLLANDOISES
SUR LES EAUX THERMALES D'AIX-LA-CHAPELLE.

Jamais les Philofophes ni les Medecins n'ont été plus intriguez pour penetrer un Phénomene de la nature, que pour expliquer l'origine de la chaleur thermale. Nous ne voulons pas rapporter les fentimens divers des Auteurs qui en ont écrit: Cette repetition eft ennuiante & donne un dégoût pareil aux mets plufieurs fois réchauffez, qui excitent plutot la naufée que l'appetit.

C'eft une verité inconteftable confirmée par les experiences phyfiques, que la caufe de la chaleur des eaux qui coulent continuellement tres-chaudes, confifte dans un fel acide concentré & igneé de la nature, ou pour nous expliquer plus clairement, dans les particules de la matiere fubtile embaraffées &liées par les parties plus groffieres, terreftres & aqueufes, en tres-grand mouvement, & en forte agitation de ces particules. C'eft dans ces mouvemens que le feu fouterain tire fon origine. Confiderant fa nature, nous ne connoiffons autre caufe que la trop grande agitation de fes parties acides & fluides & les continuels changemens des corps de fon voifinage. Ce feu renfermé dans les entrailles de la terre ne produit pas des flammes, à cause qu'il n'eft pas agité du fouffle de l'air ou plus certainement, à caufe des particules molles mêlées avec les groffieres, qu'il ne peut tellement agiter qu'elles produifent la flamme; caufe pourquoi, par le continuel mouvement de fes parties, il pouffe les vapeurs fulphareufes chargées du fel concentré le plus fubtil à la region fuperieure de la terre interieure, qui étant parvenues jufques là, elles fe joignent avec les eaux qu'elles rencontrent impregnées des rayons du foleil. Pour-lors les parties des deux corps s'uniffent étroitement; car la matiere fubtile d'un corps, sans le fecours de fon phlegme, fait une continuelle diffipation de fes parties. Ainfi l'efprit du fel depuré de tout fon phlegme fe diffiperait continuellement, fi par un phlegme ajouté on n'arrêtoit pas la diffipation des parties volatiles. C'eft de même que les exhalaifons remplies de beaucoup de matieres fubtiles s'y diffiperoient continuellement, fi un phlegme aqueux, qui eft leur vehicule, n'empêchoit la fuite des parties les plus fubtiles.

L'eau impregnée par une agitation mutuelle, faifant fon chemin par les canaux de la terre, rencontre pour fon objet un corps metallique falin, qu'il penetre par la force def on fel concentré & qu'il dilate à cause de fon umidité, d'où les particules falines renfermées dans le métal étant agitées avec vioence, rompent les petites bourfes où elles étoient renfermées; & s'unissant avec l'acide, dont l'eau eft impregnée, elles font une grande effervefcence dont la chaleur eft dilatée & augmentée confiderablement.

De-là l'eau extrémement bouillante eft preffée par la pulfion continuelle de l'air, qui la comprime & la porte à la fuperficie de la terre pour en faire une fource.

Les experiences fuivantes confirment notre hypothefe.

PREMIERE PREUVE.

L’Huile de vitriol concentrée d'un acide, mêlée avec de l'eau commune, produit une chaleur tres-grande, qui étant agitée d'un peu de matiere fubtile, s'augmente fi confiderablement & avec une fi grande effervefcence, qu'il eft impoffible de toucher le verre de la main.

SECONDE PREUVE.

Si l’on met un morceau de pierre calaminaire dans un esprit acide, il se fait une fi grande chaleur, que personne n'eft capable de tenir le vafe dans la main.

TROISIEME PREUVE.

Si l’on diffoud du mars dans un efprit acide tres exactement rectifié & qu'on dephlegme avec attention la folution, on aura un efprit de nature igneée, dont en verfant quelques gouttes il fe produit une chaleur tres-violente, qui s'entretiendra tant que l'on voudra, fans l'affiftance du feu, en y ajoutant de temps en temps quelques gouttes de cet efprit ignee du fer.

QUATRIEME PREUVE

La quatriéme Experience que nous ajoutons le fait par la liqueur du nitre, par l'antimoine fixé, arrosé d'eau commune & mêlé exactement, qui font une chaleur confiderable. Cette épreuve fe peut auffi faire avec le faffran des métaux fi on y verfe de l'eau goutte à goutte.

On abfervera une effervefcence fort grande, fi on verfe fur cette preparation de l’eau goutte à goutte. Notre fyftême fe confirme évidemment par les minieres de calamine, qui font aux environs des Eaux thermales. Ce qui paroît d'autant plus, que les marcafites, les mottes de terre falines fulphureufes, & les mineraux de cette nature nouvellement tirez, étant arrofez de pluye s'échauffent beaucoup en peu de temps. De tout ce que nous venons de dire nous concluons, que les Eaux faturées de l'efprit fulphureux, aidées de la tiédeur centrale, qui leur donne un plus haut degré d'activité, diffoudent en paffant les corps metalliques qu'ils rencontrent, en penetrant les pores de ce métal, qu'elles dérangent; d'où fe fait que la matiere fubtile s'introduit dans une plus grande quantité, & que les particules fe hurtant & s'agitant mutuellement, excitent entre eles un plus grand mouvement, qui continue fi long-temps, en faifant la dilatation d'un plus grand air, que les particules falines foient forties de leurs bourfettes terreftres. Etant chaffées, elles fe dilatent partout & s’uniffant avec l'acide fulphureux fon ennemi irreconciliable, elles produisent une effervefcence ignéée par la continuelle reaction & frixion de leurs particules. On obferve que la chaleur eftd'autant plus grande & plus étendue, que les parties rameufes & falines, ou que les fels divers font en plus grande quantité. Ces Eaux ainfi bouillantes produisent les fources thermales étant portées à la fuperficie de la terre par la preffion continuelle de l'air.

Ayant maintenant pofe nos fondemens en general, nous voulons contempler les Eaux thermales d'Aix-la-Chapelle en particulier, & montrer par diverfes precipitations que ces Eaux font impregnées d'un fel acide éfurin, & d'un corps rameux fulphureux.

Nous arrêtant à ces fpeculations, nous devons maintenant examiner pour quelle raifon, appuyées de l'experience dont nous avons parlé, peuvent nous donner la connoiffance des parties contenues.

Nous ne fommes pas d'humeur de décrire exprès la teinture de differentes couleurs; nous n'avons pas le loifir de les examiner dans les diverfes precipitations à caufe du peu de temps. Qu'il nous fuffife, cherchant la connoiffance des parties contenues dans ces Eaux, de fçavoir que les couleurs dans le changement font variées, tantôt par les acides, tantôt par les alkalis qui s'y attachent diverfement & par quelques differences modifiées par les diverfes reflexions & refractions des rayons de la lumiere. Nous connoifons la methode de rendre toutes les couleurs diaphanes & incolorées, & nous fçavons par notre volonté les engendrer & les détruire.

Il n'y a point de vitriol de mars: la folution de noix de galle infufée dans ces Eaux thermales, ne fait paroitre aucune teinture noire en forme d'encre ou pourprée.

Il paroit que le nitre n'eft pas dans ces Eaux parce que les fels reftans après leur évaporation, étant jettez fur du charbon allumé, ne font aucune détonation comme le nitre.

Ces Eaux thermales ne font point impregnées de fel armoniac, car fi on ajoutoit du fel de tartre à la folution, le fel volatil purement falé, étant délivré des chaînes du fel acide, auquel il étoit auparavant uni, se diffiperoit auffitôt dans l'air & fe rendroit fenfible à l'odorat, par l'irritation des parties organiques de ce fens. On n'obferve rien de femblable fur ces Ea ux minerales.

Il eft conftant, qu'elles contiennent du foulfre, fon odeur ne le découvre pas feulement, mais on voit fes fleurs attachées aux murailles & aux voutes des Bains.

D e plus, le foulfre peut fe precipiter par le fel alkali,& pareillement par les acides. Par fa décoction avec la chaux vive, on le precipite avec les acides; les fpiritueux de nature alkaline volatile, comme l'efprit de fel armoniac, precipite & coagule les particules huileufes du foulfre.

Ces Eaux thermales contiennent un fel alkali, qui fe découvre fenfiblement, lorsqu'on les a évaporez jufqu'à ficcité. Il s'y trouve auffi un fel tenant des deux natures; fçavoir acide & alkali, que l'on découvre dans le changement en couleur du lait par la folution du fucre de lune, de faturne & du fel de tartre.

On n'y rencontre pas le fel volatil; on le connoit parce qu'ayant fait la folution du mercure fublimé, elles demeurent limpides, & diaphanes fans notable blancheur.

L'Analyse du foulfre, qui n'eft rien autre chofe, qu'un dérangement de fes particules rameufes & acides, prouve fuffifamment, que ces eaux, qui contiennent ce mineral en fubftance, ont beaucoup d'acide. Ainfi les Thermales poffedent deux fels; L’un alkali, & l'autre acide. Ces deux ennemis impuiffans, n'ayant pû fe détruire l'un l'autre, retiennent chacun leur nature, pour faire effervescence avec les fels contraires, qu'ils rencontrent.Voila la caufe pourquoi les eaux thermales, font une fi grande effervefcence avec le fel de tarte & l’efprit acide du nitre. C'est tout ce que nous pouvons dire fur cette matiere: fi quelqu'un veut s'efforcer à la dévoiler davantage nous lui abandonnons la carriere, pour obtenir la gloire de philofopher ulterieurement.

D. Je comprends maintenant la veritable cause de la chaleur actuelle: toutes ces experiences font des faits qui ne peuvent fe contefter. Il me paroît que vous êtes d'un même fentiment, Meffieurs les Analyfeurs Holandois, Monfieur des Rochas & vous.

R. Beaucoup d'autres font auffi de cette opinion; Glauber, & Becker en ont fait leur hypothese fur cette matiere. Il y a pourtant quelque difference entre tous les Auteurs que nous avons nommez: S'ils conviennent de la caufe naturelle & efficiente de la chaleur, ils ne font pas d'accord fur le lieu du fein de la terre où fe fait le foier. Si vous voulez en connoître, lifez s'il vous plaît, leurs Ouvrages. Je ceffe de philofopher & je laiffe cette matiere conteftée pour paffer à l'exiftante.

L a vertu des Eaux thermales d'Aix-la-Chapelle confifte dans le foulfre, deux fels; l'un de la nature acide, & l'autre de la nature alkaline, qui unis ensemble font un fel androgin, & dans un efprit mineral produit du gas univerfel, & de l'action violente, qui fe fait dans l'effervefcence. Je vous expliquerai dans le Dialogue parellele les effets que les Eaux actuellement chaudes ainfi impregnées peuvent faire, tant par la boiffon que par les Bains, pour la guerifon de plufieurs maladies.

Monfieur de Blondel prétend, que dans les fels qui restent après l'évaporation, il a obfervé des fels alumineux, nitreux, & des femblables au fel marin: moi-même je les ai diftinguez par le microscope dans leur differente configuration. Aujourd'hui, par diverses obfervations que j'ai faites du depuis, je dois conclure, que c'eft un fel androgin; puifque dans les experiences il fait les fonctions d'un veritable acide, & celles d'un vrai alkali.

Sur l'évaporation de 360. livres de ces eaux, on trouve une livre peu plus, peu moins, de fel mineral. Cette livre fait 5760. grains, le tout poids de Medecine: par confequent les eaux d'un pot, ou de quatre livres, font impregnées de 64. grains. On ne peut définir le poids du foulfre, ni celui des efprits mineraux, à caufe qu'ils s'échappent.

D. Depuis quel temps les Eaux Minerales d'Aix-la-Chapelle, par les Bains & par la boiffon, font-elles en ufage?

R. L'Hiftoire rapporte, que Granius frere de Neron & d'Agrippa a été le fondateur d'Aix -la-Chapelle, & le premier qui a fait faire des Bains à la façon de ceux de Rome, vers l'an du falut 53. Ayant été ruinée par les fucceffions & les viciffitudes des temps, Charles leGrand, en allant à la chaffe, a découvert les ruines des Palais & des Bains, & les a fait rétablir plufieurs fiecles après.

Du depuis les Eaux thermales ont toûjours été en ufage par lesBains. Vers le milieu du fiecle paffé Meffieurs Didier Medecin François, & Blondel Medecin penfionnaire d'Aix-la-Chapelle, ont rifqué de les mettre en ufage medical par la boiffon: ce qui leur a affez bien réuffi.

D. Combien de Bains trouve -t'on à Aix?

R. Il y a dans cinq maisons bien bâties plufieurs Bains conftruits, fort propres, & tres-commodes pour l'ufage de ceux qui s'en veulent fervir. Les eaux qui fourniffent les Bains de l'Empereur, des petits Bains & de faint Quirin, viennent des rameaux d'une même fource, impregnée des mineraux dont j'ai parlé; celles dont on remplit les Bains de faint Cornelis, de la Rofe & du Bain des Pauvres, fortent d'une autre source qui n'eft pas fi fulphureufe que la premiere.

D. Quel ufage des Eaux Minerales appelle-t'on la douche, & quels Bains nomme-t'on vaporeux?

R. Cet ufage fe fait par une pompe, dont on tire les eaux du puits dans leur entiere chaleur, pour la faire jallir avec force fur certaine partie où l'on fuppofe une humeur froide & profondement cachée. Quant aux Bains vaporeux, on en use quelquefois avec fuccès; parce que les efprits mineraux, qui s'échappent en forme d'exhalaifon vaporeule, penetrent fubtilement les pores de la peau. Pour cet effet on met une espece de grille fur la fource, fur la grille un fiege pour le malade nud, que l'on revêt d'une caiffe de bois bien jointe, ouverte par le bas, & tellement fermée par le haut, qu'il n'y a que l'ouverture pour fortir la tête, que l'on couvre d'un linge chaud, pour la lui effuyer de temps en temps. Cette façon de Bains excite puiffamment la fueur.


DIALOGUE TROISIEME.

Des Eaux Thermales de Chaud-Fontaine.

D. Combien de fources d'Eaux thermales trouve-t'on à Chaud-Fontaine?

R. Il y en a une qui fournit les grands Bains, que l'on nomme ainfi à caufe de leur grandeur, de leur propreté & de l'ancienneté de leurs fources.

D . J'ai entendu dire qu'il y avoit auffi dans ce lieu des Bains nommez Gadot?

R. Cela eft vrai. Nous en parlerons dans fon Dialogue particulier: parce que cette fource, qui a été découverte depuis peu d'années, n'eft pas thermale, n'ayant point de chaleur actuelle pour s'y baigner fans les échauffer; ce qu'au contraire on peut faire dans les eaux de la fource thermale, qui a une chaleur fuffifante & naturelle fans être affiftée du fecours de l'art.

D. Faites-moi la grace de me dire quelles fubftances minerales ces Eaux thermales des grands Bains contiennent?

R. Je ne puis mieux vous les faire connoître, qu'en vous rapportant l'Analyfe exacte que le College des Medecins de Liege a faite. Ecoutez, je vous prie, le contenu de la Déclaration authentique qu'il en a donnée,


ANALYSE DES EAUX THERMALES DE CHAUD-FONTAINE
FAITE PAR LE COLLEGE DES MEDECINS DE LIEGE

Avec les Experiences faites far le fediment de cette Source chaude, & fur la refidence reftée après l'évaporation et des Eaux, en 1717.

Nous Prefect & Gens compofans le College des Medecins de Liege, ayant fait attention aux eaux chaudes de Chaud-Fontaine, fitué à deux lieues de cette Ville, nous avons crû être de notre devoir de communiquer au Public, les Obfervations que nous avons faites dans leur Analyfe, les principes & les qualitez que nous y avons reconnues. A quoi nous avons été portez d'ailleurs par les bons effets qu'elles ont jufqu'ici produits à une infinité de perfonnes qui s'en font fervies avec fuccès, de l'avis de leurs Medecins; chofe autant neceffaire pour l'ufage dès Eaux Minerales, que pour tout autre remede. Et pour que la chofe fe fît dans l'ordre, nous avons député au mois de septembre dernier trois médecins & deux Apoticaires de notre Corps pour aller à la fource avec notre Greffier juré, avec ordre de prendre toutes les précautions neceffaires pour qu'on ne pût rien nous reprocher. Nos Députez s'étant rendus for les lieux, ordonnerent d'abord de faire jouer la machine, laquelle, par le moien des pompes, conduit l'eau naturelle des fources dans les Bains; ils vifiterent tous les appartemens & lieux circonvoifins, pour tâcher de découvrir s'il n'y avoit point d'artifice ni de communication avec le puits, pour y faire entrer des eaux chauffées (comme quelques mal-veillans en avoient fait courir le bruit pour les décrier;) après quoi, ayant fait découvrir le puits, d'où il fortit une fumée & des vapeurs fulphureufes, ils y firent defcendre un homme avec de lalumiere, pour , en leur presence, examiner la circonference, dont le diametre eft d'environ cinq pieds & demi, ayant en hauteur environ autant d'eau chaude: Et après une exacte perquifition, il leur dit qu'il ne fentoit & ne voyoit rien que des fources vives également chaudes, qui fortant naturellement du fonds du puits, y caufoient des bouillonnemens qui agitoient la fuperficie de l'eau. Et pour être d'autant plus affurez de lapureté des eaux qu'ils avoient deffein d'analyfer, ils ordonnerent à cet hom e d'emplir quantité de bouteilles avant de fortir du puits, où il étoit en fueur, & d'apporter auffi du fediment qui fe trouvoit dans le fonds; le fediment fut d'abord mis dans un pot de grez, & confié avec les bouteilles à la garde de nos Députez, & de là apporté à notre College, pour y être examiné & analyfé. Nos Députez nous ont encore fait rapport, que le lendemain à la pointe du jour, avant de partir, il furent vifiter derechef les eaux qui fortoient des pompes, & qu'ils les avoient trouvées dans un même degré de chaleur que le jour precedent, & que font celles qui découlent du gravier a 100. pas de là, au bord de la riviere: en forte que nous avons jugé que ces eaux font propres & d'une chaleur fuffifante à s'y baignér fans y mêler d'eau chauffée. Voici la maniere que nous nous y fommes pris pour en faire l'Analyse.

Experiences faites fur le fediment des fources chaudes,
& fur la refidence reftee après l’évaporation des eaux.

I.
Pour reconnoître à fonds la nature des matieres que nous avions fait tirer du puits, ayant defféché le fediment, on a versé par-desus du vinaigre diftilé, qui a caufé une grande effervefcence, après laquelle le vinaigre s'eft trouvé adouci.

2.
Nous avons enfuite filtré ce vinaigre adouci, & on y à ajouté de la noix de galle en poudre, par le moyen de laquelle le vinaigre s'eft chargé d'une couleur violette: ce qui est une marque que cette matière contient du mars.

3.
Pour verifier cette experience, on a pris du nouveau vinaigre; & y ayant ajouté de la noix de galle avec du vitriol de mars, ce mélange a donné à peu près la même couleur & la même fenteur.

4.
Le vinaigre qu'on avoit verfé fur le fediment fufdit avec la noix de galle, yant refté quelque temps dans un verre, s'eft couvert d'une pellicule blanchâtre, qui nous a fait connoître les parties foufreufes furnageantes & feparées du mars, qui s'étoit precipité au fond du vaiffeau.

5.
Ayant mêlé du fediment du fonds du puits avec autant de falpetre, on l'amis dans un creufet rougi au feu, & il s'eft fait une détonation, qui eft la marque évidente du fouffre y contenu.

6.
Les eaux ,que nous avions fait puifer dans le puits ayant été évaporées à ficcité, ont laifé une refidence ou matiere minerale & faline, qui étant frottée entre les doigts, fentoit le foulfre; & étant mife fur la langue, la picotoit par fa fubftance faline.

7.
Ayant mélangé cette matiere dépouillée de fon fel avec autant de nître, il 'eft fait une détonation plus manifefte & plus forte qu'avec le fediment du puits.

8.
On a enfuite verfé du vinaigre diftillé fur la refidence de l'évaporation des eaux, & il s'eft fait une effervefcence plus confiderable que fur le fediment du puits; & la même chose s'eft faite avec d'autres efprits acides de vitriol, eau forte &c.

9.
Pour reconnoître la chofe ulterieurement, on a verfé de l'efprit urineux d'armoniac fur la même refidence, telle qu'elle s'eft trouvée après l'évaporation, qui n'ayant produit aucune action, nous a fait connoître évidemment que les fels, que ces eaux contiennent, font de la nature des alkalis adouciffans.

10.
Ayant enfuite féparé les parties terreftres de la refidence avec l'eau de la fource, nous avons fait évaporer la lotion dans un vaiffeau de verre à peu près à ficcité; & l'ayant laiffé en repos pendant deux jours, il s'eft formé des cristaux en forme d'aiguilles plattes émouffées, que nous avons reconnus pour fel faturé: puifque l'alkali de l'huile de tartre par défaillance, n'a fait non plus d'action que l'efprit acide de vitriol que nous avons verfé deffus.

11.
Enfin après la féparation des criftaux, nous avons examiné la lexive reftante dans le verre, & l'ayant fait évaporer à feu lent, & prefque à ficcité, on a verfé deffus de l'eau forte, qui à causé une effervescence; ce qui prouve évidemment que ce fel participe beaucoup de l'alkali, avec quelqu e portion faturée d'acide.

12.
C'est pourquoi confiderant ces eaux, & les connoiffant impregnées de mars & de foulfre, & chargées d'un fel alkali adouciffant: nous avons déclaré, comme nous déclarons, qu'elles conviennent pour l'interieur dans les maladies caufées par un acide auftere & coagulant; comme font les affections hypocondriaques, & notamment pour le fcorbut,

Dans les cruditez de l'eftomac tant acides que nidoreufes;

Dans toutes les maladies que l'on attribue aux obftructions du mefentere, du foye, de la ratte & autres vifceres du bas ventre; dans la gravelle & obftructions des voyes urinaires;

Dans l'afthme humoral & autres maladies de la poitrine, obstruction du poulmon, & autres coagulations d'humeurs.

Finalement dans les maladies o ù les principes actifs de la maffe du fang font déprimez, & dans plufieurs maladies & incommoditez du fexe.


Pour l'usage des Bains de cette fource

Elle convient fur le même principe dans plufieurs affections cutanées; comme dartre, galle, prurit, herpes & autres caufées par un acide falin.

Dans les rhumatifmes & gouttes fciatiques; dans les maladies des nerfs, crampes, gouttes, mouvemens convulfifs caufez par l'irritation des parties nerveufes, engourdiffement, ftupeurs,& autres aufquels les Medecins lesjugeront propres, tant pour la boiffon, quepour les bains.

Le tout a été fait & conclu au College le 9. Octobre 1716. avec ordre à notre Greffier juré d'enregiftrer la prefente pour la connoiffance & utilité du Public.

A ANRATE,
Greffier du College.
Par Ordonnance,

D. J'avois fouvent entendu parler des Bains de Chaud-Fontaine; je n'y ai fait aucune attention: parce que felon la voix publique, j'étois prévenu que les Bains conftruits à Chaud-Fontaine fervoient plûtôt pour le plaifir & l'amufement des peuples que pour recuperer la fanté, je reviens facilement de ce faux prejugé, étant tres-certain que des Eaux minerales contenant les principes que le College des Medecins y a decouverts par une Analyse fi exacte, doivent produire des effets furprenans, pas feulement par les Bains, mais encore par la boiffon.

R. L'experience a affez fait connoître que vous ne vous trompez pas; elles ont produit par la boiffon & par les Bains des guerifons merveilleufes, dont je parlerai au Dialogue du parallele. Je ne me fuis pas trompé dans le préjugé que j'ai avancé fur le chapitre de ces Eaux thermales lorfque j'ai dit l'an1700 dans la Defcriptionou Analyse desEaux de Tongre que j'ai donnée, qu'il y avoit une fource d'Eaux thermales à Chaud-Fontaine, & que je ne doutois pas que dans la fuite elle ne produifît des guerifons auffi merveilleufes pour le moins que celles d'Aix-la-Chapelle.

D. Les Eaux thermales de Chaud-Fontaine font-elles fort anciennes?

R. Leur ancienneté fe manifefte affez par le nom du lieu où elles fe produifent; puifque ce petit terrain, qui est un valon agréable & qui prend fon luftre de cette fontaine, a été connu depuis plufieurs fiecles fous le nom de Chaud-Fontaine.

D. Il me femble d'avoir oui dire qu'il n'y a pas fort long-temps qu'elles font en ufage?

R. Anciennement ces Eaux ne furent connues que par une quantité de petites fources qui couloient fur le bord de la riviere de Weft, & qui ne paroiffoient pas affez abondantes pour en faire un grand ufage; cependant en l'an 1676. Simon Sauveur obtint du Major de ChaudFontaine fon beau-frere, la permiffion de faire ériger dans fon fond un petit bâtiment avec quelques bains, à l'endroit où fe trouvoit une de ces fources. Quelques gens des environs commencerent à s'en fervir avec beaucoup d'avantage pour la fanté; ce qui ayant procuré à ces Bains quelque credit dans le monde, plufieurs malades des Villes voifines en voulurent faire l'experience, & cela avec un fuccès fi merveilleux que peu d'années après on y vit aborder de toutes parts plufieurs perfonnes des plus diftinguées, qui venoient en foule pour y trouver leur guerifon.

D. Dites-moi, jevous prie, quelques-uns des effets que ces Eaux ont produits, pour fe donner d'abord tant de reputation.

R. Elles ont fait des effets prodigieux, tant par la boiffon que par les bains à l'égard de tous ceux qui étoient attaquez du rhumatifme, & même à l'égard de plufieurs paralytiques, lefquels n'ont pas feulement trouvé du foulagement mais pour la plupart un entier rétabliffement de leur fanté. Ceux qui étoient incommodez de la gravelle, de la retention d'urine, & d'autres incommoditez provenantes de l'obstruction des vifceres & des maladies même les plus inveterées & chroniques, y ont pareillement trouvé pour la plûpart leur guerifon; & les autres un foulagement notable, qui certainement leur auroit procuré une entiere guerifon, s'ils en avoient continué l'ufage avec conftance.

Hypocrate confeille un terme de fix femaines pour l'ufage des remedes alterans dans les maladies chroniques. Ce fçavant homme confeille de plus, quand les maladies font opiniâtres, pour peu de foulagement qu'on ait trouvé après un mois de repos, d'ufer des mêmes remedes pendant un pareil terme, & continuer de m ême à quatre ou cinq reprifes, pour déraciner les maladies les plus fixées & les plus opiniâtres.

D. J'ai auffi entendu dire que Chaud-Fontaine a été fort long-temps prefque fans bâtiment?

R. Cela eft vrai à l'égard de l'endroit où les Bains font aujourd'hui; du temps de Simon Sauveur il n'y avoit qu'une petite hutte conftruite d'argille, où l'on avoit fabriqué deux ou trois petits Bains mal-propres, qui recevoient l'eau de la fource à la faveur d'une petite pompe. Pour-lors les étrangers étoient obligez de fe loger dans la maison du proprietaire du lieu, qui eft un gros bâtiment antique peu éloigné de la fource, ou dans les forges voifines: & ce n'a été qu'en l'an 1713. qu'on a commencé de conftruire le magnifique bâtiment, tel qu'on le voit aujourd'hui à l'endroit des Bains.

D. J'ai peine à concevoir pourquoi, malgré de fi grands effets, & un fi grand concours de monde, on a resté tant de temps fans procurer cet avantage au Public.

R. Pour vous éclaircir là-deffus je fuis obligé de reprendre la chofe un peu de loin. Je me flatte que vous ne ferez pas fâché d'apprendre des faits qui peuvent fervir à l'hiftoire du temps & à fatisfaire votre curiofité.

Voici la raison effentielle du retardement qui vous furprend. Simon Sauveur, comme je vous ai déja dit, avoit en l'an 1676 obtenu du Major de Chaud-Fontaine fon beau-frere la permiffion de faire dans fon fond des Bains. Simon Sauveur apprehendant que cette permiffion ne pût plus lui fervir après la mort du Major fon beau-frere, & qu'en ce cas il alloit être privé du profit notable qu'il avoit retiré pendant fa vie, chercha un moyen pour éluder le droit de ce dernier, ou plûtôt de fes reprefentans. Pour cet effet il s'avifa en l'an 1696 de s'adreffer au Prince, & de lui expofer que par fon application & fçavoir faire il avoit eu le bonheur de trouver la fource de ces Bains, & qu'il les avoit fait conftruire à grands fraix fur un chemin royal. A la faveur de ce narré peu fincere, il demanda que cette fource lui fût accordée en accenfe, ce qu'il obtint par Octroi du 19. Juin 1696.

Cet Octroi ne manqua pas de produire des difficultez entre les reprefentans du Major & Simon Sauveur. Ce dernier ne voyant pas de jour pour foûtenir cet Octroi, trouva à propos de furroguer dans fes droits litigieux Theodore Sauveur fon neveu, qui peu inftruit du fait de fon auteur, continua un gros procès, jufqu'en l'an 1713. Dans ce temps notre fereniffime Prince ayant reconnu qu'il avoit été furpris par la fauffe expofition de Simon Sauveur, & que même Simon, non plus que Theodore Sauveur fon neveu & furrogué, n'avoient pas dans ce lieu-là un feul pouce de terrain en leur propre pour bâtir des Bains convenables, revoqua fon Octroi de l'an 1696. comme nul. Ce fut pour-lors que les Eaux de Chaud-Fontaine commencerent à prendre un nouveau luftre & plus de perfection.

D. Faites-moi la grace de me dire pourquoi ces eaux prirent alors un nouveau luftre & plus de perfection?

R. Le voici. En confequence de la revocation de l'Octroi fus-touché, la Chambre des Comptes de notre sereniffime Prince, qui étoit alors adminiftrée par les Seigneurs que la Regence Imperiale avoit établis, jugerent à propos de faire creufer dans le petit terrain que Simon Sauveur avoit occupé, & ils remarquerent que la principale fource qui donnoit naiffance à celle que ce dernier avoit occupée, & aux autres plus petites qui couloient le long de la riviere, étoit bien avant dans la prairie de feu le Major de Chaud-Fontaine. Ils trouverent auffi que la fource de Theodore Sauveur étoit quelque peu alterée par une petite fource d'eau froide qui fe mêloit avec l'eau chaude, prefque dans l'endroit où elle jaillifoit.

Cette découverte confirma plus que jamais les reprefentans du Major dans le deffein qu'ils avoient de faire valoir leur droit fur cette fontaine; il s'adrefferent pour cela à la Chambre des Comptes, qui faifant attention aux raisons & aux demandes propofées par les heritiers ou reprefentans & proprietaires de la prairie, leur fit la justice d'y acquiefcer.

D. L'on m'informe cependant que les poffeffeurs de ce fonds n'ont obtenu cette fource qu'à la faveur de certaine accense.

R. L'on vous a informé jufte; puifqu'en effet les Seigneurs de la Chambre des Comptes ayant pris l'avis du Chapitre Cathedral, & confulté là-deffus les plus habiles Jurifconfultes, de même que quelques Medecins tres-experts, jugerent que cette fource étoitune espece de tréfor pour le Pays, & par confequent que le Prince étoit en droit d'en difpofer, ou du moins de referver quelque reconnoiffance au profit de fa Table épifcopale, & fur ce principe ils donnerent en accenfe cette même fource aux proprietaires de la prairie, parmi deux cens chapons à payer annuellement à la Chambre des Comptes, & parmi plufieurs conditions avantageufes, que le Prince, toûjours de l'avis du Chapitre Cathedral, impofa en faveur du Public, comme j'ai vû par l'Octroi fur ce fait & accordé le neuviéme du mois de Juin 1713.

D. J'avois crû jufqu'à prefent, que les Princes avoient feulement droit fur les minnes & les métaux?

R. C'est un abus: car on a toûjours déferé cet honneur aux Princes à caufe de leur fouvereneté, de leur laiffer la libre difpofition de ce qui croît de plus rare & de plus précieux dans leurs Provinces; c'est pourquoi les Rois de Perfe ayant conquis l'Arabie & l'Ethiopie, fe referverent un particulier tribut fur l'encens, l'ébene & l'yvoire, qui étoient les plus excellentes & les plus riches marchandifes de leur Empire.

Les Rois de Judée en firent de même fur le Baume, qui étoit reputé le plus excellent qui fût au monde. Les Romains, après avoir conquis ce Royaume, le conferverent avec tant de foin & de curiofité, qu'il n'y avoit que le Fifque qui reçût les revenus de la culture de cette riche plante; d'où vient que Pline traitant de fes proprietez, dit: Balfama nunc ferit Fifcus.

Les Rois d'Egypte retenoient pour eux les plus belles topazes qui croiffoient dans l'Ile Ophiade.

Maintenant l'Empereur des Tartares prend pour foi les plus belles Turquoifes qui fe trouvent en fes Pays; comme les Rois de Bifnaga, où font les plus belles roches de diamant, fe refervent tous ceux qui excedent le poids de cent quinze grains.

D. Je vous ai engagé dans une digreffion un peu longue; cependant je me trouve fi fatisfait des éclairciffernens que vous me donnez, que je ne puis l'abandonner fans vous prier auparavant de me dire, fi cette principale fource eft abondante; & fi elle fe produit au jour fans aucun mélange de l'eau la riviere, ou d'autres fources étrangeres?

R. Cette fource eft tellement abondante que pendant toute la faifon elle fournit depuis les quatre ou cinq heures du matin une quantité de Bains; & cela fi copieusement, qu'au befoin elle pourroit en fournir au double pour les remplir, & même pour les renouveller à chaque moment du jour.

Il est d'ailleurs tres-certain, qu'elle ne fouffre aucun mélange d'eau étrangere; parce que les poffeffeurs d'aujoud'hui ont pris un foin exact de bien renfermer leur principale fource dans un puits ou reservoir bien cimenté, qui étant au furplus enclavé dans les bâtimens, empêche abfolument toute communication de l'eau froide avec cette eau thermale.

D . Avez-vous quelques experiences de cela?

R. Oui, j'en ai une tres-fûre & tres-évidente car aujourd'hui cette fource fe produit naturellement d'une chaleur auffi agreable & auffi propre pour les Bains qu'on puiffe la fouhaiter. Il n'en étoit pas de même autrefois; puifque la petite fource dont on s'eft fervi du temps de Simon Sauveur, & enfuite de Theodore Sauveur on neveu n'étoit pas tout-à-fait exempte de mélange; & que pour cette raifon on étoit pour-lors obligé de fe fervir du fecours du feu artificiel pour donner aux eaux une chaleur fuffifante, ce qui n'eft plus neceffaire aujourdhui.

D. Faites-moi, s'il vous plaît, une description du bâtiment & des Bains de Chaud-Fontaine?

R. Les fondemens de ce bâtiment ont été jettez en l'an 1713; & les proprietaires de ce Lieu y ont fait travailler avec tant de diligence, que ce bâtiment magnifique a paru en état l'an 1714, à la fatiffaction de notre fereniffime Prince & de fes Etats, qui en avoient prefcrit le plan.

Ce Bâtiment eft un pavillon à la˛ moderne, accompagné de deux aîles regulieres. Ce corps de logis eft flanqué de deux tours quarrées, & les deux aîles font ornées chacune d'une pareille tour à leurs aboutis. Je vous en donne ici le plan avec fes mefures geometriques, pour éviter une defcription qui n'eft pas de ma sphere.

Ce logis peut contenir un grand nombre de perfonnes, même de la premiere qualité, avec beaucoup de commodité. Outre ce magnifique pavillon il y a quantité de maisons fort fpacieuses, & bâties nouvellement, où l'on peut être à l'aise. Quand on peut loger dans le pavillon, il est beaucoup plus à propos, parce que l'on fe rend aux Bains fans s'expofer à l'air. Il y en a dix-neuf dans l'aîle droite, les uns plus grands, les autres plus petits, avec leurs chambres & la commodité pour y faire du feu, en cas qu'il foit neceffaire ou qu'on le fouhaite. L'on pourra en conftruire d'autres dans l'aîle gauche, qui eft destinée à cet ufage, fi, comme je n'en doute pas, l'affluence des malades augmente toutes les années comme elle a fait jufqu'à present.

Ces Bains reçoivent les Eaux de la fource chaude, par le moyen de quatre groffes pompes, qu'une roue actionée de l'eau d'un bras de la riviere fait agir fans ceffe, avec des balanciers, à la façon de ces machines que l'on employe à Marly pour les Fontaines de Versailles, & de celles dont on fe fert pour vuider les eaux qui noient les minieres: ce qui fait qu'on peut entretenir les eaux des Bains dans un même degré de chaleur pour y refter auffi long-temps qu'il eft neceffaire; & que l'on a de plus l'avantage & l'agrément de renouveller les Bains, fi on le fouhaite; parce que les eaux y découlent fans difcontinuer un moment. D'où vient que la circonference du corps reçoit immédiatement l'impreffion des efprits & des fubftances minerales en leur entier, qui par penetration ou irradiation font de puiffans deftructeurs ou correcteurs de tous acides viciez. Ce qui ne peut pas fe faire fi fortement, lorfqu'il faut échauffer des eaux froides, quand même elles feroient minerales: l'action du feu diffipe les parties les plus fubtiles & les plus actives; quand même le mouvement de cet élement feroit capable d'agiter les matieres minerales, & reveiller les efprits retenus & accrochez dans leurs fubftances. Il feroit ridicule de s'imaginer, qu'elles puiffent-être auffi efficaces que celles, qui fortant de la fource, ont leur chaleur naturelle, leurs efprits & leurs matieres en mouvement.

Quoique le fentiment que je viens d'avancer fur les Eaux, foit fondé fur la raifon; je dois donner ce témoignage à la verité, que les Eaux minerales de la fource du Gadot, quoiqu'on doive les chauffer pour s'y baigner, ont fait de grandes guerifons de plufieurs maladies. J'en parlerai plus amplement dans fon propre Dialogue, qui fuivra celui-ci.

Ces deux fources fidifferentes en chaleur ont fait courir le bruit qu'on étoit obligé de chauffer toutes les Eaux des fources de Chaud-Fontaine pour s'y baigner. On étoit perfuadé que l'on fe fervoit d'artifice au grand Bain, pour leur donner la preéminence de la chaleur actuelle fur celles du Gadot. J'ai voulu m'éclaircir de ce fait par moi-même. Je me rendis fur le Lieu à la fin du mois de Novembre 1720, dans le temps que tous les Etrangers en étoient partis. Je m'adreffai au Directeur des Bains; je lui demandai un Bain, qu'il me fournit auffitôt. Je trouvai les eaux d'une chaleur proportionnée à celle de la nature du fang. Etant forti, je le priai de me faire voir l'endroit où étoit la chaudiere à chauffer une partie des eaux minerales, pour en fournir à ceux qui les demandent (ce qui eft néanmoins une grande erreur;) car la nature fe réjouit par une chaleur qui lui eft effentielle, & eft hurtée par celle qui excede par trop fon équilibre. Quoique la promptitude, avec laquelle le Directeur m'avoit fourni le Bain, m'eût déja assez persuadé, qu'il n'y avoit point d'artifice, j'avois demandé à voir la chaudiere pour lever entierement mon doute. Je la vis vuide, n'ayant ni eau chaude ni froide; fon fond étoit couvert du dépôt de la matiere minerale, à l'épaiffeur d'un travers de doigt. Je vis auffi le puits de la fource, qui étoit rempli de vapeurs; j'en fis tirer de l'eau, & je connus qu'elle étoit dans le même degré de chaleur que celle qu'on avoit fournie aux Bains.

D. Je vous fuis obligé de cet éclairciffement; faites-moi la grace de me dire où Chaud-Fontaine eft fitué.

R. Il eft à deux lieues de la Ville de Liege vers le Sud, dans un vallon percé de l'Orient à l'Occident. C e vallon eft le plus agréable du monde; les montagnes qui l'environnent ne font pas de ces rochers fauvages & infertiles; elles font couvertes par-tout de bocages d'une riante verdure, ce qui fait que le moindre zephir qui peut agiter les feuil les y fait refpirer un air le plus fain & le plus convenable à la refpiration des malades.

On peut dire auffi que cette quantité de belles maifons, que plufieurs Particuliers y ont fait conftruire pour l'utilité du Public, ces allées par-ci par-là, où l'on promene commodément, la riviere de Wefte qui fepare cet aimable vallón, & d'autres objets qui par leurs diverfitez vous recreent & vous occupent en même temps, peuvent en quel-maniere être mis au rang des chofes qui contribuent à la convalefcence des malades. Dailleurs le voifinage d'une grande ville qui fournit abondamment tout ce qui eft neceffaire à la vie, par fes bâteaux couverts qui y arrivent & qui en partent plufieurs fois par jour, leur procure fuffifamment tout ce qu'ils peuvent fouhaiter pour les befoins de la vie & pour la commodité de la voiture.

D. Cette petite riviere de Weste eft-elle confiderable?

R . Elle eft fi confiderable qu'elle fert par bâteaux au tranfport de quantité de marchandifes. Julius Cæfar faifant la guerre contre Ambiorix Roi des Eburons, dit qu'Embourg, pour-lors Capitale de cette Nation, dont les Liegeois tirent leur origine & le nom d'Eburon, étoit fitué entre les rivieres d'Owtre & de Wefte: en effet Embourg, qui n'eft aujourd'hui qu'un village, eft fitué fur une hauteur à peu de distance de l'une & de l'autre de ces rivieres, qui fe joignent à Chaînée, à une lièue de Chaud-Fontaine, & portent enfemble leurs eaux en tribut à la Meufe, qui paffe, comme vous fçavez, au travers de la Ville de Liege.

D. Il eft fûr que cette riviere eft d'une fort-grande utilité pour Chaud-Fontaine; mais n'y a -t'il pas d'autres commoditez par terre?

R. Oui. Il y a des chemins affez commodes pour y aller à pied & à cheval; mais pour ce qui regarde les voitures, il m'en eft pas de même, à caufe, de certains défilez qui s'y rencontrent. J'apprends que Son Alteffe Sereniffime Electorale, à la requifition des Etats, a refolu, & même donné les ordres pour y faire pratiquer un chemin commode, par où les voitures pouront paffer à côté les unes des autres, fans s'embarraffer. Cela étant, je ne doute pas que Chaud-Fontaine ne s'augmente confiderablement, & que fes Eaux falubres ne foient d'un grand profit à la Ville de Liege & à tout le Pays, par l'abord des Etrangers, qui viendront y chercher la guerifon de leurs maladies.

DIALOGUE QUATRIEME.

Des Eaux du Gadot.


Il me paroît, felon ce que vous avez dit dans les Dialogues précedens, que Gadot eft fitué dans le même vallon que Chaud-Fontaine?

R. Oui, même à peu de diftance, au pied de la montagne: il eft pourtant féparé par un bras de la riviere de West, que l'on a fait couler exprès pour faire agir les machines mechaniques qui fervent aux moulins, fendries, batteries de fer &c.

D. Pourquoi appelle-t'on ces Bains Gadot?

R. Parce qu'ils font fituez dans un endroit appellé vulgairement de ce nom.

D. Y a t'il beaucoup de Bains?

R. Il y en a plufieurs, des grands & des petits, bâtis affez commodément, & des logemens propres pour la commodité de ceux qui vont s'y baigner.

D. Dites-moi prefentement quels font les principes mineraux que ces Eaux contiennent?

R. Vous les connoîtrez par l'Approbation de Meffieurs du College de Liege, dont voici la copie tirée du Regitre authentique de ce Corps.

APPROBATION .
De la Fontaine Tiede nommée vulgairement Gadot, fituée dans le vallon de Chaud-Fontaine, donnée le 13. Novembre 1711. par les Prefect & Medecins compofans le College de Liege, fpecialement convoquez au Lieu ordinaire, à la requête du Sieur DE CHESSION Capitaine de Beaufais.

« Nous les Prefect & Medecins compofans le College de Liege: vû le rapport des Sieurs BURDO &
BRESMAL, fpecialement députez à la vifite de cette Fontaine nouvellement découverte, les experiences réiterées en notre prefence, & celles que nous y avons ajoûté pour un entier éclairciffement; déclarons que cette Source eft impregnée de foulfre & de Mars, & par confequent tres-utile au Public.

Premierement pour débarraffer par la boiffon de ces Eaux les premieres voyes, rétablir les levains viciez, corriger l'acrimonie des humeurs, ôter les obftructions des vifceres, & guerir plufieurs maladies de la poitrine. Secondement nous jugeons ces Eaux propres à faire des Bains pour diverfes maladies de l'exterieur.

Etoit figné,
A. ANRATE Greffier,
Per Regiftrum.

D. Il me paroît que ces Eaux ont beaucoup de rapport avec celles de la Fontaine chaude, puisqu'elles tirent leurs vertus du foulfre & du mars; mais d'où vient qu'elles font fi differentes á l'égard de la chaleur actuelle?

R. La caufe de cette difference fe manifefte d'abord, fi l'on confidere, que paffant comme elles font au travers d'une carriere de marbre, que l'on a découvert dans cet endroit, elles perdent la chaleur actuelle qu'elles peuvent avoir d'origine. Quoi qu'il en foit, j'ai l'honneur de vous dire, qu'elles ont produit & qu'elles produifent encore aujourd'hui des effets tres-heureux, par la boiffon & par les bains, pour la guerifon des maladies, tant de l'interieur que de l'exterieur: j'en ai été moi-même témoin oculaire; & plufieurs perfonnes gueries & foulagées en ont donné leurs déclarations authentiques. J'avois promis au Dialogue précedent d'en parler plus amplement; mais j'ai trouvé à propos de le remettre á celui du Parallele, parce qu'elles font à peu près femblables en principes avec celles de la Fontaine chaude & feulement diffemblables par la chaleur actuelle, par confequent efficaces pour produire de bons effets.

DIALOGUE CINQUIEME.

Des Eaux de Borçet ou de Porçet.

D. Pourquoi dites-vous de Borçet ou de Porçet

R. Quoique j'aye dit de Borçet ou de Porçet, j'aurois mieux fait de dire de Porçet ou de Borçet; parce que ce nom de Borçet, qu'on lui donne ordinairement, ne fuit pas fon éthymologie: puifque felon plufieurs Auteurs, il fe tire de la grande quantité de porcs fauvages que l'on trouvoit dans cet endroit.

Ce Bourg eft diftant de la porte d'Aix-la-Chappelle (vers le Midi) de laportée d'un coup de moufquet. Dès qu'on entre dans ce Bourg il y a une defcente fort difficile pour fe rendre dans une vallée entre deux montagnes, o ù il fe trouv e plufieurs sources d'eaux fi chaudes, qu'elles paroiffent bouillonantes, comme de l'eau dans un chaudron fur le feu: tellement que les Habitans ne se fervent d'autres moyens, pour ôter le poil aux cochons & pour plumer la volaille; de plus, on y peut cuire des œufs durs. Monfieur de Blondel a fait une remarque, que quoique l'aubin en foit endurci le jaune ne peut fe fixer. Il ne nous dit pas les raifons de ce phenomene; j'en dirai ma pensée au Chapitre du Parallele.

Au bord du ruiffeau qui découle des prairies appartenantes aux Nobles Dames de Borçet, il y a quinze maisons voifines les unes des autres.
1. La Maifon des Dames.
2. De la Couleuvre.
3.& 4. De l'Epée.
5. De la Meule d'Or.
6. Du Heaume.
7. Du Cocq.
8. Des Grands Bains.
9. De la Fontaine.
10. De l'Ecreviffe.
11. Du Monde renverfé.
12. De la Coupe.
13. De L'Ange.
14. De la Role.
15. Le Bain des Pauvres, qui eft fans Couverture.

Les fubftances & matieres minerales de ces Eaux thermales, felon Monfieur de Blondel, contiennent un alun falé, fans foulfre; & felon moi un fel androgin ordinaire aux fontaines: je fuis perfuadé que les fels feuls ne font pas capables de caufer cette grande effervefcence. Cela fuppofé, il doit y avoirun milieu, qui eft le gas univerfel, & une troifiéme matiere graffe & huileufe qui fe peut rencontrer dans d'autres mixtes auffi-bien que dans le foulfre.

Les déjections noires que l'on apperçoit dans le découlement des fontaines me perfuadent qu'elles tiennent de la nature de faturne, communément appellé plomb, qui contient plus de graiffe & de parties huileufes que les autres métaux. On fçait que ce métal a une particuliere vertu & douceur anodine pour combattre les matieres âcres par fes parties adouciffantes.

C'eft pour cette raifon que les fains & les malades s'y baignent avec fuccès; les premiers le faifant avec délices & impunément, & les feconds y trouvant du foulagement, du remede à leur maux & de la force dans leurs membres.

Enfin ces Eaux, par la boiffon & par les bains, fortifient beaucoup par la vigueur de faturne, qui tire fon nom de la planette dont il reçoit les influences.

Ce métal eft rempli de foulfre ou d'une terre bitumineufe; il contient auffi du mercure, que les Chimiftes experts fçavent faire découler, quand il leur plaît.

Il feroit à fouhaiter qu'il en demeurât dans les Eaux de Borçet; je crains que dans la reaction de l'efprit volatil acide avec le fouffre & les autres parties graffes & huileufes du métal, il ne s'en fépare entierement, à moins qu'il ne refte par irradiation quelque vertu de ce fleau des maladies les plus opiniâtres.

Les connoiffeurs fçavent que le plomb eft de fa nature fort adouciffant, par consequent ennemi des humeurs âcres & acides. Voila d'où vient que les Eaux de Borçet impregnées des vertus de ce métal font propres par la boiffon aux cardialgies, aux fquinances, à ceux qui font fujets aux maladies de la gorge, & font avantageufes pour le flux immoderé des menftrues & des hemoroïdes, les flux de ventre, les lienteries, les diffenteries, les gonorhées, & confolident les folutions de continuité faites par l'acrimonie dans l'eftomac & dans les inteftins.

Par les Bains, outre qu'elles ne font jamais nuifibles, comme j'ai dit ci-deffus, aux perfonnes faines, qui peuvent s'en fervir fans rifquer, mais au contraire fortifient les membres; elles gueriffent dans l'ufage medical par leur vertu balfamique les dartres, la gratelle, l'eryfipelle, & foulagent beaucoup la goutte chaude, & meme la gueriffent entierement, fi on ufe de ces Eaux, tant par la boiffon que par les bains, pendant long-temps, & avec l'exactitude requife, ce qu'il faut obferver, fi l'on veut obtenir l'effet fouhaité.

DIALOGUE SIXIEME.

Du Parallele.

D. Commencez, s'il vous plaît, de mettre les Eaux Thermales & Minerales en parallele fur leur chaleur actuelle & fur les differens effets qu'elles peuvent produire, tant pour la guerifon des maladies, que pour la confervation de la fanté.

R. Les Eaux thermales d'Aix-la-Chapelle font d'une fi grande chaleur, qu'il eft impoffible d'en faire des Bains à s'y pouvoir baigner dès qu'on vient de les remplir: c'eft pourquoi on eft obligé de laiffer couler le foir les Eaux qui doivent fervir aux Bains du matin, encore fe trouvent-elles fi chaudes, que les perfonnes d'un temperament foible rifquent beaucoup en s'y baignant dans un tel degré de chaleur.

Vous ne doutez pas que cet inconvenient ne foit fâcheux; d'autant plus que les Bains étant grands & fpacieux, fervent à baigner tout à la fois un grand nombre de perfonnes: s'ils conviennent aux uns, ils font bien fouvent contraires a u x autres; qui bien loin d'y trouver du foulagement à leurs maux, les augmentent ou en acquierent de nouveaux.

De plus c'est un autre inconvenient, que les Bains étant fi fpacieux, ceux qui doivent s'y baigner ne conviennent jamais fur le degré de chaleur qui leur eft neceffaire: les uns les veulent avoir fort chauds, il feroit neceffaire aux autres de les prendre de mediocre chaleur; & plufieurs perfonnes, par rapport à leur complexion foible, & au caractere de leurs maladies, ne doivent faire ufage que des Bains tiédes. Il feroit facile aux Directeurs des Bains de lever cette difficulté: car y ayant plufieurs Bains dans un même thermopole, il feroit tres-aifé d'en préparer de differens degrez de chaleur pour fatisfaire à l'indication des Medecins.

C'eft une fcience neceffaire de bien regler les degrez de chaleur dans les Bains par rapport aux differentes maladies & aux differentes complexions, fi l'on veut obtenir de bons effets. J'avouë qu'il est quelquefois neceffaire à de certaines maladies provenantes d'humeurs froides & compactes, de prendre les Bains fort chauds, pour les fondre; mais encore eft-il rifquant de s'en fervir au delà du degré de chaleur neceffaire. II eft plus prudent d'ufer des Eaux temperées, & d'en augmenter peu à peu la chaleur au degré neceffaire.

Cette regle indifpenfable se pratiqueroit plus ailément à Aix, fi au lieu de Bains fi grands, on avoit conftruit de plus petits, comme pour baigner commodément deux, quatre, & fix personnes à la ois, on en auroit plus facilement renouvellé les eaux, & les efprits mineraux qui fe diffipent dans le temps qu'elles refroidiffent, fe feroient mieux confervez: parce qu'il ne faut pas tant de temps à une petite portion d'eau chaude pour se refroidir au degré neceffaire
qu'à une grande quantité; de plus l'on pourroit avec plus de facilité nettoiter les Bains & y faire couler de l'eau nouvelle, pour y baigner plus promptement & plus efficacement: ce qui ne fe peut faire maintenant à Aix: fi plufieurs troupes veulent se baigner un matin fucceffivement les uns aux autres, les feconds & ceux qui les fuivent doivent le faire dans les Bains de ceux qui les ont précedez. Il eft vrai pourtant qu'on décharge une partie de ces eaux, & qu'on y fait couler à proportion de la nouvelle; mais il refte toûjours de la craffe de ceux qui ont précedé, ce qui ne peut produire un bon effet. C'eft domage que les Ingenieurs de ces Eaux n'ayent pas fait ces reflexions avant de les faire bâtir.

Ces Eaux étant impregnées des principes mineraux, dont je vous ai expliqué la nature dans leurs propres Dialogues , ont operé depuis plufieurs fiecles diverfes guerifons, & en opereront encore bien plus generalement; puifqu'on doit avouer, qu'elles contiennent des fubftances minerales fort actives & penetrantes.

La chaleur actuelle dans les eaux de Borçet eft plûtôt d'un degré fuperieur que moindre, par rapport à celle des eaux d'Aix. Elle cuit des œufs, comme j'ai vû moi-même, tout au moins l'aubin, mais pas le jaune. J'avois promis de vous en donner la raifon. La voici; c'eft que la chaleur de ces eaux cuit d'abord fi folidement & fi fixement l'aubin, qu'étant devenu corps compact, il empêche les particules actives de la chaleur de paffer jufqu'au jaune.

Les inconveniens pour fe baigner à Borçet font les mêmes qu'à Aix,tant à caufe de la grandeur des bains, qu'à caufe du temps qu'il faut pour les refroidir. Les Eaux de Chaud -Fontaine du grand bain, qui font actuellement chaudes, furpaffent fort peu dans leur chaleur naturelle celle du fang. Son Alteffe Sereniffime Electorale notre Sereniffime Maître eft un témoin irréprochable. Ce grand Prince, toûjours attentif pour le bien de fes Sujets, a pris la peine de fe faire conduire en perfonne à Chaud-Fontaine, pour connoître par lui-même, fi la chaleur actuelle de ces Eaux étoit réelle ou fuppofée. Lorfqu'il eut reconnu la réalité de la chofe, il dit publiquement, que les Bains de Charlsbad, fi fameux par l'ufage qu'en a fait la fereniffime Imperatrice, & les auguftes Princes du Sang Imperial, n'avoient pas plus de chaleur actuelle & naturelle, que celles de Chaud-Fontaine.

Des Eaux auffi quadrantes à la nature que celles-là ne peuvent avoir que des fuccès merveilleux, tant pour conferver la fanté que pour la recuperer. Je ne vous parle pas des qualitez minerales qu'elles contiennent; elles vous doivent être connues, par l'Analyfe que j'ai donnée du College des Medecins de Liege. Je dois feulement vous faire remarquer, que l'on a évité dans la conftruction des Bains, les inconveniens qui fe rencontrent à Aix-la-Chappelle & à Borget: on peut avoir à Chaud-Fontaine fon bain renouvellé cinquante fois, fi l'on veut, dans le temps que refte, dans la même proportion & dans le même degré de chaleur. C'est un avantage qu'on ne trouve peut-être pas dans le reste de l'Univers. Les Medecins y peuvent fournir toutes leurs fpeculations, foit qu'il faille des bains tiédes en differens degrez, ou qu'il foit neceffaire d'ufer de bains chauds, dans la même graduation: c'eft à cette feule fpeculation qu'on fe fert de la chaudiere pour échauffer une portion des eaux minerales.

Les Bains font fi bien proportionnez, que deux, quatre, fix,& huit perfonnes peuvent s'y baigner aifément & proprement. Les Bains des hommes font feparez de ceux des femmes, la bienséance voulant (pour éviter le fcandale & attirer la benediction du Ciel) que l'on ne souffre pas à Chaud-Fontaine que les perfonnes de differens fexes fe baignent enfemble, excepté celles à qui le Sacrement ou la proximité du fang le permettent encore doivent-elles être particulierement connues! On ne le permet point aux étrangers, à moins qu'ils ne foient munis de bons certificats.

Les Eaux de la fource, minerale de Gadot font à peine tiédes; tellement qu'il eft impoffible de s'en fervir par les bains, à moins qu'on ne leur donne par le fecours du feu, un degré de chaleur proportionnée à l'intention. Il y a pour cette fource des Bains propres & commodes faits à peu près avec la même précaution que ceux des grands Bains chauds, excepté que celle-ci n'a point de machine qui faffe continuellement renouveller fes Bains. On y trouve des logemens affez commodes, pour fervir ceux qui veulent fe baigner ou boire ces Eaux minerales, qui font anologues avec celles des grands bains dans les matieres minerales dont elles font impregnées; à la referve qu'elles n'ont pas autant d'efprits volatils & actifs, foit à cause du malheur (comme je l'ai dit dans leur Dialogue) qu'elles ont de paffer au travers d'une carriere de marbre, dont la froideur a fixé & concentré fes agens vifs, dans les pores de l'eau, foit à caufe qu'elles ont peut-être le malheur de fe mélanger avec quelque petite source d'eau froide, qui s'eft fait paffage lorfqu'on a creufé la terre pour faire les fondemens des bâtimens. Il eft tres-certain que la tiédeur des eaux du Gadot eft á préfent moindre que lorfque nous les examinâmes mon défunt Collegue Burdo & moi.

Voila pourquoi ces efprits concentrez étant reveillez par le feu domestique, peuvent rentrer dans une petite reaction avec les matieres minérales: car ces eaux pour les bains, quoiqu'artificielement chaudes, ont produit & produisent encore journalierement des effets efficaces, que l'experience a fait, & fait connoître tous les jours. Il ne faut pas que j'oublie de vous faire refléchir qu'avec une petite quantité d'eau chauffée, on peut au Gadot donner aux eaux de la fource un degré de chaleur douce, & que par les canaux qui conduifent & l'eau chaude & l'eau froide, on les peut continuer dans la chaleur proportionnée à l'intention & à l'ordonnance des Medecins; cette chaleur cependant n'aura jamais tant d'activité que celle qui fort de la fource naturellement chaude. Il faut fe baigner dans l'un & dans l'autre de ces bains pour le moins une heure de temps: l'efpace de deux heures feroit beaucoup plus convenable à ceux qui peuvent le fouffrir, parceque la feconde heure pouffe l'irradiation des matieres jufques dans le centre, où elle agit fur les obftructions des vifceres & des entrailles.

Lorsque l'on prend les Bains de cette maniere, il me paroît jufte que ceux qui occupent les Bains deux heures, doublent le payement de ceux qui ne les occupent qu'une heure.

D. J'approuve fort ce que vous venez de me dire de ces Eaux thermales; il est tres-affuré que la grande chaleur de celles d'Aix-la-Chapelle peut caufer de grands défordres á ceux qui n'y font pas attention; & que celles que la nature produit á Chaud-Fontaine, font moins rifquantes & plus propres à fuivre toutes les indications de la Medecine. Dites-moi maintenant dans quelles maladies ces Eaux minerales & thermales font propres par la boiffon?

R. Les Eaux thermales d'Aix-la-Chapelle contenant une grande quantité de fels mineraux, de foulfre en fubftance & d'efprits volatils, font fort efficaces: & on ne les boit pas impunément quand on en use mal-á-propos; l’experience cependant nous apprend, qu'elles gueriffent les afthmes, l'hydropifie, & la leucophlegmatie; qu'elles font propres & utiles contre la gravelle, qu'elles conviennent aux cachexies humoriales, & à la décharge de l'eftomac farci de matieres gluantes & pituisteufes; qu'elles précipitent par les felles ou par les urines. On en peut continuer l'usage par la boiffon, tout au plus quatre á cinq jours pour les plus foibles, & dix à douze pour les plus robuftes.

Quant aux Eaux minerales de Borçet par la boiffon, je m'en fuis expliqué dans le Dialogue précedent est p u s

Pour les fources minerales qui font á Chaud-Fontaine, elles adouciffent par leurs fels alkalis les levains des premieres voyes trop aigris; d'où provient un chile doux, qui étant porté à la mafle du fang, en corrige toute l'âcreté furnaturelle, Elles relevent beaucoup l'appetit par cet
esprit acide volatil, commun à toute les Eaux minerales.

J'ai vu plufieurs perfonnes à qui ces Eaux excitoient des vomiffemens fans violence, & cela par l'effet de la reaction des fels alkalis dou x, fur l'acide dont leurs eftomacs étoient remplis.

Ce qui eft fi vrai, que ce qu'elles rejettoient par le vomiffement, manifeftoit affez leur grande aigreur á l'odorat. J'ai remarqué fort fouvent, que la boiffon des Eaux, par la reaction de l'acide contre l'alkali, les précipitoient tellement, que les bûyeurs les déchargeoient doucement par les felles.

Cet endroit m e fait fouvenir combien il eft á propos de faire boire aux baigneurs, pendant qu'ils font dans les bains, quatre á cinq verres de l'eau de la Source, cela bien fouvent leur fait rejetter quelques aigreurs par la bouche, de plus, après les bains elles donnent quelques felles, qui tiennent le ventre libre, ne caufent jamais les conftipations que l'on voit arriver lorfqu'on s'eft baigné dans des Eaux minerales trop chaudes.

Ce que je viens de dire de la boiffon des Eaux chaudes de Chaud-Fontaine, fe doit expliquer pour la boiffon des Sources du Gadot, parce qu'elles font á peu près analogues.

Je finirois ce Dialogue, fi je n'étois obligé de vous dire, que par la boiffon & les bains de Chaud-Fontaine on a vû la guerifon des rhumatifmes inveterez des neuds podagreux diffous, jufques á voir des matieres tartareufes fortir des jointures; on a remarqué que des bras & des jambes demeurées oedemateufes après des fractures & diflocations, étoient d'abord rétablies dans leur état naturel, & fur-tout aux grands Bains de Son Alteffe Sereniffime Electorale.

Il m'eft impoffible de vous rapporter ici toutes les perfonnes qui ont été nettoyées des dartres, de la gratelle, de la galle & d'autres maladies de la peau, qu'elles ont gueries entierement; ni combien de cachextiques, de membres engourdis & de paralytiques ont été parfaitement gueris en peu de jours.

Je finis en vous affurant fincerement, que l'une & l'autre des fources de Chaud- Fontaine font des effets merveilleux dans les maladies des rognons & de la veffie, foient-elles caufées par des glaires, par des fables, ou par de petites pierres. Ceux qui font atteints de ces maux doiventfe baigner, & enfuite boire les eaux dans la quantité qui leur fera confeillée par leurs Medecins, qu'ils doivent abfolument confulter fur le choix & fur l'ufage de ces Eaux thermales potables & balneables.

D. Il eft tres-prudent fans doute de confulter un Medecin habile fur l'ufage interne & externe des Eaux thermales d'Aix-la-Chappelle, de Borçet, de Chaud-Fontaine & du Gadot. Etant fi
diffemblables dans leur chaleur actuelle & dans les principes qu'elles contiennent; c'est une fcience entiere de s'en fervir á propos pour recevoir les effets neceffaires & utiles fur les objets diffeffrens.

J'efpere maintenant, Monfieur, que vous continuerez à m'éclaircir fur les Eaux minerales actuellement froides du Pays & du Diocefe de Liege.
?
R. Je le ferai tres-volontiers; permettez, s'il vous plaît, que nous en remettions les Dialogues à la feconde Partie. Avant de finir celle-ci, je dois vous faire remarquer l'avantage que ceux qui vont à Spa pour boire lesEaux minerales de ce Lieu, pourront recevoir des Bains de Chaud-Fontaine en s'y baignant pour se disposer le corps à leur ufage en allant, & fe décharger d'un refte des eaux en s'en retournant: il eft hors de doute que les Bains font ces effets en nettoyant les pores du cuir, en augmentant la tranfpiration & en faifant couler les urines abondamment.

Rien ne fera plus facile que de pratiquer cette methode utile & neceffaire; car j'apprends que Meffieurs de Spa font d'intention pour l'été prochain d'établir des voitures par eau & par terre pour la commodité de ceux qui voudront se rendre dans ce Lieu. Les voitures d'eau conduiront les paffagers de Liege á Fraipont pour les dix á onze heures du matin; & celles de terre, de Fraipont à Spa le foir du même jour,

Le village de Fraipont eft fitué fur la petite riviere de Wefte, environ une lieue & demie au-deffus de Chaud-Fontaine, qui eft comme je vous ai dit fur le bord de cette même riviere: ainfi les bâteaux paffant donneront la commodité à ceux qui voudront fe baigner en allant de reprendre la voiture le lendemain ou quelques jours après pour Fraipont; en retournant ils auront la même commodité de s'arrêter à Chaud-Fontaine & d'en partir pour Liege quand il leur plaira. Ce qui fera bien avantageux au Public & aux bons fuccès des Eaux minerales de Spa, & de Chaud-Fontaine, qui font des fources inestimables, fur lefquelles Dieu a répandu par fa providence, fon efprit & fa benediction pour l'utilité des hommes, tant de ceux de notre Pays que des étrangers, qui en reçoivent tous les jours la guerifon des maladies, qui jufqu'alors avoient refisté à tous les remedes de la Pharmacie.

D . Pourquoi les Eaux minerales par la boiffon font-elles plus puiffantes pour guerir, que les remedes que l'on prepare en tant de differentes compofitions, que l'on tient à la main dans les boutiques de nos Apoticaires?

R. Parce que les maladies chroniques étant produites par les défauts des levains des premieres voyes, rien ne peut les reduire à la nature, que ce qui contient en foi le gas naturel, dont lesEaux minerales contiennent la force & la vertu.

D. Le gas naturel ne fe rencontre-t'il pas dans les mixtes des regnes animal, vegetable & mineral, dont on prepare les compofitions medicinales?

R. Non. Le gas naturel eft un oiseau qu'aucun Artiste ne fçauroit mettre en cache: fa volatilité & fa pénetration s'échappent aux travers des corps les plus compacts & les plus folides; il feroit auffi facile de faire la pierre philofophale que de réuffir dans ce deffein.

D. Je dois donc conclure, que quand les levains font alterez, il n'y a point de remedes que l'art connoiffe, finon les Eaux minerales pour les ramener à leur état naturel?

R. Votre conclufion eft trop generale: l'art nous donne des remèdes alterans pour adoucir, rectifier, volatilifer ou fixer les levains, felon leurs défauts differens, par les abforbans doux, par les acides ftiptiques ou volatils, par les aromats, par les efprits volatils huileux, par les fels volatils effentiels ou fixes.

D. D'où vient donc qu'avec tant de bonnes armes que la Medecine connoît, la plupart ne peuvent réuffir dans les maladies opiniâtres?

R. Je vous dirai , Monfieur que le plus grand nombre des Medecins, à la mode des Anciens, qu'ils fuivent d'un pas obftiné, s'attachent plûtôt à la Medecine évacuative qu'à la substantielle. M. de Moliere n'a fçû par fa fçavante fatyre les faire revenir de leur abus. C'est
toûjours à l'ordinaire purgare, feignare & clyfterium donare; ce qui fert plûtôt à déprimer la nature, qu'à la relever: car bien loin de corriger les levains par les purgatifs, je crois au contraire qu'on les rend plus âcrimonieux & plus corrofifs.

D. Vous croyez donc les purgatifs, les feignées & les lavemens contraires?

R. Quant à la faignée, dans de grandes ébullitions de la maffe fanguine, elle eft fouvent d'une neceffité indifpenfable: nous fçavons par experience que quand un liquide fpiritueux fermente trop dans un tonneau, pour appaifer cette grande fermentation; & empêcher que le vafe ne créve, il ne s'agiti que de diminuer une petite partie de la liqueur fermentante, pour empêcher cette action violente; au refte je fuis d'avis, qu'on ne fçauroit trop épargner le fang humain.

Pour les lavemens, ils font toûjours avantageux; ils déchargent les matieres des inteftins gras, ne pouvant monter ni toucher aux grefles à caufe de la valvule ou fpinctere, qui empêche les matieres defcendues de remonter; tout au moins ces gros inteftins étant vuidez, attirent en confens les grefles & l'eftomac, pour décharger les matieres qui les peuvent furcharger.

Les purgatifs font neceffaires en certains cas; lors, par exemple, que le fuc digeftif de l'eftomac vicié ne forme qu'une chilification gluante, je les crois nuifibles; mais quand l'estomac n'eft furchargé que de matiere gluante produite d'indigeftion provenante de la trop grande quantité ou de la qualité des alimens dont on l'a furchargé, je les crois tres-utiles.

D . Pourquoi font les évacuatifs utiles dans la derniere difpofition, & nuifibles dans la premiere?

R . Quand un charbon allumé fe couvre de cendre, fa lumiere & fa force font affoupies; mais dès qu'on le fouffle, il reprend fa premiere force & fa premiere fplendeur; ainfi lorfque le fuc digeftif est empêché de faire fes fonctions par des matieres tenaces & gluantes attachées à la face interieure de l'eftomac, le remede évacuant qui les détache & les purge, rend lieu à ce levain de la premiere voye de faire fa fonction ordinaire; & par confequent dans ce cas ils font tres-utiles.

Mais lorsque les glaires fe forment tous les jours dans les digeftions des alimens, par le défaut effentiel du fuc digeftif, rien n'est plus nuifible; car bien loin d'empêcher la multiplication des glaires qui fe forment tous les jours, il en occafionne l'augmentation, en heurtant ce levain déja trop aigri par les fels âcres dont tous le remedes purgatifs font composez.

C'est pourquoi dans ce dernier cas rien n'eft plus à propos qu'un remede fubftantiel & alterant, pour ramener les levains à l'état de faire leur fonction naturelle; comme eft par exemple ma teinture anti-fcorbutique & anti-rhumatique, dont j'ai gueri un grand nombre des pèrfonnes de notre Pays & des étrangers. Au défaut de la connoiffance de ces remedes efficaces, ou d'autres auffi puiffans, rien ne peut faire plus d'effet que la boiffon des Eaux minerales choifies par rapport aux differentes complexions.

Pourvû neanmoins qu'elles foient continuées par plufieurs reprises réiterées dans une même faifon: il n'eft pas fenfé de croire que des levains viciez depuis long-temps puiffent fe corriger radicalement par un fi court ufage des Eaux minerales, tant par laboifon que par les Bains.

Fin de la première partie.

...

Suite non transcrite

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