(1) Cette date nous est indiquée par un vers de l'épitaphe de Roland, où l'on voit qu'il mourut âgé de trente-huit ans: Sex qui lustra gerens, octo bonus insuper annos. Cette épilaphe, en trois distiques, a été, dit-on, composée par Charlemagne. (Fabricius, Bibliotheca latina mediae et infimae aetatis, édit. de 1754, t. I, p. 346, etc.) Si elle n'est pas son oeuvre, elle peut avoir été faite sous son inspiration, comme l'épitaphe du pape Adrien, qui mourut en 796. (Annales Laureshamenses, dans les Monumenta Germaniae historica, t, I, p. 36, etc.) Au surplus, elle est ancienne, à coup sur du XIe siècle, puisqu'elle est insérée dans la célèbre Historia de Vita Caroli Magni et Rolandi, c. 25, du pseudo-Turpin, laquelle fut publiée vers 1090. (Dans Schardius, Germanicarum Rerum vetustiores Çhronographi, fol. 11.) Nous publions cette épitaphe dans les Annexes (n° 1).
(2) D'après Éginard, il survécut de Pépin et de Berte trois enfants: Charlemagne, Carloman et Gisèle, qui embrassa la vie monastique. (Vita Karoli Magni, dans les Monumenta Germaniae historica, t. II, p. 45.) Pépin, avant son mariage, avait aimé une jeune personne dont il eut deux filles, Chiltrude et Berte. Celle-ci, soeur naturelle de Charlemagne, passe pour la mère de Roland, au dire des vieux chroniqueurs. Sunt etiam qui Rolandum Caroli ex sorore nepotem dicant, écrivait, vers 1450, Acciajoli, Vita Caroli Magni. (Dans les Scriplores Rerum Germanicarum de Menckenius, t. I, p. 822.) Berte fit bâtir à Visé une église, y vécut recluse et y mourut : telle était dans cette ville, au moyen-âge, la tradition, laquelle est ainsi consignée dans une Vita Sancti Hadelini ( saint Hadelin est le patron de Visé ) inédite, écrite vers 1350: Ubi illa sancte memorie Berta ipsius Karoli régis soror sepulta est.
(3) Au moyen-âge, c'était l'opinion commune que Roland épousa Ode, soeur d'Olivier, qui, comme lui, a dû être aussi un notable commensal de la Cour de Herstal. Cette alliance ne semble point douteuse au classique Eckhart: Nos inde percipimus uxorem Rollandi ducis fuisse Audam, Otgerii (I. Oliverii) sororem. (Commentanii de Rebus Franciae orientalis, t. I, p. 633. )
(4) Le comte palatin était en même temps conseiller intime et commandant militaire. A certaines époques de l'année, il allait dans les provinces tenir les assises, inspecter les milices, etc. Voir Struvius, Corpus Juris publici Imperii Germanici, édit. de 1738, p. 740, etc.
(5) Tunc nos una cum fidelibus nostris, id est, Hagino, Rothlando,
Wichingo, Frodergario, comitibus... Dans le Codex Laures hamensis Abbatiae diplomalicus, t. I, p. 9. ) Nous publions ce diplôme dans les Annexes (n° 2).
L'abbé Gondelan était le frère de Chrodegan, qui devint évèque de Metz, ex pago hasbaniensi oriundus, patre Sigrammo, maire Landrada, Francorum ex génère primae nobililatis progenitus. [Gesta Episcoporum Metensium de Paul Diacre, dans les Monumenta Germaniae hist., t. II, p. 267.)
(6) Signum Karoli (un monogramme) gloriosissimi régis. Ego Audacrus jussis et ordinatus a domino meo Fulrado scripsi et subscripsi. + Signum Teoderici comitis... + Signum Rotlani comitis... + Signum Harihardi comitis... + Signum Anselmi comitis palatii, etc. Ce diplôme n'a été publié, pour la première fois, qu'en 1857, dans la Bibliothèque de l'École des Chartes, 4e série, t. III, p. 51. Nous en donnons un extrait dans les Annexes (n° 3).
Dans cet acte, tous les témoins semblent s'être bornés à signer en faisant une croix auprès de leur nom, qui avait été écrit par le chancelier; ce qui toutefois ne veut pas dire que ce fût la seule graphie familière à ces personnages. On trouvait que c'était plus solennel de soussigner ainsi. Au XIIe siècle encore, à la Cour de Rome, des prélats, indubitablement très lettrés, n'avaient pour signatures qu'une croix, accentuée tantôt d'un ou de plusieurs points ou virgules, tantôt d'un trait simple ou double, etc. (Dans le Liber Cartarum Ecclesie Leodiensis, fol. 98, 99, 100, etc.)
(7) C'est ainsi, croyons-nous, que l'on doit traduire le Brittannici limitis praefectus d'Éginard (Vita Karoli Magni, dans les Monumenta Germaniae hist, t. Il, p. 448. )
(8) Venit in eodem tempore (777) ad régis praesentiam de Hispania Sarracenus quidam nomine Ibinalarabi cum aliis Sarracenis sociis suis, dedens se ac civitates, quibus cum rex Sarracenorum praefecerat, etc. (Einhardi Annales, dans les Monum. Germaniae hist., t. I, p. 159. ) Pour des détails d'après les sources arabes, voir Dozy, Histoire des Musulmans d'Espagne (Leyde, 1861), t I, p. 376.
(9) Charlemagne s'engagea dans les Pyrénées après avoir célébré les fêtes de Pâques à Cassineuil, en Aquitaine: Idcirco rex pascha vero in Aquitania apud Cassinoillum celebravit. (Einhardi Annales, ibid., t. I, p. 159.) Les Pâques tombaient cette année le 19 avril.
(10) Hispaniam quam maximo poterat belli apparatu adgreditur. (Einhardi Vita Karoli Magni, ibid., t. II, p. 448.)
(11) Eodem die, scilicet sextodecimo calendas julii, lit-on dans l'Historia de Vita Caroli Magni et Rolandi, c. 25, du pseudo-Turpin. Molanus a accueilli l'indication du 10 juin, et c'est sous cette date qu'il place le martyre des preux de Charles dans la vallée de Roncevaux. XVI calendas julii. In Galliis, nalalis Rolandi, Oliverii et sociorum, qui juxta Pompelonem sub Pyreneis montibus pro Christo pugnantes, Carolo Magno imperante occubuerunt. (Marlyrologium quo romana Ecclesia ac permultae aliac utuntur, édit. de Louvain de 1573, folio 100 v°. )
(12) Nam cum agmine longo . ut loci et angustiarum situs permittebat, porrectus irel. exercitus, etc. (Einhardi Vita Karoli Magni, ibid., t. Il, p. 448.)
(13) In cujus summitate Wascones insidiis conlocatis extremum agmen adorti, totum exercitum magno tumultu perturbant. (Einhardi Annales, ibid., t. I. p. 159. )
(14) Adjuvabat in hoc facto Wascones et levitas armorum, et loci in quo res gerebatur silus; e contra Francos et armorum gravitas et loci iniquitas per omnia Wasconibus reddidit impares. (Einhardi Vita Karoli Magni, ibid., t. II, p. 448. )
(15) Usque ad unum omnes interficiunt. In quo proelio Eggihardus regiae mensae praepositus, Anselmus comes palatii, et Hruodlandus brittannici limitis praefectus, cum aliis compluribus interficiuntur. (Einhardi Vita Karoli Magni, ibid., t. II, p. 448.) Ainsi, de tous ceux qui se distinguèrent dans cette journée mémorable, Éginard n'a daigné citer que Eggihard, Anselme et Roland. Nous devons faire remarquer que les vieux récits traditionnels y font aussi succomber nombre d'autres braves, et, notamment, Olivier, le beau-frère de Roland. Les énumérer tous aurait été probablement alors très fastidieux, leurs noms étant dans les souvenirs de tous. C'est ce que l'on écrivait au siècle suivant, vers 840: Quorum, quia vulgata sunt, nomina dicere supersedi. (Vila Hludowici imperatoris, dans les Monumenta Germaniae hist., t. II, p. 608.)
(16) Cette agonie de Roland n'a point été racontée par les historiens du temps, si avares de détails; mais le souvenir s'en transmit d'une génération à l'autre, et, vers l'an 1050, il entra dans la Chanson dite de Roland. (Édition de Génin, p. 148, et édition de Michel, p. 69.) II fallut que le palatin répétât trois fois ses appels de détresse, pour que Charles comprit que son neveu était en un danger suprême. C'est ce que fait sentir admirablement le vieux poête dans un de ses épisodes les plus émus. Voir dans les Annexes, n° 4.
(17) Quia hostis re perpetrata ita dispersus est. (Einhardi Vita Karoli, ibid., t. II, p. 448.) Et hostis propter notitiam locorum statim in diversa dilapsus est. (Einhardi Annales, ibid., t. I, p. 159.)
(18) Ipse coeteris copiis dimissis, Herislallium villam, in qua hicmare constituerat, venit. (Einhardi Annales, ibid, t. I, p. 159.) Reversus est in Franciam, celebravit nalale domini et pascha in Haristalio. (Annales Tiliani, ibid., p. 221.) Post cladem in Pirenaeis acceptant, Heristalli nalalem et pascha agit Carolus, dit Fisen, Historia Ecclesiae Leodiensis, Chronol, t. I, p. 26, etc.
Le désastre de Roncevaux attrista longtemps Charlemagne, qui y avait perdu ses vieux amis, des amis d'enfance. Son coeur en était tellement blessé, qu'il maudissait les conquêtes faites en Espagne. Cujus vulneris acceptio magnam partem rerum féliciter in Hispania gestarum in corde régis obnubilavit. (Einhardi Annales, ibid., t. I, p. 159. )
(19) C'était l'usage alors de donner une dénomination aux épées ainsi qu'aux chevaux. Durandal était un présent de Charlemagne à Roland, si l'on en croit les vieux rimeurs gaulois, et particulièrement un poète latin qui florissait en 1115. (Dans les anciens Mémoires de l'Académie des Inscriptions, t. XXI, p. 141, etc.) Voici comment celui-ci en parle:
Rutlandi fuit iste (gladius) viri virtute potentis,
Quem patruus Magnus Karolus huic dederat.
Et Rutlandus eo semper pugnare solebat,
Millia pagani multe necans populi.
(20) Gladius Rolandi Durenda et tuba ejus eburnea, ostenditur juxta Leodium, écrivait en 1667 Besselius. (Dans l'édition de Schmincke d'Éginard, De Vita et Gestis Caroli Magni, p. 55) Durandal et l'olifant se voyaient dans un monastère de Liège, in coenobio quodam Leodiensi, répétait en 1775 Heerkens, dans sa Vita Caroli Magni d'Éginard, p. 23.
Nous ignorons quel a pu être le monastère qui possédait ces curieuses reliques. Se trouvaient-elles à Liège, dans l'église collégiale de St. -Pierre, ou, en Ardenne, dans l'abbaye de St.-Hubert, dans l'église de laquelle on conserve encore aujourd'hui un grand olifant qui répond assez bien aux descriptions des vieux poètes?
(21) On gardait bonne mémoire de Roland dans notre pays au moyen-âge. En 1213, à la journée de Steppes, le comte de Looz, à la tête d'un corps de Liégeois, repoussa les Brabançons; mais il fut renversé de cheval, et tout l'effort des ennemis se dirigea contre lui pour le tuer: Set Comes non discimilis Rolando el Olivero, se tuebatur clipeo et gladio, dit un contemporain. (Reineri Annales Leodienses, dans les Monum. Germaniae hist., t, XVI, p. 668.)
Dans tous les pays, du reste, le souvenir de Roland était populaire. On sait qu'en 1066, au commencement de la bataille d'Hastings, pour animer les soldats Normands, on entonna une vieille chanson sur la vaillance de Roland. Dans son Roman de Rou (t. II, p. 214), Robert Wace, qui écrivait en 1140, rapporte ainsi celte particularité:
Taillefer ki mult bien cantait,
Sor un rencin ki tost alait,
Devant as sen alait cantant
De Carlemane e de Rolant,
E d'Oliver e des vassals
Ki morurent en Renchevals.