WWWCHOKIER


CHARLEMAGNE

Le comte palatin Roland

par Ferd. HENAUX

Roland tranche le bras droit de Marsille, roi de Saragosse - Tapisserie de Tournai. Dans cette oeuvre, l'épée Durandal fend littéralement en deux le roi Marsille.
Roland tranche le bras droit de Marsille, roi de Saragosse - Tapisserie de Tournai à Londres.
Dans cette oeuvre, l'épée Durandal fend littéralement en deux le roi Marsille.

Roland appartient à la famille carolingienne.

Par sa naissance comme par ses fonctions, il a joué, auprès de Charlemagne, un rôle considérable; mais la poésie et la fable se sont tellement emparés de lui, qu'elles en ont fait presque un être imaginaire.

Il existe cependant des détails historiques sur cet homme célèbre. Nous en avons recueilli quelques uns.

Roland était né en 740 (1). Il avait eu pour mère Berte, soeur naturelle de Charlemagne (2). C'est ainsi qu'il était le neveu du grand roi (3).

Cette parenté suffit pour établir la nationalité liégeoise de Roland.

Ses brillantes qualités lui valurent l'amitié de Charlemagne, qui l'investit des plus hautes dignités.

En 776, on le voit à Herstal, à la cour. Il y porte le titre de comte palatin (4), et figure, comme témoin, au bas d'un diplôme que Charlemagne délivre à son cousin Gondelan, abbé de Lorsch (5).

En 777, il est encore à la cour de Herstal, et signe toujours en qualité de comte palatin, un diplôme par lequel Charlemagne approuve une donation faite à un monastère (6).

En 778, il apparaît comme Garde de la cote britannique; c'est-à-dire, comme gouverneur des pays de la Belgique baignés par l'Océan (7).

Jusqu'alors, Roland, malgré ses éminentes fonctions et son bouillant courage, n'avait joué qu'un rôle secondaire.

C'est l'expédition d'Espagne qui va le rendre illustre, c'est le désastre de Roncevaux qui va en faire un héros légendaire.

Voici, en peu de mots, le récit de cette célèbre journée.

En 777, Soliman Ibn-el-Arabi était gouverneur de Saragosse pour Abd-el-Rahman, khalife de Cordoue.

Ayant à se plaindre du puissant khalife, Soliman vint offrir à Charlemagne la suzeraineté de Saragosse, à la condition d'en rester le gouverneur. Ses propositions furent acceptées (8)

Dans les derniers jours du mois d'avril 778 (9), Charlemagne pénétra en Espagne avec une armée nombreuse et aguerrie (10), prit Pampelune, et ensuite Saragosse et Barcelone. Après avoir tout disposé pour conserver ses conquêtes, il s'en revint au pays.

Le mardi 16 juin (11), l'armée s'engagea dans les gorges des Pyrénées. L'arrière-garde, embarrassée par les bagages, défilait péniblement dans l'étroite et longue vallée de Roncevaux (12). Elle était commandée par les comtes Anselme, Eggihard et Roland. Tout à coup, elle est attaquée par les Basques, qui la mettent dans le plus grand désordre (13). Les Francs, harcelés dans tous les sens, essayent vainement de résister (14). Ils sont tués jusqu'au dernier (15). Roland fit des prodiges de valeur. Resté seul, et tout couvert de blessures, il s'accula contre un rocher, et se défendit longtemps encore avec sa terrible épée. Au moment d'expirer, il saisit son cor et en sonna d'une telle force, qu'il vomit des flots de sang (16).

Charlemagne entendit cet appel de détresse, et accourut au secours de ses palatins. Il ne trouva plus que des cadavres, et vit au loin l'ennemi qui fuyait (17).

Après avoir fait inhumer les restes de ses héroïques compagnons, Charlemagne ramena son armée sur les bords du Rhin. Il ne tarda pas à la licencier, puis il revint à Liège pour y passer l'hiver. Il célébra les solennités de Noël et de Pâques dans la cathédrale St Lambert (18).

On avait rapporté, du champ de bataille de Roncevaux, le cor d'ivoire de Roland et son épée, la fameuse Durandal (19). Ces deux précieuses reliques furent déposées, en ex-voto, dans une église de Liège (20).

Partout, le souvenir de Roland est populaire; mais nulle part sa mémoire n'a été en honneur comme au pays de Liège (21).



(1) Cette date nous est indiquée par un vers de l'épitaphe de Roland, où l'on voit qu'il mourut âgé de trente-huit ans: Sex qui lustra gerens, octo bonus insuper annos. Cette épilaphe, en trois distiques, a été, dit-on, composée par Charlemagne. (Fabricius, Bibliotheca latina mediae et infimae aetatis, édit. de 1754, t. I, p. 346, etc.) Si elle n'est pas son oeuvre, elle peut avoir été faite sous son inspiration, comme l'épitaphe du pape Adrien, qui mourut en 796. (Annales Laureshamenses, dans les Monumenta Germaniae historica, t, I, p. 36, etc.) Au surplus, elle est ancienne, à coup sur du XIe siècle, puisqu'elle est insérée dans la célèbre Historia de Vita Caroli Magni et Rolandi, c. 25, du pseudo-Turpin, laquelle fut publiée vers 1090. (Dans Schardius, Germanicarum Rerum vetustiores Çhronographi, fol. 11.) — Nous publions cette épitaphe dans les Annexes (n° 1).

(2) D'après Éginard, il survécut de Pépin et de Berte trois enfants: Charlemagne, Carloman et Gisèle, qui embrassa la vie monastique. (Vita Karoli Magni, dans les Monumenta Germaniae historica, t. II, p. 45.) Pépin, avant son mariage, avait aimé une jeune personne dont il eut deux filles, Chiltrude et Berte. Celle-ci, soeur naturelle de Charlemagne, passe pour la mère de Roland, au dire des vieux chroniqueurs. Sunt etiam qui Rolandum Caroli ex sorore nepotem dicant, écrivait, vers 1450, Acciajoli, Vita Caroli Magni. (Dans les Scriplores Rerum Germanicarum de Menckenius, t. I, p. 822.) Berte fit bâtir à Visé une église, y vécut recluse et y mourut : telle était dans cette ville, au moyen-âge, la tradition, laquelle est ainsi consignée dans une Vita Sancti Hadelini ( saint Hadelin est le patron de Visé ) inédite, écrite vers 1350: Ubi illa sancte memorie Berta ipsius Karoli régis soror sepulta est.

(3) Au moyen-âge, c'était l'opinion commune que Roland épousa Ode, soeur d'Olivier, qui, comme lui, a dû être aussi un notable commensal de la Cour de Herstal. Cette alliance ne semble point douteuse au classique Eckhart: Nos inde percipimus uxorem Rollandi ducis fuisse Audam, Otgerii (I. Oliverii) sororem. (Commentanii de Rebus Franciae orientalis, t. I, p. 633. )

(4) Le comte palatin était en même temps conseiller intime et commandant militaire. A certaines époques de l'année, il allait dans les provinces tenir les assises, inspecter les milices, etc. Voir Struvius, Corpus Juris publici Imperii Germanici, édit. de 1738, p. 740, etc.

(5) Tunc nos una cum fidelibus nostris, id est, Hagino, Rothlando,

Wichingo, Frodergario, comitibus... Dans le Codex Laures hamensis Abbatiae diplomalicus, t. I, p. 9. ) Nous publions ce diplôme dans les Annexes (n° 2).

L'abbé Gondelan était le frère de Chrodegan, qui devint évèque de Metz, ex pago hasbaniensi oriundus, patre Sigrammo, maire Landrada, Francorum ex génère primae nobililatis progenitus. [Gesta Episcoporum Metensium de Paul Diacre, dans les Monumenta Germaniae hist., t. II, p. 267.)

(6) Signum Karoli (un monogramme) gloriosissimi régis. Ego Audacrus jussis et ordinatus a domino meo Fulrado scripsi et subscripsi. + Signum Teoderici comitis... + Signum Rotlani comitis... + Signum Harihardi comitis... + Signum Anselmi comitis palatii, etc. Ce diplôme n'a été publié, pour la première fois, qu'en 1857, dans la Bibliothèque de l'École des Chartes, 4e série, t. III, p. 51. Nous en donnons un extrait dans les Annexes (n° 3).

Dans cet acte, tous les témoins semblent s'être bornés à signer en faisant une croix auprès de leur nom, qui avait été écrit par le chancelier; ce qui toutefois ne veut pas dire que ce fût la seule graphie familière à ces personnages. On trouvait que c'était plus solennel de soussigner ainsi. Au XIIe siècle encore, à la Cour de Rome, des prélats, indubitablement très lettrés, n'avaient pour signatures qu'une croix, accentuée tantôt d'un ou de plusieurs points ou virgules, tantôt d'un trait simple ou double, etc. (Dans le Liber Cartarum Ecclesie Leodiensis, fol. 98, 99, 100, etc.)

(7) C'est ainsi, croyons-nous, que l'on doit traduire le Brittannici limitis praefectus d'Éginard (Vita Karoli Magni, dans les Monumenta Germaniae hist, t. Il, p. 448. )

(8) Venit in eodem tempore (777) ad régis praesentiam de Hispania Sarracenus quidam nomine Ibinalarabi cum aliis Sarracenis sociis suis, dedens se ac civitates, quibus cum rex Sarracenorum praefecerat, etc. (Einhardi Annales, dans les Monum. Germaniae hist., t. I, p. 159. ) Pour des détails d'après les sources arabes, voir Dozy, Histoire des Musulmans d'Espagne (Leyde, 1861), t I, p. 376.

(9) Charlemagne s'engagea dans les Pyrénées après avoir célébré les fêtes de Pâques à Cassineuil, en Aquitaine: Idcirco rex pascha vero in Aquitania apud Cassinoillum celebravit. (Einhardi Annales, ibid., t. I, p. 159.) Les Pâques tombaient cette année le 19 avril.

(10) Hispaniam quam maximo poterat belli apparatu adgreditur. (Einhardi Vita Karoli Magni, ibid., t. II, p. 448.)

(11) Eodem die, scilicet sextodecimo calendas julii, lit-on dans l'Historia de Vita Caroli Magni et Rolandi, c. 25, du pseudo-Turpin. Molanus a accueilli l'indication du 10 juin, et c'est sous cette date qu'il place le martyre des preux de Charles dans la vallée de Roncevaux. XVI calendas julii. In Galliis, nalalis Rolandi, Oliverii et sociorum, qui juxta Pompelonem sub Pyreneis montibus pro Christo pugnantes, Carolo Magno imperante occubuerunt. (Marlyrologium quo romana Ecclesia ac permultae aliac utuntur, édit. de Louvain de 1573, folio 100 v°. )

(12) Nam cum agmine longo . ut loci et angustiarum situs permittebat, porrectus irel. exercitus, etc. (Einhardi Vita Karoli Magni, ibid., t. Il, p. 448.)

(13) In cujus summitate Wascones insidiis conlocatis extremum agmen adorti, totum exercitum magno tumultu perturbant. (Einhardi Annales, ibid., t. I. p. 159. )

(14) Adjuvabat in hoc facto Wascones et levitas armorum, et loci in quo res gerebatur silus; e contra Francos et armorum gravitas et loci iniquitas per omnia Wasconibus reddidit impares. (Einhardi Vita Karoli Magni, ibid., t. II, p. 448. )

(15) Usque ad unum omnes interficiunt. In quo proelio Eggihardus regiae mensae praepositus, Anselmus comes palatii, et Hruodlandus brittannici limitis praefectus, cum aliis compluribus interficiuntur. (Einhardi Vita Karoli Magni, ibid., t. II, p. 448.) — Ainsi, de tous ceux qui se distinguèrent dans cette journée mémorable, Éginard n'a daigné citer que Eggihard, Anselme et Roland. Nous devons faire remarquer que les vieux récits traditionnels y font aussi succomber nombre d'autres braves, et, notamment, Olivier, le beau-frère de Roland. Les énumérer tous aurait été probablement alors très fastidieux, leurs noms étant dans les souvenirs de tous. C'est ce que l'on écrivait au siècle suivant, vers 840: Quorum, quia vulgata sunt, nomina dicere supersedi. (Vila Hludowici imperatoris, dans les Monumenta Germaniae hist., t. II, p. 608.)

(16) Cette agonie de Roland n'a point été racontée par les historiens du temps, si avares de détails; mais le souvenir s'en transmit d'une génération à l'autre, et, vers l'an 1050, il entra dans la Chanson dite de Roland. (Édition de Génin, p. 148, et édition de Michel, p. 69.) II fallut que le palatin répétât trois fois ses appels de détresse, pour que Charles comprit que son neveu était en un danger suprême. C'est ce que fait sentir admirablement le vieux poête dans un de ses épisodes les plus émus. Voir dans les Annexes, n° 4.

(17) Quia hostis re perpetrata ita dispersus est. (Einhardi Vita Karoli, ibid., t. II, p. 448.) Et hostis propter notitiam locorum statim in diversa dilapsus est. (Einhardi Annales, ibid., t. I, p. 159.)

(18) Ipse coeteris copiis dimissis, Herislallium villam, in qua hicmare constituerat, venit. (Einhardi Annales, ibid, t. I, p. 159.) Reversus est in Franciam, celebravit nalale domini et pascha in Haristalio. (Annales Tiliani, ibid., p. 221.) — Post cladem in Pirenaeis acceptant, Heristalli nalalem et pascha agit Carolus, dit Fisen, Historia Ecclesiae Leodiensis, Chronol, t. I, p. 26, etc.

Le désastre de Roncevaux attrista longtemps Charlemagne, qui y avait perdu ses vieux amis, des amis d'enfance. Son coeur en était tellement blessé, qu'il maudissait les conquêtes faites en Espagne. Cujus vulneris acceptio magnam partem rerum féliciter in Hispania gestarum in corde régis obnubilavit. (Einhardi Annales, ibid., t. I, p. 159. )

(19) C'était l'usage alors de donner une dénomination aux épées ainsi qu'aux chevaux. Durandal était un présent de Charlemagne à Roland, si l'on en croit les vieux rimeurs gaulois, et particulièrement un poète latin qui florissait en 1115. (Dans les anciens Mémoires de l'Académie des Inscriptions, t. XXI, p. 141, etc.) Voici comment celui-ci en parle:

Rutlandi fuit iste (gladius) viri virtute potentis,

Quem patruus Magnus Karolus huic dederat.

Et Rutlandus eo semper pugnare solebat,

Millia pagani multe necans populi.

(20) Gladius Rolandi Durenda et tuba ejus eburnea, ostenditur juxta Leodium, écrivait en 1667 Besselius. (Dans l'édition de Schmincke d'Éginard, De Vita et Gestis Caroli Magni, p. 55) Durandal et l'olifant se voyaient dans un monastère de Liège, in coenobio quodam Leodiensi, répétait en 1775 Heerkens, dans sa Vita Caroli Magni d'Éginard, p. 23.

Nous ignorons quel a pu être le monastère qui possédait ces curieuses reliques. Se trouvaient-elles à Liège, dans l'église collégiale de St. -Pierre, ou, en Ardenne, dans l'abbaye de St.-Hubert, dans l'église de laquelle on conserve encore aujourd'hui un grand olifant qui répond assez bien aux descriptions des vieux poètes?

(21) On gardait bonne mémoire de Roland dans notre pays au moyen-âge. En 1213, à la journée de Steppes, le comte de Looz, à la tête d'un corps de Liégeois, repoussa les Brabançons; mais il fut renversé de cheval, et tout l'effort des ennemis se dirigea contre lui pour le tuer: Set Comes non discimilis Rolando el Olivero, se tuebatur clipeo et gladio, dit un contemporain. (Reineri Annales Leodienses, dans les Monum. Germaniae hist., t, XVI, p. 668.)

Dans tous les pays, du reste, le souvenir de Roland était populaire. On sait qu'en 1066, au commencement de la bataille d'Hastings, pour animer les soldats Normands, on entonna une vieille chanson sur la vaillance de Roland. Dans son Roman de Rou (t. II, p. 214), Robert Wace, qui écrivait en 1140, rapporte ainsi celte particularité:

Taillefer ki mult bien cantait,

Sor un rencin ki tost alait,

Devant as sen alait cantant

De Carlemane e de Rolant,

E d'Oliver e des vassals

Ki morurent en Renchevals.




ANNEXES

Roland a Roncevaux


I

ÉPITAPHE DE ROLAND,

Composée par Charlemagne.


Tu patriam repetis, tristi nos orbe relinquis;

Te tenet aula nitens, nos lacrymosa dies.

Sex qui lustra gerens, octo bonus insuper annos,

Ereptus terrae justus ad astra redis.

Ad paradisiacas epulas te cive reducto,

Unde gemit mundus, gaudet honore polus.


On peut traduire ainsi ces trois distiques:

Fuyant notre triste terre, tu es rentré dans ta patrie. Là haut, il n'y a que des joies, et ici-bas chaque jour à ses douleurs. A l'âge de trente-huit ans, honnête et juste, tu vas rejoindre Dieu. Par ton retour dans le paradis, le monde est plus sombre, et le ciel plus radieux.


II

PRAECEPTUM EVINDICATORIUM MAGNI CAROLI.

776.

Carolus gratia Dei rex Francorum, vir illustris. Veniens ad nos Haristellio palatio vir venerabilis Gandelandus abba de monasterio Lauresham, ubi sanctus Nazarius martyr in corpore requiescit, nobis innotuit t eo quod homo aliquis nomine Heimericus de ipso monasterio calumnias generare voluisset, dum diceret, quod suus pater Cancor eum de ipso monasterio vestitum dimisisset, et ipse Gundelandus praesens astabat, et causam in omnibus denegabat, dum diceret, quod avia ipsius Heimerici nomine Williswinda vel genitor suus Cancor germano suo domino Rudgango archiepiscopo tradidisset vel confirmasset, et talem chartam nobis exinde protulit ad relegendum; tunc ipse Heimericus ante nos taliter fuit professus, quod de hac causa vel de ipso monasterio superius nominato in antea nunquam tempore debeat calumniam generare, sed per festucam ante nos exinde dixit exitum, tune nos unacum fidelibus nostris, idest, Hagino, Rothlando, Wichingo, Frodegario comitibus nec non et vassis nostris Theoderico, Berthaldo, Albwino, Frodberto, Gunthmaro taliter visi fuimus judicavisse, ut de hac causa omni tempore ipse abbas habeat evindicatum atque elitigatum et sit illis in postmodum ex hac re sublata causatio.


III

EXEMPLAR DONATIONIS FULRADI AD LOCUM SANCTI ALEXANDRI QUOD

DICITUR LEPRAHA DE VILLA QUAE VOCATUR ANSULSISHAIM.

777.

... Ego Foleradus in Dei nomine sacerdos indignus, Riculfi et Ermengardis filius, dono atque in perpetuum donatum cupio quandam juris mei villam Ansulsishaim, cum omnibus superpositis et ad se pertinentibus, tam in aedificiis quam in terris cultis et incultis, aquis, pascuis, exitibus et reditibus universis, et omni supellectile sua, cum servis et mancipiis utriusque sexus, ad nomen sancti et gloriosi Christi martyris Alexandri, ad locum ipsius quod nominatur Lepraha, situm in pago Alsacinse infra forestem quae nuncupatur Vosago...

Actum publice Haristalio, anno nono et quarto regnante Carolo gloriosissimo rege Francorum et Langobardorum atque patricio Romanorum, cum stipulatione subnixa.

Signum Karoli (loc. monog.) gloriosissimi régis.

Ego Audacrus jussis et ordinatus a domino meo Fulrado scripsi et subscripsi.

+ Signum Teoderici comitis. + Signum Vulferdi. + Signum Baldulfi. + Signum Fulradi. + Signum Teodulfi. + Signum Hadtritao. + Signum Chrodonis. + Signum Hartgeri. + Signum Hildradi comitis. + Signum Rotlani comitis. + Signum Gislemari. f Signum Hainrici. + Signum Harihardi comitis. + Signum Herleberti. + Signum Nivonis, + Item signum Hildradi comitis. + Signum Anselmi comitis palatii. + Signum Richau. + Signum Richardi. + Signum Gundracri. + Signum Godonis.


IV

BATAILLE DE RONCEVAUX. APPELS DE DÉTRESSE DE ROLAND.

(Extrait de la Chanson de Roland, écrite vers l'an 1050. )


...Ço dit Rollans: " Fors est nostre bataille!

" Jo cornerai, si l'orrat li reis Karles... "



Rollans ad mis l'olifan a sa buche,

Empeint le ben, par grant vertut le sunet.

Halt sunt li pui, e la voiz est mult lunge;

Granz XXX liuues l'oirent il respundre.

Karles l'oït e ses cumpaignes tûtes.

Ço dit li reis: " Bataille funt nostre hume! ..."



Li quens Rollans par peine et par ahans,

Par grant dulor, sunet sun olifan:

Par mi la bûche en salt fors li cler sancs,

De sun cervel le temple en est rumpant.

Del corn qu'il tient, l'oie en est mult grant!

Karles l'entent, ki est as porz passant;

Naimes l'oït, si l'escultent li Franc.

Ço dist li reis: " Jo oi le corn Rollant !

» Unc nel sunast, se ne fust en cumbatant! ..."



Li quens Rollans a la bûche sanglente,

De sun cervel rumput en est li temples:

L' olifan sunet, a dulor e a peine!

Karles l'oït, e ses Franceis l'entendent.

Ço dist li reis: " Cel corn ad lunge aleine! "

Respont dux Naimes: " Baron i fait la peine!

" Bataille i ad ! Par le men escientre,

" Cil l'at traï ki vos en voeut feindre!

" Adubez vos, si criez vostre enseigne,

" Si sucurez vostre maisnee gente!

" Asez oez, que Rollans se dementet! "



Li empereres ad fait suner ses cornes; ...

Es destrers muntent tuit li baron del ost, etc.

PLAN DU SITE