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CHARLEMAGNE

Capitulaire de Villis
(avant le 4 juin 800)

traduites du latin par M. Guérard

CAPITULAIRE DES TERRES ET COURS IMPÉRIALES.

1. Nous voulons que nos terres, dont nous avons affecté les revenus à notre profit, servent intégralement à notre usage, et non à celui d'autrui.


2. Qu'on ait bien soin de tous ceux qui nous appartiennent, et qu'ils ne soient réduits à la pauvreté par personne.


3. Que nos intendants se gardent de les mettre à leur service, et de les forcer de faire pour eux des labours par corvées, des coupes de bois, ou toute autre espèce de travail; et qu'ils n'acceptent d'eux aucun présent, ni cheval, ni boeuf, ni vache, ni porc, grand ou petit, ni brebis, ni agneau, ni quoi que ce soit, excepté quelques bouteilles de vin on d'autre boisson, du jardinage, des fruits, des poulets et des oeufs.


4. Si nos hommes nous ont fait tort par des vols ou par d'autres fautes, qu'ils réparent entièrement le dommage, et que, pour le reste de la satisfaction légale, ils subissent la peine du fouet, à l'exception des cas d'homicide ou d'incendie, qui peuvent être punis d'amendes. Mais, pour le préjudice causé par eux à d'autres personnes, nos intendants auront soin de rendre aux parties lésées la justice qui leur est due d'après la loi; car, pour les torts commis envers nous, les coupables encourront seulement, au lieu d'amende, la peine du fouet, comme nous l'avons dit. Quant aux hommes libres qui habitent dans nos fiscs ou dans nos terres, qu'ils réparent, selon leurs lois, le mal qu'ils auront fait, et que les amendes encourues par eux soient payées à notre profit, soit en bétail, soit en autres valeurs.


5. Lorsque nos intendants doivent procéder aux travaux de nos champs, aux semailles, aux labours, à la moisson, à la fauchaison, à la vendange, que chacun d'eux, au temps du travail et dans chaque lieu, prévoie et règle de quelle manière on doit opérer pour que tout soit mené à bien. S'ils ne sont pas dans le pays et qu'ils ne puissent se rendre eux-mêmes sur les lieux, qu'ils envoient quelqu'un de nos hommes en état de les bien remplacer, ou une autre personne bien accréditée, pour pourvoir à nos affaires et les conduire à bonne fin. Mais que nos intendants apportent la plus grande attention à n'employer à leur place, pour notre cause, que des hommes fidèles.


6. Nous voulons que nos intendants donnent intégralement la dime de tous les produits aux églises qui sont dans nos fiscs, et que notre dime ne soit pas donnée aux églises d'autrui, excepté à celles qui, d'après une institution ancienne, sont en usage de la recevoir. Nous vouIons aussi que ces églises ne soient pas possédées par d'autres ecclésiastiques que par les nôtres, c'est-à-dire par ceux qui sont de notre maison ou de notre chapelle.


7. Que chaque intendant fasse exactement et complètement son service, tel qu'il lui a été prescrit. Et s'il y a nécessité pour lui de l'augmenter, qu'il fasse calculer s'il doit pourvoir à ce surcrott de service par un supplément d'hommes ou par un supplément de journées.


8. Que nos intendants prennent la charge de nos vignes, qui sont de leur ressort, qu'ils les fassent bien cultiver; qu'ils mettent le vin dans de bons vaisseaux, et veillent avec soin à ce qu'il n'y en ait pas de perdu. Quant à l'autre vin dont ils ont à se pourvoir au dehors, qu'ils en fassent acheter ce qu'il faut pour l'approvisionnement des maisons royales. Et lorsqu'il en aura été acheté plus qu'il n'est nécessaire pour cet approvisionnement, qu'ils nous en donnent avis, afin que nous leur mandions ce qu'ils en doivent faire. Nous voulons, en effet, qu'ils fassent servir à notre usage le produit des ceps de nos vignes. Le vin qui provient du cens de nos vignes, et qui nous est dû par ceux qui les possèdent, sera mis dans nos celliers.


9. Nous voulons que chaque intendant ait, pour mesures, dans son district, des muids, des setiers (la situle étant de 8 setiers) et des corbus, de la même contenance que ceux que nous avons dans notre palais.


10. Que nos maires, forestiers, préposés aux haras, cellériers, doyens, péagers et tous nos autres officiers, fassent les labours réguliers et fixes, et payent la redevance des porcs pour leurs manses; et que, pour la main-d'oeuvre qui leur est remise, ils aient à bien remplir leurs offices. Que tout maire qui aura un bénéfice en sa possession fasse mettre quelqu'un à sa place, de manière que son remplaçant s'acquitte pour lui de la main-d'oeuvre et des autres services.


11. Que nul intendant ne prenne à son profit, ni même pour ses chiens, de gite chez nos hommes ni chez les étrangers.


12. Qu'aucun intendant ne fasse garder à personne notre otage, placé dans notre terre.


13. Qu'ils aient bien soin des étalons, c'est-à-dire des waraniones, et qu'ils se gardent de les laisser longtemps dans le même pâturage, de peur qu'ils ne le détruisent. S'il y en a un qui ne soit plus propre au service ou qui soit trop ancien, ou qui vienne à mourir, qu'ils nous en donnent avis en temps utile, avant la saison de mettre les étalons avec les juments.


14. Qu'ils veillent au bon entretien de nos juments, et qu'ils séparent les poulains en temps convenable. Et lorsque les pouliches se seront multipliées, qu'ils les séparent également pour en former un nouveau troupeau.


15. Qu'ils aient soin que nos poulains soient rendus à notre palais à la Saint-Martin d'hiver (11 novembre).


16. Nous voulons que nos intendants exécutent ponctuellement ce qui leur sera commandé soit par nous et par la reine, soit, en notre nom ou au nom de la reine, par nos officiers le sénéchal et le bouteiller. Celui qui se rendra coupable de négligence dans l'exécution de nos ordres, devra s'abstenir de boire du moment où il aura été averti, jusqu'à ce qu'il vienne en notre présence ou en présence de la reine, et qu'il sollicite de nous sa grâce. Si l'intendant est à l'armée, s'il est de garde, en mission ou ailleurs, et qu'il alt commandé à ses aides quelque chose qu'ils n'aient pas fait, alors qu'ils viennent à pied au palais, et qu'ils s'abstiennent de boire et de manger, jusqu'à ce qu'ils aient exposé leurs motifs d'excuse, et qu'ensuite ils reçoivent leur sentence, et soient punis sur leur dos ou de tout autre peine qu'il plaira à nous ou à la reine de leur infliger.


17. Que chaque intendant ait autant d'hommes employés aux abeilles pour notre service, qu'il a de terres dans son ressort.


18. Qu'ils aient dans nos moulins des poules et des oies en proportion de l'importance des moulins et en aussi grand nombre qu'ils pourront.


19. Qu'ils n'aient pas moins de 100 poules et de 30 oies dans les fenils de nos terres principales, et pas moins de 50 poules et de 12 oies dans nos ménils.


20. Que chaque intendant fasse venir abondamment tous les ans à la cour de son district le produit des poules et des oies, et qu'en outre il visite ce produit trois ou quatre fois et plus.


21. Que chaque intendant ait des viviers dans nos cours, où il y en a eu précédemment; qu'il les augmente s'il est possible, et qu'il en soit établi de nouveaux où il n'y en a pas encore eu, et où il peut y en avoir aujourd'hui.


22. Que ceux qui possèdent des vignes n'aient pas moins de trois ou quatre couronnes de raisins chez eux.


23. Dans chacune de nos terres, que nos intendants aient des vacheries, des porcheries, des bergeries et des étables de chèvres et de boucs, autant qu'ils pourront en avoir, et qu'ils n'en soient jamais dépourvus. Qu'ils aient de plus, pour faire leur service, des vaches fournies par nos serfs; de manière que les vacheries et les charrues ne soient en rien amoindries par les travaux exécutés pour notre domaine. Qu'ils aient aussi, quand ils seront de service pour la fourniture des viandes, des boeufs boiteux, mais sains, et des vaches et des chevaux non galeux, ou d'autres bestiaux non malades; et qu'il ne dégarnissent pas pour cela, comme nous l'avons dit, les vacheries ou les charrues.


24. Que chaque intendant ait l'oeil surtout ce qu'il doit donner pour notre table, de manière que tout ce qu'il donne soit bon et excellent, et que tout soit apprêté avec beaucoup de soin et de propreté. Et qu'il ait à sa disposition du blé pour deux repas par jour, lorsqu'il sera chargé du service de notre table. Et que nos autres provisions soient également toutes de bonne qualité, tant la farine que la viande.


25. Qu'ils fassent annoncer, le premier septembre, s'il y aura paisson ou non.


26. Que les maires n'aient pas plus de terres, dans leurs districts, qu'ils n'en peuvent parcourir et administrer en un jour.


27. Que nos habitations aient en tout temps du feu et des gardiens, de manière qu'elles n'éprouvent aucun dommage. Et lorsque nos commissaires ou les envoyés étrangers viennent à notre cour ou en repartent, qu'ils ne prennent aucun gîte dans nos manoirs, sans un ordre particulier de nous ou de la reine; mais qu'ils continuent d'être logés et défrayés soit par le comte, soit par les hommes auxquels cette charge est depuis longtemps imposée par la coutume. Quant aux chevaux de conduite, qu'ils leur soient fournis avec soin, selon l'usage, avec toutes les autres choses qui leur sont nécessaires, afin qu'ils puissent se rendre au palais et s'en retourner commodément et honorablement.


28. Nous voulons que tous les ans, dans le carême, au dimanche des Rameaux, appelé Osanna, ils aient soin de faire, suivant notre ordonnance, le versement de l'argent de nos revenus, après que nous aurons reconnu et arrêté les comptes de l'année.


29. Que chaque intendant veille à ce que ceux de nos hommes qui ont des procès, ne soient pas dans la nécessité de venir les poursuivre devant nous, et qu'il ne laisse pas perdre par sa négligence les jours de service qu'ils nous doivent. Et si un de nos serfs a des droits à réclamer dans une terre étrangère, que son chef fasse tout ce qu'il pourra pour qu'il obtienne justice. Dans le cas où le serf ne parviendrait pas à l'obtenir, que son chef ne souffre pas qu'il se fatigue dans ses poursuites, mais qu'il ait soin de nous en informer par lui-même ou par un messager.


30. Nous voulons que nos intendants mettent a part, de chaque espèce de produit, ce qui est nécessaire pour notre usage, pendant leur service; qu'ils fassent mettre aussi à part ce qui doit être chargé sur les voitures pour l'armée, en le prenant tant dans les maisons que chez les pasteurs, et qu'ils sachent la quantité de toutes ces réserves.


31. Qu'ils mettent de même en réserve, tous les ans, la part destinée aux prébendiers et aux personnes des gynécées; qu'ils la leur distribuent intégralement en temps convenable, et qu'ils sachent nous rendre compte de ce qu'ils en font et d'où ils la prennent.


32. Que chaque intendant avise aux moyens d'avoir toujours de la semence de première qualité, soit par achat, soit autrement.


33. Après les approvisionnements ordonnés ci-dessus, après les semailles et après les autres sortes d'emploi qu'on aura pu faire des différentes espèces de produits, tout ce qui en restera devra être conservé jusqu'à nouvel ordre de notre part, pour être ensuite vendu ou mis en réserve selon que nous en aurons disposé.


34. Il faut absolument veiller avec la plus grande attention à ce que le lard, les viandes fumées, les salaisons, le petit salé, le vin, le vinaigre, le vin de mûres, le vin cuit, le garus, la moutarde, les fromages, le beurre, le malt, la bière, l'hydromel, le miel, la cire, la farine, en un mot tout ce qui s'apprête ou se fait avec les mains, soit apprêté et fait avec la plus grande propreté.


35. Nous voulons que l'on fasse de la graisse avec les brebis grasses, comme avec les porcs. Nous voulons, en outre, que nos intendants n'aient pas moins de deux boeufs gras, dans chacune de nos terres, soit pour en faire de la graisse sur les lieux, soit pour nous être envoyés.


36. Que nos bois et nos forêts soient bien gardés. S'il y a des places à défricher, qu'ils les fassent défricher, et qu'ils ne laissent pas gagner les bois sur les champs. Que, là où il doit y avoir des bois, ils ne souffrent pas qu'on les coupe trop ni qu'on les gâte. Qu'ils veillent attentivement à la garde de notre gibier dans nos forêts. Qu'ils veillent de même aux autours et aux éperviers réservés pour notre service. Qu'ils perçoivent diligemment les cens de nos bois. Et si nos intendants, ou nos maires, ou leurs hommes, y mettent engraisser leurs porcs, qu'ils soient les premiers à en payer la dime, pour donner le bon exemple, afin qu'ensuite les autres hommes la payent exactement.


37. Qu'ils tiennent nos champs et nos cultures en bon état, et qu'ils fassent garder nos prés en temps opportun.


38. Qu'ils aient en tout temps un nombre suffisant d'oies et de poules grasses, soit pour en faire usage quand ils sont de service, soit pour nous les envoyer.


39. Nous voulons qu'ils soient chargés de recevoir les poulets et les oeufs que nos sergents et les possesseurs de manses rendent chaque année, et qu'ils les fassent vendre lorsqu'ils ne sont pas de service.


40. Que chaque intendant alt toujours dans nos terres, pour servir à leur ornement, des oiseaux singuliers, tels que paons, faisans, canards, pigeons, perdrix, tourterelles.


41. Que les bâtiments, dans nos cours, et les hales qui les environnent soient bien entretenus, et que les étables, les cuisines, les boulangeries et les pressoirs soient tenus en bon état, afin que les employés à notre service puissent y remplir leurs fonctions convenablement et avec une grande propreté.


42. Que, dans chacune de nos terres, la chambre soit pourvue de courtes-pointes, de coussins, d'oreillers, de draps de lit, de tapis de table et de banquettes; de vaisseaux d'airain, de plomb, de fer et de bois; de chenets, de chaînes, de crémaillères, de doloires, de cognées, de tarières, de coutelas, et de toutes les autres espèces d'outils, de manière qu'on ne soit jamais dans la nécessité d'en aller chercher ou d'en emprunter au dehors. Que chaque Intendant ait soin des instruments de guerre, pour qu'ils soient en bon état, et lorsqu'ils reviendront de l'armée, qu'ils soient replacés dans la chambre.


43. Que nos intendants fassent donner, en temps convenable, à nos gynécées, selon l'usage établi, les choses nécessaires pour le travail, c'est-à-dire du lin, de la laine, de la guède, de la teinture en vermeil, de la garance, des peignes à laine, des chardons, du savon, de la graisse, des vaisseaux, et les autres objets dont on a besoin aux gynécées.


44. Qu'ils nous envoient chaque année, pour notre service, les deux tiers des aliments maigres, tant en légumes, qu'en poisson, fromages, beurre, miel, moutarde, vinaigre, millet, panic, herbes sèches et vertes, radis et navets, et, de plus, les deux tiers de la cire, du savon et des autres denrées de cette espèce; et qu'ils nous fassent connaître ce qui sera de reste, au moyen d'un état qu'ils nous en adresseront, ainsi que nous l'avons dit ci-dessus. Mais qu'ils ne négligent pas ce devoir, comme ils l'ont négligé jusqu'à ce jour; car nous voulons vérifier par les deux tiers envoyés la quantité du tiers restant.


45. Que chaque intendant ait dans son district de bons ouvriers, savoir: des ouvriers pour le fer, pour l'or et pour l'argent; des cordonniers, des tourneurs, des charpentiers, des fabricants d'écus, des pêcheurs, des oiseleurs; des fabricants de savon; des hommes qui sachent fabriquer la bière, le cidre, le poiré et toutes les autres espèces de boissons; des boulangers qui fassent de la pâtisserie pour notre table; des ouvriers qui sachent bien faire les rets tant pour la chasse que pour la pèche et pour prendre les oiseaux, et les autres ouvriers qu'il serait trop long d'énumérer.


46. Qu'ils fassent bien garder nos parcs, qu'on appelle vulgairement des breuils; qu'ils aient toujours soin de les faire réparer à temps, et surtout qu'ils n'attendent pasqu'il devienne nécessaire de les reconstruire à neuf. Qu'ils se conduisent de même à l'égard de tous les édifices.


47. Que nos veneurs, nos fauconniers et les autres officiers qui nous font un service assidu au palais, reçoivent assistance dans nos terres, pour l'exécution des ordres contenus dans nos lettres ou dans celles de la reine, lorsque nous les envoyons pour nos affaires, ou lorsque le sénéchal et le bouteiller commandent quelque chose de notre part à nos intendants.


48. Que les pressoirs de nos terres soient en bon état. Et que nos intendants veillent à ce que notre vendange ne soit pas foulée avec les pieds; mais que tout se fasse avec propreté et convenance.


49. Que nos gynécées soient bien ordonnés, c'est-à-dire pourvus d'habitations, de chambres à poêles et d'escrènes; qu'ils soient entourés de bonnes haies, et que les portes en soient solides, afin qu'on y puisse bien faire nos ouvrages.


50. Que chaque intendant voie combien on doit placer de poulains dans la même écurie, et combien d'hommes on peut mettre avec eux pour les soigner. Que ces hommes, s'ils sont libres et qu'ils possèdent des bénéfices dans le même district, vivent de leurs bénéfices. De même, s'ils sont fiscalins et qu'ils possèdent des manses, qu'ils vivent de leurs manses; mais, s'ils n'ont ni bénéfices ni manses, qu'ils soient nourris par le domaine.


51. Que chaque intendant prenne garde que les méchants ne puissent cacher sous terre ou ailleurs nos semences, et que pour cela les blés ne viennent mal. De même pour les autres maléfices, que chacun veille à ce qu'ils n'en puissent commettre.


52. Nous voulons qu'ils obligent les fiscalins, les serfs qui nous appartiennent, et les colons étrangers qui habitent nos terres, à faire pleinement et entièrement droit à chacun, comme il le mérite.


53. Que tous nos intendants veillent à ce que nos hommes qui sont de leurs districts ne puissent se livrer au vol ni commettre de maléfices.


54. Que chaque intendant veille avec le même soin à ce que nos hommes fassent bien le travail qu'il a droit d'exiger d'eux, et n'aillent pas perdre leur temps à courir les marchés et les foires.


55. Nous voulons que nos intendants fassent écrire séparément, dans un inventaire, tout ce qu'ils ont donné, fourni ou réservé pour notre usage; et séparément, dans un autre inventaire, tout ce qu'ils auront dépensé eux-mêmes, et qu'ils nous fassent connaître, dans un troisième, tout ce qu'ils ont de reste.


56. Que chaque intendant, dans son district, tienne de fréquentes audiences; qu'il rende la justice, et veille â ce que tous les hommes qui nous appartiennent vivent honnêtement.


57. Si quelqu'un de nos serfs voulait nous dire contre son chef quelque chose d'important pour nos intérêts, qu'il ne soit pas empêché par lui de venir jusqu'à nous. Et si l'intendant apprend qu'ils ont l'intention d'aller au palais porter plainte contre leur chef, qu'il nous expose lui­même, dans un rapport contradictoire, les raisons qui les amènent auprès de nous, de manière qu'ils ne fatiguent pas nos oreilles de leurs réclamations. Par ce moyen nous voulons savoir s'ils viennent par nécessité ou sans motif.


58. Lorsque les intendants auront été chargés d'élever nos jeunes chiens, qu'ils les nourrissent à leurs frais, ou qu'ils les confient à leurs aides, c'est-à-dire aux maires, aux doyens ou aux cellériers, qui devront alors les bien nourrir avec ce qui leur appartient, à moins qu'il n'y ait ordre de nous ou de la reine de les nourrir dans notre domaine, à nos frais. Dans ce cas, l'intendant désignera un homme pour prendre soin de leur nourriture, et il fera mettre à part ce que celui-ci devra leur donner, afin qu'il ne soit pas obligé de recourir tous les jours aux fenils.


59. Que chaque intendant, quand il sera de service, fasse donner par jour trois livres de cire et huit setiers de savon, et, en sus, à la Saint­André (30 nov.), partout où nous serons avec nos gens, six livres de cire, et autant à la mi-carême.


60. Que les maires ne soient jamais pris parmi les hommes les plus considérables, mais toujours parmi les honnêtes gens d'un état moyen.


61. Que tout intendant, lorsqu'il est de service, fasse conduire son malt au palais, et qu'il y amène en même temps des maîtres brasseurs, qui fabriquent de bonne bière.


62. Que nos intendants nous adressent tous les ans, à Noël, sur des états séparés, des comptes clairs et méthodiques de tous nos revenus; afin que nous puissions connaître ce que nous avons et combien nous avons de chaque chose, à savoir: le compte de nos terres labourées avec les boeufs que nos bouviers conduisent, et de nos terres labourées par les possesseurs des manses qui nous doivent le labour; le compte des porcs, des cens, des obligations et des amendes; celui du gibier pris dans nos bois sans notre permission, et celui des diverses compositions; celui des moulins, des forêts, des champs, des ponts, des navires; celui des hommes libres et celui des centaines engagées envers notre fisc; celui des marchés, celui des vignes et de ceux qui nous doivent du vin; le compte du foin, du bois à brûler, des torches, des planches et des autres sortes de bois d'oeuvre; celui des terres incultes; celui des légumes, du millet et du panic, de la laine, du lin, du chanvre; celui des fruits des arbres, des noyers, des noisetiers, des arbres greffés de toutes les espèces, et des jardins; celui des navets; relui des viviers; celui des cuirs, des peaux et de cornes d'animaux; celui du miel, de la cire, de la graisse, du suif et du savon; du vin de mûres, du vin cuit, de l'hydromel, du vinaigre, de la bière, du vin nouveau et du vin vieux; du blé nouveau et du blé ancien; celui des poules et des oeufs; celui des oies; les comptes des pêcheurs, des ouvriers en métaux, des fabricants d'écus et des cordonniers; celui des huches et des boites; celui des tourneurs et des selliers; celui des forges, celui des mines de fer, de plomb et des autres mines; celui des tributaires, et celui des poulains et des pouliches.


63. Que rien de ce qui précède ne paraisse trop dur à nos intendants; car ce que nous requérons d'eux, nous voulons qu'eux-mêmes s'appliquent à le requérir également, sans dureté, des officiers placés sous leurs ordres. En effet, tout ce qu'un homme doit avoir dans sa maison et dans ses terres, nos intendants doivent l'avoir de même dans nos domaines.


64. Que nos chariots qui vont à la guerre, et qu'on nomme basternes, soient bien construits. Que les opercules soient bien couverts de cuirs, et qu'ils soient tellement cousus, que, s'il est nécessaire de passer l'eau, les chariots puissent traverser les rivières avec les provisions qu'ils renferment sans que l'eau y pénètre, et de manière que ce qui nous appartient passe, comme nous l'avons dit, sans éprouver de dommage. Nous voulons que l'on mette dans chaque chariot de la farine pour notre consommation, c'est-à-dire 12 muids. Dans les chariots pour le transport du vin, on en mettra 12 muids de notre mesure. On mettra aussi dans chaque chariot un écu et une lance, un carquois et un arc.


65. Que les poissons de nos viviers soient vendus, et que d'autres soient mis à la place, de manière qu'il y ait toujours du poisson. Toutefois, lorsque nous n'allons pas dans nos terres, que le poisson en soit vendu [sans être remplacé]; et que nos intendants nous fassent profiter du produit de toutes les ventes.


66. Qu'ils nous rendent compte des chèvres et des boucs, de leurs cornes et de leurs peaux; et qu'ils nous amènent tous les ans les quartiers salés récemment des chèvres et des boucs qu'ils auront engraissés.


67. S'ils manquent de tenanciers pour les manses disponibles et de places pour les serfs nouvellement achetés, qu'ils nous en donnent avis.


68. Nous voulons que tous nos Intendants aient toujours de bonnes barriques cerclées de fer, toutes prêtes à être envoyées à l'armée et au palais. Quant aux outres de cuir, qu'ils n'en fassent pas fabriquer.


69. Qu'ils nous donnent avis sur-le-champ du nombre des loups que chacun aura pris, et qu'ils nous en fassent présenter les peaux. Qu'ils procèdent, dans le mois de mai, â la recherche des louveteaux, et qu'ils les attrapent soit avec des poudres empoisonnées et des hameçons, soit à l'aide de fosses et de chiens.


70. Nous voulons qu'ils aient dans les jardins des plantes de toutes espèces, savoir: le lis, les roses, le fénugrec (trigonella foenum graecum L.), la menthe-coq (tanacetum balsamita L.), la sauge (salvia officinalis L.), la rue (ruta graveolens L.), l'aurone (artemisia abrotanum L.), les concombres (cucumis sativus L.), les citrouilles (cucurbita pepo L.), les calebasses et artichauts d'Espagne (cucurbita lagenaria et c. melopepo L.), le haricot (phaseolus vulgaris L.), le cumin officinal (cuminum cyminum L.), le romarin (rosmarinus officinalis L.), le carvi (carvi officinarum L.), le pois-ciche (cicer arietinum L.), la scille (scilla L.), le glaïeul (gladiolus communis L.), la serpentaire (arum dracunculus L.), l'anis (pimpinella anisum L. ), les coloquintes (cucumis colocynthis L.), l'héliotrope (heliotropium europaeum L.), le méum d'athamante (athamanta meum L.), le séseli de Marseille (seseli tortuosum L.), les laitues (lactuca sativa L.), la patte d'araignée (nigella damascena L.), la roquette (brassica eruca L.), le cresson alénois (lepidium sativum L.), la bardane (arctium lappa L.), le pouliot (mentha pulegium L.), le maceron commun (smyrnium olusatrum L.), le persil (apium petroselinum L.), le céleri (apium graveolens L.), la livèche (ligusticum levisticum L.), la sabine (juniperus sabina L.), l'aneth (anethum graveolens L.), le fenouil doux (anethum foeniculum L.), les chicorées (cichorium intybus, et c. endivia L.), le dictame de Crète (origanum dictamnus L.), la moutarde (sinapis nigra L.), la sarriette (satureia hortensis L.), la menthe aquatique (mentha aquatica L.), la menthe des jardins (mentha gentilis L.), la menthe à feuilles rondes (mentha rotundifolia L.), la tanaisie (tanacetum vulgare L.), l'herbe-aux-chats (nepeta cataria L.), la petite centaurée (gentiana centaurium L.), le pavot des jardins (papaver somniferum L.), les bettes (beta vulgaris et b. y. rubra L.), le cabaret (asarum europaeum L.), les guimauves (althaea officinalis L.), les mauves en arbre (hibiscus syriacus L.), les mauves (malva sylvestris et m. rotundifolia L.), les carottes (daucus carota L.), les panais (pastinaca sativa L.), l'arroche des jardins (atriplex hortensis L), les amarantes blettes (amaranthus blitum L.), les choux-raves (brassica rapa L.), les choux (brassica oleracea L.), les oignons (allium cepa L.), les appétits (allium schoenoprasum L.), les poireaux (allium porrum L.), les raves et radis (raphanus sativus L.), les échalotes (allium ascalonicum L.), les ciboules (allium fistulosum L.) , les aulx (allium sativum L.), la garance (rubia tinctorum L.), les chardons à bonnetier (dipsacus fullonum L.), les fèves des marais (vicia faba L.), les pois (pisum sativum L.), la coriandre (coriandrum sativum L.), le cerfeuil (scandix cerefolium L.), les épurges (euphorbia lathyris L.), l'orvale (salvia sclarea L.).

Que le jardinier ait sur sa maison de la joubarbe (sempervivum tectorum L.).

Quant aux arbres, nous voulons que nos intendants aient des pommiers de diverses espèces, des poiriers de diverses espèces, des pruniers de diverses espèces, des sorbiers, des néfliers, des châtaigniers, des pêchers de diverses espèces, des coignassiers, des aveliniers, des amandiers, des mûriers, de lauriers, des pins, des figuiers, des noyers, des cerisiers de diverses espèces.

Noms des pommes: gozmaringa, geroldinga, crevedella, spirauca, les unes douces, les autres aigres, toutes de garde; et celles qu'on mange aussitôt cueillies, et qui sont hâtives.

Poires de garde de trois ou quatre espèces, douces, à cuire, ou tardives.


FIN DU CAPITULAIRE ROYAL.

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