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ALPAÏDE

Alpaïde, mère de Charles Martel

par Louis Dewez

Alpaïde, mère de Charles-Martel, tige de la seconde race des rois de France, est un personnage historique très intéressant pour notre pays: elle a vécu à Jupile, village à une lieue de Liège; elle est morte à Orp-le-Grand, vulgairement dit Ste-Adèle, village du Brabant méridional, à deux lieues de Jodoigne, et elle y a été enterrée: on y a retrouvé son tombeau avec une inscription qui lui donne le titre d'épouse ou concubine de Pépin, conthoralis Pepini. Comme les vieilles légendes ont accumulé une foule de contes plus ridicules les uns que les autres sur cette princesse, j'ai taché, en pesant et en discutant les diverses opinions des auteurs anciens et modernes qui en ont parlé, de démêler la vérité altérée, défigurée et étouffée par cet amas de mensonges et d'absurdités.

Il se présente donc sur ce sujet plusieurs questions, qui sont comme autant de problèmes historiques. Je les réduirai à quatre principales:


1. Alpaïde était-elle la concubine ou la femme légitime de Pépin de Herstal?


Le plus ancien auteur de la vie de St-Lambert est un anonyme, dont l'ouvrage a été publié en grande partie par fragments, dans la collection de Duchesne, tome I. Gocleschal, diacre et chanoine de Liege, est le second. Il a écrit la vie du même saint par ordre de l'évêque Agilfride en 771, conséquemment au commencement du règne de Charlemagne. Il parait assez, en confrontant les deux ouvrages, que Godeschal n'a fait que revoir et retoucher celui de l'anonyme. Ces deux écrivains ne parlent d'Alpaïde ni dans un sens ni dans l'autre. Ce sont les légendaires des temps postérieurs, entre autres Nicolas, chanoine de Liege, et Renier, moine de St-Laurent, écrivant dans le Xlle siècle, le premier vers l'an 1120, le second vers l'an 1139, qui ont ouvertement traité Alpaïde de concubine. Le premier dit que Pépin ayant renvoyé Plectrude, sa femme légitime, lui substitua Alpaïde, et que cet adultère fut consommé à la face de toute la France (1).

Le second en parle absolument dans le même sens et à peu­près dans les mêmes termes (2). Un légendaire, nommé Marcellinus, dans une vie de St-Suibert, traite également Alpaïde de concubine, et Charles-Martel de bâtard (3).

Mais le continuateur de Frédégaire, historien contemporain, puisqu'il a repris la chronique de celui-ci à l'an 641, et l'a continuée jusqu'en 768, dit clairement et positivement que Pépin épousa une autre femme, appelée Alpaïde, distinguée par sa naissance et sa beauté (4). Si donc, en prenant la chose dans le sens le plus défavorable, Alpaïde avait été la concubine de Pépin, elle devint sa femme légitime, et les historiens contemporains, dit Adrien Jourdan (5), en parlent dans ce sens. Mais ce point veut une explication. Comment, dira-t-on, Alpaïde pouvait-elle être la femme légitime de Pépin, puisque Plectrude, sa première femme, était vivante? Il faut remarquer avec Adrien Valois (6), que telle était la coutume des Francs, qui renvoyaient de bonne grâce leurs femmes, quand elles ne leur convenaient pas, tellement que l'homme et la femme avaient le droit, ou de se retirer dans un monastère, ou de contracter un autre mariage. Marculfe le dit également très positivement (7). Et ce n'étaient pas seulement, ajoute Valois, les rois et les princes qui usaient de ce privilége, mais même les particuliers, qui, quand cela leur convenait, suivaient l'exemple des rois (8).

Je crois retrouver l'origine de cette coutume dans les moeurs des Germains. Les Germains, dit Tacite, sont presque les seuls des barbares qui se contentent d'une femme, si l'on en excepte un petit nombre, qui, non par un effet de leur dissolution, mais par un privilége de leur naissance, en entretenaient plusieurs, parce que leur alliance était recherchée (9). C'est donc, à ce qu'il paraît, de la Germanie que les Francs avaient apporté cette coutume, ou plutôt cette prérogative, que la conquête, dit Montesquieu, n'avait pas eu le temps de changer.

La conversion de Clovis n'apporta point encore de changement à cette coutume. Cependant les lois de l'église y ont toujours été contraires; mais ce privilége, accordé par la loi civile, s'est maintenu encore pendant un fort long temps, particulièrement parmi les grands et les princes. Il est donc toujours vrai de dire qu'aux yeux de la loi, Alpaïde était la femme légitime de Pépin, et que conséquemment Charles-Martel était leur fils légitime.


2. Alpaïde est-elle coupable du meurtre de St-Lambert?


Les contemporains, ou enfin les anciens historiens n'en parlent pas. II paraît que c'est Adon, archevêque de Vienne en Dauphiné, en 860, qui le premier a imputé la mort de St-Lambert à Pépin et à Alpaïde. Les écrivains des temps postérieurs, c'est-à-dire, le chanoine Nicolas et le moine Renier ont suivi Adon, et voici comment ils racontent l'histoire. St-Lambert avait plus d'une fois fait de sévères remontrances au duc Pépin sur sa conduite. Pépin avait écouté les avis de Lambert avec assez de docilité, et paraissait même disposé à renvoyer Alpaïde. Mais celle-ci sut si bien faire valoir son ascendant sur l'esprit du prince, qu'elle parvint à détruire tout l'effet des exhortations de l'évêque, et la passion de Pépin pour la belle Alpaïde n'en devint que plus violente.

Pépin, qui consultait souvent Lambert sur les affaires de son gouvernement, l'invita un jour à se rendre à Jupille, village à une lieue de Liege, où il faisait sa résidence ordinaire. Après la conférence, le duc invita Lambert à un festin qu'il avait fait préparer pour le recevoir, et celui-ci, après s'en être longtemps excusé sans en dire la raison (c'est qu'il ne voulait pas se trouver avec Alpaïde), céda cependant aux instances réunies tant du duc que des seigneurs de sa cour.

Quand on fut placé à table selon les rangs, l'échanson vint présenter une coupe à Pépin, qui la renvoya à l'évêque, en le priant de la bénir. Tous les convives firent la même cérémonie. Alpaïde, désirant obtenir la même faveur, mais craignant que l'évêque ne la lui refusât, tâcha de mêler, sans qu'il s'en aperçut, sa coupe à celles des autres convives. Lambert, qui s'en défiait, remarqua cette ruse et repoussa la coupe. Alors, se laissant emporter à son zèle, peut-être trop inconsidéré, il lui reprocha son impudence (c'est le mot qu'emploient les vieux historiens), quitta la table et sortit de la salle. Le duc le suivit, et tâcha par les manières les plus engageantes et les instances les plus honnêtes, de l'appaiser et de le ramener; mais tous ses efforts et toutes ses paroles furent inutiles. Lambert ne répondit aux invitations et même aux excuses du duc, que par les termes les plus durs et les plus offensants. Ce sont ceux du moins que les historiens lui prêtent. Ces propos de l'évêque n'aboutirent qu'à lasser la patience et à émouvoir la bile de Pépin; et Alpaïde, de son côté, ne pouvant supporter la honte de cet affront, ne fit qu'échauffer et animer de plus en plus le duc contre Lambert; et quand elle l'eut amené au point, où, égaré par l'amour et la colère, il n'était plus en état de prendre conseil de sa raison, elle ne craignit pas de lui proposer de le faire tuer, et dans ce moment (ce sont toujours ces vieux historiens qui parlent), il eut la faiblesse d'y consentir. Comme elle craignit, si elle lui eût laissé le temps de la réflexion, qu'il ne changeât de dessein, elle envoya dans la nuit même des émissaires affidés à son frère Dodon pour l'informer de tout ce qui s'était passé, et l'engager à la débarrasser par une prompte mort d'un prêtre fanatique, qui ne cessait de l'insulter et de la persécuter (10). Dodon se chargea de l'exécution de cet odieux complot; et après avoir pris toutes ses mesures, il se rendit de grand matin au palais de l'évêque à la tête d'une troupe de sicaires dévoués à ses volontés: il fit d'abord entourer le palais par une partie de ces brigands, et les autres se répandirent en tumulte dans tous les appartemens. Les deux neveux de l'évêque s'étant armés à la hâte, accoururent pour repousser les assassins, et les forcèrent en effet à se retirer. Mais ils revinrent plus furieux, et après avoir tué les deux neveux et les fidèles domestiques qui étaient venus au secours, ils se précipitèrent dans la chambre où Lambert était couché, et l'assassinèrent (11).

Tel est le récit circonstancié de cet événement, selon les deux auteurs de la vie de St-Lambert, Nicolas et Renier. Les anciens, c'est-à-dire, Godeschal et Étienne, s'accordent à peu près avec ceux-ci quant à la catastrophe, c'est-à-dire, quant aux circonstances de l'assassinat; mais ils ne parlent pas de la scène du festin, qui, selon les autres, en a été la cause et l'occasion, et ils l'attribuent à une toute autre cause, que j'expliquerai plus bas.

Anselme, chanoine de Liege, qui écrivait peu de temps après Nicolas et Renier, rapporte les deux causes, et insiste plus particulièrement sur la seconde, c'est-à-dire, la haine d'Alpaïde. Les autres chroniqueurs, annalistes et légendaires ont suivi ceux-là, et Gilles d'Orval, qui florissait dans le XIIIe siècle, s'accorde également avec eux, ou plutôt il les a copiés (12).

Mais, dira-t-on, à quoi attribuer ce silence des historiens presque contemporains, qui devaient être mieux informés des faits? Renier l'explique, en disant que si Godeschal n'a pas parlé assez librement de la cause principale du martyre de St-Lambert, c'est qu'il a craint de choquer les rois de son temps, en rappelant les fautes de leurs ancêtres (13). Mais était-ce bien une raison pour tenir caché un fait, qui, s'il eût été vrai, aurait dû être notoire? Hincmar, archevêque de Reims, n'a-t-il pas avancé (ce qui paraîtra bien plus fort et plus hardi) que Charles-Martel était damné, et c'est sous le règne de Charles­le Chauve, descendant en ligne directe de celui-ci, qu'Hincmar écrivait. Au reste, en supposant même que la crainte, le respect humain, la raison politique, auraient pu empêcher Godeschal de dire toute la vérité, pourquoi l'évêque Étienne, qui vivait en 903, et qui, étant conséquemment éloigné de plus d'un siècle et demi de Charles-Martel, n'avait plus de ménagemens à prendre, pourquoi, dis-je, n'en aurait-il pas parlé? C'est que probablement il ne connaissait pas le fait, ou qu'il ne le croyait pas, comme n'étant pas fondé sur des preuves historiques asset dignes de foi.

Pourquoi enfin les historiens de St-Lambert auraient-ils été plus timides et plus circonspects que la plupart des historiens ecclésiastiques de ces temps-là, qui, ne pouvant pardonner à Pépin d'avoir employé l'argent qu'il avait trouvé dans quelques monastères pour payer ses soldats, et d'avoir accordé l'usufruit de quelques terres de l'église à ses capitaines, ont si indignement flétri sa mémoire, en avançant qu'il était damné, mais damné en corps et en âme? C'était cependant pour délivrer l'église et l'état du joug mahométan que Charles-Martel avait pris les armes. Mais il parait que ces historiens, qui étaient tous ecclésiastiques, se sont peu inquiétés des causes et des succès d'une guerre entreprise pour la défense de la religion chrétienne; c'est qu'ils étaient sans doute plus sensibles à la diminution de leurs revenus qu'à l'exaltation de la religion et au triomphe de la croix.

Cette fureur contre Charles-Martel a été poussée à un tel point qu'on lit dans la vie de St-Eucher, évêque d'Orléans, que celui-ci étant en prière, fut ravi en esprit et mené par un ange en enfer; qu'il y vit Charles-Martel, et qu'il apprit de l'ange que les saints dont ce prince avait dépouillé les églises, l'avaient condamné à brûler éternellement en corps et en âme. St-Eucher, ajoute son historien, écrivit cette révélation à Boniface, évêque de Mayence, et à Fulrad, archi-chapelain de Pépin-le-Bref, fils de Charles-Martel, en les priant d'ouvrir le tombeau de ce dernier, et de voir si son corps y était. Le tombeau fut ouvert; le fond en était tout brûlé, et on n'y trouva qu'un gros serpent, qui en sortit avec une fumée puante. Boniface ne craignit pas d'adresser directement à Pépin et à son frère Carloman toutes ces édifiantes preuves de la damnation de leur père. Or, si l'évêque Boniface a osé écrire de semblables horreurs à ces deux princes, pourquoi les historiens de St-Lambert auraient-ils plus ménagé Pépin, leur aïeul, et Alpaïde, sa femme?

Mais il se présente ici une nouvelle objection. Pourquoi, dira-t-on, les écrivains des siècles suivans ont-ils rapporté ainsi les faits relatifs au martyre de St-Lambert, en l'attribuant à Alpaïde, et sur quelle preuve les ont-ils fondés? Ils ne le disent pas, et c'est ce qui me force à croire que, s'ils ne les ont pas inventés, ils n'ont au moins d'autre autorité que la tradition; le bon historien Bouille le dit, et regarde cette tradition comme irréfragable; c'est son expression. Je ne saurais être de son avis; car on sait avec quelle facilité, dans ces siècles de simplicité et d'ignorance, on accueillait et on accréditait ces sortes de traditions qu'une pieuse crédulité a transmises de siècle en siècle; et à force de les entendre répéter, on s'y est tellement habitué, qu'on a fini par les regarder comme des faits prouvés. Il y a des choses, dit Montesquieu, que tout le monde dit, parce qu'elles ont été dites une fois. Qu'est-ce donc quand elles ont été vingt fois répétées? C'est sur ces sortes de traditions que sont fondées la plupart des légendes. Je suis loin, encore une fois, de vouloir accuser leurs auteurs d'avoir eu l'intention de tromper les autres: je crois au contraire qu'en général ils ne les ont rapportées que parce qu'ils étaient trompés eux-mêmes, ou, en d'autres termes, qu'ils étaient dupes de leur bonne foi. Je suis donc bien tenté de croire qu'on peut sans impiété reléguer toute cette prétendue conspiration d'Alpaïde contre la vie de Lambert, au rang de ces fables dont les légendes fourmillent, et que leurs auteurs ne tirent pas toujours des traditions, mais de leur imagination trop exaltée, comme le dit le cardinal Bellarmin de Simon Métaphraste, écrivain grec du Xe siècle, auteur d'un recueil de vies de saints, dans lesquelles, dit ce savant cardinal, ce légendaire a ajouté beaucoup de circonstances de son invention, présentant les faits, non comme ils se sont passés, mais comme il voudrait qu'ils se fussent passés, et qu'il a surchargés d'une infinité de faits romanesques, miraculeux et incroyables, dont les autres historiens ne font aucune mention (14). Or, ce n'est pas seulement Métaphraste qui a ainsi défiguré l'histoire. Un très grand nombre de légendaires, comme l'observe François Bacon, baron de Vérulam, fils du fameux chancelier, ont accumulé dans leurs ouvrages une foule de faits absurdes, qui font bien plus de tort que de bien à l'église, et (c'est l'expression de l'auteur que je cite) rendent les légendes aussi ridicules et aussi monstrueuses que le Talmud et l'Alcoran.

Pour en revenir au sujet qui m'occupe, je m'appuie de l'autorité du baron Le Roi, qui dit positivement qu'on a débité beaucoup de fables sur Pépin et Alpaïde (15), et il ajoute que ce qu'ont avancé plusieurs écrivains, savoir que St-Lambert a été martyrisé, parce qu'il avait réprimandé Pépin sur sa liaison criminelle avec Alpaïde, n'est pas vraisemblable. Pour le prouver, il s'appuie d'abord sur ce que, comme je l'ai déjà remarqué, les contemporains n'en ont pas parlé dans ce sens. Godeschal, qui vivait dans le siècle de Pépin, attribue ce funeste événement à une cause toute différente et toute étrangère aux amours d'Alpaide et de Pépin, et voici comment il le raconte. Je ne fais que le suivre, ou plutôt le traduire.

« Deux frères appelés Gal et Riold, ne cessaient d'accabler Lambert d'injustices et d'outrages, et de lui causer les plus grands préjudices dans ses intérêts particuliers, en pillant et en dévastant ses biens. Cette fureur s'étendit même sur les parents et les personnes attachées à l'évéque, qu'ils molestaient, qu'ils tourmentaient, qu'ils chargeaient de mauvais traitements. Les parens de Lambert, ne pouvant supporter plus longtemps cette persécution, se vengèrent de tant de vexations et d'outrages par la mort de Gal et Riold. »

Ces parents de l'évêque étaient Pierre et Andolet, que la plupart des historiens, se copiant les uns les autres, disent être ses neveux. Godeschal ne le dit pas: il dit seulement que c'étaient deux hommes puissant; de sa famille ou de sa maison, familiae suae; car ce mot peut signifier l'une ou l'autre. Chapeauville, tom. I, p. 337, ann. 2, dit que Godeschal n'accuse pas nominativement Pierre et Andolet d'être les auteurs de cet assassinat. Il se trompe: s'il ne le dit pas dans le passage du chap. 7 sur lequel Chapeauville fait cette observation, il paraît l'avancer bien positivement dans le chapitre suivant, comme on va le voir. Je reprends donc le récit de Godeschal.

« Un des parents de Gal et Riold, nommé Dodon, qui était un des premiers seigneurs de la cour de Pépin, et qui vivait dans l'intimité du prince, résolut de venger la mort de ses deux parents par celle de l'évêque. C'est donc dans ce dessein qu'ayant réuni une troupe de satellites dévoués à ses volontés, il se rendit pendant une nuit avec eux à la retraite de St-Lambert, qui était à l'endroit qui depuis prit le nom de Liege, et qui alors n'était qu'une espèce de hameau de peu d'importance, villam parvi adhuc nominis (16) et s'étant précipité dans la maison, ils pénétrèrent dans la chambre de l'évêque, qui s'étant réveillé et levé au bruit, saisit dans le premier mouvement une épée, qu'il jeta, pensant qu'il ne pouvait recourir, qu'aux armes spirituelles, c'est-à-dire, à la prière. Mais Pierre et Andolet (les voilà bien nommés) opposèrent une vive résistance aux assaillans non-seulement pour soustraire Lambert au coup qu'on lui préparait, mais pour défendre leur propre vie, croyant bien que c'était à eux qu'on en voulait pour venger la mort de ceux qu'ils avaient immolés à leur colère (17). »

Que l'on confronte maintenant ce récit avec celui que j'ai rapporté plus haut. Dans celui que je viens de copier fidèlement et qui est d'un contemporain, on ne voit ni le nom de Pépin, ni celui d'Alpaïde. Si l'auteur s'était borné à garder un silence absolu à cet égard, on pourrait croire que c'était dans la crainte d'offenser, sinon Pépin, qui était mort depuis trente ans, du moins ses descendans. Mais il s'explique, ou plutôt, ce n'est pas lui, c'est St-Lambert même qui parle, quand, au moment où il allait recevoir le coup fatal, il exhorte ses deux parens à subir patiemment la mort pour expier le crime dont ils s'étaient rendus coupables (18). Voilà certainement la cause de l'événement dont il s'agit expliquée d'une manière qui ne doit laisser aucun doute, c'est-à-dire, par les propres paroles de Lambert, fidèlement rapportées par un historien, dont le récit porte un caractère de vérité qui annonce qu'il était bien convaincu de la vérité du fait; et si, après cela, on vient avancer que quoique Lambert ait dit aussi clairement à ses deux parents que c'était pour venger la mort de Gal et de Riold, que Dodon s'est armé, on ne peut pas inférer qu'il n'existait aucune autre cause du martyre du saint êvèque, je me borne à répondre que dès qu'on peut tirer de pareilles inductions du silence d'un écrivain, on peut tout supposer en histoire, et en faire une science systématique et arbitraire, et il suffira toujours de dire, quand on voudra présenter un fait sous un point de vue favorable à une opinion ou à un parti, que si un historien a tu telle cause ou telle circonstance, c'est qu'il n'a pas voulu ou qu'il n'a pas osé la rapporter. Mais je crois avoir assez démontré que cette crainte qu'on suppose aux historiens qui n'ont pas compromis les noms de Pépin et d'Alpaide, n'a pas dù les arrêter plus que d'autres qui n'ont pas été si timides ni si circonspects.

D'après toutes ces circonstances, il me paraît raisonnablement, j'oserais presque dire juridiquement démontré qu'Alpaïde a été absolument étrangère à cet assassinat. Le récit de Godeschal est simple, naturel; c'est le ton d'un homme qui raconte bonnement ce qu'il croit. Celui des écrivains des temps postérieurs où l'on trouve le nom d'Alpaïde compromis, parait, au contraire, forcé, confus; ils ont tout mélé, tout confondu. Parmi les modernes, Fisen n'a fait que copier Renier. Foullon, après eux, ne sachant trop que faire, s'empara des deux versions, qu'il tâcha, par une espèce de tour de force, de lier tellement l'une à l'autre, qu'il n'en fit qu'une même histoire. C'est ce qu'on peut appeler un roman historique. En voyant la manière dont les faits ont été arrangés, je dirais mieux défigurés et dénaturés par tous ces écrivains, on ne peut guère douter qu'ils n'aient eu l'intention de faire une histoire adaptée à un système imaginé pour flétrir la mémoire d'Alpaïde et de Pépin. C'est sans doute pour appuyer ce système qu'ils ont dit que Dodon était frère d'Alpaïde; car qui a avancé cette circonstance? Ce n'est pas l'ancien anonyme, ce n'est pas Godeschal ceux-ci se bornent à dire, comme je l'ai rapporté, que ce Dodon était un des seigneurs de la cour de Pépin. Or, je le demande, s'il avait été le frère d'Alpaïde, cela devait être connu de tout le monde, et les historiens, qu'on prétend que la crainte a forcés au silence, n'avaient-ils pas un véritable sujet de craindre de déplaire à Alpaïde en nommant Dodon, si réellement il avait été son frère? car enfin, n'était-ce pas compromettre indirectement cette princesse? Citer le nom de l'exécuteur du complot, n'est-ce pas, par un retour naturel d'idées, rappeler à l'esprit celle de l'auteur? Ces hommes qu'on fait si timorés, eussent donc été bien inconséquents. On ne doit pas le supposer, et l'on peut au contraire inférer de ces réflexions, qui se présentent si naturellement, que Dodon n'était pas le frère d'Alpaïde. Qui sont ceux en effet qui l'ont dit? C'est, selon le père Pagi, dont je parlerai plus bas, Anselme qui l'a avancé le premier. Je crois que Pagi se trompe, et que c'est plutôt le chanoine Nicolas, et après lui le moine Renier, qui l'un et l'autre, je pense, étaient antérieurs, mais de fort peu de temps à Anselme. Ainsi peu importe; car ils écrivaient à peu près à la même époque, de l'an 1120 à 1150. C'est Sigebert de Gembloux, qui a copié ce que les derniers avaient dit sur la cause du martyre de St-Lambert, sans rapporter celle qui avait été transmise par Godeschal. Pourquoi encore cette réticence? S'il y avait de la bonne foi, ne fallait-il pas rapporter l'une et l'autre? Mais non; il fallait tout arranger ou plutôt tout déranger pour assortir la chose au système ou au parti de ceux qui ne voulaient voir la chose qu'à leur manière. Qui encore? C'est Gilles d'Orval, qui est encore celui qui parait avpir le plus altéré la vérité. C'est ce que lui reproche en termes assez durs le baron Le Roi (19), de sorte que plus on s'éloigne du temps de l'événement, plus on dirait qu'on s'éloigne de la vérité.

C'est sans doute encore dans la même intention qu'ils ont tous rapporté que Dodon, par un châtiment visible du ciel, fut rongé de vers, d'autres disent de vermine, et déchiré de douleurs d'entrailles si vives, qu'il vomit ses intestins; Bouille ajoute même son âme. Je ne nie pas le fait (quant aux intestins, bien entendu), il est possible. L'abbé Velly, Hist. de France, tom. 1, pag. 312, le rapporte même sur la foi des chroniques liégeoises; mais il est bon de faire attention que cet historien observe que cette maladie vermiculaire était alors fort commune, et comme épidémique.

Tous ces légendaires qu'ont-ils donc fait autre chose que dénaturer les faits et embrouiller l'affaire? et en les jugeant ainsi je suis d'accord avec un écrivain très religieux, qui en parle dans le même sens; c'est dom Mabillon, qui, dans son commentaire sur la vie de St-Lambert, insérée dans les actes des saints de l'ordre de St-Benoit, après avoir rapporté les noms des différens écrivains de la vie du saint évêque, qui sont ceux que j'ai cités, ajoute qu'il eût été plus heureux, s'il n'en avait eu qu'un, mais qui eùt été plus exact. Felicior certè futurus, si vel unicum, eumque diligentem habuisset. Mais, dit ce savant et pieux bénédictin, il est arrivé à St-Lambert ce qui est arrivé à tant d'autres saints, c'est-à-dire, que, quand, pour toujours renchérir les uns sur les autres, les auteurs font tous leurs efforts pour donner du lustre, de l'éclat et du merveilleux à la vie et aux actions de leurs héros, ils font précisément le contraire; ils les défigurent et les souillent par les fables, les inepties et les mensonges grossiers dont ils les surchargent (20).

Je suis encore d'accord avec un autre écrivain, non moins distingué par sa piété que par sa profonde science; c'est un prince de l'église, Godeau, évêque de Vence, qui dit positivement que ceux qui ont cru qu'Alpaïde avait fait assassiner St-Lambert, se sont appuyés sur des narrations fabuleuses ou corrompues.

Je suis d'accord avec le savant et judicieux Antoine Pagi, cordelier, qui a relevé avec une critique si sage les nombreuses méprises de Baronius. Il n'hésite pas d'accuser d'imposture les différents auteurs des vies de St-Lambert, à commencer par Anselme, qui, dit-il, pour nouer le tissu de sa fable et la rendre plus vraisemblable, feignit le premier qu'Alpaïde était la soeur de Dodon. Renier inventa d'autres particularités, et Gilles d'Orval, continue le père Pagi, plus coupable encore, a amplifié la narration d'Anselme, en omettant ce qu'il y a de plus croyable, et en recueillant ce qu'il y a de plus douteux. Ce jugement sur le moine d'Orval est bien conforme à celui qu'en porte le baron Le Roi, que j'ai cité plus haut.

Après ceux-ci, je pourrais citer Fleuri, Baillet, les Bollandistes, les auteurs de l'Art de vérifier les dates, qui, tous, ont attribué la mort de Lambert, non aux instigations dAlpaïde, mais aux démêlés que les parens de Dodon eurent avec ceux de Lambert; et c'est bien plutôt, je pense, à ces sages écrivains qu'il faut s'en rapporter, qu'à tous ces pesans chroniqueurs du moyen age, souvent égarés par une crédulité aveugle, ou entraînés, tranchons ici le mot, par un fanatisme grossier, qui, écrivant dans un siècle où la saine critique était absolument inconnue, où il eût peut-être même été dangereux de l'employer, rapportent les faits tels qu'ils les avaient appris, c'est-à-dire, comme ils étaient passés de bouche en bouche, sans examen, sans discussion, sans en chercher les preuves, ou selon qu'ils les trouvaient mieux assortis à leurs préjugés, à leur crédulité et à leur système. Je remarque d'ailleurs que ce ne sont que les écrivains liégeois, même ceux des derniers temps, qui, toujours dans l'intention de donner du lustre à leur église, ont accusé Alpaide d'être l'instrument de la mort de St-Lambert, afin de le présenter, non comme victime d'une querelle particulière, mais comme martyr d'un zèle apostolique. Mais les critiques modernes et les écrivains étrangers, dégagés de toute prévention, de toute partialité, de tout esprit national, ont pesé les preuves, ont distingué ce qui était absurde de ce qui est raisonnable, n'ont, en un mot, cherché que la vérité, et c'est dans ceux-là, selon moi, que ceux qui aiment à la découvrir, iront la trouver.

Je sais qu'un savant liégeois, René-François de Sluse, chanoine de St.-Lambert, a publié sur ce sujet une dissertation (21), dans laquelle il tache de fixer le temps et d'assigner la cause du martyre de son saint. Mais, en le lisant attentivement, on ne peut guère se méprendre sur son intention, et l'on s'aperçoit aisément qu'il, cherche à jeter du lustre sur l'histoire de son pays, et que c'est pour cela qu'il accompagne la mort du patron de Liège, de toutes les circonstances qui lui donnent le caractère d'un véritable martyre. II s'efforce donc, non par des faits avérés, mais par des probabilités et des apparences, de prouver que la véritable cause de l'événement a été l'influence et le crédit d'Alpaïde. Mais le silence de Godeschal l'embarrasse; car c'est un terrible argument contre son système. Il cherche donc, comme Renier, à expliquer ce silence par les ménagemens politiques que devait employer cet écrivain, pour ne pas choquer la race puissante des Pépins. Je crois, pour mon compte, avoir suffisamment démontré la faiblesse de cette raison, par celles que j'y ai opposées plus haut.

Du reste, que St.-Lambert soit honoré comme martyr, j'y souscris: l'église de Liege l'honore comme tel; elle a bien toujours également honoré comme tels Pierre et Andolet, et leurs reliques étaient encore dans les derniers temps exposées à la vénération publique à cote de celles de St-Lambert; et l'on sait d'ailleurs que, dans ce temps et longtemps après, on donnait le titre de martyr à ceux qui, après avoir bien vécu, périssaient injustement. Or, que St-Lambert ait été injustement assassiné, je le crois; mais cela ne prouve pas que c'est Alpaïde qui en a été la cause.

J'ajouterai encore ici un témoignage que je regarde comme bien respectable; c'est celui du père Daniel Papebroch, bollandiste, qui, à l'occasion de Ste-Adèle, patrone d'Orp-le-Grand, dit, en parlant de l'assassinat de St-Lambert, qu'Alpaïde n'y eut aucune part, comme l'ont cru les écrivains modernes, contre l'autorité de Godeschal, contemporain: nullam in eo scelere partem habente Alpaïde, ne quidem occasionalem, ut posteriores scriptores passim credidere, contra proximioris Godeshalki fidem. Acta SS. Belg. sel., tom. 2, p. 634, n. 6. On voit que ce savant bollandiste regarde aussi l'autorité de Godeschal, comme la plus sure.


3. Qu'est devenue enfin Alpaïde?


Ce n'est que pour ne laisser rien ignorer de tout ce qu'on a écrit sur cette princesse, que je rapporterai ce qu'on a inventé sur sa fin. N'a-t-on pas dit qu'un frère de St-Lambert, alla, après la mort de Pépin, arracher Alpaïde de sa retraite d'Orp-le.Grand, et qu'il la jeta dans un grand feu, où elle périt? Augustin Wichman, Brabant. Mariana, lib 3, cap. 30, p. 690, le dit positivement. Il appelle ce frère de St-Lambert le comte Plaudus (22). Un manuscrit que j'ai sous les yeux, sans date et sans nom d'auteur, rapporte aussi que Landris, comte de Looz, frère de St.-Lambert (23) (il y a, comme on voit, différence dans le nom), fit brûler Alpaïde. C'est le titre d'un chapitre, et voici comment le fait y est raconté.

« Un jour que cheuarchoit Landris avec ses gens à Orpes, où Alpaïs estoit demourante, laquelle Landris hayoit (haissait) à mort pour la meurde de S. Lambert, son frère, qu'elle auoit fait faire et procuré: pourquoy il la feit prendre et brusler en ung feu tellement que personne ne la sceut reschoyr (secourir) ni en dissuader ledit Landris, tant il la hayoit. »

On sent qu'il faut reléguer ce récit au rang de ces misérables contes dont sont remplis tous ces mauvais recueils aussi je ne rapporte celui-ci que pour faire comprendre que c'est comme par une sorte d'acharnement à poursuivre la mémoire de cette princesse, qu'on s'est en quelque sorte plu à imaginer les contes les plus absurdes, qui, après tout, ne peuvent que faire manquer le but de ceux qui les inventent; car à force de surcharger leurs histoires pour leur donner une apparence miraculeuse, ils ne les ont rendues que ridicules et incroyables. Qui nimis probat, nihil probat.

La vérité est qu'Alpaïde se retira à Orp-le-Grand, ou elle fonda une abbaye de religieuses, qui fut détruite par les Normands. C'est ce qu'attestent tous les historiens. Le baron Le Roi dit que le tombeau d'Alpaïde avait existé dans la grande église d'Orp-le-Grand, avec cette inscription: Alpaïs comitissa conthoralis Pipini Ducis, mais qu'il n'en restait plus de vestiges. Cependant Miraeus, dans ses Fastes belgiques, dit que ce tombeau a été découvert dans l'église paroissiale d'Orp-Ie­Grand, devant l'autel de la Vierge, l'an 1618. C'est ce que le baron Le Roi ignorait sans doute. Mais ce qui était aussi généralement ignoré, c'est que le 21 mars 1674, cette église fut entièrement consumée par les flammes avec tout ce qu'elle renfermait, les autels, qui étaient au nombre de sept, ainsi que la tour avec les cloches. Cet incendie a été constaté par l'extrait d'un registre déposé dans les archives de cette paroisse. J'en transcris ici en note le contenu littéral (24).

S. M. le roi des Pays-Bas, informé de l'existence présumée de ce monument dans cette église, a chargé S. E. le ministre de l'instruction publique de demander à cette académie son avis sur cet objet. La compagnie s'est en conséquence concertée, par l'intermédiaire de son secrétaire perpétuel, avec M. le gouverneur du Brabant méridional, qui a délégué M. le commissaire du district de Nivelles, dans le ressort duquel est situé Orp-le-Grand, pour faire toutes les perquisitions qu'on jugerait convenables à l'effet de parvenir, s'il était possible, à la découverte de ce tombeau. Ce commissaire s'est en conséquence rendu sur les lieux, et à l'intervention de M. le maïeur d'Orp­le-Grand et de M. le desservant, il a procédé à cette opération, en faisant les fouilles et les démolitions qu'on a cru nécessaires. Mais toutes les recherches ont été inntiles, comme il en conste par le procès-verbal qui en a été dressé le 20 novembre 1823. Le tombeau d'Alpaïde aura donc été consumé avec le reste dans l'incendie de 1674.

Mais quand Alpaïde s'est-elle retirée du monde? Les uns en fixent l'époque avant, les autres après l'assassinat de St.-Lambert; car on varie beaucoup sur la date de cet événement. Les uns la fixent à l'an 696, les autres, à l'an 699; ceux-ci, à l'an 700; ceux-là, 707 et 708; les Bollandistes, à 709; et c'est ce qui fait dire positivement à Adrien Jourdan qu'Alpaïde n'eut point de part à l'assassinat de St.-Lambert, puisquelle était séparée de Pepin depuis le commencement du siècle, et retirée dans un monastère. Cette preuve serait décisive, si la date de la mort de St-Lambert était certaine; mais comme Jourdan n'en est pas plus sur qu'un autre, on ne peut pas adopter aveuglément son raisonnement. Miraeus dit au contraire que ce ne fut qu'après la mort de Pépin (il mourut en 714) qu'Alpaïde se retira à Orp. Dans ce conflit de contradictions, il faut donc, à défaut de preuves positives sur l'époque, se borner à rapporter le fait, savoir, qu'Alpaïde se retira à Orp, qu'elle y mourut, et qu'elle y fut enterrée, puisqu'on y a retrouvé son tombeau.


4. Alpaïde, comtesse de Hougarde, a donné à l'église de St-Lambert les terres de Hougarde, de Lumai, de Tourines, etc.; elle a fondé dans le premier de ces villages un chapitre de chanoines, et a donné son comté de Jodoigne au comte de Brabant, à condition qu'il se déclarerait avoué de l'église de Hougarde.

Est-ce Alpaïde, mère de Charles-Martel?


Non. Miraeus, Divaeus et d'autres l'ont cependant avancé; mais ils se trompent, confondant ainsi deux dames de ce nom. Cette Alpaïde, comtesse de Hougarde, est différente de l'autre: elle a réellement légué à l'église de Liège les terres dont je viens de parler, et la preuve s'en trouve dans l'inscription qu'on lit sur une grande pierre de marbre qui recouvre un tombeau dans l'église de St-Paul à Liège, et où l'on voit taillée la figure d'une femme, avec une inscription latine; qui signifie en français: Ici git. Alpaïde, comtesse de Hougarde, qui nous a légaté Jodoigne et Tourines, et qui a fait de son propre château de Hougarde une église où elle a fondé des prébendes.

J'ai cru devoir, en finissant, relever encore cette bévue, pour tacher, autant que possible, à travers tant d'absurdités, d'incertitudes et de contradictions, d'éclaircir la vérité sur toutes les circonstances relatives à ce point si embrouillé de notre histoire.


FIN.


(1) Pipinus Plectrudem uxorem suam legitimam repudiavit eique superinduxit puellam elegantem, Alpaidem nomine... Et factum est in oculis Franciae publicum hoc adulterium. Cap. 14.

(2) Puellam nobilem et elegantem, nomine Alpaïdem, superinduxit legitimae conjugi suae Plectrudi. Cap. 16.

(3) Carolum-Martellum illegitimum ex Alpaïde pellice genitum. Cap. 25.

(4) Pipinus aliam duxit uxorem nobilem et elegantem, nomine Alpaidem. Cap. 102.

(5) Ce fut au commencement de ce règne, dit encore cet historien de bonne foi et de bon sens, que Pépin se sépara de Plectrude, sa femme, et épousa Alpaide... On ne doit point douter qu'il n'ait épousé Alpaïde dans toutes les formes. Hist. de France et l'orig, de la maison royale, tome 5, p. 569.

(6) Notantum est fuisse morem Francis uxores malè convenientes bonâ gratiâ dimittere, ita ut vir et uxor alterius matrimonii contrahendi haberent potestatem. Rer. Franc., tom. 3, lib. 23, p. 379.

(7) Unusquisque ex ipsis sive ad servitium Dei in monasterio, aut copulae matrimonii sociare se voluerit, licentiam habeat. Lib. 2 cap. 30.

(8) Nec reges modò, qui quidquid libuerit licere sibi putant, ita facie bant: verumtamen privati, quos uxorum suarum fastidium ceperat, beneficio legis utebantur. Vales. Ibid.

(9) Quamquam severa illic matrimonia, nec ullam morum partem magis laudaveris: nam prope soli barbarorum singulis uxoribus contenti sunt, exceptis admodum paucis, qui non libidine, sod ob nobilitatem, plurimis nuptiis ambiuntur. Germ, cap. 18.

(10) Nicol. canon. in vita S. Lamberti, cap. 16. Rener. S. Laurent. monachus, in vita ejusd., cap. 18.

(11) Nicol. ibid., cap. 17. Rener. ibid., cap. 19 et 21.

(12) Anselm. cap. 11, ap. Chapeauv., tom. I, p. 117. AEgid. am. vall. ib., p. 119.

(13) Gesta quidem ejus veraciter prosecutus, de causa martyrii parum Iibero ore locutus est: quod hac de causa fecisse creditur, ne sui temporis regibus culpam majorum suorum videretur exprobrare. Cap. 28.

(14) Illud autem est observandum a Metaphraste scriptas fuisse historias de vitis sanctorum, multis additis ex proprio ingenio, non ut gestae resfuerunt, sed ut geri potuerunt. Addit Metaphrastes multa colloquia sive dialogos martyrum cum persecutoribus, aliquas etiam conversiones astantium paganorum in tanto numero, ut incredibiles videantur: denique miracula plurima et maxima in eversione templorum et idolorum et occisione persecutorum, quorum nulla est mentio apudveteres historicos.

(15) Multa de Pipino et Alpaïde fabulosa scripta fuere. Topograph. hist. Gallo-Brab., lib. 7, P. 249.

(16) Godesch. cap. 7 .

(17) Duo autem familiae suae praestantiores, et apud ipsum habiti gratiae potioris, Petrus et Andoletus vocati, hostibus obsistere nitebantur ... et hoc quidem pontificis dilectioni et ereptioni praestabant: sibi etiam providebant, quorum mors petebatur in ultionem illorum quos supra sibi infestos, extinxerant. id. cap. 8.

(18) Recordamini verò vos reos fuisse criminis hujus cujus nunc ultio expetitur; idcirco non subterfugiatis praesentis mortis correptione expiari, certi quòd Deus puniat omne peccatum quod ad poenam vel pœnitentiam res conscientia non adduxit.

(19) At ubi sermo de martyrii causis instituit, prae ceteris veritatem odisse visus est. Topogr. hist. Gallo-Brab., lib. 7, p. 252.

(20) At S. Landeberto id quod pluribus sanctis accidit, ut dum auctores, alius post alium, ipsius res gestas illustrare exornando amplificandove moliti sunt, eas e contrario incertis ac fabulosis narrationibus ineptè obscursrunt atrocibusque mendis fœdarunt.

(21) De tempore et causa martyrii S. Lamberti, tungrensis episcopi, diatriba chronologica et historica.

(22) On lit en effet dans la vie de St-Hubert que le frère de St-Lambert, appelé Plaudus, comte d'Osterne, a vengé la mort de son frère vers l'an 725. Qu'est-ce que ce comté d'Osterne? Les opinions varient à ce sujet; mais cette discussion serait étrangère à l'objet de ce mémoire. On peut voir au reste le tome I des Act. SS. Belg., p. 507.

(23) Je doute que les comtes de Loos remontent si haut. Mantélius, écrivain judicieux, qui a donné une bonne histoire du comté de Loos, place l'origine de ces comtes à Charlemagne.

(24) Voici cette pièce, signée pour copie conforme à l'original par M. Michotte, maïeur, et M. Defays, desservant d'Orp-le-Grand.

Ad perpetuam rei memoriam.

Notum sit quòd anno 1674 die vigesimâ primâ martii, quae erat vigilia jovis sanctit, sive cœnae Domini, inter undecimam et duodecimam horam matutinam, incendio infausto consumpta fuerit ecclesia nostra Orpiensis,. quae tempore belli repleta erat mobilibus totius panchiae, quae omnia consumpta fuerunt, occasione, ut fertur, infantis sine baptismo defuncti, qui offerebatur ante altare Sanctae Adiliae, ut per interceasionem praescriptae a Deo gratiam vitae et baptismi reciperet. Omnia altaria quae erant septem, navis, turris cum campanis et omnia fuerunt igne consumpta. Nunc vero eccesia nostra, quam Deus conservare dignetur, fuit multis expensis per decimatores restaurata. Ita accepi a Deodato Dumoulin aetatis suae 77. Ita testor hac 25 feb. 1738. Inferiùs est signalum. F. B. Du Bois, past. in Orpio.

Pour copie conforme son original faite à Orp-le-Grand, ce 23 décembre 1823. Signés, J. D. J. De Fays, desservant d'Orp-le-Grand, 1825. Michotte, maïeur.

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