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Les Bénédictines de la Paix Notre Dame à Liège

Abbaye Paix Notre Dame à Liège

photo Clem. DESSART

PAIX NOTRE-DAME, nom plein de saveur en sa forme légèrement archaïque. La Paix Notre-Dame, oui c'est bien cela; car l'impression qu'on éprouve très vive lorsqu'on pénètre dans cette maison qui possède une si belle tradition, un si riche passé de trois siècles, c'est qu'on y respire la paix, la vraie paix, la paix surnaturelle, la paix qui vient du Christ et de sa Mère. (1)

LE CLOCHER DE L'EGLISE VU A TRAVERS UN VITRAIL

Claires et joyeuses, les notes descendent du clocher qui dresse sa gracieuse silhouette au-dessus des toits du boulevard d'Avroy.

Ainsi, plusieurs fois le jour, depuis quelque trois siècles elles appellent à la prière; et dès que leur voix se fait entendre, les bénédictines s'alignent dans le cloître et se dirigent vers le choeur pour la sainte psalmodie.

Le passant, lui, s'arrête et contemple la jolie façade de l'église la mieux réussie de toutes celles de nos églises bâties aux XVIIe et XVIIIe siècles. » (2).

Dans son prolongement, un peu en retrait, une double rangée de grandes fenêtres court tout le long d'un vaste bâtiment. C'est le quartier réservé aux hôtes.

En vain, l'oeil cherche-t-il le monastère. Rien n'apparaît des lieux claustraux. Pour les atteindre, il faut pénétrer à l'intérieur. Mais quelle surprise alors pour le visiteur!

L'espace se dilate; un large domaine s'étend en profondeur.

Nous voici au préau. Dans un parterre de roses, apparaît Notre-Dame, toute souriante, toute accueillante.

Tout autour, le cloître ouvre ses grandes verrières et par un de ses angles, s'adosse au chevet de l'église.

La paix, le silence règnent ici, invitant à la prière et à la méditation.

LES COLOMBES L'ALLEE DES PEUPLIERS
LE VERGER LE TENNIS DE L'ECOLE

Au delà, ce sont les jardins: cours de l'Ecoe avec ses tennis ombragés; jardin anglais aux grands arbres, aux parterres multicolores où butinent les abeilles, chantent les oiseaux, roucoulent les colombes, hôles préférés de la soeur jardinière.

A gauche, de l'autre côté d'une barrière marquant la cloture, on entre en plein verger: deux vaches y paissent sous les arbres chargés de fruits.

Sommes-nous vraiment au coeur de la cité trépidante et non pas dans quelque lointaine solitude champêtre?

Les moniales qui ont fixé leur séjour dans cet oasis de paix, appartiennent à la réforme de Madame de Werquigneul, réforme introduite à Liège, en 1627, par des Bénédictines de Namur.

Seule des nombreux monastères établis dans la cité des Princes-Evêques, leur abbaye a survécu à la Révolution, grâce au courage de la plus jeune de ses moniales d'alors, Mme Constance Greck qui avec deux de ses consoeurs, y demeura malgré l'ordre d'évacuation, malgré l'occupation militaire des lieux claustraux.

Affiliée à la Congrégation bénédictine belge, la Paix Notre-Dame, comme le veut Saint Benoît, est l'Ecole du service du Seigneur.

« Appelées, déclarent les constitutions, par leur vocation même à prêter leur voix à la Sainte Eglise, dans le chant et la récitation de la prière qu'Elle adresse chaque jour à Dieu, les moniales doivent concevoir toujours une plus haute idée de cette fonction.

Elles s'appliqueront à bien comprendre les psaumes et généralement toutes les prières de la Sainte Eglise, afin de s'élever ainsi à la contemplation des choses divines qui est l'essence même de leur vie.

Elles seront très soigneuses d'apprendre le chant de l'Eglise et les rubriques afin d'être en état d'accomplir le plus parfaitement possible ce que le Saint Patriarche appelle l'oeuvre de Dieu. »

Se conformant à ce point de leur Régle, les moniales suivent des cours de latin, s'exercent au chant grégorien et s'adonnent à l'étude de la Sainte-Ecriture.

Le zèle de l'Oeuvre de Dieu n'a jamais fait défaut à la Paix Notre-Dame. Même aux jours les plus néfastes de la guerre, l'office n'a jamais été ni réduit, ni interrompu. Dans la pénombre des souterrains, dominant le sifflement des bombes qui rasaient le monastère, le fracas des murs qui s'écroulaient, les lugubres modulations des sirènes, la prière de l'Eglise a, comme au temps de la Révolution, continué de monter chaque jour vers le Très-Haut.

ORA ET LABORA. A la prière, succède le travail; car, avertit Saint Benoît, l'oisiveté est ennemie de l'âme et, ajoutent les constitutions, « le travail, étant après l'office divin le principal fondement de la vie monastique, les soeurs s'y adonneront avec toute l'ardeur dont elles sont capables »

Ce zèle s'exerce tout d'abord dans l'éducation de la jeunesse. Travail ardu, certes. Saint Benoît ne dit-il pas dans sa Règle, que rude et difficile est la tâche de conduire les âmes à Dieu? Mais combien grande aussi!

L'enfant, à la Paix Notre-Dame, comme dans tout monastère bénédictin, s'épanouit dans un milieu essentiellement familial. Elle participe, dans une certaine mesure, aux offices liturgiques, afin de se former tout naturellement à la piété large et vivifiante de l'Eglise. S'inspirant des grands principes de la Règle bénédictine, on l'accoutume à vivre dans un esprit profondément surnaturel, à pratiquer une observance souple et joyeuse, à aimer la simplicité, la droiture. N'est-ce pas, en quelque manière, dans une sphère modeste, continuer l'oeuvre de christianisation entreprise par Saint Benoît?

Et en cela, comme l'a dit si judicieusement le Révérendissime Abbé Dom Bernard Capelle, « les moniales de la Paix Notre-Dame restent fidèles à la tradition de leur Ordre, celle de Saint Benoît lui-même, de Saint Wilfrid, de Saint Boniface, de Théodulphe, celle de l'ardente et douce Lioba, tradition qui ne fait que grandir dans notre Ordre. La plupart des cloîtres bénédictins de moines et de moniales sont aujourd'hui voués à l'Ars Artium de l'éducation des enfants. (3).

Les jeunes religieuses, montrant des dispositions pour l'enseignement et n'ayant pas les diplômes requis, vont à Louvain, conquérir à l'Alma Mater le titre de licenciées ou font à Liège même leurs études de régentes.

Arrivent les vacances, maîtresses et étudiantes, fatiguées par les labeurs de l'année scolaire, sont envoyées dans une abbaye-soeur afin d'y goûter, dans l'air pur de la campagne, un repos bien mérité. Quant aux moniales, non appelées à remplir un emploi à l'Ecole Abbatiale, elle trouvent dans les multiples offices du monastère, l'occasion d'exercer leur activité.

S'agit-il des travaux ménagers? Les soeurs converses leur apportent un dévoué concours.

Préposée à la réception des hôtes, la mère hôtelière veille, en outre, à la bonne organisation des réunions d'oblates bénédictines, de religieuses enseignantes, de membres d'Action Catholique et d'autres encore qui, tout au long de l'année, viennent demander l'hospitalité à la Paix Notre-Dame.

A la bibliothèque, comme à l'atelier de reliure, les livres réclament les soins assidus de celles qui en ont charge. L'art enfin, qui a toujours été en honneur dans l'ordre bénédictin, se donne libre carrière au service de l'Oeuvre de Dieu. Les musiciennes se forment au jeu de l'orgue dont les accords rehaussent la majesté de l'office divin. Les doigts habiles brodent les ornements sacrés. Les expertes en peinture enluminent finement les livres liturgiques.

Dans cette variété d'occupations, chacune a la place qui correspond à ses talents et à ses forces.

Bien que les oeuvres soient diverses, unique est l'esprit qui anime tous les coeurs. Cet esprit propre à la Paix Notre-Dame est un esprit de paix, de joie, de simplicité dans une atmosphère familiale.

« Les Moniales, recommandent les Constitutions, ne doivent jamais perdre de vue l'intention du sage législateur qui a voulu unir dans ses disciples, l'exactitude de l'observance monastique à la dilatation du coeur et qui a su tempérer ses règlements par la plus paternelle bonté.

Que le Monastère soit donc une famille qui l'emporte sur toutes les familles du monde en union, en affection, en tendresse, en oubli de soi même, afin que Dieu y soit honoré en toutes choses ! »

Deux fondations ont étendu le rayonnement de la Paix Notre-Dame: la première, en Angleterre, dans l'île de Wight; la seconde, plus récente, à Louvain. Toutes deux ont été élevées au rang d'abbayes et sont en pleine prospérité.

Puisse la Paix Notre-Dame, seule héritière, dans la cité liégeoise, d'un long passé bénédictin, continuer à y vivre la règle du grand patriarche d'Occident, sous la protection de la Regina pacis qui, depuis trois siècles et demi, n'a cessé de l'entourer de sa maternelle protection.


(1) Dom Flicoteau O. S. B., prieur d'Oosterhout.

(2) Saumery, Les délices du Pays de Liège.

(3) Conférence de Dom Capelle, à l'occasion du centenaire de Constance Greck.

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