Pour assurer l'équilibre de la voûte jetée sur la nef principale des églises, l'architecture romane avait dû recourir à l'emploi d'épaisses maçonneries portantes et contrebutantes qui la contraignirent à se contenter d'étroites et rares ouvertures percées dans ses murailles. Elle fut, selon la phrase de de R. Schneider, « la lutte dramatique de la lumière et de l'ombre, l'une cherchant à s'épandre dans le mouvement, l'autre, s'accumulant à l'abri des masses qui consolident. »
Il était réservé à l'art gothique de résoudre le problème ainsi posé de l'éclairage des édifices religieux. Il y parvint en créant le système constructif de la voûte sur nervures ou croisées d'ogives, qui permet de bâtir en hauteur. Ce système a pris naissance dans l'Ile-de-France, qui a gardé des traces de la période d'essais. Du jour où l'abbé Suger, ministre des rois de France Louis VI et Louis VII, eut montré, en 1144, à une assemblée composée de rois et d'évêques, d'abbés et de seigneurs, les ressources et les avantages que l'on peut tirer de l'édifice construit suivant ces principes, l'abbatiale SaintDenis. La découverte gagna, d'un côté, la Bourgogne, de l'autre, la Picardie et la Normandie, et rayonna bientôt dans toute l'Europe occidentale, notamment en Belgique, en Allemagne et en Angleterre. A Liège, le procédé fut employé vers 1170 pour la construction de l'église Saint-Jacques, dont le narthex subsistant laisse voir des croisées d'ogives bien apparentes; il fut ensuite continué à Saint-Christophe (1241) puis à Saint-Antoine (1244). C'était fini chez nous, de l'influence rhénane. Cologne avait été supplantée par les villes nouvelles de la Baltique: Hambourg, Brême et Lubeck, qui étaient trop éloignées pour nous entraîner dans la ligue commerciale qu'elles avaient fondée. Notre attention se tourna vers les riches cités des Flandres et s'orienta aussi vers la Champagne, où huit foires annuelles florissantes furent, durant deux siècles, le rendez-vous général des marchands européens. Notre voie d'accès était la grande chaussée romaine, allant de Cologne à Bavai, par Maestricht et Tongres, puis, de Bavai à Reims. Liège, métropole ecclésiastique qui avait brillé d'un si vif éclat aux XIe et XIIe siècles, au point d'être devenue la première cité de la Lotharingie, ne put survivre comme foyer artistique, à la chute de l'Eglise impériale. Désormais, ce fut Tournai qui commanda aux Pays-Bas.
Cette parenthèse historique était nécessaire pour montrer à la suite de quels événements, dans la construction de nos églises, nous ne suivîmes plus l'Allemagne qui, lente à évoluer, éleva ses premières cathédrales en style roman, alors que, partout ailleurs, sauf en Italie, la formule gothique était appliquée.
Dans les églises gothiques, une suite de voûtes d'arêtes remplacèrent les longues voûtes en berceau du style roman, et formèrent autant de divisions qu'il y a d'arcades dans la nef qu'elles couvrent. Leur ossature comporte deux arcs doubleaux, deux arcs formerets et deux arcs diagonaux, sur lesquels s'appuient des voûtains, indépendants les uns des autres. Ainsi appareillées sur nervures entre-croisées, elles ramènent toute la charge de leur maçonnerie sur quatre supports peu encombrants. Leur légèreté donna la faculté de réduire l'épaisseur des piliers et leur indépendance permit d'ajourer les murs, qui ne furent plus qu'un remplissage et non un soutien.
L'idée de la croisée d'ogives a dû se présenter aux maîtres d'oeuvre médiévaux comme une conséquence naturelle des principes appliqués dans leurs constructions: rendre permanents les cintres qui servaient à l'édification de la voûte en leur substituant des arcs en pierre. L'ogive est un arc de renfort, comme l'explique très bien son étymologie: augere, en latin, signifie augmenter, accroître, renforcer. Elle est à la voûte d'arêtes, ce que le doubleau est à la voûte en berceau.
Vues à une certaine distance et considérées seulement depuis leur naissance jusqu'à leur point d'intersection, deux branches d'ogives ont l'aspect d'un arc brisé. C'est de là que vient, sans doute, l'habitude prise d'appliquer, mais d'une manière abusive cependant, le nom d'ogive, à la forme d'arc brisé, qu'un souci naturel d'harmonie fit employer pour couronner toutes les ouvertures des édifices gothiques comme, dans le style roman, la voûte en berceau avait généralisé l'emploi de l'arc en plein cintre. Consacré par un long usage, le mot ogive sert à désigner l'arc brisé qui recouvre une porte, une fenêtre ou une arcade.
Les poussées localisées des voûtes sur croisées d'ogives sont neutralisées au moyen d'arcs-boutants, qui sont toujours placés au droit des piliers et soutiennent la partie de la nef qui s'élève au-dessus des bas-côtés. Ils trouvent leur origine, ou bien, dans une section de la voûte en demi-berceau, ou bien, dans la cloison de maçonnerie appelée diaphragme, élevée au-dessus des arcs doubleaux employés dans la construction des bas-côtés. Ces espèces de bras raidis contre les murs transmettent la poussée qu'ils reçoivent, dans des contreforts extérieurs, qui l'envoient se perdre dans les profondeurs de leurs culées.
Ainsi, c'est la voûte sur croisées d'ogives et son adjuvant constructif l'arc-boutant, qui constituent la grande ligne de l'architecture ogivale. L'arc brisé peut être considéré comme un élément complémentaire.
L'époque ogivale comprend trois périodes assez distinctes, qui correspondent à peu près, aux XIIIe, XIV et XVe siècles et elle s'est même prolongée chez nous, jusqu'au début du XVIe siècle. Son évolution est soumise à la loi de la subordination des membres inférieurs d'un édifice (les piliers) aux membres supérieurs (les voûtes).
A. Le style gothique de la première période (XIII siècle)
Les maîtres d'oeuvre du moyen âge comprirent de bonne heure que les poussées et les pressions exercées par la voûte devaient déterminer la dimension et la position de ses supports. Ils s'habituèrent ainsi à commencer par le haut, la conception de leurs édifices. Ils créèrent les voûtes sur plan barlong (quatre compartiments et une travée) pour remplacer celles établies sur plan carré et sexpartite de l'époque de transition, qui a l'inconvénient de répartir les charges d'une manière inégale. Les supports sont cantonnés de colonnes engagées, qui montent de fond, et elles sont destinées à recevoir sur leur tailloir, toujours carré, la retombée des arcs. La section en plan de ces colonnes engagées est différente de celle des arcs. Les bases de ces supports sont formées de deux tores séparés par une scotie; le tore inférieur est très développé. Les chapiteaux jouent le rôle de supports en encorbellement et sont ornés de crochets.
La sculpture a réalisé une alliance intime avec l'architecture. Elle est sobre de détails. Ses personnages, drapés simplement, ont des attitudes et des expressions empreintes de noblesse. C'est le triomphe de l'idéalisme.
D'autre part, la décoration est en saillie sur la mouluration.
1. - L'ANCIENNE COLLEGIALE SAINT-PAUL
La collégiale fut érigée en cathédrale le 14 mai 1803, a remplacé l'église d'Eracle, au XIIIe siècle. Les travaux commencèrent en 1232, sous le doyen Otto de Jeneffe, dit des Prés. Le 11 avril 1289, Bonaventure, évêque de Céos et auxiliaire du princeévêque de Liège, jean de Flandre (1281-1291) consacra le maître-autel et six autres autels placés à l'entrée du choeur.
De cette époque datent la façade méridionale, la partie rectangulaire du choeur, le transept, la nef centrale et la maçonnerie des nefs latérales.
La façade méridionale produit une impression de force et de simplicité. Le mur de la grande nef n'a pas de balustrade; il est orné d'arcatures trilobées sous la corniche et il est épaulé par d'élégants arcs-boutants soutenus par des contreforts massifs.
L'intérieur de l'église est d'une harmonie tranquille et reposante. Son charme réside dans la pureté et dans la vigueur de ses lignes architecturales. Elle a pour principales dimensions: longueur 82,74 m. (depuis la pointe de l'abside jusqu'au fond de la tour); largeur totale: 3,51 m.; hauteur de la voûte 24 m. sous clé.
La grande nef se compose de sept travées séparées par des colonnes cylindriques lisses, dont l'abaque seul est de forme polygonale. Les chapiteaux sont ornés d'une rangée de crochets qui s'étalent en larges feuilles plates. Les abaques des chapiteaux supportent les moulures des arcades, en arrière, la retombée des voûtes des collatéraux, en avant, trois colonnettes engagées qui montent jusqu'à la retombée des arcs doubleaux et des nervures des grandes voûtes. Le triforium est formé d'élégantes colonnettes qui soutiennent des arcatures en arc brisé redenté. Les écoinçons des arcatures ainsi que les chapiteaux de ces colonnettes sont en pierre de sable.
Il y a, dans la nef centrale, deux étapes de construction qui sont nettement marquées dans la forme des bases et des chapiteaux des colonnes. Les deux travées rapprochées du choeur sont plus anciennes que les cinq autres; leurs colonnes sont composées de plus gros tambours; dans la moulure des bases, les gorges sont moins profondes; les feuilles des chapiteaux sont taillées moins profondément, mais elles sont plus longues; enfin, les abaques ont moins d'épaisseur et ne sont pas surmontés d'amortissements.
Des différences d'ornementation sont aussi marquées dans les sculptures du triforium: les chapiteaux des colonnettes des cinq dernières travées n'ont que leur partie supérieure ornée et très déchiquetée; aux écoinçons, se montrent des êtres fantastiques mêlés à des formes végétales; tandis que les chapiteaux des colonnettes des deux premières travées se composent de quelques feuilles longues et plates et les écoinçons ont une ornementation régulière de feuilles de fougères.
La tour a reçu après 1390, la même décoration que la nef, mais d'une qualité assez grossière: les arcatures n'ont pas de sculpture et les chapiteaux des colonnettes ont des crochets, au lieu des longues feuilles occupant toute leur hauteur.
Chose curieuse, la construction de Saint-Paul, qui avait si bien inauguré le style gothique sur les bords de la Meuse, ne fut suivie immédiatement d'aucune autre. On dirait que la cité était déjà à bout de souffle, après cet effort. Pendant quarante ans, de 1290 à 1330, nulle construction importante ne s'élève à Liège, alors que le treizième siècle y avait été si fécond. Il faut attribuer cette carence dans l'art de bâtir, aux tristes guerres qui désolèrent le pays à cette époque: querelles entre les Awans et les Waroux (de 1296 à 1335) qui, tout en ayant la Hesbaye pour théâtre, semaient la misère dans la cité; guerre civile entre les patriciens et les plébéiens, qui sévissait à Liège même et devait aboutir, dans la nuit du 3 au 4 août 1312, au fameux massacre du Mal Saint-Martin et continuer pendant presque tout le XIVe siècle.
B. Le style gothique de la deuxième période (XIVe siècle)
Les voûtes continuent à être établies sur plan barlong. Les supports sont formés d'un faisceau de colonnettes reliées entre elles, par des gorges et des filets, et ils reproduisent exactement, en section horizontale, la mouluration des arcs qu'ils soutiennent.
Les bases sont constituées de deux tores séparés par une partie très allongée; le tore inférieur est très réduit.
Les chapiteaux ne sont plus des supports, mais des ornements (bouquets de feuillages). Ils ne font que marquer la naissance des arcs, lesquels se prolongent le long des piliers. Les tailloirs sont octogonaux, leur saillie s'amincit.
La mouluration est en saillie sur la décoration, contrairement à la période précédente. Les statues sont placées dans des niches et ne sont plus adossées à des colonnettes.
Les personnages ont des attitudes maniérées, avec un hanchement spécial. Les draperies dont ils sont revêtus sont compliquées. Les détails sont exécutés avec minutie. C'est le règne du naturalisme.
1. - L'ANCIENNE COLLEGIALE SAINT-PAUL
C'est à cette époque, que se place la seconde phase de la construction de la collégiale et que se rattachent probablement: l'abside pentagonale du choeur, le porche nord, les chapelles latérales, la voûte de tout l'édifice, les fenêtres hautes et les admirables réseaux des grandes fenêtres du transept, la tour, les galeries est et sud du cloître.
Il faut ajouter, comme appartenant à ce style, la façade septentrionale de l'édifice, qui fut restaurée par Delsaux, vers 1850, et la fenêtre de la tour.
Delsaux, qui a rendu de grands services à la conservation des monuments gothiques, a travaillé à une époque où l'on ignorait complètement ce qu'est une restauration discrète. Son oeuvre est remarquable, sans doute, mais elle constitue une erreur. Il a ajouté arbitrairement une double galerie avec pinacles, au-dessus de la grande nef et au-dessus des chapelles latérales; il a aminci et surchargé de crochets et de fleurons, les contreforts avec leurs arcs-boutants et il a abaissé la grande fenêtre du transept. Bref, cette façade est trop richement ornée pour une église mosane et elle contraste trop vivement avec l'intérieur, qui est simple et austère.
La baie de la fenêtre du transept nord ainsi que des trois fenêtres suivantes a ses deux lumières de trois panneaux couronnées de deux quadrilobes et d'un triangle curviligne renfermant une rosace. Les arcades aveugles du gâble, qu'on rencontre également à Sainte-Croix, sont construites d'une façon plus simple: rien que l'arc trilobé, le triangle curviligne et le quadrilobe.
L'unité de l'édifice est si bien réalisée à l'intérieur qu'on n'y remarque pas tout de suite que l'abside du sanctuaire et les fenêtres hautes de la nef et du transept sont plus particulièrement ornées. Le réseau des quatorze fenêtres hautes se compose de trois compartiments en forme de quatrefeuilles.
La voûte est conçue dans le style simple: un arc doubleau par pile, et une croisée d'ogives, par travée; l'abside est bâtie sur plan polygonal, une nervure par angle. La voûte a été construite sous le doyen Grégoire Marescal (1414-1430). Au croisement des ogives de chaque travée, est encastrée une clé de voûte sculptée, peu saillante, ornée d'une fleur ou d'un masque. La clé de la travée centrale représente saint Paul entre deux anges céroféraires. Les dates: 1528, 1557, 1576, que l'on voit sur les voûtes, indiquent, semble-t-il, l'époque de la peinture. La voûte de la tour est en parfaite harmonie avec celle de la nef.
Le porche septentrional présente un fenestrage aveugle d'une grande pureté de dessin.
La galerie méridionale des cloîtres est plus large que la galerie orientale (4,59 m. contre 3,65 m.); les nervures de sa voûte se coupent en laissant au milieu, une série de compartiments; c'est ainsi que son croisement paraît plus compIiqué.
Le merveilleux vitrail du transept méridional date du début du XVIe siècle. Il se distingue par sa lumière chaude et profonde, la variété de ses couleurs chatoyantes et le velouté des étoffes drapées avec art. C'est, sans conteste, le plus bel ornement de l'église.
2. - L'EGLISE SAINTE-CROIX
L'église appartient au genre de construction appelé « hallenkirchen », très répandu dans les pays du Nord et devenu aujourd'hui, modèle unique en Belgique. Elle est toujours très admirée par les compétences; elle est caractérisée par trois voûtes de même élévation, que supportent hardiment, aux trois quarts de leur hauteur, sur des encorbellements placés en dessous des chapiteaux, de légères colonnes d'une grande délicatesse, qui ont un peu fléchi. Ces trois nefs furent construites au milieu du XIVe siècle, par le Florentin Philippe Bruni, dit « le bon doyen ». Dans les bas-côtés, les nervures des voûtes retombent sur les chapiteaux des colonnes. Le chevet du choeur est polygonal.
Le porche nord a été habilement restauré en 1935 par l'architecte liégeois Camille Bourgault. Il date de la fin du XIVe siècle. Le tympan du portail est garni d'admirables statues représentant la Résurrection du Christ et le Christ triomphant. Les niches latérales abritent les effigies modernes de saint Lambert et de saint Hubert.
3. - L'EGLISE SAINT-DENIS
Le choeur de l'église St Denis a été reconstruit en 1359 sur plan dodécagonal, avec son appareil extérieur en pierre de sable.
C. Le style gothique de la troisième période (XVe et XVle siècles)
XV SIECLE.
Les voûtes consistent en petits panneaux à multiples nervures.
Une partie de la mouluration des arcs pénètre directement dans les piliers ou se prolonge le long du fût, sans interruption, jusqu'à la base. Les piliers sont couverts de moulures prismatiques à arêtes vives et à gorges profondes.
Les chapiteaux disparaissent et sont parfois remplacés par une bague.
L'élément caractéristique est l'arc en accolade, qui est composé d'une courbe et d'une contrecourbe formant la pointe; il est souvent orné de crochets de feuillages.
Les fenêtres hautes de la nef centrale descendent presque jusqu'au sommet des grandes arcades, supprimant ainsi la galerie de circulation et le faux triforium en assurant un éclairage intense à l'édifice.
Le tracé, sinueux comme des flammes, des meneaux des fenêtres, a fait donner à ce style, le nom de flamboyant.
XVIe SIECLE.
L'arc en accolade du XVe siècle devient l'arc en accolade en contre-courbes brisées.
On a surnommé les supports, des piliers à ondulations parce qu'ils sont formés de colonnes soudées et raccordées parfaitement entre elles, par des courbes.
Les crochets de feuillages deviennent des masses informes d'un dessin lourd et mou (feuilles de chardon et de chou frisé).
A l'intersection des nervures des voûtes, pendent de longues clés qui ont pour office de neutraliser leur poussée verticale.
La basilique Saint-Martin et l'église Saint-Jacques relèvent de ce style.
1. - LA BASILIQUE SAINT-MARTIN.
Primitivement collégiale, l'église Saint-Martin fut élevée la dignité de basilique au mois de mai de l'année 1886.
Elle fut fondée par le prince-évêque Erard de la Marck (1505-1538) le lendemain de son intronisation, sur l'emplacement de l'antique sanctuaire construit par l'évêque Eracle.
Les travaux avancèrent péniblement pendant tout le XVIe siècle; ils furent d'abord conduits par Paul de Ryckel puis, à la mort de celui-ci, par Arnold de Mulcken.
Vers 1840, l'édifice menaçait ruine dans plusieurs de ses parties. Il fut d'abord restauré par Delsaux, qui employa le granit des bancs les plus durs et les plus résistants des bords de l'Ourthe. Les parties anciennes sont en calcaire, ce qui permet d'apprécier l'importance des travaux qu'il exécuta. En 1880, Auguste Van Assche restitua à l'intérieur de la basilique, son aspect grandiose et son noble caractère d'autrefois.
Au point de vue de l'architecture, la basilique SaintMartin constitue une sorte de compromis entre Saint-Paul et Saint-Jacques. Elle accuse par son plan, les caractères du XIVe siècle et, par son décor, ceux des XVe et XVIe siècles. Ce plan comporte une tour en hors-d'oeuvre, un narthex, une nef accostée de deux bas-côtés et de huit chapelles, un vaste transept et un choeur terminé par une abside polygonale.
L'édifice a pour dimensions 75 m. de longueur, 31,30 m. de largeur et 23,80 m. de hauteur à la voûte centrale.
La tour carrée a une hauteur de 40 mètres et une largeur de 13,40 m. Elle comprend cinq étages délimités par des cordons et elle est couronnée d'une jolie balustrade. Chacune des faces de l'étage supérieur est percée de deux fenêtres séparées par une bande lombarde. Une fenêtre, haute de 14,50 m., s'ouvre dans le bas de sa face occidentale. Elle est divisée en cinq lumières, par quatre meneaux, reliés par des arcs brisés redentés, qui supportent une grande rosace. Une tourelle d'escalier est accrochée à sa face méridionale.
L'édifice est étançonné par de puissants contreforts surmontés de pinacles reposant, du côté du choeur, sur un stylobate qui épouse les mouvements de la construction. Il est entouré d'une frise de légères arcatures. La porte latérale est accompagnée de deux contreforts non restaurés, composés de colonnettes à bases moulurées et se terminant par des supports destinés à recevoir des statues. Le pignon du transept est orné de plusieurs jolies fenêtres aveugles et il est surmonté, depuis 1865, d'une énorme statue de saint Martin bénissant la ville. Le mur de retour du transept, à sa partie supérieure, ainsi que la corniche du choeur et de l'abside sont surmontés d'une balustrade composée de meneaux à pans coupés que relient des arcs en plein cintre.
Le narthex est situé au nord de la tour; il occupe l'emplacement d'une galerie des anciens cloîtres. Il est éclairé par trois larges baies au fenestrage flamboyant. Ses murs sont garnis d'arcatures à redents.
La tour s'ouvre sur la nef, par une arcade dont les retombées se font sur des demi-colonnes aux chapiteaux ornés de larges pas-d'âne. Les trois murs portent des arcatures dont les arcs brisés, garnis de redents, sont soutenus par des colonnettes appuyées sur un soubassement. La tour est fermée par une voûte sur croisées d'ogives.
La grande nef ne comprend que quatre travées portées par des piliers cylindriques qui sont cantonnés de huit colonnettes, alternativement fortes et faibles, suivant le rôle qu'elles remplissent. Ces colonnettes ont leurs bases moulurées reposant sur un socle polygonal et leurs chapiteaux, qui manquent du côté de la nef, sont ornés de guirlandes de feuillages. Au dessus, s'ouvrent de larges et gracieuses fenêtres qui s'élèvent jusqu'aux voûtes. Celles-ci, légères autant que hardies, ont leurs voûtains remplis de petites briques rouges tandis que leurs arcs sont faits en pierre blanche.
Le transept a une largeur de 10,65 m. La croisée, qui est couronnée d'une voûte en forme d'étoile, est composée de quatre grandes arcades qui retombent sur deux gros piliers cruciformes. Le triforium, qui fait retour dans les croisillons, est surmonté, sur les murs occidentaux, de deux fenêtres aveugles. Des arcatures à redents ornés de têtes grotesques, de feuilles et de fruits, courent sur les murs en simple, double ou triple rangée. L'extrémité septentrionale du transept est occupée par un vaste jubé qui repose sur trois arcades moulurées s'appuyant sur de gracieuses colonnes au fût taillé en pointes de diamant.
Le choeur, à lui seul, est presque aussi long que la nef: avec l'abside, il mesure en profondeur: 24.40 m. Il est composé de trois travées séparées par des colonnettes. Dans chaque travée, s'ouvre une fenêtre qui comprend trois lumières.
L'abside est formée de sept pans coupés polygonaux, percés de hautes fenêtres à trois lumières que séparent des colonnettes qui, à la voûte, surbaissée, soutiennent la gracieuse ramification des arêtes.
Ce qui frappe dans cet édifice grandiose, c'est l'heureuse disposition des lignes architecturales et l'harmonie des proportions, qui lui donnent un air de majesté. Et c'est aussi la variété des moyens employés pour vaincre la monotonie du style: a) l'asymétrie: les travées de la grande nef ont une largeur variant entre 4,07 m. et 4,40 m.; les bases des colonnettes de la grande nef ne sont pas au même niveau; les arcatures qui ornent les murs ont une largeur qui diffère souvent de 25 à 30 centimètres; le triforium fait un retour complet dans un croisillon et un retour de la largeur d'une travée, dans l'autre; b) la diversité des matériaux apparents: les colonnes adossées aux murs de l'un des bas-côtés sont en pierres bleues jusqu'à mi-hauteur, et en pierres jaunes, à la partie supérieure; dans le collatéral opposé, ces colonnes sont complètement en calcaire; le pavement de l'église est composé de pierres bleues, blanches et grises, en forme de parallélogrammes; c) la multiplicité des formes: le réseau des deux grandes fenêtres du transept est formé de lignes habilement disposées qui suivent leur mouvement sans jamais provoquer de confusion; des figures variées sont dessinées dans le tympan des hautes fenêtres du choeur; le tympan des larges fenêtres qui s'ouvrent au-dessus du triforium renferme des figures à formes indécises.
Les trois verrières du fond de l'abside sont dues à la générosité du cardinal prince-évêque Erard de la Marck, dont elles portent les armoiries ainsi que la date 1526. Elles constituent, par l'harmonie des teintes et par le fini de l'exécution des figures, l'un des plus beaux spécimens de ce genre de travail que possède la Belgique. Elles sont envahies jusqu'aux moindres espaces, par une profusion d'ornements.
2. - L'EGLISE SAINT-JACQUES.
L'ancienne abbatiale de Saint-Jacques, dont la première pierre fut posée le 25 avril 1016, par l'évêque Baldéric II, était dans un piteux état quand, en 1418, l'abbé Renier de Heyendael (1408-1436) s'avisa de la reconstruire en lui donnant des proportions plus vastes. Il fit élever le choeur actuel, à l'est de l'ancien; mais, par suite des malheurs du temps, les travaux durent être suspendus pendant près d'un siècle. En 1513, le vieux choeur roman s'effondra en défonçant la crypte de saint André et le tombeau du fondateur Baldéric II. On put se remettre à l'oeuvre grâce à l'appui du prince-évêque Erard de la Marck. L'abbé jean de Cromois ou de Coronmeuse (1506-1525) acheva le choeur et le transept. Son successeur Nicolas Balis (1525-1555) reconstruisit la grande nef et les bas-côtés jusqu'à la tour, sous la direction de l'architecte Arnold de Mulcken et l'église fut achevée en 1538. Toutefois, la consécration n'eut lieu qu'en 1552.
On a pu dire de l'église Saint-Jacques, qu'elle constitue le chant du cygne de l'art gothique, chef-d'oeuvre d'art et de bon goût. C'est un des types les plus parfaits qui existent dans l'Europe entière, du style ogival flamboyant parvenu à son apogée.
L'extérieur de l'église est remarquable par sa simplicité et sa grande régularité, du moins à la façade septentrionale, qui n'a pas été restaurée. Il n'en est pas de même du côté méridional qui a été complètement restauré au XIXe siècle et même renouvelé en partie.
Le croisillon nord est assez endommagé; son gâble, décoré avec goût, est fait en pierre de sable; il porte tout en haut, une statue d'ange et plus bas, une statue de la Vierge, entre deux anges à genoux. Le gâble du croisillon sud est orné de la statue de saint Jacques.
L'édifice est étayé par de légers contreforts surmontés de pinacles. Une grande galerie court sous la corniche. A la croisée du transept, s'élève un gracieux campanile à toit bulbeux et surmonté d'un soleil doré; il porte la date 1635.
La façade du portail est en Renaissance italienne; elle sera étudiée plus loin. Le porche est une élégante construction gothique percée de six fenêtres aux fines moulures; la voûte est divisée en compartiments prismatiques et couverte de jolies arabesques.
La construction de l'église est d'une grande hardiesse et semble défier les lois de l'équilibre: elle n'a pas d'arcsboutants et ses murs, percés de belles et larges fenêtres ne remplissent pas l'office de masses portantes; toute la charge des voûtes pèse sur les piliers.
La plus grande longueur du temple, depuis l'abside du choeur jusqu'à la tour est de 73 m.; la nef centrale a une largeur de 11 m.; sa hauteur est de 23 mètres.
Considérons une travée de la grande nef. Elle est formée de trois étages superposés: l'ouverture des arcades, le triforium et les grandes fenêtres.
Les arcades sont portées par des piles massives, qui n'ont pas de chapiteau; ces supports sont accostés de deux fines colonnettes qui montent de fond jusqu'à la naissance des grandes voûtes dont elles reçoivent les retombées. Les arcades sont ornées d'un double rang de festons trilobés redentés.
Dans les écoinçons, apparaissent, entourés de rinceaux, les têtes expressives des principaux personnages de l'Ancien Testament.
Le triforium fait le tour de toute l'église. Sous les élégantes arcatures, il semble être un magnifique balcon découpé en trilobes, en trèfles et en quatrefeuilles.
Les grandes fenêtres occupent toute la largeur de la travée; leurs arcs se confondent avec les formerets des voûtes.
Le transept a de larges fenêtres divisées en douze compartiments, par des meneaux verticaux, dont le central porte une grande statue et monte directement jusqu'à la clé de l'arc. Les meneaux supérieurs s'arrondissent en courbes et en contrecourbes pour donner les formes caractéristiques du flamboyant: flammes, trèfles pointus, coeurs allongés, etc.
Le choeur est d'une grande richesse d'ornementation.
Les murs des basses nefs présentent une décoration originale sous de larges fenêtres à cintre surbaissé.
Les voûtes, en réseau, ou à compartiments prismatiques, sont d'un effet décoratif incomparable; des rinceaux et des arabesques d'une riche polychromie animent les voûtains; les clés délicatement fouillées pendent aux intersections des nervures; des têtes de rois, d'empereurs, de prophètes, sont peintes dans des médaillons entourés de feuillages.
Les verrières du choeur se rangent parmi les meilleures productions similaires du XVIe siècle et même parmi les plus intéressantes de la Belgique entière. Elles jouissent d'une réputation mondiale, amplement méritée.
3. - AUTRES CONSTRUCTIONS.
En 1468, la ville de Liège fut soumise à un sort effroyable par le duc de Bourgogne Charles le Téméraire. Après avoir été pillée, elle fut mise à feu et à sang pendant sept semaines. Seuls, furent épargnés: le Palais épiscopal, les églises, les habitations des tréfonciers et celles des chanoines des sept collégiales: Saint-Barthélemy, Sainte-Croix, Saint-Denis, Saint-Jean-l'Evangéliste, Saint-Martin, Saint-Paul et SaintPierre.
Il fallait, selon le mot de Louis XI, « déraciner l'arbre où nichaient les oiseaux criards ». Le nom même de Liège devait être remplacé par celui de Brabant, et le siège de l'évêché, transporté à Namur. A la fin de l'année, la vieille cité épiscopale n'était plus qu'un monceau de ruines et un charnier.
Durant une dizaine d'années, elle subit le joug de fer du lieutenant du prince bourguignon, le sire de Humbercourt. Elle ne recouvra sa pleine indépendance et ses antiques privilèges qu'après la mort tragique du cruel vainqueur, survenue le 5 janvier 1477, sous les murs de Nancy.
Dès l'année suivante, le prince Louis de Bourbon, pris de remords, sans doute, autorisa la reconstruction de 202 maisons: 24 pour la cathédrale, 12 pour chacune des sept collégiales et 104 pour les serviteurs des ecclésiastiques.
L'ancien hôtel du bourgmestre jean d'Amay situé rue d'Amay, n° 10-12, est une des premières habitations en pierre élevées après le sac de la cité. Ce Jean d'Amay fut bourgmestre de Liège en 1619 et en 1625 et mourut le 26 décembre 1625. En réalité, la maison en comprend deux: une petite, à gauche, une grande, à droite. Elles comportent des caves, un rez-de-chaussée surélevé, un étage et des combles desservis par un escalier à vis. La petite maison, qui est la plus intéressante, a encore conservé toutes ses boiseries, ses ferronneries gothiques, ses plafonds à voussettes et son curieux balcon; les fenêtres sont surmontées d'accolades.
La ville dut attendre cependant l'avènement du sage et puissant Erard de la Marck pour qu'elle recouvrît le calme et la stabilité, que les luttes fratricides entre les de la Marck et les de Hornes avaient troublés durant les dernières années du XVe siècle. Lors de l'intronisation de ce prince, elle ne présentait encore qu'un immense amas de décombres, desquels s'élevaient, par-ci par-là, les églises avec les demeures des chanoines et celles des autres membres du clergé qui avaient été reconstruites après le désastre, et encore quelques petits groupes de maisons en colombage relevées sur leurs anciennes fondations ou restaurées à la hâte, sans consistance.
Une fièvre de reconstruction s'empara alors des Liégeois. Le prince donna l'exemple. Sous son long règne (1505-1538), trois monuments religieux considérables furent restaurés ou réédifiés: les collégiales Saint-Martin et Saint-Paul et l'abbatiale de Saint-Jacques. Le grand prélat confia à Arnould de Mulcken, la mission de relever, dans de plus grandes proportions, et sur un plan nouveau, le Palais épiscopal, qui avait été incendié en 1505, sous le règne de jean de Horne.
En 1583, toute la voûte de l'église Saint-Servais, minée par la vétusté, s'affaissa avec fracas, entraînant dans sa chute, une partie de la tour. Le curé Curtius (1562-1614) s'appliqua sans tarder, à réparer ces dommages. Dès l'année suivante, le corps de l'église était reconstruit à trois nefs et dans le style flamboyant. De la cour de la maison joignant l'église, on peut voir, dans le pignon de celle-ci, un curieux damier, qui constitue un document précieux où se lit toute l'histoire de l'édifice, c'est-à-dire les trois phases du gothique qu'elle a traversées.
D'après les constatations qui ont été faites par l'architecte liégeois Edmond Jamar (1853-1929), la partie en pierres de taille de la tour de Saint-Remacle remonterait à la seconde moitié du XVe siècle. Une baie unique y donne accès. Les murs ont 1,20 m. d'épaisseur. L'un d'eux encastre une immense ogive en pierres de taille équarries dont les arcs se rejoignent à près de dix mètres de hauteur. De l'extérieur, on aperçoit, dans la partie en pierre, deux ouvertures gothiques, aujourd'hui aveugles c'étaient les anciens abat-son.
L'église Sainte-Croix n'avait primitivement que trois nefs. Les deux autres, percées de baies en triangles curvilignes, ont été ajoutées au XVe siècle.
La Halle aux viandes ou Manghenie fut construite probablement sur les plans de Paul de Ryckel, sous la magistrature des bourgmestres Guillaume de Meeffe et jean de Miche (1544) et Erard de Berlaimont et Wathieu Woot de Triexhe (1545). Le bâtiment, en pierre calcaire, est pourvu d'un bout à l'autre, de deux rangées de caves, dont les voûtes en briques sont construites en anses de panier. Au rez-dechaussée, une série de poteaux et de colonnes gothiques avec bases et chapiteaux. Quatre portes voûtées en anses de panier donnent accès dans la grande salle, qui est éclairée par de grandes fenêtres dont les croisillons en pierre ont disparu. Sur la clé de voûte de chacune des portes, le blason du métier des Mangons (bouchers) de gueules au boeuf et perron crucifère d'or.
La porte d'entrée de la Caserne militaire de Saint-Laurent (autrefois abbaye) fut construite par l'abbé Henri delle Cheraux (1436-1459). Démolie en partie en 1893, elle fut restaurée fidèlement cette année même, d'après une estampe ancienne. C'est une construction originale où sont étrangement réunis le plein cintre, l'ogive et la voûte à nervures croisées. Elle se déploie sous une ample arcade à moulures qui repose sur des bases arrondies et offre deux ouvertures inégales.
Presque en face de cette porte, au n° 144, on voit une maison avec de belles fenêtres dont les linteaux sont ornés d'accolades originales. Dans la grande façade, vers la cour, apparaît une pierre sculptée aux armes de l'abbé Natalis, avec sa devise: « Corde et animo ». Cet abbé procéda, dès l'année 1571, à la reconstruction de divers bâtiments de l'abbaye, notamment de la nouvelle église, qui fut terminée en 1601, sous l'abbatiat d'Oger de Loncin (1586-1633) et détruite en 1809.
La façade du Bureau de la Prévoyance sociale (ancien refuge de l'abbaye d'Aulne), place Saint-Paul, a été restaurée en 1898, par Edmond Jamar. On remarque, dans le porche de cette jolie construction, ainsi que dans les caves, des voûtes à nervures prismatiques.
L'hôtel de Sélys, au Mont-Saint-Martin, fut construit dans la première moitié du XVIe siècle. C'est le type de l'hôtel français « entre cour et jardin » qui ne triompha chez nous que vers le temps des conquêtes de Louis XIV. Splendide habitation historique qui fut entièrement restaurée, au cours des années 1910, 1911, 1920, 1921 et 1922, par la collaboration étroite de son propriétaire le baron de Sélys-Longchamps et l'architecte liégeois Edmond Jamar, et que la Commission royale des monuments a rangée en 1916 déjà dans la première catégorie des édifices civils privés.
Dans un pignon de l'immeuble, une gracieuse bretèche, seul spécimen de loggia de l'époque gothique qui reste en Wallonie, surplombe de façon pittoresque la voie publique. Elle est faite en castein, sauf l'allège, qui est en pierre de sable. Elle repose sur un piédestal à gradins; ses fenêtres, ornées d'accolades et de sculptures flamboyantes, sont encadrées de moulures ogivales et elles sont surmontées d'une frise d'arcatures courant sous la corniche.
Le haut mur clôturant la cour d'honneur est percé d'une porte en style Louis XIV liégeois timbrée du monogramme des comtes de Méan. Cette porte, très belle, mais d'un caractère beaucoup plus évolué que le reste de la construction, semble annoncer les multiples transformations que celle-ci a subies au cours du temps, de la part de ses différents propriétaires.
L'édifice est flanqué, dans un angle de sa façade méridional, d'une tour haute et massive, qui était connue, il y a six cents ans, sous le nom de « la grosse tour de Saint-Martinen-Mont »; elle servit primitivement de redoute dans l'enceinte notgérienne; elle forme par sa puissante structure et par ses souterrains et casemates, une véritable forteresse. Elle comprend quatre étages et renferme des chambres circulaires pourvues de belles cheminées en style Renaissance. La plateforme du sommet constitue un poste d'observation admirable d'où l'on découvre un vaste panorama.
La base de la tour contient un escalier qui conduit à un jardin architecturé à la française: la distribution ternaire du terrain, assurée au moyen de dénivellements et de terrasses étagées, ménage des perspectives plongeantes et des points de vue variés qu'animent des massifs d'arbustes, des plates bandes fleuries, des allées couvertes de sable coloré, des pièces d'eau, des vases, des stèles, des statues.
La construction située au fond d'une avant-cour, rue Saint-Léonard n° 535, est un magnifique manoir, qui était connu autrefois sous le nom de Château des Quatre Tourettes. Elle date de l'année 1512; elle a remplacé alors une ancienne maison-forte qui fut incendiée en 1468, au cours du sac de Liège. Elle a subi beaucoup de transformations. Elle conserve cependant encore quelques vestiges du temps où elle fut construite: une tour avec meurtrière, deux échauguettes, des fenêtres à meneaux. La porte d'entrée est surmontée de l'inscription suivante, sculptée dans la pierre: DAMOISEL ALID PIETE DE MALLE - L'AN MIL CCCCC ET XII - A FAIECT FAIRE Cte MAISON. Cette inscription est couronnée d'un cartouche contenant les quartiers de noblesse de la châtelaine.
Du côté du quai Sainte-Barbe, l'orphelinat des filles présente, au rez-de-chaussée, un mur massif en calcaire soutenu par de gros corbeaux. C'est un vestige de l'ancien rempart de la deuxième enceinte d'Outremeuse, qui fut construite par Paul de Ryckel vers 1525, sous le règne d'Erard de la Marck. Sur ce rempart, s'élève un des murs d'une maison gothique bien conservée quoique défigurée, qui possède à l'étage, cinq fenêtres à linteaux en accolades et à croisillons dont les meneaux ont malheureusement disparu.
Les habitations particulières du XVIe siècle étaient appelées communément « maisons de bois ». La maison Havart, située au quai de la Batte, en constitue un excellent spécimen. Elle date de 1594. Elle est entièrement construite en pans de bois reposant sur un soubassement en parpaings de pierre bleue; la membrure de bois est apparente; les remplages sont hourdés et étrésillonnés par des traverses diagonales. L'étage est bâti en encorbellement, c'est-à-dire qu'il surplombe le rez-de-chaussée. Les baies sont à croisillons de bois. Le parement s'abrite sous une corniche très saillante ornée de modillons à cymbales, comme à Curtius. La façade principale est toute carapaçonnée d'ardoises; la façade latérale est en colombage à panneaux de briques rangées en assises régulières.
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